« L’autre Chris ». Chris avait entendu ces deux putains de mots toute sa vie. L’autre Chris. Celui que sa mère avait connu avant même sa conception. Celui qui était venu du passé dans l’idée de tuer son petit frère qui allait devenir démoniaque. Celui qui avait envoyé son père au Valla hala, et qui d’ailleurs ne l’aimer pas du tout. Chris et Léo, ce n’était pas une histoire d’amour, mais pas au point de l’envoyer dans le paradis des guerriers ? Il n’était pas monstrueux à ce point, n’est-ce pas ? Chris,  ce Chris, celui qui est né, qui a vécu, qui vit avec le souvenir d’un homme qui était lui mais pas lui, en avait ras le cul. Il était gentil. Souvent. Il essayait d’être le plus agréable à tout le monde. Il n’était pas aussi puissant que son frère. Chris était plus être de lumière que sorcier. Là où Wyatt était plus sorcier qu’être de lumière, c’était pour ça qu’il était plus facilement posséder par le mal.

N’empêche vue toute la tension que Chris ressentait dans ses tripes, il ne comprenait pas comment il pouvait ne pas être un être des ténèbres, parfois. Son cœur était toujours tendu. Il était toujours sous tension. L’autre Chris. Putain. Ce putain d’autre Chris qui était comme une ombre sur son épaule. Il descendit l’escalier du manoir pour entendre sa mère parlait avec son père.

- L’autre Chris, commença Piper sans se douter de la douleur que causer ses mots à son fils, était moins sous tension.
- L’autre Chris, reprit Léo, n’était pas notre fils. L’autre venait d’un monde où notre autre fils faisait le mal et créer la terreur. Il est venu, il a changé le futur, il est mort et nous avons eu notre fils.

Sur ça, Léo était le seul à faire attention. Il n’utilisait rarement l’autre Chris pour le comparer. Chris, celui-ci, se mit contre le mur. Il savait être l’autre Chris depuis longtemps. Cachant cet état de fait à tout le monde. Il n’avait pas eu envie d’avouer les visions qui l’assaillent. Il se souvenait de certaines choses. Mais ce n’était pas lui. Il n’était pas l’autre. Il attendait une soirée où tout le monde était présent. Pour le bien des empathes de la famille, il y avait toujours des charmes misent autour et dans la maison pour que les pensées et les sentiments restent personnelles. Il regarda sa cousine, au loin. La fille de Phoebe n’avait jamais eu besoin pour le comprendre. Proche en âge, il préféra tourner les yeux et l’éviter durant tout le repas. Alors que sa mère allait apporter le dessert, c’était toujours bien d’avoir une mère chef cuisinier, il s’éclipsa sans magie. La magie était détectable. Il fallait être ailleurs avant que quiconque ne remarque sa disparition. Les clés de voiture dans sa poche, des charmes pour que rien ne puisse le retrouvaient tatouer sur sa peau, il arriva devant la voiture et parti sans allumé les phares. Il avait mit un sac d’habits, de l’argent et de quoi vivre tranquillement. Il ne voulait pas partir milles ans. Juste le temps qu’on l’oublie. Le vrai Chris serait certainement plus rapidement oublié que l’autre Chris. Et c’était pour le mieux. Il avait même pensé à chercher un moyen de rendre son corps à l’autre Chris, c’était dire.

Il avançant sans feux jusqu’à la limite de la ville pour rallumer les feux et sortir. Il avait évité le GPS, retenant de mémoire la carte qu’il avait vérifié dans l’ordinateur de son université. C’était les vacances. Il reviendra avant la rentrée, ou pas. Il avait choisi de changer de pays. Le Mexique avait son lot de démon, aussi, et moins de sorcière pour protéger les innocents. Surtout une ville qui était connue pour être le repère de démons. Il allait s’y rendre. Pour qu’on arrête de l’emmerder. Alors qu’il regarda dans le rétro, il sursauta en voyant la tête de sa cousine apparaître sur la banquette arrière. Il sursaute.

- Putain *insérer prénom ici* qu’est ce que tu fous là ?

