Le Temps d'un RP
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LE TEMPS D'UN RP

Le vent se lève et le monde nous appartient

Lobscure
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Lobscure
Ven 27 Mai - 20:37

Le vent se lève
et le monde nous appartient
Mise en situation


Le vent se lève et le monde nous appartient 1200px-The_Flying_Dutchman_by_Charles_Temple_Dix
Dans un monde changeant qui s’ouvre vers de nouveaux horizons, corsaires, boucaniers, flibustiers et autres forbans - somme toute, pirates - écument les mers de l’Océan Atlantique et livrent leurs existences à de tumultueuses aventures qui marqueront les mémoires. Tous se battent de leur vie pour gronder leur vérité.
Un vent de liberté se lève…



Contexte provenant de cette recherche
Lobscure
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Lobscure
Ven 27 Mai - 21:33
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Meg Seegar
alias
Sean Malloy

J'ai 23 ans et je vis là où le vent me mène. Je suis née à Dún Laoghaire, Irlande. Dans la vie, je suis travesti et matelot, je vis au jour le jour. Sinon, grâce à ma hardiesse, je suis en quête de liberté et je le vis plutôt bien.

Meg ne sait pas grand chose de son père, sinon qu’il était un ennemi de l’Angleterre. Quant à sa mère dont le fils ainé est tout récemment décédé du typhus, elle ne lui inspire que le mépris de voir en son visage et ses manières, les traits de son progéniteur répudié. Aux yeux de tous, elle n'a plus grande valeur, violé par un équipage voguant sous l'étendard de la reine. Elle a oublié leurs visages, mais pas celui de leur capitaine. Sans attaches, la jeune femme préfère prendre le large loin des côtes Irlandaises à bord d’un navire marchand. Travesti en son défunt frère, Sean Malloy, elle rêve d’une autre vie. Meg ne le sait pas encore, mais la rébellion, elle l’a dans le sang...



Chanson thème (Meg Malloy)

Crédit image : Jeleynai


1785

Les acclamations furibondes de la foule qui accompagne mes pas jusqu’à la potence retentissent dans toute la ville. Aujourd’hui est un jour de fête. Toutes ces vies se sont réunies ici pour célébrer la mort. Drôle d’ironie. Je n’aurais pu espérer meilleur public, même si les insultes « salope ! », « traînée ! » et j’en passe, qui manque cruellement d’imagination ne sont pas à la hauteur de mes actes. Si vous tous, misérables, connaissez mon nom, ce n’est certainement pas pour mes qualités de maîtresse ! Mais ces imbéciles et ignares sont encore trop orgueilleux pour accepter ce que je suis. Mon bourreau me revêt de la corde et le silence qui s’installe de ce geste en est pesant. Dans quelques instants, la pirate aux cheveux de sang versera du sien pour rassasier les habitants de Port Royal, avides et impatients du spectacle de ma mort. Meg Malloy ne sera plus. Plus qu’un souvenir malléable par les historiens à la volonté de faire taire tout ce à quoi j'aspire… La révolte, le choix, la liberté. Une petite fille dans la foule qui ne semble pas partager la fébrilité ambiante me regarde. Je lui accorde toute mon attention comme s’il n'y avait qu’elle et lui tend un sourire. Quoiqu’un peu craintive, elle me le rend… Un souvenir qui, si ne se tarit pas dans l’esprit de tous, deviendra légende. Un jour peut-être, mon nom l’inspirera. Je veux que cette petite fille dans la foule sache que le monde lui appartient. Ainsi, je ne mourrais peut-être pas en vain. C'est sur cette dernière pensée que je ferme les yeux et compte chaque seconde qui me rapproche de Sean.


1782 - Quelque part sur la mer Celtique

Voilà plus de cinq jours que nous naviguons sur une mer docile et tranquille vers des lieux qui me sont encore étrangers. Cinq jours derrière lesquels j’ai laissé les terres d’Irlande qui m’ont vu naître. Peut-être pour toujours. L’étendue bleue devant moi semble s’étirer vers l’infini et se mêler au ciel. Dans quelques heures, elle engouffrera le soleil et au matin peut-être, si la mer continue d’être clémente, je verrais la France. J’ai le réflexe de porter une main à mes cheveux, mais me suspends un instant à ce geste désormais désuet. J’avais oublié ce que m’en avait coûté cette liberté, en plus de cinq pièces d’or goulument arrachées par le capitaine de cette petite flotte pour qu’il m’accepte à bord. C’est alors que les paroles de ma tante qui m’avait fait promettre de ne jamais toucher à ma tignasse me revienne subitement en tête : « Tu n’as peut-être pas hérité de la beauté de ta mère, mais tu possèdes de magnifiques cheveux, Meg. Ne les coupe jamais ! » Je me plais à m’imaginer le choc que je lui aurais causé. Le cœur lui en aurait cessé de battre, pauvre femme. Des bruits de pas chassent ces pensées de ma tête. De toute manière, c’est du passé désormais. Un homme de l’équipage que je crois reconnaître à l’odeur, me rejoint. Il empeste l’alcool et boit sans soif du matin au soir. Je l’ai aperçu à plusieurs reprises piquer la bière qui se trouve dans l’un des barils que transporte le navire. Je me penche un peu plus par-dessus le pavois et d’une main discrète, enfonce mon tricorne davantage sur ma tête. Il baisse alors son futal mal lacé et se soulage allègrement sans se soucier que je me trouve à quelques pieds de lui. L’odeur âcre qui me monte aux narines m’arrache une moue de dégoût, mais je ne bouge pas préférant ne pas attirer son attention et me contente de regarder ailleurs. Aux Plic-ploc irréguliers que j’entends à mes pieds, je devine que j’ai des gouttes de pisse qui giclent sur mes chaussures. L’envie folle de le faire passer par-dessus bord me tend et vue sa maladresse pour viser et les va et vient qui convient d’un manque d’équilibre, il est assurément ivre, ce serai facile. Cherchant distraction de ce jet qui n’en finit pas, je le vois du coin de l’œil tourner la tête vers moi. Il semble enfin remarquer ma présence. Ses yeux me scrutent, mais je préfère éviter son regard. Je n’ai peut-être plus grand chose d’une femme, ma poitrine est aplatie par un tas de bandages et mes cheveux court sont noués en catogan sous mon tricorne qui me tombe sous les yeux, mais sait-on jamais. Son regard est insistant et j’en viens à espérer qu’il finisse par le détourner ailleurs. Ce qu’il ne fait pas et par mégarde, je croise ses yeux un peu hagards.
— Tiens… C’t’une vilaine balafre que tu as là, jeune homme. Je n’l’avais pas remarqué… »
— Peut-être… » Je me racle la gorge pour me donner de la consistance et sortir ma voix la plus grave. « …que si vous ne passiez pas le plus clair de votre temps la tête dans un baril vous l’auriez remarqué plus tôt j’imagine. » Je regrette aussitôt mes paroles. Il y a mieux pour éviter de se faire remarquer. J’ai une grande gueule, ma mère me l’a souvent reproché. Mais à ma grande surprise, il ne le prend pas plus mal que ça et se met à partir d’un rire gras.
— Rappelle-moi ton p’tit nom, hic! gamin ?
— Sean. Sean Malloy.
— Eh bien Sean Malloy… Mêle toi de c’qui te r’garde !
— Je n’aurai pas mieux dit.
Il se tourne vers moi, enflé comme un taureau. Tout aussi musclé. Merde. Mais qu’est-ce qui m’a pris ? Qu’est-ce qui l’empêche de me jeter par-dessus bord maintenant ? Je soutiens néanmoins son regard avec la même densité et ne bronche pas. Il est gigantesque, on dirait un viking. Enfin, je n’en ai jamais vue de mes propres yeux mais les histoires qu’on me racontait petite me suffisent pour m’en faire le portrait et lui y colle parfaitement. Je dois bien lui arriver au nombril. Il n’a pas l’air tout jeune, mais arbore une chevelure épaisse et blonde cendrée, il a une fossette au menton et une autre… sur le front ? Ah, non. Une cicatrice. En fait, maintenant que je l’observe, il en a des tas. Et ce que je pensais être des manches épaisses qui dépassent de sa chemise sont en réalité des tatouages qui semblent lui recouvrir les avants bras. Je me surprends à glisser discrètement une main à mon poignard dissimulé sous un pan de ma chemise, l’instinct en éveille, mais le géant semble le remarquer et repart de plus bel d’un rire rauque. J'en demeure interdit de ne pas m’être mangé plutôt un poing en pleine figure ou pire.
— T’a du cran gamin… J’aime ça. Ça change d’être entouré de fiottes ! » Il sort de sous sa chemise une bouteille d’alcool dont il arrache le bouchon à pleine dents puis le recrache à la mer.
Il me la tend. Je pense que refuser cet acte de paix me serait encore plus préjudiciable que mon répondant, alors j’accepte sans broncher. Le liquide me brûle la gorge. C’est la première fois de ma vie que je bois, mais je pense que je n’ai pas besoin de le lui préciser. Il ne lui échappe pas la grimace que j’en tire et se gausse avec hilarité. Il lui en faut peu... Je l’imagine bien être le genre de type qui meurt vieux et heureux gavé d’alcool, sur le sein d’une putain. Comme mon oncle Calvagh.

