L'arrivée de Lullaby dans sa vie avait fait tellement de bien à Glen. A elle seule, elle représentait tous les espoirs que Glen avait cru devoir enterrer. Cette fois, il misait tout sur elle. C’était le bonne. Comme dans les comédies romantiques. Il y mettrait sa main à couper. Ok, c’était peut-être un peu naïf… ou peut-être qu’il allait un peu vite en besogne. Mais, bon sang, Glen avait quarante ans. A son âge, il savait faire la différence entre une amourette de passage et une vraie histoire. Il n’avait encore jamais ressenti ça. Et il ferait tout pour elle. Tout. Et pour le moment, il parlait surtout de tout faire pour signer Austin Butler. Ça avait le mérite de dégouter sa promise ce qui ne manqua pas de faire rire l’agent. Il aimait tellement raconter n’importe quoi. Elle allait devoir s’habituer. Depuis le temps qu’ils se connaissaient, elle avait certainement déjà du comprendre qui était le personnage. Pourtant, Glen s’était senti obligé de préciser qu’il rigolait. Hors de question qu’elle s’imagine qu’il soit d’accord pour qu’elle fréquente un autre type. Plutôt crever. Surtout que si ça arrivait, il n’aurait que les yeux pour pleurer. Glen savait qu’il n’était pas tout à fait moderne, que les limites d’une relation se redéfinissait tous les jours un peu plus… Mais lui, il rêvait de quelque chose à l’ancienne. Une histoire d’amour qui commence et ne s’arrête jamais, dans laquelle personne d’autre que les deux protagonistes n’existent. Et, comme souvent, Bee avait eu les mots qu’il faut. Il pouvait lui faire confiance. Elle n’avait rien fait pendant quatre ans pour ses beaux yeux. Elle n’allait pas craquer maintenant, si ? Glen avait sourit avant de répondre à son baiser avec une infinie tendresse. « J’ai attendu quelqu’un comme toi toute ma vie… Je te laisse aller nulle part. » Bee tendrement blottie contre lui, ils avaient continué à regarder le film. C’était beau à crever. D’ailleurs, Glen avait bien cru se mettre à pleurer quand les dernières minutes du film avaient défilées sous leurs yeux. Lullaby, elle, s’était allée à ses émotions et Glen avait commencé à lui frotter le dos pour la réconforter. « T’as raison… On le regardera de nouveau. » Et il avait posé un baiser sur son front en la serrant tout contre sa poitrine.
 

Non, il n'est pas question qu'elle trompe Glen avec qui que ce soit, Austin Butler ou pas. Lui faire mal est bien la dernière chose qu'elle veuille et puis, aussi talentueux soit le jeune acteur, il ne l'intéresse pas. Bee a besoin d'un peu plus que d'une belle gueule, qu'un beau physique, pour ce genre de choses et, si Glen ne le sait pas encore, il faudra bien qu'elle le lui dise un jour. Ce n'est guère un secret, seulement une indication qu'elle donne rarement sur elle-même, sur sa propre sexualité. Un coming-out qu'elle n'a pas - encore - fait. Qu'elle fera un jour, peut-être. A lui en tout cas, c'est certain. Mais pas ce soir, pas devant leur film, alors que celui-ci ne les attend pas et continu de défiler sur l'écran, loin de leurs considérations.

Il a attendu quelqu'un comme elle toute sa vie, affirme-t-il, et la jeune femme est parcourue d'un frisson en l'observant. Ces mots ont une puissance incroyable. Ils la remuent du plus profond de son être et elle lutte pour ne pas laisser l'humidité de ses yeux se transformer en larmes. Elle se contente de se blottir contre lui, passant ses bras autours de sa taille, comme pour lui permettre de lui faire sentir sa présence. Non, il ne la laissera aller nulle part. Et il n'y a nulle part où elle veut être plus qu'auprès de lui.