Il s’arrêta sur le bas côté aussi rapidement que possible pour se retourner vers elle. Si elle était là, ses parents pourront les retrouver. Assez rapidement, il prit son bras et fit un sortilège pour qu’un tatouage de « disparition » apparaisse sur son bras et qu’elle soit indétectable comme lui.

- Tu vas rentrer à la maison, tout de suite !

Prudence n'avait pas été dupe, elle avait des yeux, et surtout, son empathie allait au delà des simples pouvoirs qu'avaient pu lui léguer sa mère. Ses compétences en la matière étaient bien humaines, et ces derniers temps, elle avait bien remarqué le comportement mutique et sombre de son cousin. Mais la véritable bascule se produisit durant un énième diner de famille banal, lorsque Chris s'était décidé à fuir son regard durant toute la soirée, et elle comprit alors qu'il tentait de lui cacher quelque chose. Il la connaissait, il avait conscience qu'elle n'allait pas le lâcher sans savoir ce qu'il se tramait dans sa tête, et s'il y a bien une chose qui la poussait toujours à vouloir en savoir davantage, c'était justement ce genre de comportement fuyant.
On lui avait parlé, de 'l'autre Chris', du fils que Pipper et Léo avaient connu avant même qu'elle ne tombe enceinte, une histoire qui, dans son quotidien de sorcière, n'était en soit pas très surprenante au vu de toutes les bizarreries qu'elle avait déjà vues dans sa jeune vie. Pourtant, Prudence n'avait jamais parlé de cela avec le Chris du présent, de son ressentit quant à cet autre lui qui avait connu ses parents, et bien qu'elle était une empathe, elle ne s'était jamais douté qu'il le vivait si mal. Pour elle, son cousin cachait d'autres secrets qu'elle ignorait, et cela malgré leur proximité au sein de la famille.
Ce soir, en plus, il avait eu le culot de sortir de table avant le dessert, et ça, Prudence n'allait pas lui pardonner.
Elle l'avait suivi, discrètement, et elle l'avait vu passer la porte d'entrée. Pour ne pas être repérée, et ne pas attirer l'attention sur eux, la jeune femme se hâta au grenier de la maison, et de là-bas, elle se jeta à l'unique fenêtre. Prudence avait remarqué le sac qu'il avait emporté avec lui avant de démarrer, et tout cela ne lui disait rien qui vaille.
Elle rayonna donc rapidement, merci au don de papa Coop, avant qu'il ne s'enfuie, et elle atterrit juste derrière lui, sur la banquette arrière.
Plusieurs longues minutes plus tard, la jeune sorcière décida finalement de signaler sa présence en se redressant, et à peine avait-il pu s'apercevoir de sa présence qu'il lui signala immédiatement son mécontentement.

-C'est toi qui es en pleine fugue, pas moi je te signale, alors c'est à moi de te demander ce que tu fais là

Lui déclara-t-elle tandis qu'il se garait. Après avoir reçu le charme adéquat pour camoufler sa présence, Prudence croisa les bras, fixant son cousin avec insistance.

-Tu crois que j'ai pas vu ce qu'il se passe ? Ce n'est pas parce que tu ne parles pas que personne ne le voit, ma mère est une sorcière empathe Chris, et mon père est un cupidon, et si moi je ne peux pas sentir que quelque chose ne va pas, alors personne ne le peut

Elle se laissa tomber sur la banquette arrière, se mettant aussi à l'aise que possible, les bras derrière la tête, un large sourire collée sur le visage. Elle la jouait détendue, pour lui signaler qu'elle était là désormais, qu'elle était collée à lui comme un chewing-gun à sa chaussure, et il n'allait évidemment pas pouvoir se débarrasser d'elle si facilement.

-Bon, tu vas m'en parler ou on doit attendre des heures de silence gêné avant que tu ne délies ta langue ? Parce que je ne m'en irais pas, ou si je m'en vais, il y a quelques sorcières qui possèdent ce qui s'appellent le pouvoir des trois qui ne risquent pas de laisser les États-Unis, voir le continent Américain, ou peut-être même le monde tranquille avant qu'elles ne t'aient retrouvé, et je te signale que ton père peut s'éclipser, comme moi, comme tante Paige, comme ton frère, comme mes sœurs... tu veux que je continue ? À nous tous, on te retrouve en moins d'une semaine, moins de deux heures si tu quittes pas la ville

Lui signala-t-elle avec beaucoup d'assurance.