Avec Fingal Burbeck, puisque c’est comme cela qu’il se prénomme ce bougre, nous avons passé la nuit à parler à la belle étoile. Enfin, surtout lui. Il est écossais, je l’avais déjà dénoté à l’accent guttural de son langage. À l’auberge de ma mère, j’en ai servi plus d’un. Ce sont de bons vivants à l’estomac solide et le foie bien accroché, faut se l’avouer. Fingal, d’une autre vie, était corsaire pour l’Angleterre. Une altercation avec des pirates ayant mal tournée l’aurait laissé seul survivant de son équipage et on lui a reproché sa survie du fait qu’il s’était livré à eux et du même coup, à leurs activités illicites. Il a échappé à la potence de justesse. Je ne suis pas convaincu quant à l’exactitude de son récit et je ne serais pas surprise qu’il en ai rajouté ici et là juste pour le plaisir de me voir tressaillir. Il est vrai que cela ne m’empêche pas d’être accroché à ses propos. Je n’ai jamais rien entendu d’aussi fascinant. Il me dit que son nom me portera chance, si jamais. Il m’a fait promettre de ne jamais l’oublier et de ne pas hésiter à l’utiliser si un jour je suis dans le pétrin. J’ignore en quoi le nom de ce pochard peut me permettre de me sauver les fesses dans le futur, mais j’opine du chef ne voulant pas le froisser.
— Et qu’est-ce qui, hic! amène c’te dénommé Sean Malloy en France, dis-moi ? C’est quoi ta p’tite histoire à toi ?
Une promesse. Ou plutôt les dernières volontés d’un mourant. Pas n’importe lequel. Les dernières paroles de mon frère sur son lit de mort m’ont marquées au fer rouge. C’est le genre de paroles qui après coup, te possède. « …Ce n’est pas ce que tu es, Meg… Ce n’est pas toi. Vis. Vis pour nous deux, tu veux bien ? »
— Mes parents sont morts, c’est plus simple de prétendre qu’ils le sont si je veux me débarrasser des questions futiles par la suite, je suis fils unique. Plus rien ne me retenait à Dún Laoghaire d’où je viens et je veux faire fortune ailleurs… Pourquoi pas voguer sur mer ? Ça m’a l’air paisible.
— Désolé gamin, pour tes parents et désolé d’ta crédulité ! La mer est tout sauf paisible. Méfie-toi ! Elle gronde et tu ne l’vois pas. Mais regarde bien, tu verras qu’elle n’attend qu’une occasion pour t’sauter au visage.
Et comme pour donner raison à ses propos, la mer qui semble vouloir ajouter son grain de sel fait tanguer le bateau côté tribord et Fingal dans sa gestuelle maladroite, c’est surtout une vague d’alcool qu’il m’envoie au visage. Il s’esclaffe à perdre haleine devant ma mine outrée et mouillée. Je grince des dents et me contiens pour ne pas lui faire bouffer sa bouteille. Je ne sais pas encore si j’apprécie ce curieux personnage ou si j’ai l’envie irrépressible, mais contenue, de lui sauter à la gorge. Dans un moment de silence, Fingal observe longuement mon visage.
— Dit moi Sean… On s’connaîtrais pas d’quelque part par hasard ? Ton visage m’dit vaguement quelque chose…
— Ça m'étonnerait. Je n’ai jamais quitté l’Irlande jusqu’à… Aujourd'hui.
Il semble vouloir dire quelque chose, mais se ravise. Pour changer de sujet ainsi que cette manière étrange et insistante qu’il a de me dévisager, je lui pique sa bouteille et ingurgite goulument tout ce que je peux. Il se met alors à hurler comme un goret envoyé à la mort et m’arrache sans trop d’effort la bouteille des mains. Une bonne moitié de son précieux liquide est allé éclabousser les lattes assoiffées du navire avec la brusquerie de son geste. Il me lance un regard furieux et pour la première fois depuis la disparition de Sean, je ri à gorge déployée sans m’arrêter. Je comprends alors un peu mieux ce Fingal Burbeck aux rires désopilants à tout vent. Le rire est salvateur, on l’oublie trop souvent.

À l’aube, nous n’étions qu’un ramassis de poivrots et le capitaine s’est permis de nous jeter un seau d’eau au visage. J’ai vite décollé des planches et rejeté tout mon soûl à la mer tandis que Fingal me retenait fermement par la ceinture d’une main. De l’autre, il se gargarisait avec le fond de bouteille que je lui avais généreusement laissé de la veille. Un goéland s'est posé sur le pavois à côté de moi. Sa vilaine tête au regard fourbe m’a fait penser à celle de ma mère et en tentant de le renvoyer d’où il venait, j'apercevais au loin les côtes françaises pour la toute première fois.

*

J’atterris sur le ponton des deux pieds. Fingal à ma suite en fait trembler les planches sous nos jambes.
— Hummm. Tu sens ça, gamin ? L’odeur de la liberté !
Tout ce que je sens à l’instant c’est l’étal de poissons non loin de nous. Je fronce le nez avec le désagrément d’associer mon premier souvenir de la France à celui de la poiscaille défraîchie. Pour moi, l’odeur de liberté a l’odeur de la mer, pas d’intestin de truites.
— Ravie d’avoir fait ta rencontre, gamin ! Tu manques un peu de gabarit et de poils, mais pas de jugeote ! Ça compensera pour le reste. Je suis sûre que tu t’en sortiras où que tu iras, Sean Malloy. » Fingal Burbeck me fait ses adieux et me tape dans le dos si fort que je manque de m’étouffer. Je lui offre en retour qu'un faible sourire tandis qu’il glisse son baluchon sur le dos. Je n’ai jamais été très à l’aise avec les départs. Il m’adresse un signe de la main avant de disparaître dans la foule. J’ai le curieux sentiment que ce n’est pas la dernière fois que je le vois.

À rester planté au milieu du ponton comme un piquet, je me fais un peu bousculer par quelques marins qui viennent eux aussi tout juste d’amarrer. J’ai vite compris que ma présence était importune aux bougonnements qu’ils font, même si la langue m’est inconnue. Du français, je présume. Sans dire de mots, je me décale pour les laisser passer. Encore une fois, je préfère jouer la carte de la discrétion. Le navire duquel ils viennent de sauter m’apparait gigantesque en comparaison à celui par lequel nous avons effectué notre traversée. Admirative face au bâtiment devant moi, j’en ai la mâchoire qui s’en décroche. Soudain, une réalisation traverse mon esprit. Du même genre de celles que l’on se fait étant enfants. Il nous habite pendant quelque temps la volonté naïve de devenir plus tard une fée, un elfe ou un chef viking. Rêver de l’impossible, c’est remettre en question l'absolu. Et devenir un elfe ou un jarl est aussi improbable qu’une femme matelot. Alors, c’est ce que je deviendrais. À l’instant, je ne sais peut-être pas qui je suis, mais je sais exactement où je veux être. N’importe où au monde, tant que ce soit sur un navire. Et... pourquoi pas celui-ci ?
Houmous
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HOUMOUS
Houmous
Lun 6 Juin - 16:58

Louis Oregen
J'ai 35 ans et je vis sur le Grand Coureur. Je suis né à Grois, France. Dans la vie, je suis maitre d'équipage, je vis pas trop mal. Sinon, grâce à ma sympathie pour mes hommes, je suis dans le doute et je le vis plutôt mal.