Le film terminé, elle sent la main de Glen dans son dos, essayant de la réconforter, comme cette fois elle ne parvient pas à freiner sa sensibilité. Le film était beau, magistral. Une claque visuelle et auditive. Un vrai spectacle, qui a intérêt de récupérer toutes les récompenses possibles aux prochaines cérémonies. Il ne fait aucun doute qu'Austin Butler, surtout, doit voir son exploit salué d'une belle statuette ou deux. Elle ne comprendrait pas que cela ne soit pas le cas. Elle ne comprendrait pas que le prix puisse aller à un autre. Pas après ça. Pas après cette claque.

"- Oui !"

Ils reverront ce film, c'est certain. Et elle serait peut-être même capable de le revoir tout de suite. Mais il est tard. Se levant elle débarrasse la table basse des papiers amoncelés de leur dîner, avant de se tourner vers lui. Même si elle voudrait passer un maximum de temps à profiter de leur soirée et refaire le monde, elle sait aussi que l'homme a peut-être des choses de prévues le lendemain, même si c'est samedi. Parce qu'elle sait qu'il est comme elle, sûrement le genre à travailler peu importe le jour, n'ayant rien d'autre à faire. Jusqu'à maintenant.

"- Tu veux prendre une douche en premier, ou j'y vais ?" questionne-t-elle. "J'te propose pas de la partager, hein..."

Trait d'humour, parce qu'elle sait bien ce qu'il va dire. Elle sait bien où sont ses limites, encore. Elle sait ce qui perturbe encore son esprit, même si elle voudrait qu'il ne se tracasse pas autant avec ça. Elle sait comme c'est difficile de stopper son cerveau, parfois.

"- T'aurais un truc à me prêter pour la nuit ? J'ai rien prévu."

Les films qui faisaient un tel effet sur ses spectateurs étaient rares, Glen le savait. Il estimait la chance qu’un tel bijou ait pu paraitre. Sur le King, Elvis Presley lui-même en plus. Une de ces idoles. Il n’hésiterai pas à en faire une bonne publicité, il le dira à qui voudra bien l’entendre. C’était un très beau premier film à voir avec sa dulcinée, Glen était ravi d’en avoir fait la découverte avec elle. Si elle l’avait déjà vu, ça n’aurait pas eu la même saveur. Comme quoi. Il aimait déjà beaucoup leur exclusivité. Bee n’avait pas tardé à confirmer qu’ils le reverraient. Evidemment. Il se faisait tard et les deux amoureux s’étaient levés pour ranger derrière eux. Et puis Bee avait demandé s’il voulait passer à la douche avant elle et la remarque qu’elle ajouta à sa question ne manqua pas de faire rougir légèrement Glen. Alors elle avait remarqué qu’il faisait exprès de ne pas être trop intime. Comment ne pas remarquer en même temps ? Glen avait ouvert la bouche, prêt à se justifier. A quoi bon ? Il se sentait déjà ridicule de rougir, il n’allait pas en rajouter. « Je me suis déjà douché ce matin. » qu’il avait déclaré dans un petit sourire gêné. Oh, ce n’était pas un mensonge. Mais, franchement ? Il aurait très bien pu se doucher de nouveau si ça voulait dire qu’il se douchait avec elle. Sauf qu’il n’était pas prêt. Pas encore. Ça lui demandait un lâcher prise dont il n’était pas capable. Ça évoluerait avec le temps. Il le fallait. Mais Glen n’oubliait pas qu’il n’y a pas si longtemps encore, il s’était totalement interdit cette relation. Il y était maintenant plus heureux que jamais. Chaque chose en son temps donc. Qu’y avait-il de mal à prendre son temps ? « Hum… Oui, j’imagine qu’un t-shirt à moi, ça fait une robe sur toi ? » Glen la jaugea du regard avant de disparaitre dans sa chambre chercher un t-shirt et une serviette propre. Après être revenu, il avait déplié le t-shirt devant Bee. « Le t-shirt de ma fraternité à l’époque où j’allais à la fac ! Si le gamin que j’étais voyait la fille que je mettrais un jour dans ce t-shirt… » Et un peu d’humour, ça allait bien faire oublier ce passage douteux sur le fait qu’ils ne sont pas intimes, non ?
 

