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LE TEMPS D'UN RP

Le vent nous portera...

Dreamcatcher
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Dreamcatcher
Dim 8 Oct - 23:28
Le vent nous portera... Images17
Elizabeth Van Sechtelen
J'ai 28 ans et je vis à Helsinki, en Finlande. Dans la vie, je suis comédienne de théâtre et je m'en sors avec un sentiment d'exil. Et puis...Il y a LUI qui m'empêche de me suffire. Je le vis douloureusement.

Le comte et la comtesse Van Sechtelen s'aimaient comme l'on pouvait s'aimer dans le milieu aristocratique. Quelques années plus tôt, leurs familles respectives avaient œuvré avec soin pour que leurs progénitures se rencontrent, s'apprécient. De rallyes en rallyes, des affinités se liaient, les jeunes tricotaient et fricotaient ensemble. Ces deux-là finirent par se marier, encouragés par leurs proches très au fait des avantages de porter un nom prestigieux.
Mais Madame pécha par excès. Grisée, lassée et délaissée depuis trop longtemps par son époux, elle succomba à ce bel amant d'un soir. Renversée sur le bureau d'ébène, elle se laissa aller comme jamais, noyée au creux d'un ventre en feu et assoiffé.

1994

Au sourire de la Lune, elle naquit presque sans bruit. Ne pleura pas. Ses grands yeux ouverts s'arrêtèrent quelques instants sur l'aube de cette grande vie qu'on lui offrait. Il paraît même qu'elle avait souri...
Elizabeth, fruit d'une adultère éphémère. Si jeune et déjà, elle voyait les anges.
Le secret de son origine fut férocement gardé. On l'éleva comme il se doit, telle une descendance de rois. Par chance ou par destin, l'enfant maudit se révéla excellente élève, douée pour les études. Elle aurait pu être promise à une brillante carrière mais sa passion brisa les aspirations familiales. Comédienne ! Ce n'était pas un métier, encore moins un avenir, tout juste un passe temps d'original et ce, chez les autres ! Pas dans le milieu ! Alors, d'une manière subtilement hypocrite et joliment perfide, on la bannit définitivement du clan familial. On ne l'aima pas l'enfant de "l'accident". Le manteau infâme de la Bienséance la revêtait comme une lèpre. Alors, au fil des années, elle développa une sensibilité à fleur de peau. Elle devint différente.HPE diagnostiqua le rapport du spécialiste.

Un.
Deux.
Trois.

Le bruissement du rideau qui se lève.
Arrêt sur scène.
Les secondes ralentissent.

Elle ne voit plus ici. Ses ailes se déploient délicatement
L'audace d'une extravagance
Le chant d'un songe
L'insolence de l'irréalité

Le théâtre. Le RÊVE.

Et puis cette rencontre. Un chauffeur de maître. Un être à part. Ob. Celui qui la comprend. Celui qui résonne. Celui qui rêve avec elle. Les clartés de Là-bas se mirent à resplendir les éclaboussures d'un sublime amour. Un feu douillet valsait tout autour, les écailles de Lune voletaient. Projetée dans une dimension parallèle. Aveugle et sourde à la réalité. S'imprégner de l'éternité. Rêver à deux, à l'Absolu, à l'Infini. Enfin! L'exil n'est plus! Mais...Il s'en est allé loin, soudain inaccessible tel un songe éthéré n'ayant jamais existé.

Eli avait deux cœurs : l'un ici, l'autre...L'autre... ? Non, vous ne saurez pas. Vous ne pouvez pas comprendre.



avatar :Daria Sidorchuk
copyright:️ Azu


Je n'ai pas peur de la route
Faudrait voir, faut qu'on y goûte
Des méandres au creux des reins
Et tout ira bien là
Le vent nous portera

Ton message à la Grande Ourse
Et la trajectoire de la course
Un instantané de velours
Même s'il ne sert à rien va
Le vent l'emportera*

Eclipse


Octobre 2023, Helsinki.

Une année et demi s'était écoulée depuis cette fameuse discussion où Valvarn le chamane avait proposé à Elizabeth de l'enseigner. Elle n'oubliait pas percevant viscéralement que le bon moment se présenterait de lui-même lorsqu'il l'aurait décidé. L'irrationnel faisait partie de sa vie comme l'air que l'on respirait et oui, un assez long temps s'était étiré avant qu'elle ne ressente la morsure de l'appel. Cela s'était imposé la nuit de la lune bleue de sang, une nuit belle et ronde d'évidence.

Le sourire en milliers, elle l'avait écouté avec une grande attention mais plus encore avec beaucoup d'amour et de respect. L'affection qu'elle lui vouait d'emblée alors même qu'elle ne connaissait que de très infimes bouts de ce qu'il était pouvait choquer, déranger, indifférer, interroger... Elle s'en fichait n'ayant partagé cette rencontre avec personne. Ce que Val dégageait par son esprit, sa manière de vivre, d'appréhender le monde et les autres, la Vie, la Mort etc représentaient bien trop d'intimités et de profondeurs à son goût pour les dévoiler. Elle ne pouvait pas divulguer ça. Ça ! Aussi puissant et incompréhensible que ce qu'elle avait vécu avec Ob ! À qui confier l'autre réalité parcourue en aigle ?!  À qui dire que le concept de « rêve » signifiait une mise à mort d'une dimension qui EXISTAIT bel et bien ! Que les consciences modifiées éclataient les limites de l'humain dans des univers qui régnaient par eux-mêmes ? Songes, chimères, hallucinations, folie...autant de termes qui exprimaient en langage d'homme ce qu'il était incapable de comprendre ou de contacter. Certains osaient aller plus loin, se risquaient à des voyages d'ailleurs. Elizabeth l'avait expérimenté sans rien chercher. Le pire se résumait peut-être à l'addiction engendrée qui parfois la rongeait comme une mauvaise lèpre. Finirait elle par en parler au natif ?À ce sujet, sans trop savoir pourquoi, elle craignait sa sagesse.

- Je suis comme une comète dans le ciel, à l'échelle de l'univers un être mouvant à l'existence éphémère... Je reçois, et je transmets, je ressens et je donne à connaître. Que je sois loup ou homme, ça n'est qu'un détail, je suis l'oubli de soi, l'éveil de l'autre...

Elle n'avait pas répondu : il en était si convaincu jusqu'à refuser sans aucun doute son point de vue. Et les balbutiements de leur complicité improbable ne suffisaient guère à ce qu'elle se sente légitime face à ses convictions. Elle le voyait, le considérait, l'aimait en plein tel qu'il était: un terrestre unique, rare et précieux mais n'acceptait pas cette fusion-dilution dans le Tout. Ils en discuteraient, plus tard. Elle y reviendra, encore et encore...

Qui es tu Valvarn ? Où te caches tu ?
Sa vie... ? Une autre fois, dans un lieu divergent...Peut-être se contera t-il, peut-être pas. Elle n'avait pas insisté. Pas cette fois-ci.

Ces mois passés avaient été étranges, complexes à vivre : prendre conscience d'une Réalité nouvelle, s'épancher entre ici et là-bas... S'envoler dans une dimension qui existait dans un "n'existe pas "...Ne pas comprendre, aimer à en perdre la raison...Croire en l'incroyable...

Maintenant se déclinera incomparablement avec le chamane. Quelque chose d'insolite allait se mettre en marche. Sans avoir peur, elle ne se sentait assurée en rien, brûlant de cette solitude qui lui collait à la peau depuis toujours. « Je ne suis pas d'ici », le leitmotiv-prescience prenait désormais tout son sens, lui prenait tous ses sens ! Amoureuse de la vie d'ici, amoureuse de celle de là-bas, amoureuse d'Ob à en mourir...amoureuse de Val d'une certaine façon. L'intensité ne la quittait pas, la poursuivait sans relâche et ce qu'elle avait vécu ne faisait que la renforcer et l'approfondir. N'allait elle pas en crever à force ?!

Coupant le contact, elle ajusta son bonnet, ferma la portière. Il lui avait expliqué où il dormait parfois. Elle n'était pas sûre qu'il soit présent un an et demi après... mais n'avait-il pas dit : « Viens comme tu veux, je sentirai que tu es là ». Elle en avait eu les larmes aux yeux avant de le quitter.

Elle devait marcher une centaine de mètres avant d'atteindre la caravane. Le froid, un peu de vent, le silence de la nature tout autour lui procurèrent un bien fou. Apercevant la petite « maison », elle sourit. Le revoir lui donnait une drôle d'impression emplie d'une joie merveilleuse. C'était ça la clef : quand tout s'ajuste, c'est le bon chemin. Le bon chemin...

*Noir désir

Le vent nous portera... Val310

"Je me souviens de vous, archanges des roseaux, pâles ailes des tilleuls, nuages convalescents,...je me souviens très bien de vos ombres...et chaque seconde passait comme passe l'amoureuse, éternelle et riante..." 

C.Bobin, le colporteur.


[Hrp: merci à @Val, une de mes plumes d'amour, pour l'inspiration du titre de ce rp et de l'extrait de Noir désir qui lui appartient  :heart3: ]
Val
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Val
Jeu 19 Oct - 16:50
Le contexte du RP
Mise en situation

La situation

Le vent nous portera... Eli_ai10Le vent nous portera... Valrav10

Elizabeth Van Sechtelen est une comédienne de théâtre connue, Amka "Valravn" Wraith-Uyarak un chaman itinérant né en Alaska...:
3/ Nous en sommes donc là, à l'automne 2023. Elizabeth et Ob rêvent en Norvège, Mary et Val cherchent des solutions et sont en passe de les trouver, grâce en partie à Cresus avec lequel Amka s'est ressourcé... A Swamp Domain en Louisiane, un étrange personnage est apparu qui se dit retoucheur de temps ?



Amka Wraith,
dit « Valravn ou Crow »  

J'ai 33 ans et je vis pour le moment à Helsinki, Finlande. Dans la vie, je suis .. . que dire ? J'ai fait à peu près tous les métiers qui ne demandent que de la bonne volonté et du muscle, pas que je sois idiot, mais je n'ai pas en tête de « faire carrière » dans aucun. En fait, je suis chamane en quête du Savoir qui fera de moi un sage porteur de sagesse auprès de tous. Je suis célibataire, mon rôle ici bas n'est pas de procréer, mais de transmettre autrement l'humanité et la paix. Je dois être libre, attaché à tous et non à l'un(e), pour aller au bout de ma quête,.

Sur mes papiers, il est écrit Amka Wraith... Avant ce que je continue à appeler la colonisation avec une rancoeur qui m'honore peu, nous nous appelions Uyarak, Je suis Amka Uyarak, et répond aux surnoms de Valravn que j'utilise souvent comme prénom, et de Crow...

J'ai récemment reçu du sort ce que je considère comme une malédiction... une... âme sœur moitié supposée amputée de mon être lors de sa création. Les sentiments et la douleur que cela fait naître en moi m'horrifient !




avatar :copyright: inconnu

Le vent nous portera

Elizabeth &  Amka (Valravn)


Le vent nous portera... Carava10



« Le monde est ce que vous croyez qu'il est, il n'existe pas de limites, maintenant est le moment de pouvoir... »*

Octobre 2023

- Viens comme tu veux, je sentirai que tu es là   

C'est un moyen comme un autre de rester connecté ? Il y a quelques années, si j'avais dû lui enseigner ce qu'elle s'entête à appeler du savoir et que moi je nomme connaissance, j'aurais sans doute affirmé bien trop de choses. Savoir ? Connaissance ? Quelle différence ? Dans mon esprit, l'un est acquis et définitif, l'autre n'est que la recherche ininterrompue et vaine du premier. Je connais le but à atteindre, d'une certaine façon je sais aussi qu'une seule vie ne suffira jamais à le toucher. Est-ce à dire que je pense me réincarner comme tant de cultures l'imaginent ? La vision qu'ont les miens d'une « seconde » vie est pour moi différente d'une réincarnation... En chaque enfant qui vient au monde, ses ancêtres déposent un peu de leur parcours, comme dans les contes de ce monde-ci les fées donnent un présent, un « don ». Cela permet à chaque existence d'avoir un sens, et à chaque disparition d'être pleinement utile, pour la nature et pour la mémoire...

Connecté, je ne le suis que trop... à Elizabeth mais aussi à Cray, à Mary, et aux miens là-bas, si loin. À mon aïeule entre autres et à ma mère, l'afflux de nouveautés dans ma vie quotidienne me fait craindre que la mémoire de mon sang n'envisage un voyage, long, si l'on en croit nos légendes... un an dans le royaume des morts avant de germer dans un être nouveau, germer... pas renaître. Les morts ne reviennent pas, ils mutent et habitent d'autres corps, parfois plusieurs.

Si je dis cela à Eli, je ne suis pas certain qu'elle comprendra. Si elle a en elle tout le potentiel pour me succéder son vécu est différent. Cela ne signifie en rien qu'il est mieux ou moins bien, juste que son approche de certains sujets sera... biaisée, comme la mienne l'est. L'objectivité n'existe pas dans un cerveau humain, l'homme met des mots et des sensations sur ce qu'il peut comprendre ou assimiler... Moi, je sais qu'il y a des poissons dans la mer, que l'eau gèle l'hiver, qu'il suffit d'invoquer le loup pour en être un et que les ancêtres vivent en toi aussi longtemps que tu respires... Elle ?

Peu importe comment elle transcrit ce qu'elle sent et sait. Peu importe à quelle profondeur son vécu personnel a enfoui son pouvoir... Ce pouvoir, elle l'a et c'est tout ce qui compte.

Dehors, j'ai allumé un feu à distance idéale de mon home de tôle. J'ai construit des bancs rudimentaires en bois à mon arrivée pour remplacer les fauteuils de voiture laissés là par un estivant insouciant des pluies et de la neige... Un jour, il y a probablement des dizaines d'années, cette caravane a peut-être été le refuge d'une famille soucieuse de calme loin de la ville, ou celui de chasseurs peu désireux de se mêler à la foule, ou d'un pauvre ère comme moi dénué de logement durable ? L'endroit a dû être accueillant et confortable, avant que tout ne soit abandonné aux éléments. La nature reprend ses droits vite, le « salon » d'extérieur composé de banquettes d'automobile a pris l'humidité, servi de refuge à des rongeurs et à des insectes, de nourriture aussi... Il est toujours là, à l'écart, si moi je pourrais m'y coucher aussi bien en homme qu'en loup, je ne vois pas l'aristocratique derrière de celle que j'attends dessus ! L'idée me fait sourire, pas par moquerie ou manque de confiance, non, je l'ai dit... nous ne sommes en rien semblables sinon par notre capacité à l'un et l'autre aller plus loin que le visible.