- Je ne fugue pas, se défendit-il bien que tout crier le mensonge, je pars juste faire un tour.

Il n’avait pas du tout un sac, de la bouffe et un sort qu’il venait d’imposer sur sa cousine aussi pour permettre de partir « faire un tour » sans date de retour. Il lui lâcha un regard mauvais. Il n’avait pas envie de parler. Il n’avait pas envie de lui faire comprendre. Putain, il n’avait même pas voulu d’elle dans la voiture.

- Le but était que personne ne le puisse, bougonna-t-il en observant sa cousine.

Il aurait préféré qu’on le laisse tranquille. Plus solitaire que Wyatt, moins fort que lui, plus discret que l’autre Chris, moins empathe que ses cousines, moins intelligent que la fille de Paige. Chris en avait vraiment ras le bol d’être le dernier de la famille. Même sa petite sœur avait plus de louage que lui. Lui, il n’avait que l’autre Chris pour montrer ses prouesses. Chris sentit une vision de ce passé qu’il n’avait pas eu… Il la repoussa alors qu’il se retourna vers complètement vers sa cousine.

- Je n’ai rien à dire, fit-il doucement, il n’y a rien à dire.

Il savait, au fond, que c’était stupide d’être jaloux, dans une moindre mesure, de son autre Chris, mais c’était plus fort que lui. Il ne supportait plus cette comparaison constante qu’ils faisaient tous. Tout le temps. Comme s’il avait eu un impact sur cet autre Chris. Putain. Il lâcha un regard à sa cousine et tapota la place passager.

- On va quitter la ville, reprit-il en acceptant sa présence, et je ne suis pas aussi stupide que ça. Après mon départ, je comptais utiliser un sort que j’ai placé sur chacun d’entre vous, qui me permet de savoir si vous vous approchez de moi. J’aurais juste dû l’utiliser avant de partir, d’ailleurs…

Il ouvrit la main et fit s’éclipser le téléphone de la jeune femme avant de faire un geste vers la route pile au moment où une voiture passa. Comme ça, personne ne sera capable de les retrouver par un autre biais. On pensait toujours à la méthode magique, pour trouver les démons, pour faire un sort, mais le monde avait évolué et maintenant il y avait plus. Il avait trouvé la ville aux démons grâce à des rumeurs sur internet… et s’il le pouvait, tout le monde le pouvait. Il soupira.

- Tu es sûr de vouloir venir avec moi ? Je ne sais pas si ça sera dangereux, et je ne sais même pas quand …

Ou si, pensa-t-il.

- … on rentrera. Sans le dire, à personne. Juste toi et moi. Si tu refuses Prudence, alors au nom de notre lien particulier je te demande au moins deux ou trois heures d’avance, avant que tu ne m’envoies l’armée de sorcière… S’il te plait.

Il avait besoin de ces « vacances ». Il en avait besoin comme de l’air qu’ils respirent ou du sang dans son corps. Il avait besoin de vivre loin de sa famille, sans personne, sans attache. Elle était là. Prudence n’était pas la pire. Il pouvait l’accepter. Il l’aimait bien. Mais il espérait qu’elle accepterait ses conditions.

Malgré l'acharnement de Chris à repousser sa cousine, à demeurer muet au sujet de ses motivations, Johanna avait conscience qu'il lâcherait le morceau à un moment ou à un autre. Alors, d'abord, elle le laissa dire, lui dire qu'il n'y avait rien à dire, qu'il n'allait pas partir bien loin, puis, petit à petit, la vérité se révéla. Quitter la ville ? C'était plus qu'un petit détour sur un coup de tête, et ça, Johanna avait eu raison de le soupçonner. C'était pour cela qu'elle se révélait sous être une tête brûlée, les 'et si c'était pas si grave ?' et les 'peut-être que je devrais le laisser tranquille ?' très peu pour elle, quand il y avait un doute, alors il n'y avait plus de doute : il fallait agir.
Lorsque Chris éclipsa son portable pour l'écraser sur la route avec la voiture passante, Johanna quitta son sourire, et éleva la voix contre son cousin.