Le film est beau, très beau, et l'un comme l'autre ne boudent pas leur plaisir, affirmant qu'ils le reverront encore. Il le faut pour pouvoir apprécier les petits détails qu'ils n'ont peut-être pas relevé cette fois. Il le faut pour profiter encore, surtout, du jeu d'acteur d'Austin Butler et de sa merveilleuse interprétation du King, comme pour profiter des performances vocales dont le film est parsemé. Mais dans l'immédiat c'est surtout une nuit de repos qui les attend, Bee ayant conscience qu'elle ne peut probablement pas le faire se coucher trop tard parce qu'il a sans doute prévu des choses, le lendemain.

Bien sûr, sa remarque ne manque pas de faire rougir légèrement Glen. Elle aurait put s'y attendre. À vrai dire, elle s'y attendait justement. Ce n'est pas comme s'il ne l'avait pas déjà mentionné à Santorin. Pas comme s'il n'avait pas déjà évoqué ses limites. S'il est avec elle, il ne parvient pas encore à passer les barrières de l'intimité, ne parvenant pas à faire abstraction du fait qu'elle soit la fille d'un ami, une situation bien plus difficile pour lui que pour elle, c'est certain.

Comme il s'est douché le matin même, l'homme lui cède la place dans la salle de bain. Voilà un point sur lequel, visiblement, ils sont différents alors que Bee privilégie souvent une douche le soir, pour se délasser de la journée et s'engouffrer dans les draps en étant parfaitement propre, quoiqu'elle reconnaisse sans mal les bénéfices de la douche matinale que beaucoup trouvent vivifiantes. À condition bien sûr de la prendre plutôt froide pour profiter de tous ses bienfaits, ce dont la demoiselle n'est pas vraiment capable alors qu'elle prend toujours des douches bien chaudes.

"- Oui, à peu près."

Est-ce qu'un vêtement de Glen lui ferait vraiment une robe ? Il y a des chances. Ils ne vont pas tarder à le savoir puisque l'homme disparaît dans sa chambre, revenant rapidement avec une serviette de toilette et un t-shirt qu'il présente comme étant celui de sa fraternité, à l'époque de l'université. Un t-shirt qui lui fait penser au jeune homme qu'il a été et qui ne savait pas encore, alors, quelle fille enfilerait un jour son t-shirt. Bee esquisse un sourire en le récupérant.

"- Si tu le croise à ce moment là, pense à lui dire que c'est sa future femme." souffle-t-elle.

Oh oui, elle sait que c'est vrai. Elle sait que tous les deux, c'est fait pour fonctionner. Parce qu'ils veulent que ça fonctionne. Parce que ça lui ferait trop mal que ça ne soit pas le cas. Et parce qu'il a attendu quelqu'un comme elle toute sa vie, a-t-il dit. Elle pique un léger fard et glisse la serviette sous son bras, gardant le t-shirt dans sa main.

"- J'en aurai pas pour longtemps. Où est la salle de bain ?" demande-t-elle avant de s'y diriger, y disparaissant une dizaine de minutes environ avant de le retrouver une fois démaquillée et douchée, portant effectivement le t-shirt qui lui arrive à mi-cuisse. "Alors ? Il en dit quoi l'adulte que tu es maintenant ?" demande-t-elle en s'appuyant contre l'encadrement de la porte, un léger sourire aux lèvres.

