Une sonnerie tonitruante se fit entendre dans la petite chambre étudiante que Lily et Abel partageait. Ce dernier se réveilla en sursaut, les yeux toujours fermés. Il attrapa son téléphone portable fraichement réparé -merci Lily- et il regardait le correspondant, puis l’heure. Mais pourquoi Diable sa mère l’appelait-elle à sept heures trente-quatre du matin ? Il se rendait compte qu’il n’avait que très peu de dormi cette nuit et lui vint en tête leurs cochonneries de la veille. Un petit sourire en coin, mal réveillé, étira ses lèvres et il souffla dans sa main pour sentir son haleine. Mon dieu qu’il puait de la gueule. Il se leva doucement sans réveiller Lily pour aller se brosser les dents et passer ce coup de fil dans la salle de bain. Il décrocha le combiné après avoir craché le dentifrice dans le lavabo. Il s’assit sur la cuvette, la porte entrouverte. « Allô ? » Il marqua un temps d’arrêt. « Mais pourquoi tu m’appelles si tôt maman ? » Il fronçait légèrement les sourcils dans l’incompréhension totale. « A… Quoi ? Quelle heure ? Huit heures trente, tu déconnes, je viens de me lever. » Il se mit debout et commença à marcher dans la pièce. Il était nerveux. « Mais j’en ai rien à foutre de ce qu’il veut lui je… » Il fut interrompu à nouveau. Il essayait de ne pas hausser le ton de sa voix pour éviter de réveiller Lily, et puis à ce stade, il ne savait pas si elle entendait ou pas. Il n’en avait rien à faire, il ne lui cachait rien. « Il se réveille maintenant ? Tu te fous de ma gueule ? » Des suppliques se fit entendre au bout du cellulaire d’Abel et il soupira fortement, justement pour que sa mère l’entende. « A la seule condition que Lily m’accompagne. Je viendrais alors. » Abel laissait sa mère s’énerver au bout du combiné, il ne cessait de marcher, tentant avec la brosse à cheveux de dompter sa tignasse bouclée. « Non, ce n’est pas négociable. Lily vient. Point barre. » Et il raccrocha le téléphone. Il s’appuyait sur le lavabo, et se passa un coup d’eau sur le visage. Puis, il se regarda droit dans les yeux. Il regardait son visage et les micro-cicatrices des bagarres qu’il avait créées, le bleu de ses yeux et sa mâchoire très carrée. C’était de lui, tout ça. Il ne l’avait jamais vu, mais il le savait. Il était bien au courant que son père existait quelque part dans ce monde, mais il n’avait jamais pensé avoir de ses nouvelles un jour. Sa mère n’avait pas souhaité lui dire plus, elle lui avait donné rendez-vous dans le centre-ville, non loin du palais de justice du quartier où elle résidait, où il avait résidé.

Elle n'a pas eu le sommeil aussi lourd depuis longtemps. Très longtemps. Lily, elle remue à peine quand Abel se détache d'elle pour se lever. Elle émerge, mais seulement à moitié, paupières closes, attrapant l'oreiller le plus proche pour le prendre dans ses bras en substitution à son petit ami. Les souvenirs de la veille sont flous, mais bien là. Et quand elle se rappelle petit à petit que tout ça n'était pas un rêve, elle pivote sur le dos avec un petit sourire idiot, frottant ses yeux d'un air endormi. C'est là seulement que la voix d'Abel lui parvint. Il était au téléphone, et visiblement, en colère. Ou tout du moins irrité. Son ton était sec, et ça suffit à Lily pour définitivement émerger, et ouvrir les yeux pour jeter un regard vers la porte de la salle de bain tout en s'asseyant sur le matelas. Il était tôt. Trop tôt pour que cet appel ne sorte de nulle part, alors la belle s'extirpe doucement du lit, et après s'être étiré comme un chat, elle finit par aller de sa démarche traînante et endormie vers la pièce, dont elle pousse la porte. « Abel...? » Il était debout devant le miroir. Sans trop réfléchir, Lily, elle s'avance dans sa direction, se place derrière lui, et elle enroule ses bras autour de son petit ami et appuie sa joue encore chaude contre son dos nu. Il est tendu, et elle n'a pas la moindre idée du pourquoi du comment. Alors elle garde le silence quelques secondes, avant de déposer ses lèvres sur le haut de son dos, commençant peu à peu à vraiment s'éveiller. « Qu'est-ce qui se passe...? » qu'elle demande enfin d'une toute petite voix, se décidant à contourner la silhouette pour lui faire face avec un regard soucieux.