En entendant la portière claquer loin vers la route j'ai mis l'eau à chauffer et les feuilles dans la théière... J'ai aussi allumé le poêle à l'intérieur parce que la pluie menace et qu'il fait -je dirais frisquet ? - elle est Finlandaise mais a-t-elle la même notion du froid que moi ? Ici, sur terre je dirais qu'il fait légèrement plus doux, sinon... la différence vient de la mer gelée déjà dans mon grand nord... et encore, j'ai la chance relative d'être un ilien et donc de bénéficier d'un climat plus doux. Je l'attends sur le pas de la porte et descends les trois marches qui isolent le home du sol.

A son sourire je réponds par le mien, j'ouvre les bras pour une accolade fraternelle... Je ne dis pas « Tu es prête ? » ou rien de ce genre, elle dira elle-même mais son état d'esprit est positif et pas uniquement à l'idée de me revoir, en bon canidé je sens ces choses même si je suis moins perceptif qu'un chien de ma connaissance...

- Le thé t'attend, il fait frais dehors.  

Je crois qu'elle n'est jamais entrée ? Je doute que mon intérieur ressemble au sien mais il est propre c'est tout ce qui m'importe, quand je suis arrivé j'ai dû comme partout retaper et nettoyer pour rendre l'endroit « humain ». Je souris, autant à sa venue qu'à la pensée que d'un animal sdf la précaution de rendre habitable et propre un squat de quelques mois pourrait paraître étrange à d'aucuns mais j'ai horreur de la crasse, chacun a ses travers.

- Avant de te transmettre quoi que ce soit Elizabeth, je dois te dire … beaucoup de choses sur moi...

Je suis solennel ? Simplement prudent pour la plupart des gens croisés, je ne suis pas une fréquentation pour elle...

- La majorité de nos contemporains chez moi en Alaska, aux USA et presque partout à travers le monde, pensent certainement que toi et moi ne devrions pas nous rencontrer...Rien qui empêche ce que nous projetons, ça n'est pas en rapport avec le chamanisme...

Cela m'indifférerait si elle ne pouvait en être éclaboussée... Je fais un geste pour prévenir toute protestation.

-  mais ce sont des informations que tu dois détenir pour le cas où l'on nous verrait ensemble et où certains voudraient s'ouvrir à toi de renseignements glanés à propos de ton compagnon ?

Je n'ai pas dit « si tu es venue pour cela » je sais... Cela n'est plus une « connaissance » mais une certitude, je me dis que j'aurais dû d'ailleurs avant de lui faire miroiter un partage lui en apprendre plus. Pour de nombreux humains croisés... je ne suis pas quelqu'un de bien.

Je pose les tasses, lui montre le porte-manteau accroché à la porte à côté de la source de chaleur, l'espace est restreint mais les sièges aussi confortables que démodés... Mes yeux sourient, j'attends sa réaction. A l'évocation des mes secrets... j'ai entendu des chants de marins du monde entier, des cris, le bruit des vagues contre la coque comme d'objets tapés contre des grilles...

L'heure du romantisme est fini, la franchise est un préliminaire nécessaire.

Musiques:





Qui sont "Les "dieux" inuits ? Mythologie. :





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Jeu 2 Nov - 0:36
Le vent nous portera... Images17
Elizabeth Van Sechtelen
J'ai 28 ans et je vis à Helsinki, en Finlande. Dans la vie, je suis comédienne de théâtre et je m'en sors avec un sentiment d'exil. Et puis...Il y a LUI qui m'empêche de me suffire. Je le vis douloureusement.

Le comte et la comtesse Van Sechtelen s'aimaient comme l'on pouvait s'aimer dans le milieu aristocratique. Quelques années plus tôt, leurs familles respectives avaient œuvré avec soin pour que leurs progénitures se rencontrent, s'apprécient. De rallyes en rallyes, des affinités se liaient, les jeunes tricotaient et fricotaient ensemble. Ces deux-là finirent par se marier, encouragés par leurs proches très au fait des avantages de porter un nom prestigieux.
Mais Madame pécha par excès. Grisée, lassée et délaissée depuis trop longtemps par son époux, elle succomba à ce bel amant d'un soir. Renversée sur le bureau d'ébène, elle se laissa aller comme jamais, noyée au creux d'un ventre en feu et assoiffé.

1994

Au sourire de la Lune, elle naquit presque sans bruit. Ne pleura pas. Ses grands yeux ouverts s'arrêtèrent quelques instants sur l'aube de cette grande vie qu'on lui offrait. Il paraît même qu'elle avait souri...
Elizabeth, fruit d'une adultère éphémère. Si jeune et déjà, elle voyait les anges.
Le secret de son origine fut férocement gardé. On l'éleva comme il se doit, telle une descendance de rois. Par chance ou par destin, l'enfant maudit se révéla excellente élève, douée pour les études. Elle aurait pu être promise à une brillante carrière mais sa passion brisa les aspirations familiales. Comédienne ! Ce n'était pas un métier, encore moins un avenir, tout juste un passe temps d'original et ce, chez les autres ! Pas dans le milieu ! Alors, d'une manière subtilement hypocrite et joliment perfide, on la bannit définitivement du clan familial. On ne l'aima pas l'enfant de "l'accident". Le manteau infâme de la Bienséance la revêtait comme une lèpre. Alors, au fil des années, elle développa une sensibilité à fleur de peau. Elle devint différente.HPE diagnostiqua le rapport du spécialiste.

Un.
Deux.
Trois.

Le bruissement du rideau qui se lève.
Arrêt sur scène.
Les secondes ralentissent.

Elle ne voit plus ici. Ses ailes se déploient délicatement
L'audace d'une extravagance
Le chant d'un songe
L'insolence de l'irréalité

Le théâtre. Le RÊVE.

Et puis cette rencontre. Un chauffeur de maître. Un être à part. Ob. Celui qui la comprend. Celui qui résonne. Celui qui rêve avec elle. Les clartés de Là-bas se mirent à resplendir les éclaboussures d'un sublime amour. Un feu douillet valsait tout autour, les écailles de Lune voletaient. Projetée dans une dimension parallèle. Aveugle et sourde à la réalité. S'imprégner de l'éternité. Rêver à deux, à l'Absolu, à l'Infini. Enfin! L'exil n'est plus! Mais...Il s'en est allé loin, soudain inaccessible tel un songe éthéré n'ayant jamais existé.

Eli avait deux cœurs : l'un ici, l'autre...L'autre... ? Non, vous ne saurez pas. Vous ne pouvez pas comprendre.

Le vent nous portera... Val311



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Filaments

Il y avait en elle un ange…un ange qui n’avait plus d’ailes
Jean Habrey


« Me voilà Val. Je viens vers toi comme tu m'avais dit, quand je voulais mais surtout quand je l'ai senti. L'appel est venu, je l'ai regardé pendant plusieurs jours, je le soupesais...Seras-tu présent au bout d'un an sans aucun coup de fil ni contact ? Ce « miracle » de tes sens capables de savoir le moment... Tout est possible avec toi, mon frère sans frontière... »


La conviction empreinte d'évidence la fit sourire. A mesure que la neige craquait sous ses pas, une paix indissoluble s'installait en elle. Elle se trouvait là où elle devait être quand il le fallait.

Elle vit le grand feu, les bancs de bois rustique autour, les carcasses de sièges de voiture qui pourrissaient tranquillement un peu plus loin, glacées par le blanc de l'hiver. La caravane tenait bon mais les signes du temps révélaient l'usure des saisons et des abandons qu'elle subissait. Prise d'un élan de générosité, elle s'imagina lui faire la surprise d'un mobil home flambant neuf. Mais ce n'était qu'une intention qu'elle laissa bien vite de côté. Val n'accepterait pas et peut-être même serait-il « attristé » d'un présent de cette envergure. Il aimait la simplicité, assoiffé d'une ascèse qui s'affranchissait du confort conformiste. Ce serait faire preuve d'une incompréhension à son égard et la rouquine ne voulait surtout pas en prendre le risque. Elle le respectait tel quel, dans ses différences, ses mystères, ses choix, sa façon de penser et de voir le monde, sa manière de vivre.

Le voilà sur le seuil puis tout près, bras ouverts. Elle le serra contre elle : « Salut Val », joyeusement.

- Le thé t'attend, il fait frais dehors.

-Non ? Tu as humé ma venue au point d'avoir déjà fait du thé ?

Elle insista sur le « humé », jouant sur le terme à la fois pour la part animale et pour celle au figuré. Incroyable prescience ! Elle se mit à rire lui donnant une tape amicale sur l'épaule.

-Sacré toi.


L'intérieur, étroit et rudimentaire mais confortable, concentrait tout le nécessaire pour voyager. La liberté n'avait pas besoin de ce genre d'espace, elle se suffisait à elle-même et le natif l'incarnait avec absolu.

Mais Elizabeth ne s'attarda guère sur la petite pièce. Peu lui importait le lieu et elle ne possédait pas cette curiosité qui animait les yeux des curieux lorsqu'ils pénétraient dans une intimité de chez soi. Et puis à peine entrés, Valravn annonça sans détour sa volonté de...se confier. Elle l'écouta avec attention, fronça les sourcils de surprise, ouvrant légèrement la bouche prête à réagir mais se tut à son mouvement. Enfin, sur son indication, elle accrocha sa doudoune, prit la tasse fumante puis s'assit en face de lui. Leur proximité contrainte la fit sourire et elle le regarda en grand. Elle réfléchit, but une gorgée. Bougeant un peu la tête de droite à gauche, elle finit par lui dire :

-Val, lorsque l'on s'est vu en Laponie, j'avais soif que tu me parles de toi, de ta vie, de ce que tu avais expérimenté, d'anecdotes...de toutes ces choses dont on se souvient...des gens que tu as rencontrés...Je crois que j'avais envie ou plutôt besoin que tu me partages ce que tu avais vécu. Tu as choisi de ne rien me dire et...je ne sais pas pourquoi j'en avais besoin. C'était sans doute égoïste de ma part, ça comblait une certaine solitude. Et ce qui est « drôle » c'est qu'aujourd'hui je n'ai plus ce besoin. Tu es là, tu me dis ce que tu veux ou pas, je ne te demande rien, et voilà que...comme un coup du sort, tu m'accordes ta confiance dans une gratuité parfaite. Je ne sais pas quoi te dire ?

Elle reprit une lampée, se cala contre le dossier.

-...disons que je suis légèrement capable de ne pas tenir compte des jugements émis sur quelqu'un, sur toi donc en l'occurrence. Et si l'on veut me pourrir ou me polluer en bavant des infos sur toi, sache que ça me glissera dessus comme l'eau sur les plumes d'un canard. Que celui qui n'a jamais péché te jette la première pierre ! J'ai une intuition féroce et vorace Valravn, elle ne m'a jamais fait défaut, me protège tout autant qu'elle m'expose et j'adore ça. Je ne suis pas ici par hasard et je sais que je peux te faire confiance les yeux fermés. Alors quoi qu'on dise ou pense sur toi, je m'en contrefiche royalement et idem pour le reste dans la mesure où cela ne m'appartient pas.

Une autre rasade avant de conclure :

-Mais je comprends ta démarche, je crois que j'agirais de la même manière. C'est touchant et je te remercie.

Elle ne s'attendait guère à ça ! Valravn, le chamane, souhaitant partager un bout de lui-même ?! L'insolite de la situation lui épingla le cœur entre des émotions vives.

Oh Valravn, si tu savais...

Le vent nous portera... Ezgif_15


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Univers fétiche : Avatars réels, mais tous types
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Mar 5 Déc - 13:43

Amka Wraith,
dit « Valravn ou Crow »  

J'ai 33 ans et je vis pour le moment à Helsinki, Finlande. Dans la vie, je suis .. . que dire ? J'ai fait à peu près tous les métiers qui ne demandent que de la bonne volonté et du muscle, pas que je sois idiot, mais je n'ai pas en tête de « faire carrière » dans aucun. En fait, je suis chamane en quête du Savoir qui fera de moi un sage porteur de sagesse auprès de tous. Je suis célibataire, mon rôle ici bas n'est pas de procréer, mais de transmettre autrement l'humanité et la paix. Je dois être libre, attaché à tous et non à l'un(e), pour aller au bout de ma quête,.

Sur mes papiers, il est écrit Amka Wraith... Avant ce que je continue à appeler la colonisation avec une rancoeur qui m'honore peu, nous nous appelions Uyarak, Je suis Amka Uyarak, et répond aux surnoms de Valravn que j'utilise souvent comme prénom, et de Crow...

J'ai récemment reçu du sort ce que je considère comme une malédiction... une... âme sœur moitié supposée amputée de mon être lors de sa création. Les sentiments et la douleur que cela fait naître en moi m'horrifient !




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Le vent nous portera

Elizabeth &  Amka (Valravn)


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« Le monde est ce que vous croyez qu'il est, il n'existe pas de limites, maintenant est le moment de pouvoir... »

Octobre 2023

- Viens comme tu veux, je sentirai que tu es là  avais-je dit, et j'ai effectivement « senti », non pas une odeur mais … une présence, une approche, une aura diraient certains cercles qui se veulent initiés. Comment ? Pourquoi ? Il faut bien que le Tout garde quelques secrets ?

J'ai un sourire un peu las... Elle voulait savoir et je n'ai pas dit, et désormais, alors que je veux dire elle n'a plus envie de me questionner plus ? C'est un résumé de la vie qu'elle me fait, pour la majeure partie des gens l'existence sociale n'est que cela : vouloir et ne pas avoir, avoir alors qu'on ne veut pas.

...disons que je suis légèrement capable de ne pas tenir compte des jugements émis ... Et si l'on veut me pourrir ou me polluer en bavant des infos sur toi, sache que ça me glissera dessus comme l'eau sur les plumes d'un canard. … Je ne suis pas ici par hasard et je sais que je peux te faire confiance les yeux fermés...