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Crédit image : Naughty Dog

Après des mois de navigation, à beugler du gaillard d’avant à celui d’arrière, Louis ne pensait qu’à retrouver la chaleur du foyer d’une quelconque taverne, sur le port de l’Arsenal de Brest qui l’avait vu déjà de nombreuses fois s’en aller pour mieux revenir. Parcourir les mers pour chasser l’anglais était une routine qui s’était déjà de loin passée. Maintenant, la dernière lubie de son capitaine avait été d’aller et venir dans les colonies, pour le commerce. La marine royale d’antan pouvait s’en retourner dans sa tombe, à son humble avis, mais cela ne le dérangeait pas. La mer, maitresse caractérielle, s’en trouvait être suffisamment dangereuse qu’il n’en faille défier la poudre en chaque croisière. Portant le coffret qui contenait le reste de la solde des vilains forbans qui formaient son équipage, il s’en descendit sur la jetée pour les laisser passer un à un, accompagné de ce bon vieil Albert.

Chacun à leur tour, ils débarquaient du Grand Coureur, les sourires, parfois un peu édentés, d’une oreille à l’autre. Les spéculations et autres projets allaient bon train dans la file. Alors que les plus sages parlaient des rubans qu’ils enverraient à leur bonne femme à l’autre bout du Finistère, d’autres pariaient sur le nombre de verres qu’ils auraient le temps de goûter avant de rouler sous la table ou dans les bras d’une bonne compagnie. Le moral était à son meilleur, effaçant par ailleurs les injures qui étaient monnaie si commune à bord. Le soleil eut bien le temps de se déplacer le temps que la centaine d’hommes aient pu passer face à lui. L’espadon qui leur servait de figure de proue, toute en verve et rage, rendit son aspect le plus féroce lorsqu’il passa dans sa face ombragée.

- Mon bon Albert, je crois que nous en sommes venus à bout, fit-il en s’étirant alors que le vieillard marmonnait dans sa barbe nacre sur lit de framboise. Oui, je n’ai pas oublié Jacques Tourdiot et Fabien Plouvennec. Je m’en vais aller quérir un courrier pour apporter les soldes à leurs femmes. Prend donc ta part, tu es libre de t'en aller.

Le bonhomme eut l’air satisfait de voir que ses craintes étaient bien entendues. Il ne prit pas plus de son temps, révérant de son chapeau avec son crâne dégarni pour prendre congés. Dans le même temps, quelques-uns des ouvriers qui s’affairaient à emporter la cargaison dans les entrepôts du port révélèrent la présence de l’officier en charge et capitaine du Grand coureur, Jacques de Cassigny. Louis s’en réprima d’un soupir lorsque leurs regards se croisèrent et qu’il vit à son regard que son supérieur attendait de lui qu’il vienne le saluer comme le voulait la discipline à bord. Approchant, le coffre bien allégé, sous le bras, il réalisa une fois de plus à quel point il entretenait du mépris pour ce nobliau, ce gaillard qui n’avait pas mis pied sur un bâtiment avant ses 30 ans et passait son temps à fulminer de rage que tel changement de bord ou telle réparation de voiles prenait par trop longtemps à son goût.

- Mon capitaine, la solde a été distribuée selon ce que vous m’avez laissé dans le coffre, fit-il, en saluant d’une main à la mode militaire.

- Bien, Oregen ! Très bien, fit-il passant une paluche dans sa moustache étirée. Expérimenté, intègre et sérieux : vous irez loin, mon petit, s’amusa-t-il en me détaillant du regard. Je vous avais dit que cette cargaison était à destination de Monsieur ? Mmh… Après une si belle affaire, les demandes vont affluer et avec elle les richesses.

- Mon capitaine, puis-je ? demanda-t-il en espérant pouvoir exprimer le fond de sa pensée, ce qui lui fut accordé d’un vague regard interrogateur. Je sais que ce contrat était utile pour faire reconnaitre notre travail mais les hommes n’accepteront pas toujours de-

- Les hommes accepteront ce qui leur sera ordonné ! tonna-t-il de suite, la soupe se mêlant au lait. Vous êtes là pour les garder dans le rang, mon petit ! Qu’ai-je à faire de leurs petites considérations ?! N’importe quel gueux ferait l’affaire à leur place s’il rechigne à se mettre à l’ouvrage ! Si certains ourdissent des séditions, je les fouetterai de mes propres mains, ajouta-t-il même, dans une de ces colères habituelles.

Louis hocha vaguement de la tête, approuvant pour la tranquillité plus que pour donner son accord. La discipline était chose importante dans les trois-mâts mais il n’en restait pas moins qu’un équipage heureux était la moitié du travail de fait. Il fit mine de s’en aller et s’en trouva retenu d’une main sur son épaule.

- Je n’en avais pas fini, mon petit. Donnez-moi de suite la solde de cet ivrogne de Fabien. La mer l’a rappelé parce qu’il se saoulait de bon matin. Sa femme n’aura pas sa solde et j’irai lui expliquer pourquoi.

Louis serra les dents et se retint de délester l’odieux personnage de sa tête pour son injure. Ne pas rendre la solde à la veuve d’un marin faisait partie des grands tabous qu’il avait constaté. Même en étant optimiste, il savait que la vérité éclaterait d’ici à peu, la bonne femme vivant à quelques lieux de Brest. Si elle ne voyait pas venir tinter les piécettes sous peu, elle viendrait à se poser des questions et s’en irait le quérir pour comprendre ce qu’il s’était passé. Il soupira un peu en donnant la bourse, recevant en retour un grand sourire du capitaine qui lui tapota familièrement la joue. Craignant de voir une mutinerie arriver s’il ne faisait rien, il se résolut à donner une part de son propre solde à la pauvresse et ses cinq marmots. Il poursuivit ainsi vers la ville pour s’occuper de ses tâches habituelles. C’est à ce moment qu’il le vit : un jeune homme, un rouquin comme les irlandais qui se faisaient si souvent embarquer dans les galères albionnaises. Le gamin avait l’air curieux de la figure de proue en espadon et des voiles du mât de misaine. Le drapeau au lys rappela à Louis pourquoi il avait décidé de monter à bord pour la première fois, bien des années auparavant.

- Tu cherches quelqu’un du Grand Coureur, petiot ? fit-il, approchant de par derrière sans chercher à le surprendre

Lobscure
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Ven 10 Juin - 18:35
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Meg Seegar
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Sean Malloy

J'ai 23 ans et je vis là où le vent me mène. Je suis née à Dún Laoghaire, Irlande. Dans la vie, je suis travesti et matelot, je vis au jour le jour. Sinon, grâce à ma hardiesse, je suis en quête de liberté et je le vis plutôt bien.

Meg ne sait pas grand chose de son père, sinon qu’il était un ennemi de l’Angleterre. Quant à sa mère dont le fils ainé est tout récemment décédé du typhus, elle ne lui inspire que le mépris de voir en son visage et ses manières, les traits de son progéniteur répudié. Aux yeux de tous, elle n'a plus grande valeur, violé par un équipage voguant sous l'étendard de la reine. Elle a oublié leurs visages, mais pas celui de leur capitaine. Sans attaches, la jeune femme préfère prendre le large loin des côtes Irlandaises à bord d’un navire marchand. Travesti en son défunt frère, Sean Malloy, elle rêve d’une autre vie. Meg ne le sait pas encore, mais la rébellion, elle l’a dans le sang...



Chanson thème (Meg Malloy)

Crédit image : Jeleynai

Le navire me plonge dans de douces remembrances. C’est le genre de bâtiment que naviguait notre père. Enfin, d'ouï dire de mon frère qui nourrissait d’images merveilleuses mon imagination fertile alors que nous guettions parfois son arrivée, les yeux rivés sur l’horizon. Depuis ma naissance, Sean ne l’a jamais revue. Je ne l’ai jamais rencontré et j’ignore pourquoi j’ai tant cru à sa rencontre malgré les années de désillusion passées. Je n’étais alors pas plus haute que trois pommes et prenait place sur les épaules de mon frère qui se tenait au bord des falaises. Je me souviendrais toujours des histoires qu’il me contait sur son compte tandis qu’il me pointait au loin l’océan. Elles frôlaient le fantastique. Mais Sean m’assurait qu’elles étaient vraies, et qu’au même âge que le mien, c’était père lui-même qui les lui racontait. Comment en démentir lorsque le protagoniste lui-même en est le conteur ? Rallié à l’admiration sans faille que l’on porte pour son progéniteur, Sean n’a jamais douté de ces histoires contrairement à moi. C’est peut-être pour cela que j’ai toujours été attirée par la mer. Elle renferme un mystère que je me dois de résoudre moi-même. Et quelque part, elle renferme les traces et le vécu de mon père. Sur terre, j’ai toujours été inapte à tout. L’existence m’en paraissait pénible. Et sans Sean, c’était pire. Ma souillure me condamnait à la vie de vieille fille et à ma mère, cela faisait son affaire. Elle pouvait compter sur mon aide à l’auberge sans craindre que je ne me désiste, puisque c’est tout ce qu’il me restait dans la vie. C’était ça, ou devenir putain qu’elle ne cessait de me le rappeler. La deuxième option étant fort peu souhaitable, j’ai préféré dédier mes jours au service de ces cuitards d’écossais et mes soirs à décrasser les giclures de leur gerbe durcit sur les planches, qui du moins, me permettait de ne penser à rien. Il n’y a pas mieux que l’odeur de merde pour chasser ses vagues à l'âme.