Lullaby ne relève pas la gêne de Glen. Tant mieux. S’il y a bien une chose que Glen voulait éviter, c’était de devoir se justifier. Pas à ce sujet-là en tout cas. Il ne pouvait pas se forcer. La simple idée de faire un geste trop intime suffisait à lui amener l’image de Mickaël en tête et ça le faisait totalement paniquer. Pour le coup, ils prenaient leur temps. Vraiment leur temps. C’était digne des romances des années 50 et Glen savait qu’il n’y avait rien de très moderne dans cette situation. C’était juste qu’il n’y arrivait pas, le conflit de loyauté qui se livrait en lui à chaque fois qu’il y pensait -car Dieu sait qu’il y pensait- l’empêchait toujours de se montrer plus entreprenant. Ses barrières étaient énormes et il était le premier à le déplorer. Il avait enfin la femme parfaite à ses côtés… Mais il avait aussi la sensation de se priver de toute une partie de leur romance. Et, clairement, il n’avait pas envie d’en parler. Parler de ses émotions, si elles sont positives, pourquoi pas. Mais quand elles sont négatives ? Glen avait toujours préféré les taire plutôt que de se plaindre. Ou alors il tournait tout à la dérision. Pas de douche ensemble ce soir donc. Glen avait ramené à sa belle un t-shirt qui lui servirait de pyjama et une serviette. « Je suis pas sûr qu’il me croira mais je le ferai, promis. » qu’il avait soufflé à son tour dans un sourire avant de lui montrer la salle de bain. Pendant la douche de Bee, il avait fini de ranger la cuisine et le salon. C’était presque un appartement témoin ici. Heureusement que la petite Thalya était là, elle allait ramener un peu de vie ici maintenant. Une dizaine de minutes plus tard, elle était revenue. Démaquillée, dans un t-shirt beaucoup trop ample et beaucoup trop court à la fois, les cheveux mouillés… Et Glen l’avait trouvé incroyablement belle. Plus belle que jamais. Et à l’admiration s’était vite mêlé du désir… Mais Mickaël était arrivé dans ses pensées. Comme à chaque fois. Glen avait ravalé un soupir en s’approchant de la jolie blonde. Il l’avait arraché à l’encadrement de la porte pour la prendre dans ses bras et lui offrir un tendre baiser. « Il en dit que t’es vraiment la plus belle femme qu’il lui a jamais été donné de voir. » L’agent l’avait quitté quelques secondes le temps d’éteindre toutes les lumières avant de la prendre par la main pour l’emmener jusque dans sa chambre. « Tu veux quel côté ? » qu’il avait demandé en commençant à se déshabiller.
 

Il n'est pas sûr que le lui plus jeune pourrait croire que Bee est réellement sa future femme mais, pour autant, il lui promet qu'il lui passera le message si, d'aventure, il aperçoit ce jeune homme la voir. Bee esquisse un sourire avant de disparaître dans la salle de bain qu'il lui indique, se hâtant toutefois dans ses préparatifs pour le retrouver au plus vite, le t-shirt en haut des cuisses, les cheveux encore humides dessinant une auréole sur le tissus. Elle se place dans l'encadrement de la porte et l'observe alors, curieuse de savoir ce qu'il en pense, à défaut de pouvoir le demander au gamin qu'il a été et la réponse qu'il lui fait lui tire un sourire. La plus belle femme qu'il lui ai jamais été donné de voir. Elle aime cette idée même si elle doute que ce soit vrai ou très objectif, parce que Glen fréquente pour les besoins de son travail tout un tas de femmes qui sont absolument sublimes, absolument merveilleuses, absolument fascinantes. Lullaby suit d'ailleurs les carrières de certaines d'entre elles depuis un moment, sans pouvoir s'empêcher de les admirer.

"- Je pense que tu n'es pas très objectif mais je ne vais pas trop te le dire, j'ai trop peur que tu finisses par ouvrir les yeux..." souffle-t-elle avec un sourire, se blottissant contre lui.