Mon sourire se fait plus marqué si l'on peut mais reste triste, pourquoi ? Je suis heureux qu'elle soit là, heureux d'avoir eu moi aussi de l'intuition et de lui avoir proposé de me rejoindre, dans un autre monde ou une autre dimension, ou quel que soit le vocable usité pour nommer l'endroit que nous projetons d'explorer, pour notre bien et le bien commun. Alors d'où vient cette mélancolie ? Peut-être à cause de cette nécessité de faire un point dans l'époque, de lui livrer de moi non ce que je voudrais mais ce qui doit lui permettre de parer la malveillance de certains contemporains. Si je devais lui parler de moi, de mon passé, de mon expérience de vie, je ne choisirais pas les épisodes que je vais lui narrer et qui ne sont marquants que pour les personnes désireuses de juger leur prochain en fonction de son empreinte visible grâce à un éclairage faux, mis en lumière à travers une culture et une foi qui ne sont pas miennes. Je viens d'un monde de partage et de solidarité, il s'en trouve encore, sur tous les continents... des endroits où une chaise à table ou une place autour du feu est réservée au voyageur, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne...

- Je ne doute pas de ta capacité à remettre à l'endroit les faits que l'on te présente... là, mon sourire figé devient sincère et mes yeux s'allument, espiègles comme ils savent l'être parfois avec des gens de confiance - mais lorsqu'une jeune femme rousse a aidé un loup malade dans le parc central je ne savais de toi que ce que m'a dit mon cœur ou ce que le tien a permis de deviner au mien... Depuis, j'ai été interpellé par un visage connu sur des magazines trouvés deci-delà ou des affiches annonçant des tournées théâtrales.  Socialement, tu es quelqu'un de plus vulnérable que moi parce que nettement plus en vue, et je ne veux pas qu'on te nuise à cause de moi.

Je n'exprime pas tout ce que je voudrais, les mots ne sont pas faits pour dire ce que les sens crient, les âmes viscéralement pures et non conventionnelles se fichent des dires des humains, elles sentent, pèsent, soupèsent et décident de qui fréquenter. Quoi que j'ai fait, d'où que je vienne, cela n'empêchera pas la communion à travers le Tout que nous envisageons... mais cela peut lui faire une publicité néfaste, ouvrant la porte à des rumeurs aussi malsaines que mesquines. Je fais un signe de la main, trop de palabres, autant foncer dans le tas et tomber avec l'élan si la porte est déjà ouverte ? Qui me dit après tout qu'elle n'a pas cherché ? Je reste quelques secondes pensif, non, je ne la vois pas engager un détective pour enquêter sur une rencontre... Elle n'est pas de ces divas qui se jugent trop précieuses pour se mésallier, comme elle l'a souligné, elle se fie à son cœur, à son intuition, à la perception totalement illogique de ses sens.

- Je te l'ai peut-être dit, ça n'est pas un secret, je suis né en Alaska il y a … trente trois ans désormais, sur un bout de terre plat perdu dans l'eau, face à la Sibérie, l'île Saint-Laurent. J'étais fils unique ce qui est rare chez nous, et en adoration devant mes parents, eux, ma grand-mère, et le cercle autour de cousins plus ou moins éloignés représentaient un monde qui me suffisait. Il y avait une église pas très loin, et un pasteur assez désœuvré, tout le monde se disait chrétien ou presque, et tout le monde écoutait les esprits, remerciait le Tout pour une pêche fructueuse, Jésus et la Trinité n'étaient que des dieux parmi d'autres dans le cœur de ma parentèle et des autres, je n'ai jamais entendu personne les prier par contre on demandait par un rituel ancestral à l'un ou l'autre de nos « gardiens » une accalmie dans la tempête, des bancs de poissons plus nombreux, ou l'attention d'une jolie voisine...

Je me laisse errer, j'ai les yeux dans le vagues, je n'ai pas à cacher qu'ils me manquent et que je les ai probablement idéalisés. Il y avait chez nous l'avare, le jaloux, l'égoïste, comme partout. Les défauts étaient connus, les qualités aussi, ensemble nous faisions front contre un hiver glacé et une société en changement trop rapide qui avait tendance à laisser notre peuple sur le bord de la route.

- Les vieux du clan avaient promis à ma mère que -si elle ne pouvait avoir plus d'un fils- celui-ci serait honoré du « don ». J'attendais, confiant. Un jour, j'accueillerai un esprit animal qui m'aurait choisi plus que je ne l'aurai élu, et je continuerai ainsi une lignée de chamans et de « sorcières », je me suis laissé vivre, j'aidais mon père sur son bateau, j'écoutais les enseignements de ma  grand-mère et d'un oncle pour ouvrir mon cœur et mon âme et être prêt bien plus que ceux des professeurs de l'école voisine... Ce que j'apprenais du monde alentour, déjà, se faisait par le biais des livres empruntés à la Bibliothèque.

A quatorze ans, le loup s'est dévoilé et a habité mon corps et mon esprit... J'en ai été si fier -et si épuisé- que mon père est parti seul pêcher... et n'est jamais revenu. Un autre équipage a trouvé le bateau, et des plongeurs ont ramené le corps... Je ne me pardonnais pas de l'avoir laissé seul.


Je ne suis pas un homme dissimulateur, sur mes traits, la détresse, le désespoir, et la rage coupable doivent se lire, je raconte avec mon corps autant qu'avec mes lèvres qui laissent couler les mots.

- Un jour, tu m'as demandé si j'avais jamais ressenti de la colère... Cette année-là, si notre communauté n'avait pas été si soudée, j'aurais sombré. J'étais devenu un typhon dévastateur, brûlant du désir de faire payer à tous l'absence de mon modèle sur terre. Violent, enragé, incapable de mesurer mes actes et mes paroles...

J'ai failli tuer un homme dont le seul tort était de proposer à ma famille une sépulture et une messe, indispensables pour lui mais pas pour nous... J'ai hurlé ma fureur à une femme venue dans l'idée de soulager ma mère de mon entretien en me plaçant dans une famille d'accueil et si je ne l'ai pas frappée c'est que les miens se sont interposés.

J'ai fini par accepter, me suis recentré sur le loup et ses besoins, sur ce que le Tout attendait de moi. Le temps efface les douleurs dit-on, je peux te jurer qu'il n'en est rien, il permet juste d'essayer de trouver un moyen de résister et de tourner le mal en bien...  


Je la regarde, tout cela un curieux peut le retrouver sans peine mais à part permettre de me présenter sous un jour tout différent de celui que j'offre aujourd'hui... je ne suis pas le seul adolescent à avoir (presque) sombré à la mort de son père ?

- Deux ans après j'ai pris la mer, je devais trouver ma voie, suivre le chemin tracé mais à peine esquissé, un peu comme un sentier que les pisteurs vont découvrir en recherche d'un gibier. Le mien était fabuleux, c'était... le savoir. J'ai compris ensuite qu'on ne sait jamais rien mais qu'on peut apporter aux autres ce qu'on reçoit du Tout.  

Je parle, je parle, je n'arrive pas à donner à l'intensité des sentiments qui m'agitent la bonne texture orale, mais je sais qu'elle et moi communions autant par la pensée que par les sensations et qu'elle vit en ce moment mes errements, mes espoirs, mes désillusions de jeune homme pauvre en dollars mais riche d'émotions et de volonté de bien faire. J'ai ainsi parcouru le monde, au gré des bateaux, pêcheur, matelot sur des cargos, serveur sur un paquebot même quelques mois... et puis, l'accident est arrivé, la mer s'est refusée à moi, mon bras à demi arraché par un treuil qui relevait les filets d'un chalutier n'était plus assez fiable, je suis resté à terre, toujours aussi nomade et désireux de bouger, de faire des rencontres, de lire, d'entendre, d'écouter, de comparer, toutes les cultures à croiser pour trouver ce que l'Homme avait retenu de la création et de ce Tout qui englobait aussi bien les roches que les plantes ou les animaux de toutes sortes...

- Un jour si tu le veux, je te parlerai du monde et de ce que j'en ai vu... Je suis certain que si tu as voyagé et parcouru les mêmes contrées toi et moi n'en aurons pas gardé le même souvenir...  

Mon sourire là se fait un peu moqueur, moi j'ai hanté les bas-fonds, les refuges de sans-abris, les bouges à matelots fauchés, les communautés rurales où le chamanisme persistait, elle, a sans erreur côtoyé de riches érudits amateurs de théâtre classique, des gens qui ne valent pas « moins » que ceux que j'ai croisés mais qui forment un autre monde, ignorant généralement ou refusant, ce qui les lie les uns aux autres. L'époque est au mépris et à l'absence de compassion, au cloisonnement, ce qu'on n'en voit pas ne blesse pas...

- Au hasard d'une escale je suis descendu à quai à Marseille, en France... et j'y ai passé presque deux ans, incarcéré. Cela, n'importe qui peut le trouver et s'en servir contre toi, je n'en n'ai pas honte, je continue à penser que je n'avais rien fait de mal... j'étais juste étranger, sans domicile connu, nanti d'un physique et d'un mode de vie suspect... et pas au courant des lois. J'en ai fait les frais, ça m'a permis de rencontrer des gens que je n'aurais jamais connus sans cet épisode et qui valaient à être entendus.

Je fais une pause, j'attends. Imaginait-elle que j'avais fait de la prison ? Qu'en pense-t-elle ? A mon avis comme elle l'a dit elle n'écoutera que son cœur et le suivra mais qui sait ?

Devant ceux dont je suis né je n'ai jamais rougi, j'honore mon sang et ses croyances... Je ris intérieurement de ce sursaut tribal, non, j'honore la vie dans son ensemble, et sert de lien entre elle et ... ce qui la conclut dans ce monde.

Il y a bien plus important que le presque siècle qu'un humain passe sur terre... des connaissances, des ressentis, qui sautent d'un être à l'autre et d'une époque à la suivante, tourbillonnants de vie et de renaissances...

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Jeu 4 Jan - 1:36
Le vent nous portera... Images17
Elizabeth Van Sechtelen
J'ai 28 ans et je vis à Helsinki, en Finlande. Dans la vie, je suis comédienne de théâtre et je m'en sors avec un sentiment d'exil. Et puis...Il y a LUI qui m'empêche de me suffire. Je le vis douloureusement.

Le comte et la comtesse Van Sechtelen s'aimaient comme l'on pouvait s'aimer dans le milieu aristocratique. Quelques années plus tôt, leurs familles respectives avaient œuvré avec soin pour que leurs progénitures se rencontrent, s'apprécient. De rallyes en rallyes, des affinités se liaient, les jeunes tricotaient et fricotaient ensemble. Ces deux-là finirent par se marier, encouragés par leurs proches très au fait des avantages de porter un nom prestigieux.
Mais Madame pécha par excès. Grisée, lassée et délaissée depuis trop longtemps par son époux, elle succomba à ce bel amant d'un soir. Renversée sur le bureau d'ébène, elle se laissa aller comme jamais, noyée au creux d'un ventre en feu et assoiffé.

1994

Au sourire de la Lune, elle naquit presque sans bruit. Ne pleura pas. Ses grands yeux ouverts s'arrêtèrent quelques instants sur l'aube de cette grande vie qu'on lui offrait. Il paraît même qu'elle avait souri...
Elizabeth, fruit d'une adultère éphémère. Si jeune et déjà, elle voyait les anges.
Le secret de son origine fut férocement gardé. On l'éleva comme il se doit, telle une descendance de rois. Par chance ou par destin, l'enfant maudit se révéla excellente élève, douée pour les études. Elle aurait pu être promise à une brillante carrière mais sa passion brisa les aspirations familiales. Comédienne ! Ce n'était pas un métier, encore moins un avenir, tout juste un passe temps d'original et ce, chez les autres ! Pas dans le milieu ! Alors, d'une manière subtilement hypocrite et joliment perfide, on la bannit définitivement du clan familial. On ne l'aima pas l'enfant de "l'accident". Le manteau infâme de la Bienséance la revêtait comme une lèpre. Alors, au fil des années, elle développa une sensibilité à fleur de peau. Elle devint différente.HPE diagnostiqua le rapport du spécialiste.

Un.
Deux.
Trois.

Le bruissement du rideau qui se lève.
Arrêt sur scène.
Les secondes ralentissent.

Elle ne voit plus ici. Ses ailes se déploient délicatement
L'audace d'une extravagance
Le chant d'un songe
L'insolence de l'irréalité

Le théâtre. Le RÊVE.

Et puis cette rencontre. Un chauffeur de maître. Un être à part. Ob. Celui qui la comprend. Celui qui résonne. Celui qui rêve avec elle. Les clartés de Là-bas se mirent à resplendir les éclaboussures d'un sublime amour. Un feu douillet valsait tout autour, les écailles de Lune voletaient. Projetée dans une dimension parallèle. Aveugle et sourde à la réalité. S'imprégner de l'éternité. Rêver à deux, à l'Absolu, à l'Infini. Enfin! L'exil n'est plus! Mais...Il s'en est allé loin, soudain inaccessible tel un songe éthéré n'ayant jamais existé.

Eli avait deux cœurs : l'un ici, l'autre...L'autre... ? Non, vous ne saurez pas. Vous ne pouvez pas comprendre.

Le vent nous portera... Val311



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Le vent nous portera... Gyhs

Children of the Sky


Eli l'écouta jusqu'au bout sans rien dire, sans bouger d'un pouce. Certains silences étaient le meilleur des langages.

Une part d'elle-même ne comprenait toujours pas ni pourquoi, ni comment un homme tel que Valravn s'était arrêté un jour sur son chemin. Certes, leur rencontre impromptue et la découverte des métamorphes avaient été un immense bouleversement -dont elle s'émerveillait encore- mais cela ne rationnalisait pas le sens de leur attachement réciproque. Quelque chose d'indéfinissable lui échappait. Tous ceux qu'elle aimait et vice versa répondaient d'une certaine façon à une sorte de « logique », d'intrications naturelles issues de fluidités exitencielles pourrait on dire. Valravn n'avait pas de sens  dans cette harmonie. Il était un « accident ». Il souhaitait lui transmettre de son savoir, l'avait choisie pour des raisons qu'elle peinait encore à intégrer tant elle s'estimait illégitime mais rien de tout cela ne faisait écho à une quelconque cohérence. Cette dernière était elle absolument nécessaire en vérité ? D'un point de vue humain, peut-être simplement pour rassurer ? Souvent, les qualités et les défauts s'appellaient, se rassemblaient en une harmonie belle et synchrone attirant, nourrissant une affection-attraction naturelle entre les protagonistes. Cette amitié authentique pouvait naître très tôt, durer des décennies, toute la vie, ou bien vivre quelques mois, quelques années et puis disparaître sans bruit pour maintes raisons. Mais là, avec Val, se nichait un mystère qui la dépassait totalement. Elle le sentait intensément sans être capable d'y mettre un seul mot ! Et cette alchimie particulière, fascinante, merveilleusement perturbante l'emmenait dans un inconnu immense. Par nature, l'humain craignait ce qu'il ne connaissait pas mais un fait indéniable embaumait les peurs qui auraient pu la faire fuir : elle avait une confiance infinie envers le chamane, infinie. Pourtant, elle le connaissait très peu voire pas du tout si l'on considérait la durée de leur lien. C'était au delà des murs de l'esprit, du cœur. Oserait-elle s'avouer: comme si elle l'avait toujours connu ? Comme une mémoire très ancienne qui soudain s'activait ? Elle n'en était pas là Eli, pas encore, mais s'y brûlait l'âme, déjà.