-Hey ! J'allais appeler personne, t'avais pas le droit de faire ça ! T'as intérêt à m'en repayer un, et le dernier modèle, sinon je le refuserais

Déclara-t-elle, les sourcils froncés, et la mine grave. En tant que lycéenne, Johanna demeurait une jeune fille accro à son téléphone comme tous les jeunes de son âge, et la perspective d'effectuer ce voyage sans son fidèle compagnon à ses côtés ne l'emplissait pas de joie... mais en tant que cousine, en tant que sorcière qui connaissait les dangers pouvant surgir à n'importe quel moment sur le chemin de Chris, elle ne pouvait décemment le laisser seul.

-Arrête avec tes mélodrames, je vais pas te laisser aller je ne sais où tout seul, si j'ai hérité du nom d'une tante morte pour protéger ses sœurs, c'est pas pour me dégonfler maintenant

En se rendant compte de la comparaison qu'elle venait de faire, la jeune fille revint immédiatement sur ses paroles, et se reprit sur un ton empli de panique.

-Enfin, je vais pas mourir pour toi hein ! Jamais de la vie, mais au moins, je peux te couvrir

Affirma-t-elle avec détermination. Elle supposait qu'elle n'avait plus besoin de se cacher désormais, alors elle quitta la banquette arrière pour se déplacer sur le fauteuil passager, à côté de son cousin. Elle supposait que cela n'allait pas le déranger, après tout il avait abandonné l'idée de la renvoyer à la maison. Prudence n'avait cependant aucune idée de la panade dans laquelle elle se mettait, après tout c'était sa marque fabrique : foncer d'abord, réfléchir ensuite. Alors elle détourna son regard en direction de son cousin, et le questionna du regard.

-Tu prévois d'aller où exactement ? T'as déjà un lieu en tête ? Je t'imagine bien en mode retraite spirituelle... non, t'es dans une phase plus dark... un groupe de sorciers gothiques ? Dis-moi tout

Elle avait retrouvé son sourire, son envie de le taquiner, parce qu'elle n'imaginait pas son cousin se mettre dans une situation dangereuse, quand bien même il avait besoin d'air, et de se changer les idées. Oui, elle le pensait réellement.

- Tu veux venir, fit Chris sans prendre ombrage de la colère de sa cousine, mes règles. Et si tu veux.

Il ne fit pas remarquer qu’il avait que des vieux téléphones lui. Parce qu’il était le genre de personne à penser que si quelque chose fonctionne, tant que ça fonctionne, alors on le garde. Sa voiture en était la preuve. Son ordinateur, son téléphone, même ses livres avaient ce principe. Même s’il avait envie parfois d’utiliser la magie pour augmenter leur durée de vie, il ne le faisait pas. On n’utilisait pas la magie pour son propre bien. Mais Chris était le genre économe à l’excès. Pour pouvoir disparaître dans qu’on l’emmerde. Il avait prit de l’argent, liquide. Il avait laissé tout le reste chez lui.

- D’ailleurs, tu mettras ta carte de crédit ou toutes tes cartes à puces dans la boîte à gant. Et ne jamais les utiliser. Même si tu en meurs d’envie.

Darryl, le meilleur ami des sœurs, était toujours un touche à tout dans la police. Tout le monde le connaissait… et il connaissait les moyens de trouver des fugueurs. Heureusement pour Chris, Darryl lui avait déjà dit plusieurs fois les « erreurs » que faisaient les personnes qui voulaient disparaître. Alors Chris avait prit en compte la voix « policière » autant que la voix « sorcière » ce qui attestait encore une fois de la prémédité de son acte. Il l’observe. Avoir le nom d’une tante morte. Elle est pas mal celle-là. Pratiquement aussi magnifique que l’autre Chris. Il soupire et la regarde.