Trop absorbée par mes pensées et ces souvenirs forts plaisants, c’est la voix d’un homme derrière moi qui me rappelle à la réalité. Je me retourne en virevoltant sur moi-même pour faire face à qui je présume être un membre de l’équipage du navire. Je regarde d’abord par dessus mon épaule, cherchant à voir s’il ne s’adresse pas à un autre et ne tarde de réaliser que je suis bien celle à qui il s’adresse. Sinon qu’il s’agissait d’une question au ton de sa voix, je n’ai pas compris le moindre mot qui est sorti de sa bouche. Je baisse aussitôt les yeux au sol et enfonce mon tricorne sur le crâne. N’osant relever la tête, c’est à des bottes que je m’adresse. Et ne sachant quoi leur répondre, je me contente d’un simple hochement de tête en signe de négation, qu'importe la question. Vaut mieux pour moi ne pas m’attarder ici. Je file sans demander mon reste, et lorsque je me retrouve suffisamment loin sur le quai j’ose jeter un coup d'œil furtif au matelot en question. Je croise alors le regard du blond. Il a une allure sophistiquée à la manière de ces bêcheurs d’anglos et dégageait un certain magnétisme, faut le lui concéder. J’en déduis que ce devait être le capitaine de la flotte. Eh bien Meg, pour une première impression, c'est raté.

Mes pas et ma curiosité ont vite fait de me mener dans le centre de cette étrange grande ville. Ce serait bien que d’en connaître le nom, mais l’idée de déployer mon anglais à quiconque ne me plaît pas tant. Je ne suis pas non plus totalement ignorante des tensions que sème partout l’Angleterre. Sur nos terres, la première. Je pourrais toujours m’adresser en gaélique, mais va savoir qui pourrait bien me comprendre. De plus, les français semblent être des gens peu sympathiques avec les étrangers. Sur mon passage, ma tête rousse arrache même à certains des grognements hostiles. À moins que ce soit l’effet de ma présence, il est plutôt rare d’apercevoir les dents des gens ici, contrairement à chez moi. Les sourires je veux dire. Et lorsqu’on en voit un, on comprend vite pourquoi… La dentition noire d’un type qui daigne me couvrir du sien me provoque un haut le cœur que je réprime d’une grimace.  

Alors que je me laisse guider tantôt par les effluves alléchantes de certains étals, tantôt par le bain de foule, je suis bousculée par un passant assez brutalement pour que cela me fasse me retourner sur place. La brute en question, c’est pourtant un gamin qui ne doit pas avoir plus de seize ans. Sa tête d’ange et son sourire narquois font aussitôt s’écrouler mes défenses et je me contente de lui lancer qu’un froncement de sourcil sévère. Il s’excuse aussitôt, toujours avec ce sourire en coin, emprunt de malice. Ce n’est que lorsque je me dirige dans une auberge que je réalise que ma poche est beaucoup plus légère que tout à l’heure. Après cela, j’ai du passer une bonne partie de l’après-midi à chercher pour ce foutu gamin, mais en vain. Le voleur semble avoir des ailes. Tant mieux pour lui, autrement il aurait passé un mauvais quart d’heure le môme. Heureusement, j’ai encore quelques pièces que je gardais dans mon autre poche. Je les compte. Il me reste tout juste assez pour m’acheter à manger. Pour ce qui est de la nuit, je risque de la passer à la belle étoile encore une fois. Ça devient une habitude, Meg…

À l’instant, il faut que je me trouve de quoi manger et un plan pour la suite. En priorité, manger, la suite on verra car la faim qui m’habite ne me permet pas d’avoir les idées claires. De retour au port, je me dirige donc vers une taverne où j’entends s’élever les cris, les rires. Enfin un endroit qui me fera certainement me sentir chez moi. Aussitôt que j’ouvre les portes, l’atmosphère qui y règne semble tout à fait cordiale et le lieu fort animé. Tout le contraire des rues desquelles je viens tout juste de descendre. Je me contente toutefois d'œuvrer pour mon estomac affamé et me dirige vers le tavernier au comptoir.
— He, ho! Vous parlez anglais ?
Je lui signe en portant une main à mes lèvres que je souhaite manger, mais celui-ci se contente de me lancer un regard noir.
— On sers pas les rosbifs ici, tu ferais mieux de dégager d’là petit avant que je ne décide de te botter l’cul ou que quelqu’un d’autre s’en charge à ma place.
Tout ce que j’ai compris, c’est « roast beef ». Je retiens un soupir d’agacement. Je sens bien à l’hostilité de son ton qu’il n’a pas l’intention de me servir. Alors, je sors de ma poche les quelques pièces qu’il me reste, largement assez pour un repas et les dépose devant lui. J’espère que malgré sa réticence à mon égard, l’argent saura venir à bout de ce forcené.
— Écoutez, je ne veux pas d’ennui, je veux juste manger… Tenez.
Le tavernier crache aussitôt sur mes pièces et se redresse derrière le comptoir.
— J’ai dit, DÉGAGE !!
D’un coup, le silence s’installe et avec, je sens tous les regards se poser dans mon dos. Sensation fort peu plaisante, particulièrement lorsque l’on cherche à faire profil bas. Je jette un œil par-dessus mon épaule et balaie des yeux la pièce, découvrant là qu’il n’y a que des visages peu amicaux, sauf un. C’est alors que je reconnais parmi eux, le capitaine du navire de ce matin. Je reprends quelque peu honteusement mes pièces. Il n'y a plus qu’à m’essayer ailleurs. Je ne peux m’empêcher de lâcher un juron pour moi-même cependant, et le tavernier semble particulièrement sensible au mot frogs qui s'est échappé de ma bouche puisqu'il y réagit au quart de tour. Je sens sitôt mes pieds décoller du plancher, soulevée par sa poigne qui m'agrippe le col de ma chemise. Il me tire si près de lui que je peux sentir son souffle pestilentiel me caresser désagréablement le visage.
— Qu’est-ce que tu viens de dire ?!
Son visage tordu de colère me défie, l'œil acerbe. J’ai la folle envie de lui offrir ma meilleure imitation de coassement comme le font si bien ces anglais pour se moquer des français, mais pour une fois je reste à ma place et me contente de soutenir son regard jusqu’à ce qu’il concède de lui même à me lâcher.



Le dernier acte est sanglant


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Sam 2 Juil - 11:43
Louis Oregen
J'ai 35 ans et je vis sur le Grand Coureur. Je suis né à Grois, France. Dans la vie, je suis maitre d'équipage, je vis pas trop mal. Sinon, grâce à ma sympathie pour mes hommes, je suis dans le doute et je le vis plutôt mal.


Le gamin s’en retourna pour faire face au bon maitre d’équipage. C’est à ce moment qu’il put le jauger vaguement. Il n’avait pas le visage brut, rougeot et ciselé qu’on voyait souvent sur la face de ces irlandais qu’il avait déjà eu l’occasion de rencontrer en beuverie sur les îles du Nouveau Monde. A croiser son regard, on le sentait contrarié et certainement plus qu’un peu à côté de ses bottes. Si le petit gars lui avait répondu le moindre mot sur le navire, il l’aurait certainement invité à prendre une chope pour raconter ses soucis. Malheureusement, le rouquin craintif s’en était allé comme il était venu, sans un mot. Il ne put s’empêcher de se retourner pour le regarder partir. Peut-être qu’il lui rappelait lui à son âge, quand il avait atterri pour la première fois dans un port, une fois seul au monde. Le temps d’un dernier échange de regard, il esquissa un geste pour lui dire de revenir, mais il s’était déjà engouffré dans une ruelle. Le marin se gratta la tête, surpris d’avoir si mauvais contact désormais.