Il s'arrêta de parler. Son regard n'avait pas quitté le sien, elle lui sourit, contempla brièvement la plaine à travers la petite fenêtre, manipulant machinalement la tasse vide.

-Me crois tu choquée ou mal à l'aise avec le fait que tu aies été en prison ? Que cela va changer mon opinion sur toi ?


Il l'a connaissait bien maladroitement !  À son tour, elle plongea dans la sincérité. Sans retenue. Sans filtre.

-J'ai eu un ami un jour, un ami très proche. Lui, connaissait la loi mais n'en tenait pas compte, s'imaginant passer à travers les mailles du filet. Il s'est retrouvé derrière les barreaux, je suis allée le voir chaque semaine pendant huit mois. Huit longs mois avant qu'il ne purge sa peine. Je mentirais si je te disais que cette horreur ne m'a pas bouleversée. Mais je n'avais que deux options : continuer à l'aimer comme il était, là où il était, ou bien juger et rompre notre amitié. Quand je dis juger je te parle de la situation. Ça aurait pu être simplement au-dessus de mes forces, trop dur à supporter. Le regard des autres qui vous scanne sous toutes les coutures, les questions, la pollution que ça génère à l'intérieur. Les insomnies, la honte... « Je suis amie avec un taulard ». C'est sale, ça sent mauvais, c'est moche. Tout devient entaché soudain. Même soi on se sent sale. Mais tu vois, je ne l'ai pas renié, je suis restée fidèle. La première fois que je suis allée le voir...-Elle ferma les yeux brièvement- c'était...surréaliste. Alors sois tranquille, comme tu l'as dit, tu n'avais rien fait de mal et je constate que tu es resté profondément toi même au prix de l'ignorance des lois ! C'est une preuve de ces innocences nobles, tu sais, celles que le monde ne peut accepter parce que ça remettrait en cause son appât du gain et du pouvoir. Je dis ça sans savoir ce que tu as fait et cela ne me regarde pas mais ce qui est interdit dans les pays riches pour des personnes comme toi, en regard de la culture que tu possèdes, se résume souvent à empêcher la pratique de cet amour universel qui t'habite. Les rares tribus qui refusent le monde moderne le savent d'instinct. Leurs manières de vivre ne pourront jamais s'adapter aux lois d'un ordre basé sur l'argent. Toi, tu prends tous les risques : tu voyages entre trois univers, le tien, le Tout et celui des hommes. Inévitablement, parfois ça coince, non? Tu n'as rien fait de mal, tu le dis toi même. Tu ne t'es pas dénaturé et cela t'a coûté le joug d'une société aveugle et sourde aux différences.

Un soupir. Un silence.

-Je t'admire Val...

Ses confidences la touchaient profondément, il le savait à défaut de l'accepter. Mais il ignorait d'elle des essentiels, justifiant ainsi son besoin de lui partager ses parts d'ombres afin de la protéger ?

-... chacun peut admirer une part de l'autre sans que ces étoiles dans les yeux se limitent exclusivement à sa lumière, à ses compétences, son génie quels qu'ils soient, à ta nature de métamorphe et à ta médiumnité en ce qui te concerne. Je t'aime tel que tu es, sans bordure, avec ton passé, ton présent, ton futur quels qu'ils soient, tes mystères et tes secrets. Le moche, le beau. Qu'est-ce que ça change en vérité ? Je sais, du loin et du près de mes ignorances, de mes défauts, de mes blessures, de mes expériences et du reste, à qui j'ai affaire. Je le sais. Je le sens. Je l'entends, je le vois. Je te vois Valravn et je n'ai besoin de rien d'autre.

Elle se devait d'être assez explicite pour qu'il ait une vision élargie de qui, elle, était. Son cœur bouillait, elle prit une profonde inspiration avant de poursuivre, lancée sur une marée d'authenticité et de spontanéité qu'elle lui abandonnait :

-Je prends donc tout de toi, le package avec les blancheurs et les noirceurs et je comprends que tu veuilles me préserver mais...tu dis que tu as été interpellé par des articles de presse, des photos de la troupe ? En quoi as tu été interpellé ? Tu sais comme moi que c'est du vent tout ça, c'est de l'éphémère, de la surface qui s'efface. Comment toi, un chamane, un être spirituel, un loup... qui passes sa vie dans une quête empreinte de profondeur et de Vérité puisses tu t'être arrêté à cette partie de mes "occupations" qui ne possèdent aucun essentiel en elles mêmes ? Sauf peut-être l'intention que j'y mets et la manière dont je m'en sers mais ça...

...c'était une autre histoire. Elle eut un geste chassant l'air, chassant une suite dont elle n'avait pas envie de parler maintenant. Le sujet c'était Valravn, lui et lui seul.

-Mon ami, qui es tu pour affirmer que je suis "plus" vulnérable...socialement ? Plus que quoi ? Plus que toi ?  Tu crois que l'on pourrait me nuire à cause de toi ? Que connais tu de la célébrité ?


Rivée à ses prunelles, elle lui sourit.

-N'est-ce pas ce que l'on appelle une fausse pensée ? Tu te projettes dans une réalité qui ne s'est pas encore produite et qui ne se produira sans doute jamais. Soyons généreux et disons que cela se produira un jour. Admettons. Tu m'as mise au courant, ok. Ça doit donc me blinder par avance. Mais Val, l'affection que je te porte depuis notre première rencontre me protège de tout ce qui pourrait arriver ! Quoi qu'on puisse me dire sur toi n'abîmera ni n'écorchera mon affection pour toi. Ce sont d'autres qui seront impactés, qui te jugeront, qui me jugeront et moi je resterai immuable avec mon sentiment pour toi! Si tu veux qu'il ne m'arrive rien du tout, de fait, il faudrait prévenir tous ces gens! Elle se mit à rire puis continua sur sa lancée. -Je serai virée, répudiée par le milieu? Et alors ? Où est le problème ? Le théâtre c'est mon rêve, pas ma vie. Le rêve est infini, éternel, libre. Il prend simplement d'autres formes. Ce sera le destin qui me soufflera : « Hey, il est temps d'aller vers un autre rêve... »

Un autre rêve s'était incarné...

-Tu oublies que j'ai tout lâché pour Oskar...


Elle se pencha, prit une de ses mains dans les siennes.

-Je...Je ne sais pas si je peux ...mais j'en prends le risque.Je vois beaucoup de souffrance et de solitude dans ce que tu m'as confié et la violence dont tu as fait preuve...Pour moi, c'est une...comment dire...une...considération primaire du comment tu as réagis. Le pourquoi tu le sais mieux que quiconque, mais le comment...Tu as fait comme tu as pu, rien de plus, rien de moins. Tu n'as tué personne même si tu en as eu envie. J'ai eu envie de tuer ma mère un jour. J'ai visualisé un couteau énorme que je lui enfonçais dans le dos, lâchement. Ça m'avait fait un bien fou sur le coup. Parfois, on traverse de telles situations...Où se situe la hiérarchie du Mal ? C'est difficilement entendable mais pourtant, qui sommes nous pour juger ?

Elle serra un peu sa main, le regardant avec douceur.

-Il n'y a pas de pire juge que soi même. Ne t'inflige pas ce que tu refuses de faire endurer aux autres car là est ta justesse. Tu te juges : tu te trompes, équation mathématique implacable. As tu envie de pourrir dans l'erreur ?

Elle n'attendait pas de réponse, semait des pistes de réflexion pour lui s'il en avait envie, pour elle parce qu'elle l'aimait.

-La mort est une violence sans nom alors réagir face à elle avec violence est une manière de s'y adapter. On plonge extrêmement brutalement en soi. Encore une fois, tu as fait ce que tu as pu, ne te reproche pas ce qui n'a pas lieu d'être ? Et t'avoir placé dans un foyer c'est une maltraitance, un sévice. Tu t'es juste défendu ! On t'attaquait, tu te protégeais avec les moyens que tu avais.

Il était un peu plus vieux qu'elle avec une expérience de vie bien différente de la sienne. Il y avait tant et tant à dire ! À se dire !

-Le temps oui, il paraît qu'il efface les douleurs, qu'il les atténue. Ceux qui ont connu certains chagrins ne certifient rien et se taisent. Et si tu les ressens encore...

Que pouvait elle faire pour lui ?

-De quoi as tu besoin Val ?


C'était parti malgré elle!

-Pardon je...Je capte beaucoup de choses et je peux me tromper. Je peux me tromper...

Elle lâcha sa main, se cala contre le dossier.

-Pardon. J'arrête. Je te remercie. Vraiment, je te remercie...

Elle se leva, fit quelques pas, se cala contre l'évier. Il fallait qu'elle sache...ça la taraudait depuis le début.

-Une dernière chose, si tu veux bien. Es tu parvenu à te pardonner de l'avoir laissé seul ?
Val
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Sam 20 Jan - 0:49

Amka Wraith,
dit « Valravn ou Crow »  

J'ai 33 ans et je vis pour le moment à Helsinki, Finlande. Dans la vie, je suis .. . que dire ? J'ai fait à peu près tous les métiers qui ne demandent que de la bonne volonté et du muscle, pas que je sois idiot, mais je n'ai pas en tête de « faire carrière » dans aucun. En fait, je suis chamane en quête du Savoir qui fera de moi un sage porteur de sagesse auprès de tous. Je suis célibataire, mon rôle ici bas n'est pas de procréer, mais de transmettre autrement l'humanité et la paix. Je dois être libre, attaché à tous et non à l'un(e), pour aller au bout de ma quête,.

Sur mes papiers, il est écrit Amka Wraith... Avant ce que je continue à appeler la colonisation avec une rancoeur qui m'honore peu, nous nous appelions Uyarak, Je suis Amka Uyarak, et répond aux surnoms de Valravn que j'utilise souvent comme prénom, et de Crow...

J'ai récemment reçu du sort ce que je considère comme une malédiction... une... âme sœur moitié supposée amputée de mon être lors de sa création. Les sentiments et la douleur que cela fait naître en moi m'horrifient !




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Le vent nous portera... Sans_t28


Elizabeth &  Amka (Valravn)

« Le monde est ce que vous croyez qu'il est, il n'existe pas de limites, maintenant est le moment de pouvoir... »

Octobre 2023

- Me crois-tu choquée ou mal à l'aise avec le fait que tu aies été en prison ? Que cela va changer mon opinion sur toi ?

Elle développe, elle a déjà eu un taulard comme ami, elle est sensible à l'horreur que sont l'emprisonnement, la promiscuité, la saleté... Elle ne le dit pas comme ça, la saleté dont elle parle est morale, celle-là... moi je ne l'ai pas ressentie. Je crois que l'autre non plus d'ailleurs, j'ai subi le manque d'espace, la présence d'autres hommes parfois violents mais ce qui m'a le plus marqué c'est le désespoir dont ils n'avaient eux-mêmes pas conscience et qui les rongeait de l'intérieur. Pour la majeure partie, ils étaient tombés dans le crime non par perversité, déviance ou volonté de faire le mal. Aller à l'encontre des règles était la seule option qu'on leur avait laissée, la seule solution pour exister et leurs contemporains ne le voyaient pas. La prison n'a pas été pour moi une épreuve terrible, l'est-elle pour quiconque y goûte ? Certains en sortent aigris, revanchards, d'autres remodelés... jusqu'à ce qu'ils se trouvent à nouveau dans une situation où ils devront refaire ce qu'ils ont fait et deviendront des récidivistes. D'autres comme moi refuseront de « s'amender » parce que persuadés que la loi est fautive et que ce qu'ils ont fait n'étaient qu'une preuve d'humanité. Pourtant, certains avaient fait ce que je condamne, cela n'a pas entraîné mon jugement, je pense que si la plupart m'ont pris pour un Américain complètement cinglé à vouloir refaire un monde où la violence n'aurait pas cours, il y avait dans leur esprit une sorte de respect pour le doux dingue que j'étais. En tout cas, si j'ai eu à me trouver une place au début, une fois acté que je n'attaquais jamais mais savais me défendre, on ne m'a plus jamais cherché de noises...

Elle me fait tiquer à l'expression « personne comme toi », suis-je si différent ? J'ai rencontré des prêtres de toutes les confessions qui prônaient -en s'appuyant sur une culture et une foi autres- exactement la même chose que moi ?

- Tu n'as rien fait de mal, tu le dis toi même. Tu ne t'es pas dénaturé et cela t'a coûté le joug d'une société aveugle et sourde aux différences. Je t'admire Val...

Elle me gêne, je ne suis pas comme elle le pense un idéaliste ou un saint. Qu'elle me respecte comme je la respecte me suffirait grandement, elle est sensible, intelligente et parfaitement capable de penser par elle-même ? D'où vient que je l'imagine subjuguée par des qualités que je ne possède pas ?

- Eli... Je crois que tu m'idéalises... Je suis un homme, juste un homme. J'essaie de vivre en harmonie avec ce qui m'entoure, ça n'a rien de très original... Nombreux sont ceux qui ...   Je m'arrête. Il existe des communautés entières qui suivent cette voie mais ces gens sont -comme moi- perçus comme des marginaux par la plupart des hommes, en tout cas des Occidentaux. Dans certains milieux, privilégiés, on trouve de bon aloi d'admirer le Dalaï lama ou de se référer à Gandhi, comme si seule l'Asie produisait des sages, mais au delà des apparences, la méconnaissance est grande et la volonté de se plier à une hygiène de vie jugée radicale n'existe pas. Je comprends un peu la réaction de ma compagne, j'ai déjà dit vivre sans argent, sans électricité, avec des téléphones bas de gamme et à carte, ne pas posséder de véhicule, loger où je le pouvais et ne presque jamais acheter de vêtements. Quand je n'ai pas de l'ébahissement j'ai une admiration incrédule qui n'ose dire ce qu'elle pense « On ne dirait pas ». On me le dit parfois, on ne dirait pas quoi ? Que je vis dans une époque qui n'en est pas une ? Que je limite autant que possible mon impact sur la planète ? Que je pense qu'on peut vivre heureux sans superflu, en ne suivant aucune mode, en ne participant pas à une surenchère exponentielle qui veut qu'il faille toujours plus de biens, plus de signes extérieurs de réussite ? C'est que je ne mets pas dans ce mot la même chose qu'eux, pour moi, parcourir le monde, rencontrer les gens, me fondre aux paysages, communier avec la nature, côtoyer des animaux sauvages, c'est une réussite...