La mère d’Abel n’avait jamais pris le temps de lui parler de son père. Evidemment, il avait conscience de la nature du rapport qui l’avait mis au monde. Un billet pour sa mère, et vidage de couille pour son géniteur. Voilà dans quoi Abel avait été conçu. D’autant plus que sa mère, étant une droguée, Abel était né addict à l’héroïne et les sages-femmes de l’hôpital avait eu du mal à le décrocher, à quelques jours de naissance. La mère d’Abel avait informé son client de la grossesse qu’elle souhaitait mener à terme mais celui-ci n’avait pas souhaité reconnaître l’enfant. Voilà le magnifique contexte familial dans lequel avait été créé Abel. Et tout lui revenait dans la gueule au moment où tout allait bien avec Lily. Il soupirait quand il entendit une petite voix douce mais éraillée de sommeil l’apostropher. Il sentit une présence chaleureuse et réconfortante se coller contre lui pour apaiser ses tensions. Parce qu’il sentait ses muscles se contracter sous la pression certaine qu’il ressentait. Les vieux démons d’Abel revenaient à la charge et il n’avait pas envie que Lily revoit ça à nouveau. Il fermait les yeux pendant un instant, pour s'imprégner de l'amour qu'elle dégageait. « Je t’aime bien trop Lily Abernathy, c’est fou… »

« Ma mère veut qu’on la rejoigne en ville dans moins d’une heure, t’es d’accord ? » Il s’en moquait des cours, il sentait qu’il y avait plusieurs choses importantes à aborder, et donc il voulait y aller. Mais seulement si Lily l’accompagnait. « J’ai besoin que tu viennes avec moi. » Il baissa la tête, n’aimait pas avoir besoin des autres, et il serait les dents. Les poings contractés, il lâchait la prise de Lily pour se diriger vers l’armoire et enfiler une tenue simple. Un jean relativement près du corps avec un pull gris. Abel était énervé, il se sentait fébrile. Quelque chose clochait dans le discours de sa mère mais il n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. « Je te fais le café, chérie ? » Et de l’appeler ainsi apaisait la nervosité d’Abel parce qu’il essayait de détourner son attention de ses préoccupations. Il se leva pour se faire couler le sien, en rajoutant trois sucres dedans. Bon. C’était compliqué, les mauvaises habitudes. Il attendit que la machine chauffe pour enfiler ses chaussures, et reprendre ses cheveux. Abel se mit à nouveau à s’énerver. S’il devait rencontrer son père, étrangement, il avait envie de lui montrer que malgré le trou du cul de géniteur qu’il était, Abel s’en était sorti sans lui.

S'il ne voulait pas lui dire, elle n'attendrait rien. Mais Lily, elle l'avait déjà bien trop souvent vu triste sans pouvoir faire quoique ce soit pour l'apaiser. Aujourd'hui, elle avait la capacité de le prendre dans ses bras, de lui apporter sa présence, rien de plus, rien de moins. Et quand elle sentit ses muscles se décontracter sous sa prise, la brune soupire de soulagement, et ne retient pas son sourire en entendant ses quelques mots. « J'en aurais jamais assez, Silverstein. » qu'elle murmure en retour, le sourire dans la voix, avant de se détacher de lui.

