Sinned l’avait évité. Non. Pas exactement. Si. Ok. Il l’avait évité. Tout comme il avait évité la dispute avec Artegor… Et de faire des commentaires pour les autres membres de son équipe. Il avait été un bon capitaine en les motivant et en les boostant. Il avait fait en sorte que tous comprennent qu’il n’était pas parti à cause d’eux. Mais il avait évité la blanche. Là, personne n’aurait pu le voir autrement. Il était parfois dans la même pièce qu’elle, mais il faisait en sorte de regarder ailleurs. Parfois, il la voyait et il changeait simplement de place. Et il avait fait ça pendant deux jours… Mais elle avait fini par l’avoir. Il grogna un peu. Mécontent de s’être fait prendre. Il ne pouvait plus boire avec elle. Bon, il avait surtout bu seul et s’était enivré tout seul mais tout de même … Il ne devait plus boire… Il avait vérifié, pendant les deux jours, qu’elle sortait bien avec un masque. Maintenant, il était coincé. Il se retrouvait devant la porte de la jeune femme et rentra en soupirant fortement.

- Non, répondit-il tout simplement en fermant la porte derrière lui.

Puis, il se sent mal. Il a l’impression que fermer la porte, c’est lui faire à nouveau du mal. Comme il la fait la première fois, ici, contre cette table. Il retourne vers la porte et l’entrouvre. A peine pour que la porte soit ouverte mais pas assez pour que quiconque puisse voir ce qu’il se passe à l’intérieur. Non. C’est mieux comme ça. Il réfléchit en remontant son visage vers la jeune femme, calculant rapidement.

- Quatre litres, répondit-il.

Parce qu’il boit souvent de l’eau pour ses entrainements. Parce que parfois, il a l’impression de ne plus pouvoir respirer s’il ne boit pas. Logique. Il boit parce que ça lui fait du bien. Il boit parce que c’est comme ça que son corps arrive à se renouveler. Il avait besoin de boire pour survivre. Il s’assoit. Il s’assoit et il la regarde.

- Je dois faire quoi ?

Que plus vite il commence, plus vite il aura fini. Il avait besoin de finir vite. Il avait toujours peur que la jeune femme ne voit ses cicatrices. Il avait toujours peur qu’elle demande trop, plus… Et il ne pourrait pas le supporter. Il devait se protéger. Il en avait besoin. Mais il fallait aussi qu’il l’aide, elle. Il devait l’aider.

Non. Ça avait le mérite d'être clair. Nahara sourit en coin pendant qu'elle terminait de griffonner un truc sur une feuille … couverte d'une écriture indéchiffrable. C'était en réalité ses notes sur Sinned. Et Nana avait pris depuis longtemps d'encrypter ses notes dans un vieil alphabet que seuls quelques grands fadas de vieille littérature humaine pouvaient arriver à déchiffrer. En vérité. Ils n'étaient sans doute qu'un petit millier dans la galaxie entière à pouvoir lire cette écriture. Alors il y avait peu de chance qu'elle tombe sur quelqu'un qui puisse lire ses écrits. Merci JR Tolkien qui qu'il puisse avoir été bien des siècles auparavant.

"C'est bien."

Qu'elle répond simplement quand le jeune homme lui donne sa consommation d'eau. Y a toujours des gros malins dans le sport qui ne boivent pas assez (et que se plaignent de bobo ou de fatigue ensuite). Parmi ses nombreux défauts, au moins Sinned n'avait pas celui-là. Elle pose son stylo et vient se placer debout en face de lui.

"Tu dois activer ton smog. Sans intention. Je sais que c'est bizarre puisque vous vous en servez toujours dans un but dans le foot. Jvais te laisser essayer tout seul déjà, si tu veux. Faut juste … déverrouiller, et respirer. Laisser couler doucement le flux, comme de l'eau."

