Tu en as les larmes aux yeux, de voir des bribes de la vie qu’il a eu. Cette vie faite de souffrance et de danger, de malheur injuste et injustifiable. Mais tu n’as pas le temps de réagir vraiment à ce que tu vois que te voilà tiré de ton sommeil. Le réveil te surprend un peu et tu te redresses dans ce lit que tu commences à haïr instinctivement. Sans perdre un instant, tu quittes les draps pour aller vers ton miroir. Fixant ton reflet en silence, tu inspires un peu avant de regarder ta chambre. Tu sens que tu ne pourras pas rester. Tu n’es pas censée savoir pour les Yeux Noirs, tu as les connaissances qu’il faut par la Bibliothèque, pas par les Archivistes qui se sont bien gardé de te le dire. Les choses vont changer, rapidement et tu le sais très bien. Aussi te voilà à préparer un sac, avec le minimum d’affaires dont tu as besoin. Ton œil droit ne laisse aucun doute sur ce qu’il vient de se passer.

Il n’y a qu’une seule personne à qui tu peux en parler et rapidement, tu vas appuyer sur un bouton près de ta table de chevet. Il avait été installé il y a des années pour que tu puisses appeler ta nourrice en cas de problème. Cela fait longtemps que tu ne l’as pas utilisé, mais c’est un cas de force majeure.

Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour arriver dans ta chambre et encore moins pour se figer en voyant tes yeux, enfin surtout celui qui a changé de couleur. Si elle semble tout aussi surprise que toi sur le moment, elle ne tarde pas à réagir et à te prendre dans ses bras quelques secondes. Le temps de te rappeler qu’elle sera toujours là pour toi et qu’il va falloir fuir. C’est bien ce que tu pensais, même si l’entendre de vive voix te fait soupirer un peu. Au moins, tu sais que tu ne seras pas seule. Ta nourrice vient avec toi, tandis que deux autres Archivistes, les deux seuls en qui tu as confiance, resterons ici pour couvrir votre fuite. Ce qui n’est d’ailleurs pas une mince affaire et il s’en est fallu de peu que vous réussissiez à quitter Novas, sans être vues, au petit matin.

Ta nourrice ne t’a pas tous dis, tout ce que tu sais est qu’elle a fait jouer des relations pour vous permettre de partir avant que la ville ne se réveille complètement. Cela te fait plus que bizarre de te sentir fugitive dans ce lieu où tu as pourtant grandi. Mais la vie prend parfois des chemins que l’on n'attend pas, tout comme toi, tu empruntes une route perdue pour rejoindre l’Underground, paradoxalement, le seul endroit où tu seras en sécurité.

La route sera longue, d’autant que vous ne pouvez pas emprunter les axes les plus fréquentés. Du moins pour vous rapprocher des entrées de l’Underground. Tu fais confiance en l’organisation de ta nourrice, le réseau qu’elle a activé pour te sortir de là semble s’être préparé pendant un bout de temps pour ça. Ce qui ne manque pas de te mettre clairement mal à l’aise. Tu as toujours eu du mal à te faire à l’idée que tu es régulièrement le centre de l’attention. Aujourd’hui plus encore que tu te rends compte que des gens risquent leurs vies pour la tienne. Aussi, c’est avec difficulté que tu finis par t’endormir dans le véhicule qui vous transporte loin de Novas.

Le lieu d’un blanc immaculé de la vieille t’accueille à nouveau, mais tu sembles presque moins à l’aise que la fois précédente. Ce qui ne devrait pas être le cas, en temps normal. Alors que tu te demandes si ton âme-sœur est déjà là, la réponse à ta question est donnée par la voix de ce dernier brisant le silence. Tu ne peux pas lui en vouloir de ne pas être super joyeux à l’idée de te revoir. Mais s’il croit que tu vas lui demander pardon, il peut toujours attendre. Heureusement, il change de sujet et te pose une question à laquelle tu ne t’attendais pas vraiment. Même si tu aurais dû.