- Si tu dois choisir entre ta vie et la tienne, tu choisis la tienne. On est bien d’accord sur ça. Tante Phoebe me tuerait s’il t’arrive quoi que ce soit. Voilà pourquoi je comptais partir tout seul.

Il mit le clignotant et repassa sur la route, écrasant à nouveau le reste de téléphone de sa cousine avec un petit sourire narquois. Oui. Bon. Cela l’amuse un peu. Les propositions de sa cousine le firent sourire aussi. Mhhh… Retraite spirituelle, ça lui ferait mal. Se retrouver au milieu de sorciers gothiques ? Très peu pour lui. Il avait eu une époque gothique. Eyeliner et cheveu teint en noir. Mauvaise période. Plus très envie d’y penser. Alors il sourit. Parce que l’idée qu’il avait eue était clairement biiiiiien pire.

- Real De Catorce, une ville fantôme selon les médias mexicains. La réalité c’est que les humains se retrouvent dans cette ville repartent très vite. Tous sont amnésique, devenu fous, incapable de retrouver leur sensation ou leurs souvenirs. Les médias le voient comme la malédiction de la Santa Muerte.

Il se tourna légèrement vers elle avec un sourire.

- Je pense que c’est toutes les preuves d’une possession démoniaque. Alors j’y vais. Pour voir et enquêter. J’ai pris une réservation sous un faux nom et avec la carte de crédit d’une autre personne dans mon université. C’est un hôtel où il y a eu le plus de taux de suicide. Tu es sûr de vouloir venir ?

Il n'avait aucune envie de mettre sa cousine en danger. Il ne voulait pas qu'elle se retrouve morte par sa faute. La ville était officiellement vide. les morts n'étaient pas reliés entre eux. Peut-être avait-il totalement tort ... Mais Chris doute d'avoir tort. Il pense qu'au contraire, ils trouveront là-bas une ville de démon avec un funeste plan. En tout cas, Chris y allait avec cette idée. Il était prêt à aller n'importe où dans le monde pour se sauver de sa maison... et se jeter dans tous les emmerdes possibles. Mais ... même ave sa cousine ?

Lorsque Chris lui demanda de déposer ses affaires dans la boîte à gant, Johanna soupira, elle avait parfaitement conscience qu'elle ne pouvait discuter avec son cousin, car il n'allait pas prendre le moindre risque de se faire repérer, c'était certain. Inutile alors de jouer la forte tête avec lui.

-Oui maman

Soupira la jeune femme. Elle fouilla dans sa poche arrière et plaça le contenu de son portefeuille dans la boîte à gant, elle n'allait même pas trier, elle préférait tout mettre à l'intérieur afin de montrer à son cousin qu'il pouvait lui faire confiance et qu'elle n'était pas là pour lui mettre à l'envers. Si c'était le cas, cela faisait déjà un petit moment que toute la famille aurait débarquée ici. Ça, il pouvait en être certain.

-Voilà c'est fait, t'es content ?

Lui lança-t-elle, un petit sourire narquois sur le visage. Lorsque Chris lui expliqua le lieu ans lequel ils se rendaient, et la 'mission' qu'il s'était confié, Johanna fit la seule chose que l'on n'attendait pas d'elle : se taire. Elle dut bien se taire, pour réfléchir quant à la réalité de la situation qui allait se présenter à eux. Une ville fantôme au Mexique, rien que ça ? Cela avait l'air risqué, e Johanna se disait que si elle, en tant que lycéenne tête brûlée, trouvait l'idée plus dangereuse qu'attrayante, c'était vraiment que Chris était désormais prêt à tout pour montrer à tout le monde qu'il n'était plus l'ombre de lui-même, mais bien un sorcier à part entière. À quel prix cependant ?

-Attends, pause, trente secondes, tu parles d'une ville... une ville entière dans laquelle les humains ne peuvent pas rester ? Ça ne me dit rien qui vaille, surtout que personnellement, je suis pas experte des démons qui sévissent au Mexique, si on a besoin d'une potion puissante pour le vaincre, il faudrait consulter le livre des ombres, non ? T'as tout imprimé dans ta tête ? Et si on fait face à un démon qui n'a jamais quitté le Mexique et qui est inconnu des sorciers qui nous ont précédés ? Et si on doit faire face à plusieurs d'entre eux ? On fera comment, on improvisera ?