C'est compliqué à expliquer. La plupart du temps, les joueurs de galactik football expulsent leur fluide volontairement et y mettent une intention de puissance ou de renforcement ou … n'importe quoi. Ils ne le laissent pas juste "être".

Nahara recule d'un pas et montre le sien au ténébreux. Elle inspire profondément et quand elle expire, elle laisse le souffle s'échapper tranquillement de son corps, le couvrant d'une fine pellicule bleutée et mouvante. Elle reste comme ça quelques secondes. Lève une main à hauteur de son visage, des doigts écartés observant les volutes s'élever depuis son épiderme puis se dissiper doucement dans l'air.

"Faut être le plus calme possible. Ni joie, ni tristesse, ni colère. Pas de malice, d'ambition ou de truc à prouver. Juste. Calme."

Elle lui aurait bien demandé s'il savait faire ça, avec un sourcil en l'air et la fameuse malice au fond des yeux, mais le pari était risqué. Il y avait plus de chances que Sinned s'énerve plutôt qu'il cherche à lui prouver qu'il peut y arriver non ? Nana coupe son souffle et baisse la main.

"A ton tour."

Il la regarde, cette oie blanche qui lui demande de faire plus que ce qu’il peut. Il la suit du regard, suit ses mouvements, se demande vraiment pourquoi elle avait autant besoin de l’aider pour se sauver. C’était pour ça qu’il avait dit oui, pour la sauver. Mais il la regarde et se demande ce qu’elle a bien pu fumer pour lui demander de sortir son smog pour le plaisir. Il fallait qu’il sorte ce pouvoir sans rien autour, sans intention ? Mais pourquoi ferait-il ça, alors ? Il fallait toujours une intention. L’intention de ne pas avoir d’intention, c’était comme penser à ne pas penser. C’était le genre de paradoxe qui ne pouvait se faire dans l’esprit du brun qui voyait le smog comme une déflagration de grenade plus que comme un flux. Fluide, Flux, ouais y avait l’idée que c’était quelque chose qui s’écoule en lui, qui se déplace à travers son esprit.

Alors il la regarde faire « sans intention » en ayant l’intention de lui montrer le fluide que l’on sort sans intention. Clairement, trop compliqué pour lui. Il décide de ne pas penser et de ne penser qu’à la lumineuse devant lui. Parce qu’elle l’était. Lumineuse. Sa magie était en train de sortir de son corps comme l’auréole d’un ange. Et elle doutait encore d’être une lumière ? Comment pouvait-elle douter de cela, alors qu’elle était en train d’irradier littéralement de chaque parcelle de son corps ? Le plus calme possible ?

- Calme ? il eut un sourire plein d’ironie, ne le suis-je pas toujours ?

Et il disait cela en connaissant la vérité. Elle aussi. Il était un faux calme. Il était une personne qui semblait calme mais était en réalité un volcan en éruption mental. Sans joie, il pouvait le faire. Il ne voyait pas de joie à lui montrer son fluide. La tristesse et la colère étaient inscrites en lui comme son ADN. Tout le reste, il le ferait malgré lui. Il fallait bien qu’il le fasse. S’il n’était pas là pour montrer sa valeur, qui le ferait pour lui ? Il se met en face d’elle, debout.

- Tu fais vraiment un boulot de merde. Et j’adore les croissants le matin, énonça-t-il avant de se reculer d’un pas.

Il se mit au milieu de la pièce et se mit à écouter son « fluide » intérieur. Il était là. Noir et opaque à l’intérieur de lui. Le smog sortit de son corps en explosa littéralement autour de son corps. Mais il était calme, Sinned. Il savait que son smog n’était pas puissant. Il était un « plus » dans le fluide et pas l’inverse. Il ressentait son smog comme un nuage noir autour de lui. Ce nuage qui s’accroche à sa peau, remonte vers son cou et le fait suffoquer. Mais il tient Sinned. Son smog lui tourne autour comme une araignée avant de sauter sur la mouche, vicieuse, dangereuse. Il sent le fluide se mettre autour de son cou, de ses poumons, de son cœur. Après tout, il le mérite. Il mérite chaque souffrance qui vient avec l’utilisation du smog. Puis, il soupire et annule le pouvoir qui se dissipe de la même manière qu’il était apparu. Comme une bombe qui explose.