- Je t'aime tel que tu es...  Je te vois Valravn et je n'ai besoin de rien d'autre.

« Je te vois ». J'espère ne pas m'être trompé. C'est cette aptitude à voir avec le cœur plus qu'avec les yeux qui m'a fait la choisir, parmi d'autres qui peut-être avaient de la démarche une meilleure approche. Elle n'a pas les connaissances, elle a... l'essence même d'une chamane en elle. Elle parle de ma médiumnité...

- N'oublie jamais que si un cœur se doit d'être magnanime il doit garder en mémoire qu'on peut lui mentir. Je t'ai dit que je n'avais rien fait de mal, j'aurais pu déguiser la vérité, les paroles sont trompeuses... Mais si tu m'as regardé avec ton esprit autant qu'avec tes yeux alors tu sais. Appelle le don comme tu le souhaites, médium, long-voyant, extra-lucide... ce ne sont que des mots. Ce qui compte, c'est que tu perces à jour la duplicité.  

Je l'écoute et souris. Elle a raison dans ce qu'elle a retenu de ma délicate et glissante tentative de la préserver. Je me suis -à mon tour- focalisé sur les apparences et je souris plus en l'entendant me moraliser :

- Mon ami, qui es-tu pour affirmer que je suis "plus" vulnérable...socialement ? Plus que quoi ? Plus que toi ?  Tu crois que l'on pourrait me nuire à cause de toi ? Que connais tu de la célébrité ?.

Mon sourire à son discours se change en rire.

- Jolie leçon de l'élève au maître, tu as raison, d'abord je ne connais absolument rien à la célébrité et ensuite ce n'est pas elle qui fait l'humanité de celui ou celle qui en jouit.  

Je lui reverse du thé qui est resté au chaud sur la plaque de l'antique cuisinière, et lui prends ensuite les mains.

- J'ai été stupide et ai douté de toi. Mais je ne voudrais pas que quiconque puisse t'atteindre à travers moi. Tu m'as fait un grand honneur en acceptant que je te transmette le peu que je sais ; et un grand bonheur aussi.   

Je ne plaisante pas, le maître est souvent perçu comme la pièce importante d'un apprentissage, par les gens qui vont la voir au théâtre entre autres, mais pour le chamane comme pour d'autres détenteurs de savoirs en perdition, transmettre à un être digne est un soulagement. Je ne me suis pas trompé sur elle, j'en suis certain, j'avais d'autres noms -avant de la rencontrer- mais le fait que je n'ai jamais approché aucun de mes potentiels successeurs pour qu'il m'accepte comme maître permet de mesurer mes doutes.

- Le théâtre c'est mon rêve, pas ma vie. Le rêve est infini, éternel, libre. Il prend simplement d'autres formes... Tu oublies que j'ai tout lâché pour Oskar...

Le rêve... Je ferme les yeux, lève la tête vers le plafond. C'est un mot que je n'emploie pas mais qui a une résonance à mon oreille peut-être différente du sens qu'elle y met ? Les civilisations druidiques disaient passer par le rêve pour contacter les esprits et les dieux ? Je passe moi par le chant, la méditation, la musique... Ce n'est qu'une autre sorte de rêve, ta pensée se détache et voyage, comme dans ce fameux « rêve ». Elle m'a parlé d'Oskar, un blond magnifique et mystérieux, qui lui voue un amour fou auquel elle répond ?

- Que ferais-tu si Oskar était... contre le fait que tu t'engages avec moi ?  

Je dois le savoir. Je doute que le personnage qu'elle m'a décrit soit heurté par ce que je professe, mais si elle devait choisir entre moi pour qui elle a une véritable affection dit-elle (et je la crois) et lui ? J'ai demandé, je reviendrai à la question si elle n'y répond pas, j'écoute ce qu'elle développe  « La mort est une violence sans nom alors réagir face à elle avec violence est une manière de s'y adapter. » J'ai vu d'autres morts depuis, pas celle de mon père bien sûr, mais j'ai su respecter la volonté du Tout, accompagner l'esprit jusqu'à son séjour d'en bas... Je maintiens que je n'ai pas eu le comportement voulu à la mort du père... Mon visage doit se tordre de douleur malgré mes efforts.

Je l'écoute, la regarde, avec une fierté non dissimulée. Pourquoi fierté ? Parce que je suis -je l'avoue sans honte- extrêmement satisfait d'avoir senti sa valeur et parce que je le suis aussi des leçons qu'elle me donne et qui plus que jamais me confortent dans l'idée qu'elle est celle que j'attendais. Si sa formulation n'a rien à voir avec celle que je suis habitué à entendre, elle prouve qu'elle possède toutes les qualités requises pour que je partage ce qu'elle s'entête à appeler « mon savoir ». Elle sait écouter, elle ressent les émotions, elle analyse les situations, elle est douée d'empathie, elle ne juge pas. Je pense qu'elle trouvera les clés pour que sa compréhension devienne plus universelle et je suis sûr que si je lui demande d'écouter un arbre ou la circulation de l'air elle ne me regardera pas comme si j'étais soudainement frappé de folie... En attendant, elle vise juste à deux reprises et sa première question me laisse stupéfait, incapable de répondre à une interrogation que je n'ai jamais voulu envisager.

- De quoi as-tu besoin Val ?  

Tandis que je reste immobile, les yeux grands ouverts d'ébahissement et la bouche bée, elle s'excuse, craignant d'avoir outrepassé les limites.

- Pardon je...Je capte beaucoup de choses et je peux me tromper. Je peux me tromper... Pardon. J'arrête. Je te remercie. Vraiment, je te remercie...

Je me ressaisis, ma réaction est due à la surprise, plus qu'à de la colère ou le sentiment qu'elle aurait outrepassé les droits que l'amitié donne. Je ne sais que répondre, j'ai le sentiment que sa question ne se cantonne pas à l'enseignement que je lui ai promis et qu'elle a accepté de recevoir, les « besoins » dont elle s'enquière sont d'une autre nature que je choisis lâchement d'ignorer et de taire. Mais elle m'a réveillé... « Je capte beaucoup de choses » ? Comme la détresse d'un homme dont les certitudes vacillent ? Elle m'aidera sans doute en apportant sa vision neuve à ce que j'ai toujours cru et prêché, le concept d'âme sœur tel que je le vis n'y avait pas sa place par exemple...

- Pour te transmettre ce que j'ai déduit de mes lectures, de mes observations, des discussions que j'ai pu avoir avec les uns et les autres ? Et d'autres choses plus théoriques ? Exactement de ce dont tu viens de faire preuve, de l'écoute, de l'empathie, et un esprit en éveil.  

Et ce, même s'il est éveillé sur le chemin du rêve.

La seconde question m'étonne moins mais me blesse beaucoup plus.

- Une dernière chose, si tu veux bien. Es tu parvenu à te pardonner de l'avoir laissé seul ?

Je baisse la tête, mes lèvres se crispent tandis que je les mords à sang, puis je ferme les yeux le plus fort possible pour les empêcher de « fuiter »...

- Non. Mais rien n'arrive sans raison et cette raison n'a rien à voir avec une quelconque épreuve qu'un dieu destinerait à un homme, imaginer cela est une preuve d'orgueil incommensurable. Simplement à notre petite échelle nous ne la percevons pas.  

J'ai essayé de répondre dignement. Je sais que dit comme cela ça ressemble beaucoup aux explications foireuses des pasteurs de mon enfance... Ils me choquaient en prétendant que Dieu avait fait l'homme à son image, pour moi, pour les miens, les dieux faisaient partie de ce qu'ils appelaient la Création. Encore aujourd'hui je crois vraiment que le Tout voit très au delà de l'existence humaine... de l'existence de quelque variété de vie que ce soit, même les minéraux meurent jeunes par rapport à l'éternité du Tout.

J'espère qu'elle ne me demandera rien d'immédiat, mes yeux sont noyés et mes épaules peinent à rester immobiles. Cela fait des années que je n'ai pas accepté de penser à ce jour-là. Je respire fort et tourne vers elle un visage inondé de larmes sur lequel un sourire contrit s'éveille... Je ne voulais pas qu'elle soit témoin de cela, non parce que je suis gêné de pleurer devant elle mais parce que je sais qu'elle partagera mon chagrin comme une éponge boirait l'eau qui déborde d'un vase. Je prends ses mains entre les miennes...  Le doute me taraude de nouveau, ai-je encore quelque chose à transmettre ? L'urgence que j'ai ressenti ne venait pas d'un trépas possible mais bien des ravages que la rencontre de Mary a fait dans mes convictions


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Dim 3 Mar - 19:30
Le vent nous portera... Images17
Elizabeth Van Sechtelen
J'ai 28 ans et je vis à Helsinki, en Finlande. Dans la vie, je suis comédienne de théâtre et je m'en sors avec un sentiment d'exil. Et puis...Il y a LUI qui m'empêche de me suffire. Je le vis douloureusement.

Le comte et la comtesse Van Sechtelen s'aimaient comme l'on pouvait s'aimer dans le milieu aristocratique. Quelques années plus tôt, leurs familles respectives avaient œuvré avec soin pour que leurs progénitures se rencontrent, s'apprécient. De rallyes en rallyes, des affinités se liaient, les jeunes tricotaient et fricotaient ensemble. Ces deux-là finirent par se marier, encouragés par leurs proches très au fait des avantages de porter un nom prestigieux.
Mais Madame pécha par excès. Grisée, lassée et délaissée depuis trop longtemps par son époux, elle succomba à ce bel amant d'un soir. Renversée sur le bureau d'ébène, elle se laissa aller comme jamais, noyée au creux d'un ventre en feu et assoiffé.

1994

Au sourire de la Lune, elle naquit presque sans bruit. Ne pleura pas. Ses grands yeux ouverts s'arrêtèrent quelques instants sur l'aube de cette grande vie qu'on lui offrait. Il paraît même qu'elle avait souri...
Elizabeth, fruit d'une adultère éphémère. Si jeune et déjà, elle voyait les anges.
Le secret de son origine fut férocement gardé. On l'éleva comme il se doit, telle une descendance de rois. Par chance ou par destin, l'enfant maudit se révéla excellente élève, douée pour les études. Elle aurait pu être promise à une brillante carrière mais sa passion brisa les aspirations familiales. Comédienne ! Ce n'était pas un métier, encore moins un avenir, tout juste un passe temps d'original et ce, chez les autres ! Pas dans le milieu ! Alors, d'une manière subtilement hypocrite et joliment perfide, on la bannit définitivement du clan familial. On ne l'aima pas l'enfant de "l'accident". Le manteau infâme de la Bienséance la revêtait comme une lèpre. Alors, au fil des années, elle développa une sensibilité à fleur de peau. Elle devint différente.HPE diagnostiqua le rapport du spécialiste.

Un.
Deux.
Trois.

Le bruissement du rideau qui se lève.
Arrêt sur scène.
Les secondes ralentissent.

Elle ne voit plus ici. Ses ailes se déploient délicatement
L'audace d'une extravagance
Le chant d'un songe
L'insolence de l'irréalité

Le théâtre. Le RÊVE.

Et puis cette rencontre. Un chauffeur de maître. Un être à part. Ob. Celui qui la comprend. Celui qui résonne. Celui qui rêve avec elle. Les clartés de Là-bas se mirent à resplendir les éclaboussures d'un sublime amour. Un feu douillet valsait tout autour, les écailles de Lune voletaient. Projetée dans une dimension parallèle. Aveugle et sourde à la réalité. S'imprégner de l'éternité. Rêver à deux, à l'Absolu, à l'Infini. Enfin! L'exil n'est plus! Mais...Il s'en est allé loin, soudain inaccessible tel un songe éthéré n'ayant jamais existé.

Eli avait deux cœurs : l'un ici, l'autre...L'autre... ? Non, vous ne saurez pas. Vous ne pouvez pas comprendre.

Le vent nous portera... Val311



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Le vent nous portera... Gyhs

Elevation  

-Eli... Je crois que tu m'idéalises...-Éclat de rire ! Sa tête bougea de droite à gauche- Je suis un homme, juste un homme. J'essaie de vivre en harmonie avec ce qui m'entoure, ça n'a rien de très original... Nombreux sont ceux qui ...  

Il semblait ne pas réaliser que sa singularité le plaçait à part des hommes communément mortels. Le regard pétillant de malice amicale, la réponse fusa :

-Oh non, je ne t'idéalise pas tel que tu le penses. Il ne s'agit pas de ce type d'admiration de base, aveugle, saturée d'éblouissement qui prend le risque de ne pas voir l'entièreté de la personne, ses défauts, ses limites.. C'est un peu plus subtile je crois. Comment te dire ?...


Elle chercha ses mots.

-Je dirai que...Il y a quelque chose en toi d'immuable, de pur, qui, quoi qu'il t'arrive, quoi que tu puisses vivre reste solide, ancré contre vents et marées. Ça ne gomme en rien tout ce qui fait de toi un homme évidemment mais c'est au-delà de cette humanité. Ça dépasse tes fragilités, tes doutes, tes questionnements, les erreurs, les regrets, les douleurs, les histoires de vie, de mort... C'est comme...une source intarissable qui ne se laisse pas polluer, parfaitement intouchable de par son essence et toi, TOI, tu as à cœur de la partager ! Tu pourrais la garder pour toi, t'en nourrir exclusivement, mais non, tu la diffuses...Je ne sais pas nommer cette « chose », je ne sais pas si c'est ce que l'on appelle la foi, l'amour universel, Dieu...Quel que soit le terme c'est limitant alors que c'est infini. Je le sens, c'est là partout en toi. En t'en parlant, j'aime à penser qu'aucun mot n'existe pour l'enfermer dans une quelconque définition.

Elle le regardait avec affection, intuitivement convaincue qu'il ne s'arrêtait pas pour se voir lui-même.