Sa mère voulait le voir. Les voir ? Lily, elle fronce les sourcils, intriguée par sa formulation jusqu'à ce qu'il précise simplement avoir besoin qu'elle soit là. De toutes façons, elle était toujours en arrêt, Lily. Faudra qu'elle pense à aller voir le médecin, et à lui dire merci d'avoir insisté. « Bien sûr que je suis d'accord.. » dit-elle simplement en embrassant doucement sa joue, avant de le laisser aller s'habiller. Il était en colère. Et elle ne savait pas pourquoi. Silencieusement, la brune se décida alors à aller jusque son armoire aussi pour enfiler un jean noir, et un pull rouge à col roulé. Ils avaient relativement peu de temps pour eux, alors elle irait vite pour le maquillage. Lily s'eclipse jusque dans la salle de bain, applique un peu de mascara et s'accorde la fantaisie de mettre un rouge à lèvres accordé à son pull. C'est la première fois qu'elle utilise ce rouge que Mackenzie lui a offert pour ses vingt et un ans. Si elle voyait ça, elle ferait probablement une crise cardiaque. Elle manque d'ailleurs de rater le contour de ses lèvres en entendant Abel l'appeler chérie. Impossible de retenir un sourire niais. « Je veux bien s'il te plait ! » Dit-elle simplement en terminant sa bouche et en ordonnant ses cheveux bruns, avant de revenir dans la chambre pour récupérer son café et y glisser un sucre. Abel était en train de se battre avec ses cheveux. « Attends, attends... » Elle lâche tout et se précipite pour aller pratiquement lui arracher la brosse des mains, debout devant lui, et s'occuper comme à son habitude de démêler ses boucles brunes. D'une main, elle coiffe. De l'autre, elle caresse ses cheveux, tente de le détendre. « Quelque chose te chiffonne, mon coeur... » Qu'elle murmure tout en embrassant le sommet de sa tête. « Qu'est-ce que ta mère t'a dit...? » qu'elle demande finalement en venant capter son regard avec cet air soucieux qui revient un peu trop depuis leur réveil.

Abel frémissait. Quelque chose était en train de se préparer, et il voulait partir maintenant. Mais il savait que ça ne servirait à rien de se précipiter, pire, il savait surtout qu’ils se tueraient en voiture si Lily ne prenait pas le volant. Il se laissa faire au contact des doigts et de la brosse que Lily lui arracha des mains pour gérer elle-même, comme elle avait tant bien l’habitude de faire. Les épaules d’Abel se relâchèrent instantanément et elle ferma les yeux, profitant de ces caresses avant la tempête. Le garçon s’était assis sur une chaise en pour que sa petite-amie puisse atteindre ses cheveux, et il se laissait faire. Elle lui posa une question, et l’utilisation d’un surnom, chose qu’elle n’avait jamais fait auparavant, le fit fondre d’amour pour ce bout de femme qui s’occupait de lui comme d’une mère son enfant. « Ma mère, elle veut me voir. » Il fronça les sourcils, les yeux toujours clos mais le souci se lisant clairement sur le visage. Il serrait les dents, faisant se contracter sa mâchoire carrée, comme une balle anti-stress. Il passa ses bras derrière le corps de Lily, alors qu’il était toujours dos à elle. Ca avait du bon d’être immense. Il colla à lui, bloqué par le dossier de la chaise. « Ca concerne mon père, apparemment. Je n’en sais pas plus. » Pourquoi le ramener dans nos vies, lui ? Qu’avait-il à lui dire de suffisamment conséquent pour que ça change quelque chose à sa vie ? Abel se leva quand Lily eut terminé, et il se releva. Il écarta la chaise doucement du pied et il s’approcha de Lily. Mon dieu… « Que ça te va bien, ça... » Il passa son pouce sous sa lèvre sans toucher au rouge à lèvre pour éviter de lui gâcher son maquillage. Et, un sourire en coin non-dissimulé, avec toute la perversion du monde, il sortit, sans ménagement. « Il irait bien autour de ma… on y va chérie ? » Il fronça le nez, souriant à pleine dents et se dirigea vers la porte en récupérant les clefs de Lily qui étaient pendus.

Installé sur le siège passager de la voiture, il bougeait sa jambe frénétiquement, stressé, anxieux. C’était un état qu’il connaissait bien, qu’il avait pratiqué toute sa vie auprès de sa mère. La voiture était silencieuse, bercé par le fond d’informations de la radio et le bruit du moteur et des clignotants qu’actionnaient Lily. Abel posa une main sur sa cuisse, à elle. Pour chercher un contact qui rendrait son corps un peu plus chaud, un peu plus rond et calme. Lily se garait sur une place de parking non loin du lieu de rendez-vous, et il vit sa mère au loin, très apprêtée, bien maquillé, belle, comme il ne l’avait jamais vu. C’était un cirque ou quoi ? « On y va ? Plus vite on y sera, plus vite ça sera fini. »