Venant t’asseoir en tailleur près de lui, tu inspires un peu avant de lui répondre. Cette fois, tu es moins sûre de toi et plus aussi présentable que la nuit d’avant. Tes vêtements ne sont plus vraiment frais et cela se voit, puis tu n’es pas coiffée correctement, surtout avec la cape qui te recouvre pour que tu puisses cacher ton visage.

- C’est ça… Du moins pour ce que j’en sais. Je vais devoir faire le tri dans certaines informations que j’ai reçu des Archivistes.

Tu pouffes un peu en pensant à tous ses moments que tu vas devoir passer dans la Bibliothèque pour séparer le vrai du faux.

- C’est que d’après eux… j’étais pas censée avoir d’âme-sœur donc… pas super fiable comme source de connaissance.

Tu marques une légère pause, juste le temps de l’observer un peu.

- Je suis désolée, pour la vie que tu as dû vivre… C’est injuste… Mais je sais que ça va changer… Je ferais tout ce qui est en moins pouvoir pour… Je sais que je… Qu’on pourra faire bouger les choses...

Lentement, avec une certaines douceur, elle vient te rejoindre, se posant en tailleur à tes côtés. Tu ouvres les yeux, tournant la tête pour croiser son regard alors que tu attends sa réponse. Tu fronces les sourcils, voyant bien qu’elle avait troqué les vêtements plutôt chics de la veille pour quelque chose de plus… Discret, on va dire. Tu lèves un sourcils, croyant même reconnaître les tissus rapiécés que l’on peut trouver par chez toi. Bizarre. Étrange même. Tu ne fais pas la remarque de suite, préférant voir ce qu’elle dira d’elle-même avant de rentrer dans le vif du sujet.

Tu manques de ricaner doucement quand elle dit qu’elle devra peut-être trier ce qu’elle sait, ce qu’elle a déjà entendu de ses tuteurs. Elle répond au rire, à sa manière. Vous avez l’air fin tous les deux, à combler le silence du Rêve avec des rires nerveux.

- Ah ouais… Les mêmes qui disent qu’on est tous atteint de lèpre et de peste, donc… J’adore.

Que tu rétorques quand tu apprends que d’après ces élitistes, la Guide Spirituelle n’était pas censée venir ici, pouvoir entrevoir un autre passé, pouvoir ressentir peu à peu des émotions qui ne seront pas les siennes. Ouais, ils ne sont pas tous éclairés à tous les étages, c’est sûr. Tu refermes un peu les yeux, un peu plus apaisé par l’endroit, mine de rien. Ton meilleur ami, le seul d’ailleurs que tu as dans cet endroit, t’avait dit qu’à force, cet endroit que vous partagiez pouvait devenir un second foyer, dans le monde extérieur semblait trop violent, sombre ou néfaste.

Tu le crois, lui qui ne va voir son âme-sœur qu’en Rêve, l’impossibilité pour lui de la retrouver pour le moment. Tu ouvres cependant les yeux quand elle semble désolée pour ta vie, ce passé qu’elle a pu entrevoir. Tu lâches un rictus nerveux et hausses les épaules.

- Y a pas à l’être. La plupart des gosses chez nous ont vécu la même chose… Ou alors sont morts parce qu’ils ont pas réussi à tuer leur premier Vers des Sables.

Tu te redresses pour t’étirer un peu avant d’entendre le mot changer dans sa bouche. Changer ? Changer quoi ? Le système ? Le monde ? Les mentalités ? Tu baisses la tête en pouffant, la secouant un peu avant de te redresser.

- Et tu penses qu’ceux d’là-Haut t’laisseront faire ?

Que tu dis, montrant le plafond par réflexe, parlant bien sûr de ceux qui l’ont élevé. Tu soupires un peu, te mettant toi aussi en tailleur, face à elle, les bras sur tes genoux.