- Nombreux sont ceux qui ...? Dis moi ?... T'es tu déjà « pausé » pour toi même, pour te regarder en face, t'observer, te comprendre ? Te pardonner. T'aimer comme tu sais aimer les multitudes avec cet amour que tu appelles le Tout. Ce regard empli de paix et de miséricorde que tu poses sur ce qui t'entoure, les humains, la nature, tout ce qui vit sur cette terre, le poses tu avec la même simplicité, la même humilité sur toi même ? J'en doute un peu Val mais je peux me tromper et si je me trompe, je m'en réjouis.

Le chamane s'adaptait aux situations et aux êtres avec une facilité déconcertante, inspiré par cette universalité profonde qui le reliait à une harmonie pétrie de paix et d'unicité.

-Détrompe toi. Tu es nomade des pieds à la tête, c'est ton mode de vie, de pensée, c'est ce qui fait battre ton cœur et ton corps à l'unisson. Je sais que tu peux être là aujourd'hui et décider de partir ailleurs demain, dans une heure, une minute. Une liberté exceptionnelle s'est incarnée en toi et tu la respectes, tu l'accueilles  telle qu'elle se présente à toi, comme elle veut, quand elle le veut. Je peux t'assurer que cette communion avec ce qui t'entoure comme tu dis, est particulièrement rare. Tu expérimentes à son gré, tu as le choix extraordinaire, au sens littéral, de suivre son souffle où qu'elle aille. Elle est comme le vent, les hommes en ont conscience mais de là à avoir les moyens de la suivre véritablement comme toi tu le fais, c'est une autre histoire...Alors, oui, c'est très, très original. En tous cas, c'est ainsi que je te vois.

Le monde tel qu'il était verrouillait les êtres humains dès leur territoire de naissance : contextes sociaux, systèmes d'organisations, rentabilités, profits, pauvreté, richesse...Des frontières invisibles mais bien réelles régissaient le tout, un tout fabriqué par un pouvoir bien éloigné des valeurs d'équité et de fraternité.

-D'un certain point de vue, tu représentes une sorte de...chaos d'équilibre. J'adore ça.

Elle lui sourit. Comme elle l'aimait !

-... Je t'ai dit que je n'avais rien fait de mal, j'aurais pu déguiser la vérité, les paroles sont trompeuses...

Il aurait pu mais l'imaginer en menteur et dissimulateur la fit rire. Évidemment, il n'était pas « parfait » ! Mais ce qu'il dégageait -et elle était à même de le percevoir- criait en silence son honnêteté, son intégrité. La seule chose qu'il pouvait camoufler, c'était ses blessures et ses douleurs secrètes. Légitime.

-Jolie leçon de l'élève au maître...

Elle s'esclaffa.

-Ne dis pas ça ! Je ne te fais aucune leçon ! Qui suis je pour ça ? Non, c'est juste que je...je sens des choses et je te les déballe sans filtre. « Ce n'est pas elle qui fait l'humanité de celui ou celle qui en jouit. » Joliment dit et c'est très juste.

Elle le remercia pour le thé, souffla pour le refroidir.

-Tu n'as pas été stupide mais protecteur et prévenant. C'est touchant. Merci.

De fait, hormis la connexion « primitive » qui les unissait, ils ne se connaissaient pas, risquant en conséquence se méprendre sur l'un et sur l'autre.

-Que ferais-tu si Oskar était... contre le fait que tu t'engages avec moi ?

Étonnée par sa demande, elle pouffa, égayée par l'improbable refus de son aimé :

-Pardon ? Je n'ai jamais pensé à ça ! Pourquoi le serait-il ? Ce n'est pas...incompatible que je sache ?


L'empêcherait-elle de voler, de se transformer en aigle ? Cela faisait partie de lui autant que l'air qu'il respirait. De quel droit s'arrogerait-elle le pouvoir de lui refuser une partie de sa vie ? De quel droit lui interdirait-il de vivre ce qu'elle avait à vivre avec Valravn ?

-Mais pour te répondre, eh bien, je choisirai ma liberté, je le quitterais quitte à subir un calvaire. Tu sais, enfin non tu ne sais pas, mais autant je peux aimer, autant je peux désaimer. Je l'ai déjà fait, ça ne me fait pas peur.


Une très légère dureté, vraiment très légère s'était faufilée dans son intonation. Elle avait l'air conciliante et bonne pâte Eli mais possédait une radicalité qui déroutait.

-Un honneur...Tu y vas un peu fort tout de même, sourit-elle. Moi aussi je suis heureuse tu sais. Je ne cesse de m'émerveiller sur notre rencontre, sur ces...évidences naturelles comme si ça nous attendait.

Pourtant, la perspective ne s'annonçait pas aussi simple qu'elle pouvait paraître. Des zones d'ombres subsistaient qu'elle n'avait jamais confiées à quiconque, même pas à Ob. Le théâtre participait pour beaucoup à noyer les noirceurs et les douleurs. Et le rêve..., cet amant intime, mystique, souterrain avec qui son âme couchait sans pudeur. Rêver à s'en péter la substantifique moelle, l'esprit et le cœur. Vivre et mourir dans un rêve. Elle y parvenait, y parviendra jusqu'à l'ultime soupir.

Mais une confiance pleine et entière envers le chamane supplantait la part d'inconnu qui, inévitablement, s'invitait avec audace.

-Pour te transmettre ce que j'ai déduit de mes lectures, de mes observations, des discussions que j'ai pu avoir avec les uns et les autres ? Et d'autres choses plus théoriques ? Exactement de ce dont tu viens de faire preuve, de l'écoute, de l'empathie, et un esprit en éveil.  

Elle se tut. Ce furent ses yeux plantés dans les siens qui parlèrent en premier. « Val ? Tu bottes en touche ? Tu sais très bien ce que je veux dire. »

-Ce n'est pas le sujet.

Elle n'insista pas. Pas maintenant, mais elle y reviendra tôt ou tard. S'il avait voulu répondre en vérité, il l'aurait fait. Ce n'était pas le moment ou bien il n'avait pas envie, peu importait la raison. Elle se contenta d'avoir fait mouche et rangea le tout dans sa mémoire. Souriant à demi, elle se pinça les lèvres, détacha enfin son regard, but le thé. Elle n'oubliera pas, ne lâchera pas le morceau.

Cette question...percutante qui le bouscula. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il ait une réaction aussi...intense. Elle n'attendait rien en réalité si ce n'est qu'il réponde paisiblement comme elle l'avait toujours vu faire. Mais l'émotion l'envahit et sur le coup, elle regretta de s'être montrée aussi directe.
Du sang perla sur sa lèvre, elle déglutit, mal à l'aise, profondément désolée. S'empêcha de le scruter à vif.

- Non. Mais rien n'arrive sans raison et cette raison n'a rien à voir avec une quelconque épreuve qu'un dieu destinerait à un homme, imaginer cela est une preuve d'orgueil incommensurable. Simplement à notre petite échelle nous ne la percevons pas.  


Un « non » aurait suffit, nul besoin de se justifier. Ainsi, il ne s'était pas pardonné... Son aveu lui fit mal, elle eut mal pour lui. Cela pouvait paraître anecdotique pour quelqu'un d'autre mais pour Eli ce fut...terrible. Une part de lui se supportait avec ça... L'effet miroir la renvoya à son histoire...Pourquoi sa famille ne l'avait-elle jamais aimée ? Pourquoi avoir été rejetée avec perfidie et hypocrisie ? La culpabilité...Se juger... L'arme auto destructrice des sensibles et des empathes.

Il avait fait comme il avait pu, rien de plus, rien de moins.

À l'extérieur, les nuages qui couvraient le ciel depuis le matin se déchirèrent. L'unique pièce fut soudain inondée de soleil.

Valravn pleurait. Le contraste entre son chagrin et la lumière était saisissant. L'instant de surprise passé, elle le laissa prendre une nouvelle fois ses mains dans les siennes. Un sourire triste pour un sourire de tendresse.

-Viens là mon ami.

Elle se leva, contourna la petite table, se pencha sur son visage, essuya la goutte vermeille qui coulait sur sa lèvre avec son pouce, ses larmes avec le dessus de ses doigts, l'enlaça.
...
Grâce
...
Silence
...

Éveil

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Val
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Sam 16 Mar - 16:08

Amka Wraith,
dit « Valravn ou Crow »  

J'ai 33 ans et je vis pour le moment à Helsinki, Finlande. Dans la vie, je suis .. . que dire ? J'ai fait à peu près tous les métiers qui ne demandent que de la bonne volonté et du muscle, pas que je sois idiot, mais je n'ai pas en tête de « faire carrière » dans aucun. En fait, je suis chamane en quête du Savoir qui fera de moi un sage porteur de sagesse auprès de tous. Je suis célibataire, mon rôle ici bas n'est pas de procréer, mais de transmettre autrement l'humanité et la paix. Je dois être libre, attaché à tous et non à l'un(e), pour aller au bout de ma quête,.

Sur mes papiers, il est écrit Amka Wraith... Avant ce que je continue à appeler la colonisation avec une rancoeur qui m'honore peu, nous nous appelions Uyarak, Je suis Amka Uyarak, et répond aux surnoms de Valravn que j'utilise souvent comme prénom, et de Crow...

J'ai récemment reçu du sort ce que je considère comme une malédiction... une... âme sœur moitié supposée amputée de mon être lors de sa création. Les sentiments et la douleur que cela fait naître en moi m'horrifient !




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Le vent nous portera

Elizabeth &  Amka (Valravn)


Le vent nous portera... 1410419306820_wps_1_Shamans_Siberia_4_must_cr



« Le monde est ce que vous croyez qu'il est, il n'existe pas de limites, maintenant est le moment de pouvoir... »

Octobre 2023

Parler... Parfois, lorsque je pars dans ce qu'elle appellerait probablement une « retraite » j'oublie tous les mots de toutes les langues que je parle. Vivre de silence est une transe qui me submerge, me noie, m'emporte si loin dans le Tout que j'en suis atomisé, dilué, présent en toute chose et absent malgré cela... Chacun a sa façon de communiquer, la parole n'est ni mieux ni pire que d'autres, elle n'est pas plus dangereuse, ni moins. Ceux qui se perdent dans les sentiers qu'elle ouvre se seraient perdus autrement.

Eli a dit bien des choses, toutes justes bien que demandant pour moi une traduction, une « interprétation », je ne lui demande pas d'être une pâle copie de ce que je suis, elle ne le sera pas, jamais, elle atteindra le but en étant elle-même, c'est indispensable, si elle me suit simplement, s'appropriant mes chemins et mes démarches, elle ne sera pas à l'endroit qui lui correspond et la quête n'aura pas de valeur.

Comment l'expliquer ? Ou plutôt dois-je l'expliquer ? Je pense qu'elle le sait déjà, sans que j'ai eu besoin de le formuler.

Je lance la tête en arrière, mes larmes sèchent. M'ont-elles donné un quelconque soulagement ? Je ne le crois pas. Pleurer est naturel, c'est un réflexe du corps pas uniquement celui des humains, les animaux aussi pleurent -à leur façon- les arbres, les fleurs, l'air... la terre. Pleurer est une manifestation, ça n'a jamais apporté la quiétude, je souris, je la serre un peu pour montrer que je suis sensible à sa réaction, à son soutien... Et me revient son autre question. - De quoi as-tu besoin Val ?  Je n'ai pas refusé de répondre, c'est que... je n'ai besoin de rien sinon être certain que ma quête sera continuée, que le savoir -si l'on peu l'appeler ainsi- sera préservé, creusé, cultivé comme elle cultiverait une terre fertile mais en jachère. Une vie ne suffit pas, elle n'est pas encore prête pour l'entendre... Un jour, le plus tard possible, je partirai sur la glace et le printemps suivant rendra à la vie les particules qui me composent et qui prendront possession d'autres corps, mettront un peu de moi dans ce qui m'entoure, l'air, la terre, les pierres, les herbes et les arbres, et même des animaux ou des hommes qui sait ? Je ne serai pas mort, je serai re-né. Différent, multiple, la mort n'est pas une fin, ce n'est pas tragique. Elle aussi la rencontrera et j'espère que j'aurai réussi à ce moment là à ôter de sa pensée la peur que ses compatriotes y associent. L'inconnu est espérance, l'inconnu et connaissance, apprendre n'est pas triste, retourner au Tout est normal, pour tout ce qui vit nous compris.

Je n'ai pas répondu.

Parce que je ne sais pas.

La première pensée qui me vient est que je me veux utile, que traverser une vie de divertissement, d’égoïsme et de vanité -non l'orgueil mais bien ce qui est « vain »- me blesserait. J'ai dit ne pas juger, mais c'est ce que font la plupart de mes contemporains, même ceux qui apportent aux autres nourritures, soins, assistance, bien-être... Aucun métier n'est sot, si tu le penses, il m'arrive de faire le ménage ou de débarder des chargements sur les ports ou les gares routières, la majorité de mes collègues travaillent en pensant à ce qui va suivre leur journée de labeur, à leur plaisir personnel, voient leur tâche comme une servitude avilissante plutôt que comme une service rendu à leurs semblables. Oui, si je devais répondre, je crois que je dirais que je veux la paix, non pas le bonheur, mais... la quiétude. Un rôle « profitable » non parce qu'il rapporte de l'argent ou une importance sociale, simplement parce qu'il accompagne le chemin de ceux qui  m'entourent. Je le souhaite en homme, en loup, je pense que « réincarné » en lichen d'une toundra comme en rose d'un jardin, je penserais d'abord à la terre à laquelle j'évite l'érosion ou à l'abeille qui grâce à moi fabriquera son miel...

Je veux... me fondre dans le Tout, envelopper le monde commun de sa présence et entrouvrir une porte sur un univers différent, peuplé de choses et de sens invisibles à l'homme de cette époque... Comment dire cela à une occidentale, même Elizabeth qui perçoit et sent, et sait presque autant de choses que moi.

D'abord, il faut qu'elle canalise ce qu'elle a appelé le « chaos d'équilibre ».

J'avoue, j'ai détourné la conversation, et elle l'a merveilleusement compris :  - Ce n'est pas le sujet.   Toutefois, c'est une autre phrase qui s'est imprimée dans mon cœur.
- Mais pour te répondre, eh bien, je choisirai ma liberté, je le quitterais quitte à subir un calvaire. Tu sais, enfin non tu ne sais pas, mais autant je peux aimer, autant je peux désaimer. Je l'ai déjà fait, ça ne me fait pas peur. 