- Voilà. Tu es contente ? fit-il en évitant de montrer qu’il était essoufflé et supportant la douleur sans même le remarquer réellement.

“Tu es un modèle de tempérance. Je suis certaine que c’est ton deuxième prénom.”

Voilà le terme. Non, il n’est pas calme, Sinned. Il a juste un parfait contrôle de ses états émotionnels, de ses pulsions. Tout ça, tout ça. Tempérance. Exactement. Elle se demande comment il fait. Elle-même n’est pas très claire, Nahara. Elle a ses impulsions, ses petites crises de folie, mais elle sait très bien qu’elle est bien, bien, bien, en dessous du niveau d’intensité des émotions du ténébreux. C’est presque le contraire. Elle, elle a appris à atténuer les siennes, à voir des données dans les événements, des variables dans les sentiments. Analyser et intégrer les choses, plutôt que les ressentir. En tout cas pour tout ce qui est négatif. C’est ce qu’elle a appris à faire avec … le temps. Et les événements. Bref.

“Je fais un boulot qui me donne légitimement le droit de torturer des gens. J’vois pas de quoi je me plaindrais. Et les croissants ça fait prendre du cul.”

Bim, bam, boum. Elle est en forme, Nana. Elle est concentrée, surtout. Alors elle passe un mode “sarcasm robot”, comme dirait son maître. La jeune femme fait son boulot en rebondissant de façon ironique sur tout ce qu’elle entend. Même quand ce n’est pas du tout ses oignons. C’est … un automatisme. Bref. Elle garde ses distances avec Sinned, non pas par méfiance. Mais pour ne pas être trop invasive. T’façon, elle ne veut pas intervenir cette fois. Alors autant il lui foutre la paix. Par contre, elle ne détache pas un seul instant ses yeux de lui. Du smog qui se dégage brusquement autour de lui, et de l’expression de son visage. Elle remarque les mouvements anormaux de son smog qui semble revenir vers lui, au lieu de s’échapper vers l’extérieur, comme pour les autres shadows. Elle remarque la souffrance sur ses traits. Elle la connaît par cœur, alors elle la reconnaît tout de suite. Mais elle ne bouge pas d’un millimètre, garde les bras croisés et ses grands yeux levés vers le jeune homme. Parfaitement neutre. Jusqu’à ce qu’il termine, et qu’elle esquisse un sourire en s’avançant tranquillement vers lui.

"Ravie. Je suis joie et allégresse. Mes deuxième et troisième prénoms. Je te prends le poignet."

Nahara le prévient avant d’agir. Elle attrape son poignet, le lève un peu, pose son index et son majeur sur sa face interne et le pouce sur sa face externe. Puis elle ferme les yeux et prend son pouls et sa tension, comme ça, sans machine, juste en se concentrant dans les pulsations qui vibrent presque sous ses doigts. Elle peut ainsi confirmer qu’il a souffert physiquement.

“Artegor a eu raison de m’appeler. Ou d’appeler quelqu’un en tout cas … Ton smog ne fonctionne pas normalement.”

La jeune femme lève un drôle de regard vers le ténébreux. Elle se doute que Sinned le sait très bien. Il souffre, il est pas con, il a dû faire les liens. Et il a choisi de faire avec. Nahara le lâche et réactive son propre fluide, s’enveloppe de bleu. Et cette fois-ci elle ne recule pas. Elle plante juste ses pupilles décidés dans ceux du jeune homme.

“Recommence.”