Le laissant éteindre les lumières dans la pièce, elle retrouve rapidement sa main, le suivant jusque dans sa chambre dans laquelle ils entrent rapidement, Glen l'invitant à choisir un côté du lit pour y passer la nuit. La demoiselle hausse les épaules. Droite ou gauche, cela ne fait pas grande différence pour elle, le principal est sans aucun doute le lit qu'elle partage. Ou plutôt avec qui elle le partage.

"- Peu importe, tant que je suis près de toi." remarque-t-elle alors. "Tu as l'habitude de dormir d'un côté en particulier toi ?" demande-t-elle en observant le lit, songeant que, de toute façon, il y a de fortes chances pour qu'elle dorme à moitié sur lui. De très fortes chances, même, qu'il lui serve de meilleur coussin du monde, comme cela a déjà été le cas à Santorin. Après tout ce ne sera pas leur première nuit dans les bras l'un de l'autre, loin de là.

Lui, pas objectif ? Glen soupira avec un sourire amusé. N’importe quoi. Elle était pas très bien placée pour parler sur le sujet parce qu’elle le trouvait génial alors qu’il se trouvait tout juste aimable. Mais, peu importe, il n’avait pas relevé. A quoi bon ? Ils n’arriveront jamais à s’accorder sur le sujet mais ils étaient tous les deux tout à fait capables de se rappeler à quel point ils se trouvaient l’un et l’autre extraordinaires chaque jour. Une fois arrivés dans sa chambre, Glen entreprend de se déshabiller. Pas entièrement, évidemment. Il avait gardé son boxer. Pour dormir, ça suffisait largement. « Hum, nan, je suis plutôt du genre à bouger à droite et à gauche. » Il faisait un peu frisquet maintenant qu’il s’était déshabillé. Glen n’avait pas mis plus longtemps à rejoindre son lit. Avec un soupir satisfait, il s’était glissé sous les draps. Retrouver son lit, c’était toujours aussi bon. « Allez, viens. Promis je bougerais pas d’un pouce. Je serai le meilleur oreiller du monde. » qu'il avait dit en lui ouvrant ses bras. Et il avait déjà eu l’occasion de faire ses preuves, bien sûr, mais il ne demandait à Bee que de le remettre à l’épreuve. Dormir avec elle dans les bras, c’était la promesse d’une nuit tellement réconfortante.
 

Les jours avaient passés depuis que la petite Thalya était arrivée chez son papa. Ils étaient passés trop lentement, d'ailleurs, au goût de Lullaby, alors qu'elle n'avait pas pu voir son cher et tendre de la semaine et ne l'avait alors revu que le weekend suivant. Et pas assez lentement en même temps, puisque l'anniversaire de Noah était arrivé beaucoup trop vite au goût de sa marraine, tant parce qu'elle ne voulait pas voir le petit garçon grandir, que parce qu'elle avait conscience de la difficulté que représentait cette journée pour son couple. Il faudrait que Glen et elle ne soient pas découverts, que personne ne se doute de ce qu'il se passait entre eux, que personne ne se rende compte de cette alchimie évidente qu'ils partageaient et qui semblait à Lullaby encore plus claire et manifeste maintenant qu'ils étaient ensemble. Il faudrait qu'ils se montrent très prudents, bien plus qu'elle ne l'avait été jusqu'à maintenant, si elle ne voulait pas que l'anniversaire de son neveu ne devienne le théâtre de découvertes qu'elle n'était pas sûr de pouvoir assumer. En même temps, cela voulait aussi dire qu’il aurait Glen sous les yeux toute la journée, sans vraiment pouvoir espérer un baiser, ni même qu’il ne fasse que la frôler. L’enfer sur terre avait donc, maintenant, un visage à ses yeux et c’était sans conteste celui-ci.