Sa main alterne avec la brosse, collée contre le dos de la chaise où se trouve Abel, attirée au plus près de lui par le brun qui, de toute évidence, avait vraiment besoin de sa présence aujourd'hui, ce matin. Quand il mentionne sa mère, elle n'est pas surprise, Lily. Cependant, c'est quand il parle de son père que la jeune femme suspend ses gestes dans ses cheveux, accusant le coup de l'information. « Ton père ? » qu'elle répète, légèrement surprise, sachant très bien la relation d'Abel avec lui. C'est à dire aucune, le néant. Néanmoins, elle ne posa pas plus de questions, puisqu'il n'en savait pas plus. Elle se contenta de dire dans un soupir « Il n'y a qu'un moyen d'en savoir plus... » Aller là bas. Parler à sa mère. Savoir ce qui était important au point de le faire venir si tôt. Mais Lily elle serait là, quoi qu'il arrive. Quand elle déposa la brosse après avoir fini de le coiffer, Abel se redressa pour lui faire face, et baissa les yeux vers elle, tendant la main vers son rouge à lèvres qui, de toute évidence, semblait lui plaire. Les joues de Lily rosirent naturellement, se délectant du contact du pouce du jeune homme sous sa bouche, jusqu'à ce qu'elle voie son sourire. Et entendent sa nouvelle provocation, qui fit immédiatement rougir la brune. « Sérieusement ! » Râle-t-elle en le poussant vers la sortie, enfilant ses chaussures tout en tapotant ses joues soudain un peu trop chaudes. Il allait finir par la rendre folle, décidément.

Il ne fallut pas bien longtemps pour Lily à aller jusqu'ai lieu de rendez vous, où elle se gare assez rapidement. La main d'Abel posée sur sa cuisse, elle lui jette de nombreux regards pour s'assurer qu'il va bien. Et une fois garée, il semble déjà observer au loin une femme, probablement sa mère. Lily, elle hoche la tête. Mais avant de descendre, elle enroule une main derrière la nuque d'Abel pour venir poser son front contre le sien, tendrement. « Je suis avec toi. Chaque fois que quelque chose te contrarie... je serai là. Tu n'auras qu'à me prendre la main. D'accord ? » Elle capte son regard avec douceur, et se penche un peu plus en avant pour venir l'embrasser, avant de détacher sa ceinture et descendre de sa voiture pour venir rejoindre Abel. Et directement, prendre sa main pour entrelacer leurs doigts. Here goes nothing.

Abel sortit de la voiture en même temps que Lily, et elle s’approcha pour le rassurer, en lui promettant d’être à ses côtés. Il n’avait qu’à lui prendre la main. Alors c’est ce qu’il fit, il entrelaça ses doigts aux siens et s’avança vers sa mère d’un pas ferme et décidé. Leur différence de taille aurait pu rendre la situation presque charmante s’il n’y avait pas un fond de drame derrière la situation. Arrivé à la hauteur de sa mère, il s’avança pour l’embrasser d’une bise joue contre joue. « Bonjour, maman. » Elle vint l’embrasser à son tour de l’autre côté et s’arrêta un instant sur Lily. Elle l’observa de la tête aux pieds, sans gêne. Comme Abel. Elle n’avait pas vraiment de manière, mais un petit sourire apparu légèrement dans le coin de sa lèvre. Le même que son fils. « Bonjour, mon grand, tu ne me présentes pas ? » Il eut un petit geste de recul pour revenir à la hauteur de Lily. « Je te présente Lily Abernathy. Ma petite-amie. » Et c’était la première fois qu’il mettait des mots sur sa relation avec elle, surtout devant sa mère à qui il la présentait pour la première fois. « Lily, je te présente Victoria, ma mère. » Et il laissa les deux femmes se présenter l’une à l’autre, en cherchant du regard un homme grand, blond aux yeux bleus, espérant presque rencontrer son père. Il ne savait pas s’il avait envie de le voir ou non. Il avait juste envie de mettre une image sur une idée. « Abel, viens voir une seconde. Avant que nous rentrions dans le bâtiment pour aller au dernier étage, tu dois savoir quelque chose. » Il se tendit complètement, s’approchant de Lily par instinct, et lui serrant la main, peut-être lui faisait-il mal. « Ton père est mort. »