Tempérance. Deuxième prénom. Peut-être. Il respire doucement. Son nez, sa bouche, il réfléchit à comment son souffle se fait. La respiration. C’était important de respirer. Il fallait qu’il arrive à contrôler son souffle d’oxygène. Il sentait comme une douloureux puissante, comme si on lui matraquait le buste. Le smog était comme une matraque sur son corps… Et parfois, il ne sait pas réellement pourquoi, il sent des décharges. Il sait juste que tout ça le fait souffrir. Que tout ça le rend humain. Il souffre. Il le mérite. Sinistre et sombre. Il l’était. Il méritait chaque souffrance. Mais il ne voulait pas que la jeune femme le comprenne. Il devait le cacher. Il devait se contrôler. Il n’a même plus envie de faire une blague sur les croissants. Il est trop fatigué. Il souffre quand il respire. L’impression que l’air quitte ses veines et l’enserre encore. Il n’aimait pas utiliser le smog pour rien. Il le faisait pour elle. Elle faisait chier. Voilà. C’était le terme. Il la regarde en attendant les autres directives. Qu’allait-elle vouloir de plus ?

Parce qu’il était prêt à aller chercher des croissants plutôt que de recommencer. Il aurait préféré milles fois. Parce que pour le moment, il avait juste mal. Et il devait se brider pour ne pas le laisser paraître. Il lui tend son poignet et esquisse un sourire narquois.

- Toi, tu es lumineuse et têtue, j’aurais dit. Pour le prénom deux et toi.

Il essaie de faire de l’humour … pourtant avec la jeune femme qui lui prenait le pouls … Il ne pourrait pas mentir. Il avait mal. Son pouls était à fond. Il avait l’impression que le feu parcours ses veines encore. Il la regarde, s’approche de son odeur, et malgré lui, il sent l’odeur de la jeune femme. Elle sentait la lumière, si on devait la définir. Comment pouvait-elle en croire le contraire ? Il sentait la lumière émanait d’elle, même à l’odeur et sans souffle. Elle était une lumière dans le noir.

- Je vais très bien, ment-il encore pour la forme en lui enleva son poignet.

Il la regarde et fait un soupir, qui lui brûle le poumon et lui retire une grimace de douleur. Il doit recommencer là ? Il la regarde, hume l’air malgré lui, soupire, fais un pas en arrière et ferme les yeux pour se concentrer. Bon … il était prêt à souffrir une deuxième fois pour une lumineuse. Il le fallait. Pour elle. Pas pour lui. Parce qu’il allait très bien. Comme la première fois, le smog explosa autour de lui.

Sans le vouloir, il laisse échapper un gémissement de douleur quand le smog remonta le long de son corps pour l'étrangler à nouveau.

Têtue, ça oui elle l'est. Ils le sont. Ils sont tous les deux pas mal dans le genre obstinés. Chacun dans son domaine, chacun pour ses raisons. Mais c'est tout de même un point commun. C'est pas un défaut, non, ça Nahara en est à peu près convaincue. Par contre, s'entêter à dire "je vais très bien" quand on a la tête du type qui vient de se s’éclater le petit orteil dans un coin de meuble et qui s’est rattrapé sur une pile de lego .... c’est pas une qualité. Au contraire. Et il se peut, en effet, un petit peu, que Nana prenne "plaisir" à "torturer" Sinned. Elle ne le fait pas recommencer pour le plaisir hein !! Mais il y a tout de même une petite partie mesquine d'elle qui se réjouit de savoir qu'il a mal. Oupsie.