L’ambiance au relais de poste était à l’effervescence. Les postillons couraient en tous sens, chargeant leur sacoche de cuir des nombreuses lettres et petits objets qu’ils avaient à délivrer à leurs relais respectifs. Les chevaux étaient certainement sellés en ce moment même pour pouvoir permettre au départ de se faire avant le début de la soirée. On entendit un sacré hurlement du maitre de relais sur l’un des délivreurs avant qu’il ne commence à violemment le bâtonner. Louis se fit la réflexion qu’après tout, les chefs prenaient ce genre de position quel que soit le milieu dans lequel ils travaillaient. Encore une fois, cela le fit se questionner sur le fait que les hommes soient plus durs à l’œuvre lorsqu’on les secouait de la sorte. La bastonnade continua pendant de longues dizaines de secondes, ce qui devait paraitre comme l’éternité de l’enfer pour le pauvre petiot.

Louis ne s’en rendit pas compte sur l’instant mais c’était peut-être ici que le balancement commença. Quand on avait l’habitude comme lui, qu’on marchait presque avec une démarche chaloupée sur la terre ferme et qu’on se sentait chez soi sur les vagues, on apprenait à composer avec la gite, la mer et le vent. Il ne se sentait jamais aussi bien sur le continent que sur une île et tout cela bien moins encore que sur le splendide bâtiment qui l’accueillait depuis plusieurs années déjà. Et passé un certain point, il fallait être clair sur le fait que « l’esprit de la mer » s’infiltrait dans les marins et leur offrait des idées de liberté et des envies de choisir alors même que depuis leur enfance, on leur avait appris chaque fois l’obéissance et le sacrifice sans rechigner à la tâche. Oui, c’était certainement à cet instant précis, celui auquel il vit le sang jaillir du visage du pauvre gaillard, que son esprit vacilla quant à la discipline. Il fut d’ailleurs le premier surpris de se retrouver à tourner les talons sur le bâton qui s'abattait une fois de plus. Il ne sut exprimer sur l'instant la raison de son dégoût pour cette situation, malheureusement si commune dans la crasse misère qui était quotidienne pour les petites gens. Il s'imagina plusieurs fois attraper le bâton et battre à son tour l'agressif maitre mais cela ne le satisfaisait pas entièrement, laissant un quelque chose d'excédé en lui.

Le maitre du relais se reprit finalement et fit signe à deux de ses hommes d’emmener la victime de sa rage et reprit son faux air courtois. Malheureusement pour lui, ses excès avaient révélé la nature animale qui sommeillait sous son voile de conventions sociales aux yeux l'officier. Il soupira en voyant le petit, inerte, trainé dans la boue alentour jusqu'à une proche bâtisse, certainement celle d'un médecin. La simple pensée qu'il meure sous la punition pour ses errements lui tordit l'estomac. Etait-il réellement nécessaire d'aller si loin pour imposer la même discipline à tous ?

----------------------

La taverne de la porte était un lieu fort animé toute l’année. Chaque fois que les marins revenaient de croisière, c’était ici ou ailleurs qu’ils venaient dilapider leur paie dans les plus brefs délais. On y trouvait tous les attributs des lieux de perdition classique : l’alcool, la bonne chair, la musique et même quelques catins. Louis avait à peine eu le temps d’attaquer sa chopine que l’ambiance tournait au vinaigre. Il parlait justement à ses gars du gamin qui lorgnait sur le rafiot que l’un d’entre lui fit remarquer que c’était peut-être celui qui se faisait jeter par Edouard, le patron des lieux. L’idiot avait tant et tant été insulté sur l’origine anglaise de son nom durant l’époque de la guerre qu’il ne pouvait voir en peinture quiconque venait de ces îles voisines. L’excès de zèle dont il faisait preuve concernant la question visait à le placer au-delà de tout soupçon de connivence avec l’ennemi. Aviné, qui plus était, il entrait dans une colère noire par bien trop rapidement. Encore une fois, les injustices piquaient au vif Louis mais cette fois-ci, ce gamin, il ne voulut pas le laisser à son triste sort. Il se leva plutôt que de simplement laisser couler, sous les regards interloqués de son équipage.

- Hey Edouard, le gamin est avec moi ! fit Louis, faignant un sourire à l’expression colérique de son interlocuteur. Si, si, je t’assure ! C’est notre nouvel… interprète pour le capitaine de Cassigny. Il doit lui apprendre les langues britanniques et nous éviter de nous faire enfler dans les colonies, justifia-t-il, le mensonge venant à mesure.

- Mais Louis, c’t’un foutu anglais c’gamin ! Y peut pas rester ici, y nous insulte de froques, argumenta-t-il, un peu tremblant de rage encore.

- Mais non, il adore les français, regarde-le ! ajouta-t-il, feignant l’indignation et attendant que le tavernier tourne la tête vers le gamin pour lui montrer d’hocher de la tête.

Le regard qu'il échangea avec celui qu'il voulut aider lui semblât plein de sens. Il ne s'était jamais vraiment opposé à ce point là et s'était longtemps soumis aux ordres mais ce petit gars et ses quelques piécettes de misère se superposait parfaitement avec le petiot qu'il était, quelques temps avant la guerre, alors qu'il montait pour la première fois en voilier.


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Ven 15 Juil - 21:48
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J'ai 23 ans et je vis là où le vent me mène. Je suis née à Dún Laoghaire, Irlande. Dans la vie, je suis travesti et matelot, je vis au jour le jour. Sinon, grâce à ma hardiesse, je suis en quête de liberté et je le vis plutôt bien.

Meg ne sait pas grand chose de son père, sinon qu’il était un ennemi de l’Angleterre. Quant à sa mère dont le fils ainé est tout récemment décédé du typhus, elle ne lui inspire que le mépris de voir en son visage et ses manières, les traits de son progéniteur répudié. Aux yeux de tous, elle n'a plus grande valeur, violé par un équipage voguant sous l'étendard de la reine. Elle a oublié leurs visages, mais pas celui de leur capitaine. Sans attaches, la jeune femme préfère prendre le large loin des côtes Irlandaises à bord d’un navire marchand. Travesti en son défunt frère, Sean Malloy, elle rêve d’une autre vie. Meg ne le sait pas encore, mais la rébellion, elle l’a dans le sang...



Chanson thème (Meg Malloy)

Crédit image : Jeleynai

L'auberge de ma mère était un de ces lieux de transit aux abords du port de Dún Laoghaire, où voyageurs en tout genre venait y fouler nos planches vernies de dégueulis. Surtout des gens de chez nous revenant de la pêche, ou bien quelques fois des marchands écossais. Je passais le plus clair de mon temps à scalper la mousse de leurs bières et, dans mon ennui infini, écoutais d’une oreille distraite leurs mésaventures ou leur bonne fortune. En fin de journée, c'était un véritable tourbillon d'odeurs corporelles et de mauvaises haleines qui régnait. Force d'y travailler, je crois que j’en ai perdu l’odorat. Les habitués étaient toujours les mêmes. Il y avait Angus, ce bon brave type qui venait noyer sa peine dès lors qu’il savait sa femme dans le lit du huissier, Paddy venait écumer un peu de sa rage contre la couronne en jurant outrageusement dans la broue de sa bière ou encore mon oncle Calvagh qui dans ses moments d’ivresses me confondait avec sa putain ou tante Berth. Les Anglais ne venaient déjà plus aussi souvent qu’avant avec la réforme qui a permis de lever leur législation hypothétique et fallacieuse sur nos terres ainsi que l’asservissement de notre peuple à l’Angleterre. Mais avant cela, je me rappelle qu’au moindre anglais qui débarquait en ce lieu sacré de beuverie, c’était l'esclandre. Le Griffin’s fang demeurait avant tout un concentré d’Irlandais fiers et réfractaires, avec ou sans la nouvelle constitution. Un lieu, disons fort peu fréquentable et hospitalier aux Anglais dont les frais de passage s'élevaient à bien plus que quelques piécettes. Sans mon intervention, le lieu se transformait rapidement en écorcherie spécialisée rosbifs. Je n’aurai jamais pensé qu’un jour, le rosbif, ce serait moi.