Il resta planté, comme un pantin sur le béton. Le géniteur qu’il ne connaissait pas était mort, et étrangement, ça lui faisait quelque chose, comme si une part de son identité s’évanouissait. Autour de lui, tout était flou. Pas qu’il ne voyait plus rien, mais il en comprenait pas l’intérêt de cette annonce. « Comment ? » « D’un cancer des testicules. Ironie du sort... » Elle était sarcastique, Abel pouvait la comprendre, mais il ne voulait pas l’entendre. « Pourquoi ? » Et c’est là que ça ne collait pas. Sa mère l’invita à monter les étages, et il se retrouva devant le bureau d’un notaire. Victoria tapa à la porte doucement et un vieux bonhomme grassouillet les invita à entrer. « Veuillez prendre place. Nous allons ouvrir le testament de monsieur Clark Evergreen. » Il invita une dizaine de personne à s’asseoir. Mais qui était ces gens ? Abel n’en avait aucune idée, et il faisait tâche parmi ce peuple. Ils étaient trop bien habillés, trop sûr d’eux, trop riche pour lui. Le notaire se mit à lire des noms, à léguer des voitures à sa tante, des bijoux à sa cousine, des terrains aux frères de son géniteur. Et d’un coup. « A monsieur Abel Silverstein, mon fils. J’ai honte de ne jamais t’avoir connu, ni même de t’avoir élevé. Je regrette la façon dont les choses ont été faites, et, comme tu es mon seul descendant au jour de ma mort, je te lègue l’entièreté de ma fortune. Tu ne me connais pas, je suis le dirigeant d’une très grande entreprise de coutellerie et j’espère qu’un jour, tu me pardonneras. » Les personnes se mirent à chuchoter, marmonner, à s’énerver même sur Abel, ne comprenant pas comment un homme inconnu pouvait hériter de tant d’argent. Et Abel n’arrivait plus à respirer. Son coeur battait vite, et sa respiration fut tellement saccadée qu’il manquait d’oxygène. Il se leva d’un bon pour aller dehors, derrière la porte. Respirer, il avait besoin de respirer. Abel passa une main dans ses cheveux et il faisait les cents pas. « Riche, je suis riche… c’est quoi ce délire… un père qui me donne son fric… » Il marmonnait tout seul, comme si la réalité de ces propos étaient loin de lui.

Main dans la main, ils s'approchent du point de rendez vous, et si elle ne dit rien, Lily, elle angoisse un peu quand elle voit la mère d'Abel. Elle lui ressemble, beaucoup. Encore plus maintenant qu'elle est apprêtée. Et Lily elle reste en retrait, laissant à Abel le soin de lui dire bonjour tandis qu'elle reste là, timide, attendant sans trop savoir ce qu'elle attend exactement. Le regard qu'elle tourne vers elle est bienveillant, pétillant, et son sourire... Mon dieu, elle sait maintenant d'où vient ce sourire malicieux. Lorsque Abel la présente, son coeur bat un petit peu plus fort. Ma petite-amie. Elle ne se lassera jamais de ce mot. La petite brune se décide alors enfin à faire un pas en direction de la dénommée Victoria, et elle penche légèrement la tête avec un léger sourire. « Enchantée, madame Silverstein. » Dit-elle avec une pointe d'appréhension dans la voix, que la femme dissipa directement en venant doucement étreindre Lily. « Victoria, juste Victoria. Je suis vraiment, vraiment ravie de faire ta connaissance, Lily. » Et la curiosité qui semblait brûler dans son regard à l'encontre de l'étudiante intimida d'avantage celle ci, qui retourna aux côtés d'Abel pour prendre sa main dans la sienne. Il serra sa main aux mots de sa mère. Fort. Mais elle ne dit rien, reposa même la paume de sa seconde main par dessus celle de son petit ami, lorsque la nouvelle tomba : son père était mort.