Enfin, cette once de réjouissement disparaît à la seconde où le jeune homme gémit de douleur. Parce que pour que lui en arrive là devant elle, il doit sacrément douiller. Monsieur a une sacrée fierté. Bref. Nahara ne le laisse pas souffrir pour rien plus longtemps et active son propre fluide. Elle s’apprête à faire la même chose qu’avec le smog des shadows, l’attirer vers elle, mais il y a un truc qui cloche définitivement dans celui-ci de Sinned. Maintenant qu’elle s’est approcher elle voit clairement les volutes noires faire marche arrière pour revenir vers le ténébreux comme pour … l’attaquer ? Elle pousse son souffle contre le smog et essaye de lui faire suivre le courant du smog. Ce qui confirme largement ce qu’elle pensait. Puis le fluide noir commence à remonter doucement le souffle vers elle. et Nana tend une main pour laisser les ténébres entourer ses doigts, sa main, et finit par la retirer dans le même geste qu’elle aurait eu en se brulant sur une flamme.

“Ok, arrête.”

La jeune femme observe sa main qui ne porte aucune trace de quoique ce soit … juste des fourmillements de la douleur précédente qui s’évanouissent doucement. Elle fronce les sourcils et s’écarte, n’éteignant son souffle qu’une fois certaine que Sinned a bien arrêté son smog. Elle prend son carnet de note et un stylo avant de sauter les fesses sur la table pour écrire quelques mots avant de relever un regard de reprémandes silencieuses vers le ténébreux.


“Depuis quand ton smog t’attaque ? Ca a toujours été le cas ou c’est à force de l’utiliser ? Ca arrive souvent qu’il attaque quelqu’un dautre ? Tes coéquipiers ou tes adversaires ?”

Nahara se rend soudain compte qu’elle est passée en mode sciences et en oublie le gars devant elle qui vient de douiller deux fois pour ses expériences. Elle sursaute vaguement et s’éclaircit la gorge en pointant la table d’examen de son stylo.

“Uhm désolée. Assieds-toi. Tu veux un truc à boire ? Un truc contre la douleur ? Un médoc ou un massage ?”

Ouais elle propose un massage. Ca fait parti du taff, déjà. Et en plus, elle a déjà eu à faire à des gens qui ne pouvaient pas prendre d'antidouleurs sous forme de médocs, et ça, c'est plutôt une bonne alternative.

Il respire, lentement pour faire passer la douleur qu’il ressent dans ses muscles. C’était comme avoir remplacer son sang, dans ses veines, pas une quelconque substance corrosive. Il n’était pas assez malin pour dire « la substance » exactement … Mais il connaissait les effets d’un produit qui grappille la peau en le laissant hurler de douleur. Il connaissait même ça très bien. D’ordinaire, et depuis toujours, il utilise le souvenir de sa sœur pour faire passer la douleur. Parce que les lumières font toujours disparaître les ténèbres. Il se demande si Lux se souvient de lui, et si oui, si elle se souvient de leur différence, de son amour, de tout ça. Il avait arrêté comme elle lui avait demandé. Il avait arrêté parce que le smog, quand il est utilisé pendant un match, va un peu vers là où il veut. Là, elle lui avait demandé de le sortir « pour rien » créant un sans-précédant sur le fluide qui s’amusait à revenir vers lui. Il respire doucement encore, pour faire passer la douleur. Essaie de visualiser son sang qui remonte dans son corps, qui alimente ses organes, qui change de couleur. Il imagine son sang noir disparaître pour du rouge, en respirant, c’est mieux. A la question, il hausse les épaules.

- Je n’en sais rien, j’ai toujours eu mal, avoue-t-il parce qu’il l’avait promis, mais personne n’est jamais venu se plaindre de douleur par ma faute, alors j’imagine que ce n’est que moi.

Oh, il avait déjà fait des fautes, et plus qu’à son compte, mais pour ce qui était du smog … Le smog était souvent beaucoup trop occupé à faire ce qu’il demande, et à essayer de l’étrangler, pour penser aux gens autour. Mais après tout, Sinned savait mériter chaque souffrance, chaque douleur et chaque plaie alors … Il l’excuse sans souci d’un mouvement de tête.

- Je n’ai besoin de rien.