Elle pousse un soupir en fermant sa boucle d’oreille, jetant un regard au miroir avant de sortir de la salle de bain pour le rejoindre, lui montrer sa tenue, recueillir son avis. Cette chaude journée d’été lui avait fait opter pour une robe légère, blanche à pois rouges, qui lui arrivait à mi-cuisses et qu’elle avait accompagnée d’une paire de nus-pieds à lacets rouge. Un fin collier et un petit sac complétaient la tenue. Portant un maquillage léger, discret, soigneusement choisi pour que les températures ne le détruisent pas en un rien de temps, avant que la piscine ne l’achève, elle s’arrête néanmoins avant d’avoir pu demander quoi que ce soit, le regardant lui.

”- Est-ce que j’ai pensé à te dire, aujourd’hui, à quel point tu es merveilleux et "wow" ?” demande-t-elle en prenant son air le plus sérieux, avant de tourner sur elle-même pour lui permettre de voir l’ensemble de la tenue. ”Comment tu me trouves ?”

Sa réponse obtenue, elle approche de lui encore, passant ses mains sur ses deux épaules en même temps, comme pour lisser son vêtement. Un simple prétexte inconscient pour créer du contact avant une journée complète de séparation, même si elle a déjà prévu de passer la nuit prochaine ici, y laissant un sac de ses affaires en se montrant prévoyante, cette fois.

”- Tu as préparé tout ce qu’il fallait pour Thalya ? Gamelle ? Croquettes ? Laisse ? On sera dehors, mais je ne suis pas sûre que maman apprécie de découvrir une crotte dans ses bégonias. Même si elle a été déposée par une princesse !” justifie-t-elle en glissant son téléphone dans son sac à main.

Elle s’arrête, cela fait, revenant contre lui pour le prendre dans ses bras, de quoi “faire le plein” pour la journée à venir.

”- C’est normal que tu me manques déjà ?” demande-t-elle avant de se résoudre à se séparer de lui. ”Je pars devant...” annonce-t-elle avant de se diriger vers la porte pour retrouver sa voiture, comme ils ne peuvent pas arriver ensemble.

Glen s'était parfaitement habitué à avoir une chienne à la maison. Ça lui demandait de se rendre un peu plus disponible, de penser à quelque chose d’autre que sa carrière ultra prenante. Ça lui faisait du bien. Des fois, il devait sortir la promener et prendre juste cinq minutes de son temps pour faire autre chose que bosser lui faisait du bien. Et s’il arrivait à s’occuper de la petite Thalya, il ne voyait pas assez sa chère et tendre à son goût. Il voyait arriver le week-end avec bonheur. Mais pas que. Il savait qu’il allait retrouver l’intégralité du clan Watson pour l’anniversaire du neveu de Bee et il ne pouvait pas s’empêcher d’être nerveux à l’idée. D’ailleurs, il avait été prêt deux heures avant de partir et il avait eu tout le temps d’attendre que Bee le soit aussi. En sortant de la salle de bain, elle le complimente en le découvrant. Il sourit avant de siffler, un large sourire aux lèvres malgré l’angoisse. « Tu es une vraie petite merveille. » Elle avait passé ses mains sur ses épaules, il l’avait regardé faire amuser. Il était l’heure. Il devait y aller. Ça lui vrillait l’estomac. « T'en fais pas. » qu’il avait rigolé avant de reprendre : « J’ai pensé à tout. Le jardin de ta mère va rester indemne ! » Enfin, logiquement. Thalya était encore jeune, Glen allait devoir l’avoir à l’oeil. A vrai dire, il n’avait pas vraiment prévu de la lâcher trop longtemps. Sa jolie blonde était venue se réfugier dans ses bras et Glen l’avait accueilli en soupirant. Il n’avait pas envie d’y aller. Oh, il avait envie d’être là pour Noah. Et les autres. Mais il avait trop peur de se trahir, trop peur que l’amour qu’il porte pour Lullaby soit si flagrant que personne n’y échappe. « M’en parle pas… » qu’il avait soufflé en l’embrassant une dernière fois. Plus de retour en arrière maintenant. Qu’il plante les Watson, c’était déjà quelque chose. Mais Lullaby ? Jamais. Il avait attendu quelques minutes avant de partir à son tour, juste histoire qu’on ne les voit pas arriver exactement en même temps.