- Et c’est quoi ton plan, Hael* ?

Que tu demandes, lui ayant donné un nom très spécifique, ne connaissant pas encore réellement le sien. Un nom qui, chez toi, signifie quelque chose de particulier, très ancien et poétique, voir divin. Mais il faudrait remonter loin dans l’étymologie hein ? Peut-être qu’elle ne le sait pas.

*Ange

Au moins, la tension de la vieille n’est plus au rendez-vous et cela n’est pas pour te déplaire. Il semble plus disposé à parler et tu souris un peu, entre deux rires nerveux que tu ne peux retenir. Seulement si tu ressens une joie certaine à l’idée de pouvoir le découvrir un peu plus, la réflexion qu’il fait sur ce que les Archivistes disent de son peuple te fait mal au cœur. D’autant qu’il te semble plus blasé qu’autre chose concernant sa vie, te disant même que certains ont eu bien moins de chance que lui. Tu aimerais venir le prendre dans tes bras, mais tu te retiens, parce qu’il semble se demander si vraiment ceux d’En-Haut, comme il dit, te laisserons faire. Tu soupires. Tu n’en sais rien en vérité. De ce que tu sais, des rares informations que la Bibliothèque a bien voulu te donner pour le moment, tu dirais que beaucoup de monde te suivrait, que si les gens savaient ce qu’il s’est réellement passé, il te soutiendrait, mais finalement, tu ne le sais pas. Tu hausses les épaules comme seule réponse, un peu embêter de ne pas pouvoir répondre plus.

Tu l’observes en silence quand il vient s’asseoir lui aussi en tailleur en face de toi. Il te demande alors ton plan pour la suite des événements. Tu soupires encore une fois et baisses la tête. C’est que tu n’y a pas vraiment pensé, hier soir tu avais agi instinctivement et aujourd’hui, tu suis juste ta nourrice sur les routes pour fuir. Ce n’est que le surnom qu’il te donne que tu redresses la tête.

- Pour le moment… J’en ai pas. Je dois juste suivre ma nourrice. Il faut que je sois en sécurité, c’est le plus important selon elle…

Tu te mets à jouer avec la cape qui recouvre tes vêtements et lève à nouveau les yeux vers lui. Cela te fais un peu bizarre de voir les iris de couleurs différentes, même si tu sais qu’il voit la même chose. Tu lui souris tendrement avant de te redresser un peu, de te tenir plus droite pour paraître moins défaitiste.

- Je ne connais même pas ton nom… Je m’appelle Auria...

Tu bascules un peu la tête sur le côté en l’écoutant alors que tu te ronges un ongle, par habitude. Tu lèves un sourcil quand elle parle de la nourrice. Tu baisses le regard, essayant de te rappeler de son visage dans les souvenirs que tu avais eu de sa part. C’est étrange, mais son visage te semblait familier. Tu n’arrivais pas te souvenir où, quand, comment, sachant qu’il était impossible pour toi d’avoir croiser des Archivistes, vu que tu n’avais jamais foulé le sol du Monde d’au-dessus. Tu la suis du regard, la voyant un peu jouer avec sa cape.

Elle donne son nom aussi, se redressant en souriant. Tu soupires un peu, tapotant du doigt sur le sol.

- Daï. On m’appelle Daï.

Dans le sens où c’est ton surnom depuis que tu es enfant. Tu n’as même pas conscience de ta véritable identité. Peut-être que c’est dans les archives de l’orphelinat, mais tu n’en sais rien. Tu te redresses aussi en te grattant la nuque. IL y a un truc qui te dérange dans tout ça. Il y a peu de chemin pour venir chez vous, descendre dans les grottes et espérer que les Éclaireurs puissent protéger les passants… Tu croises alors son regard, hésitant un instant pour savoir si tu dois regarder son œil droit ou gauche… Puis tu décides de te caler sur le noir, par habitude.