Non. Je ne demande cela à personne et personne ne doit le souhaiter. Je me dois de préciser, de reprendre son idée première.

- Désaimer ? J'ai peur que ça ne soit pas la solution, encore moins si pour le des-aimer il te faut souffrir...  

Je souris, mes yeux sont rouges mais secs, l'avantage des bruns est qu'on voit moins ce genre de choses que dans un regard clair... D'un geste longuement rodé j'envoie en arrière mes cheveux, les tressent grossièrement et en fais un chignon, bas, compact, qui libère mon visage de toute dissimulation. L'enseignement commence ? Après tout, elle a dit « oui » quand j'ai parlé de lui transmettre ce que je … vis.

- Dans toute opposition il y a un message... Si ton Ob réprouvait ton engagement, avant de le chasser de ta vie il faudrait comprendre ? Non ? On peut refuser quelque chose à quelqu'un -à plus forte raison à une personne aimée- pour bien des raisons. Il peut avoir une opinion différente, c'est parfaitement acceptable tant qu'il ne veut pas plus t'imposer sa façon d'être que tu ne lui imposerais la tienne... Il peut craindre les répercussions, que ce soit sur votre relation ou sur tes interactions sociales au sens large... Il peut te jalouser ou vouloir te dominer et donc exiger que tu ne fasses que ce que lui initie... Je ne pense pas que ce soit le cas de l'homme dont tu m'as un peu parlé, mais cela pousse un être à brimer l'autre...  

Il y a bien d'autres raisons encore, l'important n'est pas la raison mais de l'identifier...

Comme l'important est de savoir où elle se place -elle- dans la quête de l'invisible.

- Peu importe ce qui est à la base d'un refus, tant que tu en connais l'origine. Ensuite tu te positionnes, mais perdre un repaire important parce qu'il pense autrement n'apporte pas le repos de l'âme ou sa libération. C'est même souvent le contraire... Je fais une pause, je vais dans un coin  peu éclairé de la caravane, je n'ai pas pensé la « décoration » de manière à y voir avec les yeux, l'âme me suffit à me mouvoir sans me cogner... Je prends un sac de toile épaisse et deux pierres sculptées grossièrement.  - Dis-moi, es-tu prête ? Si je prends le tambour et t'emmène une fois encore au delà de ce que tu vois éveillée, seras-tu assez sage pour suivre la lumière ?  

Je pense qu'elle comprend, son premier voyage devait selon moi lui permettre de faire la paix avec elle-même, mais elle est partie très loin, beaucoup plus loin que je ne l'en aurais cru capable et beaucoup trop loin pour une première fois ! Il y a en elle de l'ombre comme en chacun, une masse d'ombre considérable pour une jeune femme pleinement impliquée dans la société moderne... Cette ombre pourra être explorée voire exploitée mais plus tard, pour l'instant je voudrais qu'elle voyage non pas en elle mais à travers le Tout.

- Quand tu seras initiée, tu auras ton propre tambour, il permet de mieux communiquer avec ton totem, le mien est tendu de la peau d'un loup et orné de plumes d'un corbeau, j'ignore ce qui viendra à toi. L'animal qui s'incarne en toi t'est propre, son âme et la tienne fusionnent lors des cérémonies -et parfois en dehors aussi- plus rarement il te permet de partager son corps...  

C'est une faculté qui se perd, l'époque est à la rationalisation même parmi les peuples qui se fient encore à mon art, la mondialisation a véhiculé l'idée que l'homme est homme, l'animal est animal, la frontière est étanche... Je suis l'un des rares à maintenir que tu n'es que ce que tu veux être... Il n'y a aucune frontière sinon la barrière que tu dresses par la pensée, si tu oublies les enseignements de ton époque, tu iras là où tu dois aller, en fonction de la situation vécue, peu importe que l'endroit où tu te réfugies soit un loup, une pierre, ou la branche morte d'un arbre vénérable que le Tout rappelle petit à petit... Je tends mon esprit, la parole est un obstacle comme le foi en une science ou une philosophie restrictives...  Rien n'est impossible à celui qui ose. Qui croit non en un un dieu ou un théorème, mais disons... l'universalité du cosmos ? Que les mots traduisent mal les idées !

- Quand tu te sentiras prête, aujourd'hui ou un autre jour, nous chercherons ton totem...  

Je souris.

Non.

Moi, je ne serais qu'un guide veillant à ce qu'elle suive le sentier tracé, trouve la piste de sa bête, et ne flanche pas en la rencontrant...

- TU cherchera ton totem... et tu l'accueilleras comme il t'accueillera.  

Je ne suis plus ici ni maintenant, je ne suis plus un homme brun à la longue chevelure, ni un loup noir, je suis le temps qui se fige dans l'attente de sa réponse.

Moi qui prône la paix et la quiétude je me prépare à une bataille... Le respect du Loup m'a été donné après une longue danse de séduction, faite de morsures et de griffes, l'esprit attend de toi que tu prouves la valeur de ton âme et ne se livre que s'il te juge digne... Je le lui expliquerai le moment voulu.

Musiques:





Note de l'auteur : "Val" Amka Wraith Uyarak est un personnage de fiction qui ne se prétend pas représentatif d'une culture


Quelques notions de mythologie inuit. :





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Mer 27 Mar - 14:14
Le vent nous portera... Tumblr18
Elizabeth Van Sechtelen
J'ai 28 ans et je vis à Helsinki, en Finlande. Dans la vie, je suis comédienne de théâtre et je m'en sors avec un sentiment d'exil. Et puis...Il y a LUI qui m'empêche de me suffire. Je le vis douloureusement.

Le comte et la comtesse Van Sechtelen s'aimaient comme l'on pouvait s'aimer dans le milieu aristocratique. Quelques années plus tôt, leurs familles respectives avaient œuvré avec soin pour que leurs progénitures se rencontrent, s'apprécient. De rallyes en rallyes, des affinités se liaient, les jeunes tricotaient et fricotaient ensemble. Ces deux-là finirent par se marier, encouragés par leurs proches très au fait des avantages de porter un nom prestigieux.
Mais Madame pécha par excès. Grisée, lassée et délaissée depuis trop longtemps par son époux, elle succomba à ce bel amant d'un soir. Renversée sur le bureau d'ébène, elle se laissa aller comme jamais, noyée au creux d'un ventre en feu et assoiffé.

1994

Au sourire de la Lune, elle naquit presque sans bruit. Ne pleura pas. Ses grands yeux ouverts s'arrêtèrent quelques instants sur l'aube de cette grande vie qu'on lui offrait. Il paraît même qu'elle avait souri...
Elizabeth, fruit d'une adultère éphémère. Si jeune et déjà, elle voyait les anges.
Le secret de son origine fut férocement gardé. On l'éleva comme il se doit, telle une descendance de rois. Par chance ou par destin, l'enfant maudit se révéla excellente élève, douée pour les études. Elle aurait pu être promise à une brillante carrière mais sa passion brisa les aspirations familiales. Comédienne ! Ce n'était pas un métier, encore moins un avenir, tout juste un passe temps d'original et ce, chez les autres ! Pas dans le milieu ! Alors, d'une manière subtilement hypocrite et joliment perfide, on la bannit définitivement du clan familial. On ne l'aima pas l'enfant de "l'accident". Le manteau infâme de la Bienséance la revêtait comme une lèpre. Alors, au fil des années, elle développa une sensibilité à fleur de peau. Elle devint différente.HPE diagnostiqua le rapport du spécialiste.

Un.
Deux.
Trois.

Le bruissement du rideau qui se lève.
Arrêt sur scène.
Les secondes ralentissent.

Elle ne voit plus ici. Ses ailes se déploient délicatement
L'audace d'une extravagance
Le chant d'un songe
L'insolence de l'irréalité

Le théâtre. Le RÊVE.

Et puis cette rencontre. Un chauffeur de maître. Un être à part. Ob. Celui qui la comprend. Celui qui résonne. Celui qui rêve avec elle. Les clartés de Là-bas se mirent à resplendir les éclaboussures d'un sublime amour. Un feu douillet valsait tout autour, les écailles de Lune voletaient. Projetée dans une dimension parallèle. Aveugle et sourde à la réalité. S'imprégner de l'éternité. Rêver à deux, à l'Absolu, à l'Infini. Enfin! L'exil n'est plus! Mais...Il s'en est allé loin, soudain inaccessible tel un songe éthéré n'ayant jamais existé.

Eli avait deux cœurs : l'un ici, l'autre...L'autre... ? Non, vous ne saurez pas. Vous ne pouvez pas comprendre.

Le vent nous portera... Val311



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Le vent nous portera... Gyhs

-Désaimer ? J'ai peur que ça ne soit pas la solution, encore moins si pour le des-aimer il te faut souffrir...
 

-Tu m'as demandé ce que je ferai. Je t'ai répondu dans l'absolu. Parfois, il n'y a pas d'autre solution je t'assure.

Elle sourit, un peu pour lui, beaucoup pour de vieux souvenirs. Peut-être sera t-il un jour confronté à quitter un être aimé sans autre alternative après avoir épuisé toutes les options possibles. Elle ne lui souhaitait pas une telle échéance.

-Dans toute opposition il y a un message... Si ton Ob réprouvait ton engagement, avant de le chasser de ta vie il faudrait comprendre ? Non ? On peut refuser quelque chose à quelqu'un -à plus forte raison à une personne aimée- pour bien des raisons. Il peut avoir une opinion différente, c'est parfaitement acceptable tant qu'il ne veut pas plus t'imposer sa façon d'être que tu ne lui imposerais la tienne... Il peut craindre les répercussions, que ce soit sur votre relation ou sur tes interactions sociales au sens large... Il peut te jalouser ou vouloir te dominer et donc exiger que tu ne fasses que ce que lui initie... Je ne pense pas que ce soit le cas de l'homme dont tu m'as un peu parlé, mais cela pousse un être à brimer l'autre...  


Elle l'écouta avec attention. Bien sûr que toute opposition appelait à comprendre, à se comprendre, à accueillir la différence de point de vue mais Eli ne pouvait se limiter à son acceptation.

-Ob jaloux...Non, je ne crois pas en effet. En tous cas pas jusqu'à présent mais notre relation est neuve et ni l'un ni l'autre n'avons été confrontés à des situations, des interactions avec d'autres ensemble. Je ne connais pas son entourage ni sa famille hormis son frère, sa sœur, son père que j'ai juste...croisés dirons nous. Mais si cela se produisait...

Elle eut une moue, goûtant l'insupportable sensation d'étouffement qu'elle subirait en conséquence.

-Penser autrement n'est pas un obstacle en soi au contraire même, c'est enrichissant. Mais ce qu'on en fait peut être difficile, douloureux, problématique. Si Oskar était contre ma démarche avec toi, j'entendrais son refus, on en discuterait mais je ne pourrais pas en tenir compte dans les faits ce qui aurait un impact sur lui, sur moi. Ses craintes perdureront,  à chaque fois que je viendrai te voir, je porterai son refus en moi comme une mauvaise graine. Ce serait une charge mentale, mon cœur serait lourd et je suis convaincue que ce cheminement exige une liberté, un espace bien à lui qui ne supporte aucune pollution d'aucune sorte. Je ne parle pas des limites, des défauts, des zones d'ombre etc mais bien de cette liberté d'âme, pure. Et je... je ne peux pas vivre sans cette liberté Val. J'en serai...malheureuse ? Je ne sais même pas si c'est le bon mot...


-Peu importe ce qui est à la base d'un refus, tant que tu en connais l'origine. Ensuite tu te positionnes, mais perdre un repaire important parce qu'il pense autrement n'apporte pas le repos de l'âme ou sa libération. C'est même souvent le contraire...

Un repère ? Le terme la fit tiquer. Elle s'arrêta quelques instants sur les implications que le concept générait.

-Un repère... ? Je ne considère pas Ob comme un « repère ». Il est...


Elle hésita à s'exprimer, se révéler. C'était...difficile.

-Je n'aime pas ce que tu viens de dire. Un repère sous entend... la possibilité d'être...perdue, seule... désorientée. Je peux vivre sans lui, j'ai plus d'années de vie sans Oskar qu'avec lui et pour cause. Il n'est pas un « repère », il est... au delà des mots humains. C'est une rencontre, une simple rencontre...

Elle se tut, incapable de se livrer plus avant sur le sujet. Son regard prit la couleur d'un secret, regardant le natif d'une drôle de façon.

Si elle, le quittait, -a fortiori s'il la quittait- certes elle perdrait un infini d'absolu d'éternité et le cycle perpétuel du sentiment d'exil reprendrait sa course folle. Son âme ne serait plus en paix ? Aliénée à la rupture ? Choisir Valravn : renoncer à Ob ? Une quadrature du cercle ? Non, aucun obstacle ne perturbera l'harmonie qui les liait, scellée par le Rêve et l'Amour, aucune adversité n'abimera ou n'empêchera le voyage avec le chaman.

- Dis-moi, es-tu prête ? Si je prends le tambour et t'emmène une fois encore au delà de ce que tu vois éveillée, seras-tu assez sage pour suivre la lumière ?  

Elle avait reconnu les pierres, le sac qui protégeait le tambour. Lui rendre visite ne présupposait pas une immersion aussi rapide ! Surprise, elle grimaça légèrement, les yeux brillants :

-Là, comme ça, tout de suite ?

Bousculée, il l'emmenait déjà ailleurs.

-Ok...Sage comme une image, répondit-elle avec un grand sourire. Mais elle n'en menait pas large !

-...L'animal qui s'incarne en toi t'est propre, son âme et la tienne fusionnent lors des cérémonies -et parfois en dehors aussi- plus rarement il te permet de partager son corps...  

Aussitôt son esprit s'envola vers...l'aigle ! Mais une volonté autre émergea brutalement: « je ne veux pas que ce soit un aigle, je ne veux pas !... » L'Oiseau appartenait à son aimé, elle ne se métamorphosait exclusivement que dans, par et avec l'amour de Ob et le sien mêlés ! Cela leur appartenait, procédait d'une intimité confidentielle, impénétrable ! Peut-être le chaman le devinerait, prescient et habité par son savoir mais pour l'heure, elle garda le silence sur son expérience, priant désespérément une fraction de seconde qu'il soit un tout autre animal.

-TU chercheras ton totem... et tu l'accueilleras comme il t'accueillera.
 
-Je chercherai et j'accueillerai...

De nouveau elle lui sourit. S'il n'avait pas été LUI, lui qu'elle aimait de tout son cœur, lui vouant une confiance aveugle...elle se serait enfuie.