*

J’ai les pieds qui frôlent le sol, et j’exagère à peine. Le bout de mes orteils en picote, force de soutenir à eux seuls tout le poids de mon corps. C’est pour dire celle de la grosse brute face à moi qui me tire vers lui, enflée de rage de l’autre côté du bar. Mes mains posées contre le comptoir, je me bats contre sa traction en me braquant net de tout mon corps pour ne pas passer de l’autre côté. C’est d’ailleurs grâce à cette séparation me faisant obstacle qu’il peut s’estimer chanceux de ne pas s’être retrouvé de suite avec mon genou enfoncé dans son entre-jambes. La voix d’un homme qui s’élève dans mon dos fait glisser les yeux de mon tortionnaire au regard assassin vers l'intéressé, mais n’en diminue pas moins la contraction des muscles de son bras. On dirait que les veines vont lui éclater en pleine figure. Pourtant, quelques mots échangés avec le tavernier éméché suffisent à lui faire desserrer sa poigne agrippée à mon col sans toutefois me débarrasser de ses sales pattes velues jusqu’aux doigts. Je jette un coup d'œil furtif dans la direction de l’arrivant, reconnaissant là, le marin de ce matin. À l’enthousiasme de son ton et la sympathie qu’il dégage dans sa façon de parler, j’en déduis que les deux hommes se connaissent. Et le blondinet semble avoir les mots qu’il faut pour que le mastodonte face à moi daigne me considérer autrement qu’un avorton, puisque son visage aux airs soudain dubitatifs en perd tranquillement de sa rougeur. Il reporte son attention sur ma personne et semble dans l’attente de quelque chose… Ses petits yeux enfoncés dans leurs orbites me scrutent avec la plus grande attention. Pour le coup, c’est à mon tour de paraître perplexe, car le silence qui s’installe soudain me fait comprendre qu’on attend quelque chose de moi. Je glisse alors un œil interrogateur vers le blond qui m’enjoint de la gestuelle de sa main à hocher de la tête au bonhomme. Ce que je m'empresse de faire hâtivement, espérant que le marin ne me fasse pas marcher. Pourtant, le tavernier me repose dès lors et ramasse du revers de son bras touffu toutes mes pièces en maugréant quelques mots inaudibles sur mon compte. Enfin, je suppose. J’ignore ce qu’a pu lui dire le matelot, mais ça a eu son effet. Mes yeux suivent le “sympathique” tavernier et propriétaire des lieux s'en aller en cuisine pour gueuler à ses cuistots ce qui va être - j’imagine - la concoction que peuvent me payer mes quelques pièces, assaisonnée au crachat de franchouillard. Sans trop oser me retourner tout à fait vers mon défenseur, je tente un mot que j’ai souvent entendu circuler au marché aujourd’hui, à l’intention du matelot. En sortant ma voix la plus rauque et d'un français approximatif c’est un franc « mewci » que je lui lance et qui ne doit pas valoir grand chose étant donné que je ne suis même pas assurée de ce que signifie tout à fait ces deux syllabes. Je suis toutefois assez certaine que c’est de courtoisie de le dire, d'après ce que j’ai pu observer des Français. Aussi, j’ignore pourquoi, mais je ressens le besoin de compenser pour ma piètre prestation de ce matin dans l’idée que peut-être, je paraîtrai moins louche que je ne le fais déjà.
— J'vous reconnais. C’est vous l’capitaine de la flotte de ce matin, n'est-ce pas ? Je… » Je me suspends soudain à ma phrase, réalisant que me faire comprendre risque d’être une autre paire de manche. Et puis, vaut mieux ne pas m’exprimer en anglais ici. Leçon apprise. Il ne m’a pas échappé non plus les regards méfiants qui se sont posés sur moi dès que j’ai ouvert la bouche. Je me ferais passer pour muette dorénavant, tiens. Ça m'évitera de me briser la voix chaque fois. Je me contente donc d’hausser simplement les épaules quelque peu ennuyée et de m'appuyer sur le comptoir attendant que mon nouvel ami le tavernier me serve. Ensuite, je déguerpis d’ici.

— C’ton jour de chance… V'là ta gamelle l’rosbif, après ça, tu me feras l’plaisir de dégager d'là ! »
Le tavernier revenu, fracasse presque le bol que j'ai plutôt chèrement payé devant moi, éclaboussant le comptoir et ma chemise de l'étrange bouillie grisâtre qui le remplissait. Quelques rires gras non loin s'élèvent du brouhaha. Je me contente de lui tirer mon tricorne avec ménagement et fixer la mixture pâteuse qui s'offre à moi accompagné d'un quignon de pain rassis. Très peu appétissant ce truc, mais aux cris de mon estomac qui semble vouloir me convaincre du contraire, je ne peux m'empêcher d'y plonger allègrement ma cuillère.



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Dim 17 Juil - 20:36
Louis Oregen
J'ai 35 ans et je vis sur le Grand Coureur. Je suis né à Grois, France. Dans la vie, je suis maitre d'équipage, je vis pas trop mal. Sinon, grâce à ma sympathie pour mes hommes, je suis dans le doute et je le vis plutôt mal.


Louis eut plaisir à voir qu’il avait pu un peu améliorer les choses. Il n’avait pas exactement eu le temps d’échanger sur quoi que ce soit avec le gamin lorsqu’ils étaient au port. Il s’excusa donc avec empressement auprès de ses camarades pour aller rejoindre le bar, sa choppe à la main. On avait refilé une affreuse soupe de poisson au gamin qui semblait un peu passée. Il retint un léger sourire, se sachant observé de près maintenant qu’il était de retour avec l’anglais. Le fait que le petiot lui dise quelques mots encore une fois dans son langage malaimé attisait une curiosité pesante et inquisitrice, dans le demi-silence ambiant. Il afficha malgré tout un air détendu et détaché de la situation, se concentrant plutôt sur essayer de comprendre ce qu’il pouvait bien tenter de lui dire.

- Ouaip ! On s’avoir vus sur port… ce matin, fit-il dans un anglais très approximatif et bricolé à partir de quelques mots glanés de ci, de là. J’m’appelle Louis et toi ? Tu veux travail dans Grand Coureur ? lui proposa-t-il alors de but en blanc.

A son air, on comprenait qu’il était très sérieux en lui disant ça. Il ne voulait pas que la discussion s’éternise pour éviter de perdre la confiance de ses hommes ou même qu’ils comprennent son contenu précis. Il ne voulait pas, pour maintenir la confiance de ses hommes, qu’on comprenne qu’il ait menti, semble-t-il sans raison. Il savait que ceux qui l’entendraient parler anglais iraient le répéter à qui voudrait bien l’entendre et que des rumeurs surgiraient inévitablement. A vrai dire, le poste qu’il lui proposait rognait en partie ses tâches au sein de l’équipage, car personne n’avait réellement la capacité de s’exprimer correctement en anglais. Il savait que c’était quelque chose qu’il pourrait faire aisément accepter du capitaine avec les bons arguments de gains potentiels pour le négoce. De plus, il se rendait bien compte de ce qui attendait un gamin comme celui-ci s’il était laissé à son sort dans Brest. Au mieux, il trimerait à bord d’un navire de malheur en tant que mousse en apprenant tant bien que mal le français et la navigation sous les brimades en s’attirant potentiellement les foudres d’autres comparses d’esprit d’Edouard. Au pire, il ne trouverait pas de charge, se tournerait vers la criminalité et finirait la corde au cou d’ici à quelques années.

- Je peux donner… 40 livres tournois, fit-il d’abord en français à mi-voix, avant de détailler avec ses doigts pour indiquer la somme avec ses doigts, le plus discrètement possible. Pas beaucoup mais bon pour vivre, pas mieux… ailleurs.

En réalité, il essayait de vendre la chose sous un angle avantageux pour le rouquin mais c’était plus lui qui en avait besoin maintenant qu’il avait donné sa parole sur quelque chose. Il lui arrivait rarement de prendre ce genre de risques et espérait que cela soit payant malgré tout… C’était après coup, au moment de vérité, que les mensonges étaient les plus pesants pour celui qui les prononçait, finalement. Rien qu’à penser au bordel qu’allait représenter le fait de l’enrôler à la va-vite dans l’équipage lui donnait le tournis… Pour essayer de l’encourager à répondre favorablement, il prit l’initiative de se tourner vers le tavernier.