- Ta nourrice… Elle sait comment entrer chez nous sans s’faire plomber par les monstres du coin ? Nan parce que…

Tu grimaces un peu en retirant ta cape à fourrure, lui montrant plus facilement les cicatrices que tu as sur les épaules, des griffures, des morsures. Tu ne pourrais te souvenir qui a fait quoi. Tu récupères ta lame, plus longue que ta propre main et lui tends.

- C’est ce genre de bestiole que vous allez croiser… C’est une dent à la base. Sache-le.

Tu notes dans un coin de ta mémoire le nom qu’on lui donne. Tu trouves ça plutôt joli en fait, mais peut-être que tu n’es pas objective étant donné le lien que vous avez tous les deux. Il semble bien vite comprendre où tu te rends avec ta nourrice et se montre un peu inquiet. Tu souris un peu, ne sachant pas vraiment si c’est à cause de votre lien ou juste parce qu’il ne voudrait pas avoir ta mort sur la conscience.

Tu l’observe en silence retirer sa cape pour qu’il puisse te montrer les cicatrices qu’il a. Ta mâchoire se serre quand tu vois les marques sur ses épaules et tu retiens un désir soudain de venir le prendre dans tes bras. Mais, tu restes immobile pour le moment, du moins jusqu’à ce que tu viennes prendre la lame qu’il s’est fabriqué avec une dent d’une des créatures. Tu frissonnes en voyant la taille et en sentant le tranchant sur tes doigts.

- Elle sait comment faire… Elle vient de l’Underground. C’est ce qu’elle m’a dit aujourd’hui…

Tu lui rends son arme. Même dans le Rêve, tu n’es pas vraiment à l’aise avec ce genre d’objet. Pourtant, tu te doutes au fond de toi que tu seras amené à apprendre à t’en servir. Tu grimaces un peu à cette pensée avant de porter à nouveau ton regard sur les cicatrices du jeune homme en face de toi.

- J’ai eu quelques aperçus… Des créatures… J’ai aussi l’impression que tu vis volontairement à l’écart… Il y a une raison ?

C’est que tu voudrais bien savoir pourquoi il se met autant en danger. Loin de toi l’idée de vouloir le faire changer d’avis, juste tu aimerais comprendre. Tu sais bien que tu ne pourras pas l’obliger à te répondre, mais au moins, tu peux profiter de ce moment dans le Rêve pour en savoir plus sur lui. C’est bien ce que vous êtes censé faire, non ?

La nourrice savait donc comment venir en bas… Elle connaissait l’un des chemins pour passer, venir se réfugier chez les tiens. Tu tiques un peu quand Auria confirme que cette dernière vient à la base de chez vous, peut-être pour ça qu’elle te semble familière. Tu l’as peut-être croisé quelque part, pendant tes rondes, tes tournées… Tu ne sauras pas dire. Tu lèves cependant un sourcil et sembles assez curieux sur ce fait d’ailleurs. Tu t’approches un peu d’elle.

- Savais pas qu’les nôtres pouvaient être choisi pour aller Là-Haut.

Tu le dis sincèrement. Après tout, tu n’avais jamais essayé d’en savoir plus sur eux, vu comment ils vous avaient oublié. Mais savoir ton âme-sœur liée à eux d’une manière ou d’une autre te rend soudainement plus curieux. Tu ne sais pas si c’est le lien qui fait ça, mais qu’importe. Mais oui, c’est surprenant d’entendre qu’une yeux Noirs soit devenu une yeux Blancs. Tu soupires quand elle dit qu’elle a eu le temps d’apercevoir les créatures que tu as pu affronter pendant des années. Tu reprends ta lame et la ranges à ta ceinture.

- Ouais.. On a des trucs assez costauds qui vivent dans les fonds...