Mais quand il remarqua son regard de « tu as besoin », il abdiqua et se déplaça sur la table. Pour tout dire, l’idée d’un massage lui plaisait bien. Il aimait bien les mains de Nahara sur lui… Même si on pouvait se poser des questions sur le bien fondé de cette pensée … Il était sûr que le smog commencé à lui grappiller le cerveau en plus d’essayer de l’étrangler. Elle était lumineuse, elle n’avait pas à le toucher. Et un massage … Cela signifie lui montrer sa peau, non ? Il avait très envie de demander le massage mais il ne pouvait pas formuler cette demande. Il ne le pourrait jamais.

- Laisse-moi juste me reposer deux petites minutes.

Nahara pince les lèvres en le regardant s'asseoir. Elle retient à la fois un soupire et une remarque. Soit sur son état. Soit sur sa tête de pioche. Au choix. Elle le regarde quelques secondes avant de se rompre son immobilisme.

"Je vais te faire un massage. Attends."

La jeune femme se retourne pour attraper une petite serviette qu’elle montre ensuite à Sinned.

“Vu que j’vais pas te faire enlever tes vêtements, j’utilise ça pour pouvoir faire glisser les tissus l’un contre l’autre. C’est sûr que c’est moins agréable qu’un massage sur peau avec de l’huile, mais ça fait quand même très bien l’affaire. Allonge-toi sur le côté.”

Nahara pose des arguments imparables. Elle respecte toutes ses exigences dans cette proposition. Alors Sinned n'a plus qu'à abdiquer pour ce coup-ci, hehe. Elle le laisse faire, retenant de son mieux un air amusé sur son visage. Contente qu'il se laisse à peu près faire. Même en bougonnant. C'est presque mignon. Puis la jeune femme s'approche de lui, passe derrière et commence par poser la serviette sur son cou et ses épaules. Déjà déverrouiller son trapèze, son épaule et les muscles derrière son omoplate, en douceur. Ce n'est pas simple. Mais elle prend le temps de le faire, en silence. Songeuse. Avant de reprendre la parole à mi-voix.

“T’as pas de chance, tu sais. Je suis une fouineuse. Les gens qui causent de tout ne m’intéressent pas. Je préfère avoir à creuser derrière les silences. Tu me diras c’est pas pour rien que je suis scientifique et pas journaliste. Mais tu es mal tombé avec moi. Tu es … un pot de miel devant l’ours de ma curiosité.”

Nahara pouffe toute seule de sa bêtise et puis se tait en continuant le massage sur le corps de Sinned, descendant sur ses lombaires, sa taille, ses hanches. Elle est curieuse de tout, la fouineuse. Y comprit des angles de son corps qu’elle mémorise, même si elle se garde bien d’aller explorer des zones qui pourraient paraître douteuses pour un massage. Quand même un minimum professionnelle. Et puis elle n'a pas envie de se prendre un pain, ahah. Pas encore curieuse à ce point-là. (Comment ça pas ENCORE ?? On va se calmer ma petite dame !)

Elle termine le massage en haut de ses hanches avant de lui demander de se retourner. C'est con qu'elle ne fasse pas ses jambes (et ses fesses) puisqu'il est joueur de foot mais … Bah c'est pas là que le smog a attaqué. Et puis se faire toucher les jambes (et les fesses) par des inconnus, c'est un peu chelou des fois. Bref. Nahara est en train de masser l'autre épaule de Sinned quand son regard se perd dans sa nuque. Et qu'elle repense à cette interdiction de le dévêtir. Elle se demande bien pourquoi il le refuse catégoriquement. Elle repense au smog qui l'attaque. Qui n'attaque que lui. Il l'a précisé. Elle repense aux études qu'elle et son cercle de chercheurs ont menées. Et elle reprend la parole en douceur.