- Hey Edouard ! Fais donc pas cette tête-là, le gamin disait justement qu’il aimait ta soupe ! Tiens, j’offre une tournée à toute la taverne pour fêter l’arrivée de notre nouvel ami et pour faire table rase du passé, ajouta-t-il un peu nerveusement, le stress se trahissant par quelques signes passagers et discrets.

Heureusement pour lui, le brouhaha et les cris de joie qui retentissaient à l’annonce de cette générosité subite détourna complètement l’attention des témoins. Un semblant d’ambiance conviviale était en train de refaire son arrivée, chacun reprenant des discussions plus animées qui ne permettaient plus d’entendre clairement ce qui se discutait entre les deux au bar, non pas que cela soit désormais digne d’intérêt. Même ce bon vieil Edouard se laissa dérider un peu à l’arrivée des piécettes dorées sur le comptoir et servit vin et bière en quantités. Dans une expression contrite, il en garda même de quoi servir à l’illustre inconnu, échangeant un hochement de tête entendu avec Louis. Il fallait avouer que la soirée avait amplement été gagnée pour lui suite à ces événements. Louis soupira un peu en voyant à quel point ses poches étaient désormais vides mais quelque part, il avait le cœur plus léger à l’idée que les choses se soient déroulées ainsi.



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Jeu 18 Aoû - 3:52
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Meg ne sait pas grand chose de son père, sinon qu’il était un ennemi de l’Angleterre. Quant à sa mère dont le fils ainé est tout récemment décédé du typhus, elle ne lui inspire que le mépris de voir en son visage et ses manières, les traits de son progéniteur répudié. Aux yeux de tous, elle n'a plus grande valeur, violé par un équipage voguant sous l'étendard de la reine. Elle a oublié leurs visages, mais pas celui de leur capitaine. Sans attaches, la jeune femme préfère prendre le large loin des côtes Irlandaises à bord d’un navire marchand. Travesti en son défunt frère, Sean Malloy, elle rêve d’une autre vie. Meg ne le sait pas encore, mais la rébellion, elle l’a dans le sang...



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Le marin s’en est allé chercher sa chope de bière à une table voisine où j’aperçois ses semblables me dévisager savamment. Puis il revient vers moi, le regard assuré. Je renonce toutefois à lui faire la causette m’attendant d’avance à ce que la langue nous fasse barrière. Pourtant, je sens à son regard insistant qu’il ne va pas me lâcher de sitôt. Je l’épi du coin de l’œil dans l’attente de voir ce qu’il peut bien me vouloir et m’efforçant de faire le moins de bruit de mastication possible. Mon arrivée est clairement responsable de l’ambiance moribonde qui règne, on peut jusqu’à m’entendre déglutir chaque bouchée tant le silence en est pesant. C’est alors que le blond me vasouille quelques mots qui soudain, je réalise, font sens dans ma tête. Est-ce qu’il vient tout juste de me parler dans ma langue ? Je tourne tranquillement la tête vers lui, abasourdi par son parler - il faut se l’avouer un peu bancale - mais il n’imagine pas à quel point me faire comprendre me soulage. En revanche, le contenu du message prend un certain temps avant de se frayer un chemin jusqu’à ma cervelle, mais lorsqu’il le fait, j’en saute presque de ma chaise. Sans détour, le blond me propose un travail. Je peux aussi enfin mettre un nom sur ce visage, le bonhomme s’appelle Louis. Au sérieux de son visage, sa proposition semble sincère, mais je ne peux m’empêcher de craindre l’entourloupe. J’abaisse furtivement mon tricorne sous mes yeux, je ne voudrais pas qu’il voie sous les coutures de mon accoutrement. Il m’indique ensuite de ses doigts un montant qui doit correspondre à la paie qu’il me propose. Je me demande bien ce que doit valoir cette somme, quoique que ce soit toujours mieux que de se balader les poches vides comme semble vouloir m’en convaincre Louis. Il me paraît plutôt honnête comme type, mais l’est-il vraiment ? De plus, j’ignore la nature de la besogne. Les paroles de tante Berth me remontent à l’esprit : « méfie-toi des gens gentils, ce sont les pires. » qu’elle disait. En effet, ce sont les pires. Pensive, j’observe distraitement la cicatrice qui me traverse l’arcade sourcilière sur le reflet d’une bouteille.
— Quel genre de boulot ?
À peine ai-je posé la question que Louis s’écrit par-dessus le comptoir ce qui me semble être un véritable charabia pour mes oreilles et qui me fait tressaillir sur mon siège. Ses paroles semblent faire leur effet, car aussitôt la taverne s’enflamme. Je le vois à la suite déposer quelques pièces sur le comptoir sur lesquelles se rue l’horrible tavernier qui daigne même me servir un peu de sa bière ainsi que de son sourire pourrit. La bière coule à flot et au déluge qui se déverse sans réserve dans les chopes de chacun, les gens semblent soudainement fort s’accommoder de ma présence, mieux encore, s’en passent outrancièrement. Des catins font même leur arrivée et l’une d’entre elles d’un âge plus avancé que les autres, plantureuse à souhait, me tend une œillade que je feins ne pas avoir remarquée. Je tends plutôt un regard vers Louis, à la fois surprise et admirative de la façon dont il a su retourner l’ambiance avec quelques pièces balancées sans peine et misère apparente. La convivialité qui s’installe et qui me rappelle chez moi parvient même à m’arracher un sourire. Toutefois, il ne le fait pas avec allégresse. Il ne m’échappe pas l’agacement qui passe furtivement sur son visage alors qu’il se départit de ses dernières piécettes au tavernier. Je sais reconnaître un homme sans-le-sous pour en avoir servi plus d’un. J’en déduis qu’il vient de sacrifier une belle somme, et de ce fait qu’il n’est peut-être pas celui que je croyais. Je lui lève mon verre, le remerciant pour cette générosité subite, et alors que je m’apprête à lui céder mon nom je suis interrompu par un bras qui se glisse devant moi et me barre le cou avec force.
— Ch’est bien la première fois qu’on t’voit ichi, mon minet ! T’es plutôt mignon ! T’a d’l’a chance, ch’fais un bon prix pour les premières fois à nos visiteurs d’ailleurs… Ou les premières tout court. Cha t’feras p’t’être sortir les poils du menton. » que la voix me dit en passant ses doigts sur ma mâchoire. « Qu’en dis-tu ? 
La femme qui s’est glissée dans mon dos, je la reconnais sans la connaître. À sa poitrine débordante dont je sens les chairs en feu se presser dans mon dos, et qui possède la même capacité mortifère et insoupçonnée de vous faire suffoquer que celle de ma tante. La difficulté de respirer qui se mêle à l’embarras de la scène me monte rapidement à la tête. Je sens à la chaleur qui se dégage de mes joues que la rougeur à cet instant doit s'être emparé de mon visage.
Houmous
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HOUMOUS
Houmous
Dim 21 Aoû - 10:41
Louis Oregen
J'ai 35 ans et je vis sur le Grand Coureur. Je suis né à Grois, France. Dans la vie, je suis maitre d'équipage, je vis pas trop mal. Sinon, grâce à ma sympathie pour mes hommes, je suis dans le doute et je le vis plutôt mal.


A la bonne ambiance et la bonne compagnie qui revenaient, Louis se relaxa un peu. Les œillades suspicieuses avaient été redirigées sur le houblon et la tension avait à nouveau cédé sa place à la fête. Les marins de la galère que constituait le Grand Coureur avaient grandement besoin d’un peu de détente et il se refusait à amener un scandale qui créerait de la dissension à bord. Cela dit, il était content de voir que le petiot, dont il ne savait toujours pas le nom au demeurant, se déraidissait de son siège de bar. Il lui mit une tape sur le dos, amicalement, avant de commence à reprendre son baragouinage.

- Toi, expliqua-t-il en le pointant du doigt, dire ce que gars dire… dans français ? tenta-t-il maladroitement de détailler en scrutant ses réactions, en s’appuyant d’une sorte de langage des signes improvisé. Ça et aider pour les voiles. Ok pour toi ?

Il avait de quoi donner de la tête ici et ailleurs et au final, avait le sentiment que sa discussion d’affaire se dissolvait dans le brouhaha ambiant. Les cris et les rires s’étaient à nouveau emparés des lieux et il fallait l’avouer, c’était à la fois un plaisir mais aussi une malédiction. Il devenait de plus en plus difficile de s’entendre sans beugler à pleins poumons. L’ennui gagnait Louis, de manière visible, quand la Ginette, une vieille rombière tentait de prendre dans ses filets le gosse sous ses yeux. Il fallait la comprendre après tout, la Ginette : du haut de ses quelques décennies, elle avait de plus en plus de mal dans son tapin. Des gamines aux formes plus tenues la remplaçait sans mal et elle s’était mise à être de plus en plus entreprenante en réponse. Il avait de la peine pour cette pauvre diable mais cela ne changeait rien au fait que sa patience touchait à ses limites. Il souhaitait la toper enfin pour pouvoir aller discuter avec le capitaine le lendemain, à l’occasion.