Malgré ses réticences, et la panique visible sur son visage, la jeune femme ne comptait pas fuir, mais ce n'était pas sans avoir obtenu un maximum d'informations qu'elle suivra son cousin dans une panade pareille. Bien sûr que c'était stimulant, c'était leur première enquête à deux, la première enquête solo de la nouvelle génération de sorciers. Donc oui, sur le papier, c'était assez stylé. Mais... quand même.

-D'accord, t'as envie de te prouver à tes parents, et à toute la famille, mais tu ne t'es pas dit qu'avant de gravir le mont Everest, il faut d'abord apprendre l'alpinisme ? Tu vois ce que je veux dire ?

Cependant, dans toute cette histoire, une chose avait surtout attiré la curiosité de Johanna, un détail dont Chris avait parlé, et qui l'embêtait bien plus que tout ce qu'il lui avait dit jusqu'ici.

-Par contre si on y va, et que t'as pris une chambre sous un faux nom, on fera comment ? Je squatterai la tienne ? Je te préviens, si tu me fais dormir sur la moquette, je me vengerai

Précisa-t-elle avant de continuer.

-Je suppose que je vais devoir lancer un sortilège sur ma carte d'identité, mais faudra qu'on se casse vite de la ville si on se rend compte que ça devient trop dangereux, parce que le sortilège risque de ne pas de durer longtemps et que j'ai moyen envie qu'on sache que je suis une Halliwell... et aussi que j'ai pas l'âge pour boire de l'alcool

Changer deux-trois chiffres sur sa carte d'identité, Johanna l'avait déjà fait, oui, elle ne pouvait le nier, par contre, se donner une autre identité, elle ne l'avait jamais fait, et elle ne se savait pas suffisamment puissante pour que tout fonctionne bien pendant des jours. Le sort qu'elle allait lancer allait sans doute être fragile, et elle espérait alors que ce voyage n'allait pas s'éterniser jusqu'à trahir sa véritable identité.

Il avait expliqué son plan. Plan plutôt bancal, il l’admettait bien vite … mais plan tout de même. Y aller, voir, attendre, régler le souci sans l’aide de quiconque. Ce n’était pas réellement qu’il voulait montrer sa valeur (qu’il pense) mais plus pour sortir de la famille un temps. Faire parti de la famille des Halliwell en étant un ancien « pas lui » ça n’aidait pas à devenir quelqu’un. Ouais. C’était clairement pour se tester lui, d’abord. Et montrer sa valeur véritable à sa famille, un peu. Il observe sa cousine sur le côté alors qu’il prit une nouvelle bretelle de route pour rejoindre une cinq voies. Il sourit à la jeune femme.

- Tu poses trop de question à la suite. Je parle bien d’une ville, mais c’est plus qu’aucun humain n’y habite réellement. Ils n’ont pas d’explication que la démographie et le peu d’activité. Pour ce qui est du livre des ombres, j’ai photocopié toutes les créatures mexicaines dans un dossier que tu peux voir sous tes pieds. Et on peut toujours s’éclipser pour y jeter un petit coup d’œil. S’il est inconnu, on avisera, c’est pour ça qu’on est des sorciers, non ? Si on fait face à plusieurs, j’enlèverais le sort et notre famille sera là dans la seconde.

Il croit avoir répondu à tout. Il répond à tout avec assurance. Comme s’il avait déjà pensé. En réalité, même s’il était parti en colère et sans le dire à tout le monde, il avait vraiment prémédité … alors oui, il avait pensé à ça. Chris savait vouloir aller enquêter pour voir… mais si le problème était au-dessus de sa force, il n’hésiterait pas à appeler de l’aide. C’était ça aussi, être fort. Savoir que l’on n’avait pas toutes les forces et que parfois, il fallait demander ailleurs. Il soupira un instant.

- J’ai déjà gravi le mont Everest, sans apprendre l’alpiniste. Et si c’est trop haut, je sais que j’ai des moyens de trouver de l’aide ailleurs. Avec des pros comme ma mère.