"Des études ont prouvés que les fluides répondent aux désirs, ou caractères profonds de leurs utilisateurs. Quelqu'un de bourrin et rude aura un fluide plus violent que les autres. Les gens d'intellectuels ont un fluide subtil et précis. Une maman poule aura un fluide particulièrement puissant en défense."

Elle explique quelques bases avant d'en venir là où elle veut en venir. Essayant d'être la plus neutre et douce possible dans son ton.

"Ton fluide à toi t'attaque … Tu te fais du mal Sinned ? C'est ça que tu caches sous tes vêtements ?"

Il avait baragouiné des gros mots dans la langue des Shadows. Il pouvait le faire et connaissait l’alphabet en entier pour pouvoir critiquer dans cette langue, à force… Donc, quand elle l’obligea à se faire masser, il râla. Plus que ce qu’il ressentait vraiment alors bon … Il la laisse faire. Il la laisse le toucher. Elle le pouvait. Avec ce qu’il lui avait fait …. BON. Elle le mérite clairement qu’il ne la repousse pas avec ses deux jambes comme le chat et le canard sur la vidéo qui traine en ce moment sur internet.

- Le miel ce n’est pas bon, alors arrête d’être tenté.

C’était une réponse sèche, froide, qui n’appelle aucune réponse. Elle était peut-être attirée par lui, mais il y avait de la mort-aux-rats dans son miel. Elle allait en crevé de fouiller à l’intérieur de sa grosse patte velue. Malgré lui, il regarda sa main qu’elle bougeait sur son corps. Il s’arrêta sur ses doigts fins et puissants qui le touchent sans le toucher. Il la regarde faire. Elle était trop lumineuse. Plus que quiconque. Elle était aussi lumineuse que le souvenir qu’il avait de sa sœur. Elle était si lumineuse qu’elle donnait l’impression d’être plus proche du divin que de l’humaine. Il l’écoute parler, mais qu’à moitié. Il l’écoute mais pas plus que ça. Parce qu’il était occupé à regarder la couleur de ses cils, la courbe de sa paupière, les nuances dans ses iris. La question, cependant, percuta sa conscience avec force.

Dans un mouvement rapidement, il poussa ses mains et se releva pour mettre de la distance entre elle et lui. Il prit son sac qu’il avait posé sur le sol près de la porte.

- Non.

Et il ouvrit la porte pour partir sans rien dire de plus. Il ne se faisait pas de mal. Il n’avait aucune envie de se faire du mal. Les traces qui parsemaient son corps n’étaient pas de son fait. Aucune de ses cicatrices n’étaient un désir, une envie. Il ne comprenait pas que l’on veuille se faire du mal ainsi… et pourtant, il laissait son smog lui faire du mal pour se punir. Mais c’était parce qu’il le mérite. Ce n’était pas du tout la même chose. Il méritait de souffrir. Parce qu’il avait noircit sa sœur et qu’il l’avait abandonné. Son fluide le punit, mais il ne se fait pas de mal. Il avait trop souvent vue son sang pour le laisser couler à nouveau pour le plaisir. Il finit la journée en évitant soigneusement cette ourse bouffeuse de miel.

Cependant, le lendemain matin, il toque à la fenêtre de sa chambre pour son petit déjeuner. Parce que. Tant qu’à être emmerder, il comptait bien profiter de la jeune femme… Et ça, même si dans la nuit un rêve bien trop érotique l’avait réveillé en sueur dans le lit et qu’il avait été obligé de prendre une douche froide.

Elle se doutait que la question n'allait pas lui plaire. Pourtant. Elle se devait de la poser. Déjà parce qu'on doit la poser aux gens qu'on soupçonne de se faire du mal. Juste pour qu'ils sachent que leur souffrance est ressentie. Peu importe qu'ils répondent la vérité ou non. Qu'ils parlent ou non. Au moins pendant quelques secondes, ils ne sont pas tout seuls face à ça. Mais en plus, parce qu'avec Sinned, elle le saura tout de suite. La vérité. Même s'il ne dit pas grand chose, il y a une entièreté et une honnêteté, dans ses gestes et son attitude, qui ne laissent pas de place au doute. Même quand il ment. Étrangement.