- Bon, Ginette, fous-lui la paix ! commença-t-il à râler dans une voix militaire et imposante dans laquelle on reconnaissait ses fonctions habituelles. Tu vois bien qu’c’est un anglois qu’y a pas un rond alors vas donc plutôt voir un de mes gars qu’il passe du bon temps ! continua-t-il à s’énerver un peu.

Il la fixa, l’ayant vu sursauter du fait qu’il réagisse si franchement à sa présence, jusqu’à temps qu’elle concède à s’en aller. D’autres trainées l’écartèrent un peu, cherchant à voir si Louis l’avait avoinée, non pas qu’il soit connu pour ce genre de choses. Alors, il remarqua quelques regards qui s’étaient à nouveau portés sur lui. Avec un léger sourire, il leva son verre, puisqu’il n’y avait rien de mieux à faire. Il semblât que tout le monde s’en contente parce que les œuvres continuèrent comme si de rien n’était. Alors, il se tourna vers son jeune compagnon à nouveau, remarquant avec amusement qu’il avait été surpris aussi. Probablement qu’il n’avait pas l’habitude de la vie sur la mer s’il était surpris d’entendre sa voix qui porte. Sans inquiétude, il savait que les bonnes gens d’Albion avait la mer dans le sang et qu’il se ferait très bien à cette nouvelle vie s’il venait à accepter. D’ailleurs, cela l’arrangerait bien s’il venait à accepter de remplacer Plouvennec. Il ne lui resterait plus qu’à trouver quelqu’un d’autre pour travailler le bois à la place de Tourdiot, ce qui s’avérerait peut-être plus compliqué…

- Ton nom, c’est quoi ? ajouta-t-il finalement, moins patient, en lui tendant la main pour la serrer et le jauger à sa poigne.

En arrière-plan, il entendait ses gars chanter d’ivresse en breton sur les marins de Groix et leurs malheurs dans l'œil de la tempête. Ils étaient dans ce lieu de perdition depuis quelques heures déjà et on sentait qu’ils y laisseraient quelques plumes avant d’attérir au plumard... ou en geôle. Il n’y avait pas encore eu de bagarre mais cela n’allait pas tarder à arriver, jugea-t-il. Il les connaissait tous sur le bout des doigts ceux qui étaient avec lui en mer. Aussi, il savait qu’à un moment ou un autre, ils allaient se fritter à nouveau en reparlant de la guerre ou de l'état du commerce avec les colonies. Il savait que cela les aider à souffler au port mais il voulait tout de même pouvoir rediriger son attention dessus dès que possible pour les séparer s’ils s’y mettaient trop franchement. C’est pour cela qu’il avait pressé un peu le pas avec le rouquin.



Le vent se lève et le monde nous appartient 1653241536-6Le vent se lève et le monde nous appartient 1653241536-1Le vent se lève et le monde nous appartient 1653241207-8
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Lun 22 Aoû - 5:03
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Meg Seegar
alias
Sean Malloy

J'ai 23 ans et je vis là où le vent me mène. Je suis née à Dún Laoghaire, Irlande. Dans la vie, je suis travesti et matelot, je vis au jour le jour. Sinon, grâce à ma hardiesse, je suis en quête de liberté et je le vis plutôt bien.

Meg ne sait pas grand chose de son père, sinon qu’il était un ennemi de l’Angleterre. Quant à sa mère dont le fils ainé est tout récemment décédé du typhus, elle ne lui inspire que le mépris de voir en son visage et ses manières, les traits de son progéniteur répudié. Aux yeux de tous, elle n'a plus grande valeur, violé par un équipage voguant sous l'étendard de la reine. Elle a oublié leurs visages, mais pas celui de leur capitaine. Sans attaches, la jeune femme préfère prendre le large loin des côtes Irlandaises à bord d’un navire marchand. Travesti en son défunt frère, Sean Malloy, elle rêve d’une autre vie. Meg ne le sait pas encore, mais la rébellion, elle l’a dans le sang...



Chanson thème (Meg Malloy)

Crédit image : Jeleynai

Je n’avais pas saisi ce mot ni son sens lorsque Louis avait glissé celui-ci dans son offre : « Gant Coueur ». Pas plus que la première tâche de la besogne pour laquelle il cherche à m’enrôler depuis tout à l’heure, quoique je crois cela avoir un rapport avec mon anglais. Le sien me râpe littéralement les oreilles, mais par respect pour le blond à qui je dois bien mon repas et toutes mes dents, je me retiens de le lui faire savoir retenant de grimacer à chacune des ses prononciations mal articulées. Après tout, il s’efforce de communiquer pour m’offrir de quoi vivre. Ce n’est que lorsque le mot « voile » passe sur ses lèvres que je réalise l’ampleur de sa proposition et me fait comprendre ce dont il s’agit. Le « Gant Coueur » est un navire. Je me tourne entièrement vers lui pour mieux saisir l’expression de son visage et la sincérité de ses dires. J’ai de la difficulté à dissimuler l’exaltation sur le mien à l’idée de fouler les planches du navire de ce matin. Un tel bâtiment doit bien demander quelques personnes d’expérience. Quelle serait ma place ?
— Tu veux… de moi à bord ? Pour vrai ? » Je m’écris pour parvenir à me faire entendre à travers tout ce boucan.
Ce n’est pas possible d’être aussi cocu. Je viens tout juste de débarquer en France que l’on me propose d’être mousse, sans expérience aucune, et malgré ma gueule d’Anglo. Tout ceci me semble trop… facile. La gentillesse gratuite n’existe pas. C’est plutôt un moyen commun de dissimuler ses intentions et servir ses fins. Je l’ai appris assez tôt. Cependant, le matelot ne me donne pas cette impression. J’en déduis qu’il est soit idiot, soit foncièrement bon. L’un ou l’autre, ça finira par lui causer du tort. Moi la première. Je ne vais certainement pas me gêner d’accepter cette opportunité tombée du ciel. C’est alors qu’un souvenir fort déplaisant que je croyais enfoui dans les anales de ma mémoire m’arrache à cet instant de réflexion et de joie momentanée. Il m’avait lui aussi proposé de monter à bord avec cet air magnanime. Un haut-le-cœur accompagné d’un malaise irrépressible me monte soudain à la gorge et me tord les tripes. Les choses se déroulent exactement de la même manière qu’il y a trois ans. Non. À un détail près. J’étais alors une fille. Louis croit voir devant lui un gamin tout juste sorti de l’oeuf et complètement paumé. Et si c’était… justement ses préférences ? Je me fige sur ma chaise, puis finis par chasser ces images de ma tête pour plutôt profiter de l'instant pour le sonder. Il n’y a rien dans ses yeux qui m’indiquent qu’il joue un double jeu et cette fois-ci, je suis armé. Je peux sentir la lame de mon coutelas contre ma peau. Les hurlements et cris de rires derrière nous me ramènent à la réalité. Je souffle tranquillement le temps de mettre un peu d’ordre dans mes pensées et m’arme plutôt d’un sourire conquérant pour le convaincre de l’assurance qui doit me faire défaut. Avec Sean, je ne risque rien. C’est alors que la putain de tout à l’heure en profite pour faire son apparition et se glisser dans mon dos, arrachant un jappement furieux à Louis qui nous fait toutes deux tressauter sur place. Elle me libère de son emprise et repart aussi vite qu’elle est venue avec une moue contrariée. Quant à moi, je peux souffler enfin.
— Ça marche pour moi.
Je glisse ma main dans la sienne que je secoue vigoureusement avec une force qui est plus que nécessaire. « J’m'appelle Sean. »
Quelques secondes passent et je réalise tardivement que je suis toujours en train de lui secouer la main de haut en bas. Je le libère sitôt de ma poigne avec maladresse et d'un mouvement de recul, quelque peu gênée de si mal m’y prendre.  



Le dernier acte est sanglant


quelque belle que soit la comédie en tout le reste: on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais.
- B.P.

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