Le Mont Everest, c’était le souvenir du passé de l’autre Chris. Celui qui avait réussi à tuer une Valkyrie sans la moindre once de remords avant d’envoyer son père se faire torturer là-bas. Celui qui avait dû combattre son propre frère devenu le maître absolu du mal. Celui qui avait eu non pas un, ni deux mais trois futurs dans son passé. Il y avait la vie de l’autre Chris, celui que les sœurs ont connus, qui lui revenait en bride. Son passé, son futur, ce qu’il avait fait au milieu. Il voyait même parfois la démone dont il était amoureux dans ses visions. Il y avait aussi le passé d’un autre Chris. Celui qui avait aidé à retrouvé ses pouvoirs à son frère mais qui n’était déjà plus le Chris numéro 1. Il était en réalité le Chris numéro 3, forgeait par les envoies dans le passé et le présent des deux autres. Alors, l’alpiniste, les deux autres ils étaient rodés avec.

- On peut dormir dans le même lit aussi. Je ne pète pas, je ne ronfle pas et je ne parle pas.

Il sourit en pensant à sa petite sœur qui lui arrivait parfois de marmonner dans son sommeil. Parfois même des sorts… Ce qui n’était pas pour le faire rire quand ça faisait une catastrophe. Il remue un doigt devant son nez.

- Ne pense pas avoir le droit de boire avec moi, même si tu as une autre identité. On se débrouillera pour que personne ne le remarque. D’autres questions ? Que nous avons … pratiquement quatre jours de voiture, si on ne s’arrête pas.

Et il avait prévu plusieurs arrêts. Il lui sortit la carte qui montre l’itinéraire à prendre. Ils avaient environ 24 heures de route pour quitter les Etats-Unis… Surtout qu’il allait passer par un endroit clandestin pour s’y rendre … Parce que sinon ça serait si simple de les retrouver. Ensuite, une fois au Mexique. Il avait presque 20 heures de route pour rejoindre la ville en question et l’hôtel. Et bien sûr, l’itinéraire comptait les pauses à faire, au moins une toutes les quatre heures, ainsi que des hôtels au milieu.

- Tu vas devoir dormir avec moi un bon paquet de fois, ça je peux te l’affirmer

Tandis qu'elle écoutait son cousin répondre à chacune de ses préoccupations, Johanna se disait qu'il avait définitivement tout prévu, il avait donc dû y penser à ce moment, et longtemps. Ce n'était véritablement pas un coup de tête, mais un mal être qu'il avait dû se traîner pendant longtemps, et Johanna ne l'avait pas vu, du moins, elle n'avait pas pris conscience qu'il se passait quelque chose de suffisamment grave pour qu'il puisse prendre autant de risque afin de se prouver aux autres.
Lorsque Chris mentionnait le fait qu'il ne la dérangerait pas pendant la nuit avec des bruits intempestifs, Johanna leva les yeux au ciel.

-Encore heureux ! Et puis quoi encore ? Si tu bouges trop, je me réserve le droit de tirer la couette vers moi

Lorsqu'il mentionna leur cohabitation, Johanna s'imaginait les jours qui allaient suivre, et elle priait pour arriver à dormir la nuit. Devait-elle lui dire qu'elle parlait en dormant ? Elle l'ignorait, mais elle préférait garder ces choses pour elle pour le moment. On ne sait jamais, il avait encore le temps de le balancer par la porte de la voiture.

-Arrête, j'en frissonne déjà d'horreur

Lorsqu'il lui demanda si elle avait d'autres questions, la jeune femme secoua négativement la tête, quatre jours... cela l'épuisait déjà. Elle se décidait alors de ne pas en rajouter, et de le laisser se concentrer sur la route. Après tout elle n'avait pas envie qu'ils aient un accident avant d'arriver à destination. La honte que ce serait devant la famille...

-Allez, quatre jours de route... ouais j'vais m'y faire, enfin j'ai pas de portable pour passer le temps, alors je vais chanter très fort des chansons à la radio, ça tu l'auras voulu

Mais avant cela, Johanna cherchait le dossier que Chris avait mentionné plus tôt du regard, et alors qu'elle le trouvait finalement plus bas, elle se pencha en direction de ce dernier.