Lily resta un moment silencieuse, son regard oscillant entre Abel et sa mère qui échangeaient quelques mots. Le père d'Abel était mort, et une part d'elle se doutait que derrière son visage impassible, Abel était ébranlé par la nouvelle. Par respect, Lily resta silencieuse, et suivi le petit groupe jusque l'étage, dans le bureau d'un notaire. Et petit à petit, Lily compris rapidement pourquoi ils étaient là si tôt. Le testament de son père. Clark Evergreen. C'est donc le nom qu'Abel aurait porté ? Pas une seule fois, Lily lâcha sa main. Scellées l'une contre l'autre, elle écoutait le déroulé de chaque objet légué, chaque détail, jusqu'à ce que le nom d'Abel soit prononcé... Et que Lily comme Abel tombent des nues. Sa fortune ? En voyant Abel qui, peu à peu, manquait d'air, Lily s'approcha de lui, quittant presque son siège. « Abel...? » Mais déjà, il se levait d'un bond pour quitter la pièce, sous les regards médusés des autres membres de la famille. Dans la seconde, Lily s'était déjà redressé en s'excusant poliment auprès des autres, traversant la pièce à son tour pour rejoindre Abel à l'extérieur. Il était en train de ruminer dans un coin. « Hey.. » qu'elle murmure avant de venir le prendre dans ses bras. « C'est... c'était très inattendu.. » Qu'elle murmure doucement avant de redresser la tête pour embrasser l'angle de sa mâchoire, bien incapable de se hisser plus haut. « Les regrets d'un homme peuvent faire beaucoup de choses je suppose... » dit-elle simplement, assimilant peu à peu la nouvelle : Abel venait d'hériter d'une immense somme d'argent, d'un homme qu'il ne connaissait pas.

Il tournait en rond Abel, il n’arrivait pas à se faire à l’idée qu’en l’espace d’une heure, il devenait orphelin d’un parent tout en devenant extrêmement riche. C’était de l’ordre de l’irréel. Parler à Lily par sms pendant son coma, c’était presque normal que ce moment chez le notaire. Il s’appuyait sur la rambarde de l’étage où ils se trouvaient, et tenter de respirer. Mais ce dont il avait besoin, c’était sa bouffée d’oxygène personnelle. Et sans même lui demander, elle apparut dans son champ de vision. Elle savait parfaitement ce dont j’avais besoin. Elle m’interpella et je lui souriais, sans sourire. Elle essayait de trouver une excuse à son géniteur, sans méchanceté aucune. Mais Abel ne voulait pas en parler. Il voulait l’embrasser, l’enlacer, rester sur elle pendant des heures pour se reposer, faire comme si de rien était et que tout ce qu’il se passait ne le toucherait pas. Alors quand elle l’embrassa pour sur la mâchoire, il ne put s’empêcher de la repousser sur la rambarde, son dos tapa légèrement pour venir l’embrasser à pleine bouche, comme un baiser un peu désespéré. Il avait une main sur sa joue pour la maintenir, et une autre sur sa taille. C’était le genre de moment un peu violent. Parce qu’Abel ne parlait pas, il réagissait. Abel ne dirait pas un mot, il agirait. C’était dur pour lui d’exprimer ce genre de sentiment, il avait même eu du mal avec sa propre petite-amie alors avec la mort d’un père inconnu… Ca allait être pire. « Ne me laisse jamais, toi plus que les autres, s’il te plait, ne me laisse jamais. » C’était presque un ordre. Il ne pouvait pas s’imaginer sans vie sans Lily, elle était son roc, celle qui le maintenait sur Terre. Il reprit sa respiration après ce baiser passionné, et il attrapa sa main.

Il retourna dans le bureau du notaire. Les regards noirs qu’il recevait n’étaient rien comparés au chèque déposé sur la table. Le nombre de chiffre inscrits sur le bout de papier était pire que celui de la sécurité sociale. Il se rassit à sa chaise, Lily toujours à ses côtés. « Ca fonctionne comment ? » Le notaire baissa ses petites lunettes sur le bout de son nom. « Vous allez encaisser le chèque, et comme vous ne m’avez pas laissé finir, j’allais vous informer que vous allez avoir des parts dans sa société. Vous n’avez rien à faire que récupérer de l’argent. Félicitations monsieur Silverstein, vous n’aurez plus jamais de problème d’argent sur au moins trois générations. » Il tiqua. Enfants, petits-enfants, arrières petits-enfants. Il tourna la tête vers Lily, les sourcils relevés. Jamais il n’était arrivé qu’ils discutent de ce genre de chose, et Abel ne savait pas si avec son incapacité à se gérer lui-même il saurait gérer un enfant. Il détourna vite son regard avant de penser surtout à la conception des enfants, et il remercia le notaire. Il lui donna des papiers à signer, et Abel apposa son S déstructuré sur le bas de la feuille. Il se leva, sans regarder les membres de sa famille qui n’avait jamais eu un regard pour lui depuis sa naissance et il sortit, sans lâcher Lily. Elle avait été traîné de partout, la pauvre. Ils étaient enfin dehors. Et là, il se retourna vers Lily. « On. Est. Riches. » Il n’en revenait pas.