Anma ed Préia

Des tonnerres et de la pluie, les arbres hurlent
Nous sommes faits de cendres et d'ombres, de brouillard et d'une pincée de poudre.
Soirée venteuse, fumée du destin.
Étoile, ouvrir une fente.
Étoile, garde la ouverte.
Il neige des cendres
Fièvre, rêves
Brûler dans les veines
Ils réveillent le sang.
Cendre, terre et os.
Cendre, chair et feu.
Âme de pierre.
Âme de pierre.
Étoile, ouvrir une fente.
Étoile, garde la ouverte.
Cœur de feuilles, des épines et du sang de ceux qui ont seulement voulu boire.
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Lun 1 Avr - 19:28

Amka Wraith,
dit « Valravn ou Crow »  

J'ai 33 ans et je vis pour le moment à Helsinki, Finlande. Dans la vie, je suis .. . que dire ? J'ai fait à peu près tous les métiers qui ne demandent que de la bonne volonté et du muscle, pas que je sois idiot, mais je n'ai pas en tête de « faire carrière » dans aucun. En fait, je suis chamane en quête du Savoir qui fera de moi un sage porteur de sagesse auprès de tous. Je suis célibataire, mon rôle ici bas n'est pas de procréer, mais de transmettre autrement l'humanité et la paix. Je dois être libre, attaché à tous et non à l'un(e), pour aller au bout de ma quête,.

Sur mes papiers, il est écrit Amka Wraith... Avant ce que je continue à appeler la colonisation avec une rancoeur qui m'honore peu, nous nous appelions Uyarak, Je suis Amka Uyarak, et répond aux surnoms de Valravn que j'utilise souvent comme prénom, et de Crow...

J'ai récemment reçu du sort ce que je considère comme une malédiction... une... âme sœur moitié supposée amputée de mon être lors de sa création. Les sentiments et la douleur que cela fait naître en moi m'horrifient !




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Le vent nous portera

Elizabeth &  Amka (Valravn)


Le vent nous portera... 21300722




« Le monde est ce que vous croyez qu'il est, il n'existe pas de limites, maintenant est le moment de pouvoir... »

Octobre 2023

- j'entendrais son refus, on en discuterait mais je ne pourrais pas en tenir compte dans les faits ce qui aurait un impact sur lui, sur moi. Ses craintes perdureront,  à chaque fois que je viendrai te voir, je porterai son refus en moi comme une mauvaise graine. Ce serait une charge mentale, mon cœur serait lourd et je suis convaincue que ce cheminement exige une liberté...   

- Oui.    

Nous philosophons probablement sans raison, mais savoir que pour aller au bout de mon « enseignement » elle quitterait l'homme qui fait vibrer son cœur... Non que j'ai de l'amour une idée … orthodoxe. Pour moi, aimer se fait comme tout, en passant, en voyageur qui va de l'un à l'autre, revient, repart, reste sans donner de nouvelles puis surgit et reçoit l'accueil qui lui est destiné. Si la personne qui a dit m'aimer peut accepter cela, alors de moi elle aura la fidélité et un attachement inébranlable, en n'importe quelle circonstance, je n'ai aucune gêne à accepter l'un quand je suis avec l'autre, aucune honte à changer de foyer momentanément, à passer d'un cœur au suivant... C'est que le mien est assez grand pour ne jamais « dés-aimer » comme le dit ma compagne. J'aime, mon âme s'ouvre, mon corps s'offre... Je suis un compagnon aussi insaisissable que dévoué, par mont et par vaux mais présent au moindre appel, et toujours aussi aimant qu'au premier jour. Elle, j'ignore de quelle manière elle aime, mais elle vient de dire qu'elle préfère quitter qu'être jugée, jaugée et entravée... Pourquoi « quitter » ? Ne suffit-il pas de fixer les règles ? « Je t'aime mais rien ne pourra m'attacher à toi, vouloir m'emprisonner ne ferait que m'éloigner, si tu me gardes ton cœur, malgré mes départs, alors je reviendrai... et te serai reconnaissante de m'accepter telle que je suis ? » C'est tout simple ? L'amour est un oiseau migrateur, il suit son instinct mais revient au bercail, la saison mauvaise passée -ou la bonne- selon le point de vue adopté.

Je développe mon « oui » liminaire...

- Mais même éloigné, crois-tu que ton cœur ou ton âme l'oublieraient ? Crois-tu qu'il lui suffit de prendre la porte pour que tu parviennes à le chasser de ta mémoire, sans le moindre remord ou regret ? S'il te déniait le droit d'aller au fond de ta quête, ta liberté de toute manière ne serait-elle pas entachée de ce refus ?  

Les relations entre membres d'un clan sont complexes... Fonder une famille ou juste ouvrir son cœur, cela aboutit à en créer un. Une fois dans le même cercle, proche ou lointain, chaque membre impacte les autres dans chacun de ses agissements... Si Oskar que je ne connais pas disait « non », Elizabeth, même en s'étant affranchie de sa présence ne serait pas totalement libre... Elle le confirme par la suite …

-  Je n'aime pas ce que tu viens de dire. Un repère sous entend... la possibilité d'être...perdue, seule... désorientée. Je peux vivre sans lui, j'ai plus d'années de vie sans Oskar qu'avec lui et pour cause. Il n'est pas un « repère », il est... au delà des mots humains. C'est une rencontre, une simple rencontre...    

Mes lèvres s'entrouvrent et mon sourire éclate... Ils sont rares, je n'ai que peu l'occasion de montrer ma joie, ma sympathie et moins encore ma proximité avec d'autres humains... D'abord j'ai parlé d'un « repaire », un refuge, elle n'a pas compris mais surtout, un homme qui n'est pas un « repère » mais une simple rencontre « au delà des mots humains » ? Pour moi et pour beaucoup j'en ai peur, une « simple rencontre » s'oublie dés le lendemain. C'est quelqu'un qu'on a eu plaisir à croiser mais dont l'aura ne justifie pas qu'on le suive, ni dans le temps ni dans l'espace... ça ne veut en aucun cas dire qu'il ou elle n'a pas de qualité, ne gagnera pas l'amitié ou l'amour d'autres personnes, uniquement que la fusion des âmes ne s'est pas produite.

- Le monde est plein de « simples rencontres » Eli... Mais aucune ne se situe « au delà des mots humains » si elle n'est rien de plus. Que tu l'aimes d'amour ou d'amitié, qu'il soit un frère ou un amant, ou plus un aimé dont le corps ne suffit pas à tes désirs, il n'est pas expulsable aussi vite et parfaitement que tu le dis... Mais nous parlons pour rien très certainement. Et puis... si tu crains sa réaction, ne lui dis rien, le silence n'est pas un mensonge, même s'il est volontaire.    

Je me démarque du commun là encore... La plupart des gens considèrent que taire une chose importante est mentir, moi, je pense que taire ce qui est important pour l'un(e) et qui risque de blesser l'autre est une action louable... Des guerres se gagnent par le silence, ou mieux, s'évitent ! Ne rien dire, c'est préserver celui qui devrait entendre et celui qui devrait parler. La plupart des désaccords sont dénués d'importance y compris -et peut-être surtout- s'ils paraissent « monumentaux » à l'instant T, donc autant les éviter. L'homme est le seul animal à attaquer pour des idées, à prendre la mouche pour un mot mal choisi, une phrase mal comprise ou un ton inadéquat. C'est aussi l'une des rares créatures existantes à n'avoir pas de soupape de sécurité, un loup gaffeur se fera pardonner en se montrant l'échine basse actant sa soumission au maître de la meute, au pire il sera exilé... L'homme se braque, revendique ce qu'il appelle « honneur » et va à la catastrophe, le sachant bien souvent mais trop orgueilleux pour renoncer et mettre genou à terre : je t'ai offensé, je le regrette, je n'en avais pas l'intention. Accepte mes excuses et restons-en là?

Je me fais l'effet d'un vieux ponte ressasseur... Cette impression encore d'avoir trop vu, trop entendu, peut-être trop lu, et surtout trop vécu ! Je suis las. Las d'être confronté jour après jour à l'humanité. Si j'étais lâche, je revêtirais ma peau de loup et m'éloignerais, solitaire... J’omettrais de parler, de penser, je suivrais mon instinct et finirais mon existence en chassant et qui sait, en intégrant une meute ? Je ne suis plus un jeune loup, pas vieux non plus, bon traqueur, tueur efficace, paisible compagnon de route, dans le genre qui continue sa route d'un pas sûr en oubliant de mépriser, de défier, ou de commander... mais aussi qui n'obéit pas.

Mon sourire se creuse, s’accroît, si elle était change-peau je lui aurais raconté. Là, l'humour de la situation lui échapperait. Un libertaire reniant toute autorité n'appartient à aucune meute... J'ai même quitté les miens pour ne pas recevoir d'ordres ou de directives qui auraient pu me déplaire ! Pourtant j'ai travaillé, je continue, je me plie aux exigences de la hiérarchie, sans être obséquieux mais dénué du défi et du mépris que l'on trouve parfois dans une attitude pourtant obéissante et conforme... J'ai parfaitement conscience de l'inégalité des sorts et de la « lutte des classes », simplement... je vois au -delà de l'humanité, mon unité de temps est … infinie.

Bref, là n'est pas la question.

- Je ne te parlais pas d'un repère dans le sens d'une borne de sauvetage Eli, tu n'as pas perdu ta route, du moins ça ne semble pas être le cas ? Je te parlais d'un refuge... Perdue et désorientée, je pense que tu ne l'es pas... Seule...     

Je ne continue pas, je ne doute pas qu'elle soit entourée -physiquement- je le suis aussi, bien que cela puisse sembler étrange à beaucoup. Mais dans une foule dense et compacte on peut être seul. Quand elle parle d'Ob, j'ai le sentiment qu'elle parle d'une contrée magique et merveilleuse où rien ne peut lui arriver de mal et où elle se plaît à se ressourcer... Peut-on le faire auprès d'une « simple rencontre » ? J'en doute.

- Je peux me tromper, si c'est le cas je te présente mes excuses, je ne voulais ni te déplaire ni te troubler et je ne tiens absolument pas à être l'homme-sage qui sait et veut avoir raison à tout prix... Nous aurons le temps d'en reparler ? Si tu le désires. Je ne souhaite pas non plus être intrusif.     

Je ne le veux pas, mais malgré moi, si elle s'engage dans la voie que je lui propose d'emprunter, je le serai. Modérément, le moins possible, mais pour être certain qu'elle choisit un chemin sûr, je devrais l'accompagner dans ses voyages, rester à portée d'un cri de son âme. J'ai besoin de savoir si nous risquons au détour d'un songe de rencontrer un esprit malfaisant et soucieux de l'égarer pour la garder à lui ? Parfois, les hommes les plus raisonnables abritent en eux des créatures de l'esprit qu'ils ne soupçonnent même pas.

- Là, comme ça, tout de suite ?  

Sa surprise me prend à revers... Suis-je trop pressé ? Oui, je le suis. J'ai l'impression que mon temps est compté, je sais que c'est stupide, j'ai interrogé les esprits, j'ai consulté la chamane sami qui m'a abrité lorsque j'étais en quête de ma voie, bouleversé par la rencontre de Mary... Rien n'indique que mon terme approche, je suis en bonne santé, physique et mentale, donc ce sont des idées que je me fais... ou bien ? Ou bien je sais que je vais retourner aux sources et crains de n'en pas repartir ? S'arracher aux siens est dur, je l'ai fait une fois, ma mère était jeune, ma grand-mère vivait... Je veux revoir ceux que j'ai connu et aimé. Je vais retrouver une femme que les quinze années passées au loin n'auront pas rajeunie, qui me ment possiblement sur son état de santé, voir de nouvelles têtes, entendre de nouvelles histoires dont si je repars je ne connaîtrai la suite qu'imparfaitement... Quand j'ai quitté mon île, j'avais peur pour l'avenir de mon peuple et de ma culture, je voulais en être le témoin et propager notre histoire tout en cherchant la connaissance. Qu'ai-je fait ?

Maudite âme sœur ! J'ai désormais l'impression de m'être perdu en route ! De n'avoir rien accompli de ce que j'avais en tête. Le doute est comme l'eau qui ronge une pierre friable... d'un roc à l'apparence solide il fait un château de sable.

-  Seulement si tu te sens prête. Rien ne presse, il te faut être dans une condition propice au voyage...     

J'ai dit, impatient, trop semble-t-il -Tu chercheras ton totem... et tu l'accueilleras comme il t'accueillera.

- Je chercherai et j'accueillerai...  

Je cherche dans son regard une certitude... Est-elle prête ? Une fois déjà j'ai présumé de ses forces et l'ai poussée trop loin ? Ai-je à ce point confiance dans sa force d'âme et sa détermination ? Elle ne doit courir aucun risque...

-  Eli... certaines âmes sauvages peinent à accepter le lien, ou du moins à t'admettre comme partenaire. Lorsque tu rencontreras ton animal totem, l'un comme l'autre vous saurez... mais au moment de s'engager, il peut refuser non l'affinité mais … la servitude. Comme les hommes certaines bêtes considèrent l'amitié comme un asservissement... aimer, c'est perdre une part de sa liberté et aliéner son libre-arbitre... Lorsque c'est le cas, l'animal se cabre comme un cheval craintif et peut devenir agressif, es-tu sûre de vouloir partir en quête ? Te sens-tu prête à cette éventualité ?    

Je ne sais pas pourquoi je me sens obligé de le lui dire, et surtout pourquoi j'ai le sentiment qu'elle doit absolument le savoir ? La plupart des rencontres sont pacifiques et revêtent au contraire la dimension d'une rencontre magique, doublement consentie et accueillie avec une joie indicible ?

-  C'est rare, mais cela peut être. La plupart du temps, fusionner avec son totem est un plaisir surnaturel... Mais tu dois savoir que la peur n'est pas qu'humaine, et qu'un animal n'aura pas le degré de « civilisation » pour la déguiser. Si tu le rencontres et le sens réticent, propose de revenir, donne lui le temps.    

Exactement ce que moi je ne fais pas avec elle.

Ce que je veux lui transmettre est pourtant une expérience que rien ne peut précipiter... N'ai-je pas dit et répété que le temps n'existe pas et que tout vient à temps ?

Le vent nous portera... Art-inuit-traditionnel



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Note de l'auteur : "Val" Amka Wraith Uyarak est un personnage de fiction qui ne se prétend pas représentatif d'une culture






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