Mais Nahara sait que ce "non" est la vérité. Sinon il se serait énervé. Vraiment. Il l'aimait sans doute attaquée d'une façon ou d'une autre. Il ne serait pas simplement parti. Bon. Il ne se fait pas de mal. Mais son fluide lui en fait. Il reste deux possibilités pour la jeune femme. Soit son smog agit de façon totalement anormale. Soit Sinned nourrit une profonde colère envers lui-même qui alimente cette drôle de nature chez son smog. Soit un mélange des deux. Trois possibilités donc. Bref.

La jeune femme le laisse partir. Elle range sa salle de soin en silence. Termine de remplir ses notes de ses pensées à propos de Sinned. Enfin pas toutes, nope. Y en a qui n'ont aucun intérêt scientifique. Eh eh. Erm. On se calme. Non mais n'importe quoi. Ça doit faire trop longtemps qu'elle ne s'est pas envoyée en l'air. Elle va se trouver un porno ou un truc du genre pour ce soir, ahah. (Sinon elle va finir par envisager sérieusement Sinned. Ah non, il a l'air puceau. Ou un autre shadow. Ewww. Trouvons un stock de pronos… et quelques jouets. Elle doit en avoir quelque part dans sa valise d'ailleurs.)

En tout cas, après cette décision d'ordre intime, Nahara passe une très très très bonne nuit. Fort détendue. Elle se tire de son lit juste un peu avant son réveil. Encore engourdis par le sommeil et file prendre une douche. Ce qu'elle n'a pas fait la veille. D'autres priorités. Hehe. Elle se lave, lave ses cheveux, sort de la douche et essore ses cheveux à l'air d'une serviette. Puis la jeune femme entendu un bruit venant de sa chambre. Elle n'identifie pas le bruit de toute suite. Mais il est assez fort pour attirer son attention. Alors elle sort de la salle de bain, toujours en train d'essuyer ses cheveux. A poil.

Elle sursaute violemment en découvrant Sinned derrière sa fenêtre. Bah oui espèce d’idiote !! C’est son kink de passer par les fenêtres, t’as toujours pas compris ?! Nahara rabat aussitôt sa serviette sur sa poitrine. Ouais, sa poitrine. Rien à foutre du reste. Ce sont clairement ses seins qu’elle choisit de cacher en premier, avec un air presque effrayé sur le visage. Elle prie en silence pour qu’il n’ai rien vu. Rien vu qu’autre que des marques bleutées. Comme celles de son visage. Juste ça et c’est tout. Sur et sous son sein gauche. Le temps de se remettre de ses émotions, Nahara fusille le ténébreux du regard et lui fait signe d’attendre. Elle fait demi-tour dans la salle de bain et se rhabille avant de revenir pour lui ouvrir la fenêtre.

“Félicitations. Tu peux rajouter voyeur à la longue liste de tes défauts. Cela dit, j’peux pas trop t’en vouloir, j’ai presque le même.”

Elle le tacle à moitié. Encore un peu pertubée par ce qu’il vient de se passer. Et se demandant toujours ce qu’il a pu voir. Nahara le laisse entrer en lui jetant un regard en biais avant de continuer plus calmement.

“Je peux t’aider peut-être ?”

Oui, non, parce que bon, s’il vient l’enquiquiner dans sa chambre, c’est qu’il a une bonne raison, non ? Enfin ce qui s'apparente, pour lui, à une bonne raison. La jeune femme regarde autour d'elle rapidement. Ok, ok, la télé est éteinte et ses joujoux sont paumés quelque part dans le bordel qu'est son lit qu'elle n'a pas encore fait. Bien. Bref. Erm. Sinned, donc.