-Alors... je vais réviser un peu, t'as vu à quel point je suis studieuse ?

Elle agrippa le dossier avec les photocopies des créatures et autres démons situés hors des Etats-Unis, et elle feuilleta ce dernier avec attention. Cependant, elle ne pouvait demeurer silencieuse tandis qu'elle s'intéressait à certaines représentations des démons. Elle devait avouer que certains avaient l'air plutôt... sexy ? Ouais, c'était le mot. Et elle n'avait pas peur de le signifier face à son cousin.

-Oh, très sympa celui-là, très sympa même

Fit-elle avec un petit sourire en coin, avant de rapidement changer d'expression alors que son regard se posa sur un autre dessin, bien moins flatteur celui-là, voir... carrément horrible oui.

-Ew, celui-là est dégueu, on dirait toi quand t'as pas dormi de la nuit

Ricana-t-elle en lui montrant la page en question. Elle en riait d'ailleurs, et bien fort en plus, après tout elle demeurait une ado, et elle adorait taquiner son cousin. Oui, le voyage allait être long avec elle, très long en sa compagnie à elle, mais pour le moment, elle décidait de ménager son interlocuteur, et elle se tue à nouveau, le laissant se concentrer sur la longue route qui les attendait.

-Pardon j'arrête, je vais rester sage

- Hé, fit-il doucement, la personne qui squatte n’a aucun droit de râler.

Bien sûr, il tira la langue. Il n’était pas non plus contre avoir sa cousine. Une autre, il aurait peut-être fait en sorte de l’endormir pour la laisser dans un coin … Mais elle, Johanna, elle était plus ouverte, plus compréhensible… et puis surtout, elle était plus proche de lui. Il appréciait vraiment sa cousine. C’était avec elle qu’il avait le plus de relation. Elle pour qui il donnerait sa vie… Comme avait pu faire l’autre Chris pour son frère. Il espérait que tout ira bien.

- Chante si tu veux, ou parles moi des histoires que tu aimes bien, ou j’ai pris des jeux de mots. Des mots croisés… ou tu peux réviser en effet. Je les ai presque tous mémoriser, si tu veux t’amuser à me faire un examen. Fin bref.

Il n’était pas le genre à parler beaucoup, Chris. En réalité, comparer à l’autre, ouais toujours lui, il était plutôt solitaire. Il ne voulait pas réellement être remarqué pour son statut. Il était moins bon que son frère, c’était certain. Il était moins bon que sa famille. Mais est-ce que c’était grave ? Il aimait à penser que, sans cette idée de l’autre Chris, il se ficherait de sa puissance. Il fallait vraiment qu’il se pose la question. Ou pas. Il valait mieux décider de partir voir cette ville et s’en occuper … Il valait mieux tout faire pour sauver cette ville des démons, et revenir en se sentant mieux. Prouver à sa famille qu’il pouvait le faire, mais aussi se le prouver à lui-même. Chris regarda l’image qu’elle trouvait sexy et celui qu’elle trouvait dégueu. Il eut une image de Bianca. Il avait toujours l’image de Bianca dans l’esprit. Il se mit à rougir. Comment pouvait-il être amoureux d’un démon qui n’hésite peut-être même pas dans ce monde ? Pourtant il savait la vérité, lui. Il savait qu’il cherchait Bianca à chaque fois qu’il tuait un démon. Il voulait la trouver. Et la protéger. Même si elle était un démon.

- Je suis plus beau que ça quand je fais une nuit blanche, répondit-il après quelques minutes avant de lui mettre deux doigts dans les flancs pour la faire rire. Et je ne te crois pas une minute pour la sagesse, mais je vais faire semblent pour le bien de ma santé mentale.

HRP – Je sais pas si je te l’avais proposé, mais là bas si tu veux jouer Bianca, fait toi plaisir (je jouerais un autre pour Johanna si tu en as l’envie) et n’hésite pas de dire qu’ils arrivent le soir au premier arrêt ?