 

La route jusqu'à la maison de ses parents avait semblé incroyablement longue et courte à la fois. Elle avait eut tout le temps de penser aux multiples façons dont elle pourrait se trahir avec Glen, principalement à cause d'un réflexe nouveau et malheureux qu'ils pourraient avoir. Si, par malheur, en se retrouvant à côté de lui pour une raison ou une autre, elle venait à passer son bras autour de son dos. Ou si elle venait à se perdre dans la contemplation de son cher et tendre... Avant c'était simple. Avant, elle avait trop peur qu'il découvre ses sentiments pour s'autoriser à se laisser aller. Trop peur qu'il ne la repousse. Mais maintenant qu'ils ont acquis des habitudes, une complicité ? L'épreuve serait difficile. La route, ainsi, lui avait semblé trop courte pour se préparer à tout ça. Trop longue pour laisser son imagination fructifier et trop courte, pour qu'elle soit prête.

Elle le retrouvera ce soir, c'est ce qu'elle essaie de se dire en se garant devant la maison de ses parents. Elle a juste à donner le change pour la journée et tout ira bien. Quand sonnera la fin de l'après-midi, elle pourra rentrer chez lui, abandonner toute réserve. Sur le papier, ça ne semble pas si difficile. Sur le papier seulement, uniquement. Dans la réalité... Elle a l'impression d'être comme une plongeuse. En apnée. Elle prend d'ailleurs un instant encore pour se rassurer, avant de se décider à y aller. Parce qu'il ne va pas tarder à arriver et qu'elle doit avoir passé la porte avant lui. Un petit moment avant.

Sortant de la voiture, elle récupère les cadeaux de son neveu dans son coffre et avance donc en direction de la maison parentale, à laquelle elle ne tarde pas à sonner, les bras chargés de paquets. C'est Ethan qui vole à son secours en ouvrant la porte, la laissant entrer en riant face aux abus de sa cadette, comme elle essaie de faire passer sa tour de Pise dans l'encadrement de la porte sans accident.

"- Attends, tu as dévalisé le magasin de jouets ?"
"- T'as qu'à m'en faire toi aussi, des neveux et nièces, ça m'évitera de pourrir-gâter le seul que j'ai !" proteste la demoiselle en déposant ses paquets.

Ok. Dans les faits, elle non plus ne donne ni neveu ni nièce à son frère, mais c'est de bonne guerre entre eux. De plus, elle est plus jeune et il vaut mieux qu'elle ne pense pas à ça maintenant, parce que ce n'est pas comme si l'envie lui manquait. Le problème était ailleurs, nettement ailleurs. Récupérer Noah au vol pour un énorme câlin en lui souhaitant un joyeux anniversaire l'empêche néanmoins de penser à tout ça. Juste à temps, puisque l'on sonne déjà à la porte. Noah est encore dans ses bras quand Ethan ouvre de nouveau, pour révéler la silhouette de Glen. Bee déglutit en priant le ciel que personne ne se rende compte de rien. Son regard se glisse furtivement sur Phil. Il est le plus susceptible de remarquer un changement. C'est lui, donc, qu'elle doit duper surtout, en faisant comme si rien avait changé, alors même qu'elle est incapable de rougir comme c'était le cas avant. Inspire, expire. Tout va bien se passer.

"- Glen !" le salue-t-elle avec un sourire. "Tu vas bien ? Mais oh !" elle porte son regard sur Thalya. "C'est qui ça ?" demande-t-elle avant de tourner sa tête vers Noah. "Tu as vu Noah ? C'est quoi ça ?" demande-t-elle en embrassant sa tempe. "Glen nous ramène une copine, ça y est !" dit-elle avec humour en s'adressant à son père cette fois. Bon sang. La journée menace d'être longue.