Costaud, c’est bien le mot. Certains font des tailles phénoménales, à se demander comment ils ont pu évoluer sans lumière et d’autres sont ridiculement petit, mais aussi empoisonné qu’un champignon avarié. Tu soupires un peu à sa question, sachant très bien qu’elle avait vu où tu vivais, dans quelles conditions, sans comprendre pourquoi tu t’éloignais délibérément des communautés ou des groupements. Même de la capitale. Tu hausses alors les épaules, gardant ta fourrure sur les cuisses, tripotant quelques poils par réflexes.

- J’sais m’battre, m’défendre, mais j’fais parti des rare à savoir tuer ces machins d’puis qu’j’suis gosse… Alors j’fais peur… J’suis un Récupérateur… Un chasseur… Certains vivent à deux, trois… Moi j’préfère vivre indépendant, pour pas être un boulet pour un autre… Ou être responsable d’la mort d’un autre...

Parce que oui.. C’est déjà arrivé chez les collègues. Alors tu ne veux pas ça. Tu refuses. Tu as beaucoup appris avec les autres, mais tu as toujours fait cavalier seul d’une certaine manière. Tu soupires et détournes le regard. C’est bien la première fois que tu en parles réellement à quelqu’un, toi qui es plutôt silencieux et pudique sur les sujets comme ça. Peut-être que c’est plus simple, parce que c’est elle… Tu soupires avant de revenir dans sa direction, croiser son regard et serrer les dents, inquiet tout de même.

- Vous passez par la route Nord ? Tu diras à ta nourrice d’passer par Lak-Araas. Le passage sera ouvert, c’est la saison.

Tu ne savais pas non plus jusqu’à aujourd’hui que les Yeux Noirs pouvaient être choisis aussi par la Bibliothèque. Mais plus la journée a avancée plus tu as appris de nouvelles choses sur ce monde que finalement, tu ne connais pas tant que ça. Votre discussion continue pour passer sur ce que tu as vu lors de votre lien. Il te confirme alors que les créatures que tu as vues sont assez représentatives de ce qu’il doit affronter pour survivre.

Il te parle alors de pourquoi il vit seul et tu as l’impression que tu comprends presque instinctivement son point de vue. Ce qui est assez bizarre pour toi, tu ne vas pas mentir. Tu voudrais bien prendre sa main, mais tu ne sais pas s’il est déjà à l’aise à l’idée d’être touché par toi. Alors tu te retiens et le laisses tranquille comme il vient se tourner à nouveau vers toi pour vous conseiller un itinéraire qui sera ouvert. Bien que tu te doute que ta nourrice est déjà au courant, tu hoches la tête.

- Je lui dirais...


Elle tient la jeune femme contre elle, dans une couverture sombre pour ne pas attirer les regards. Elle, pourtant, ne parvient pas à trouver le sommeil. Il faut dire aussi que pour elle revenir dans l’Underground n’étais pas vraiment prévu. Elle y a laissé la chose la plus importante pour elle et ne sait pas vraiment si aujourd’hui elle doit espérer le retrouver ou pas. Peut-être que la meilleure chose à faire serait de ne pas chercher à renouer avec cette vie qu’elle n’a pas pu vivre. Mais elle ne peut pas éviter de penser au fait qu’elle devra faire face à celui qu’elle a laissé derrière, même si cela n’était pas son choix, elle risque tout de même de devoir lui expliquer. Si jamais il est toujours en vie…


Tu réfléchis un instant en silence avant de rigoler nerveusement. Tu viens de te rendre compte qu’à la vitesse à laquelle vous alliez quand tu t’es endormi, il y a de fortes chances que la nuit prochaine, tu seras dans l’Underground. Peut-être même dans la soirée. Ce qui signifie que tu vas bientôt pouvoir le voir en vrai, s’il est d’accord bien sûr. Tu hésites un instant à lui demander, mais finalement, tu te lances.

- Normalement… Ce soir, je serai dans l’Underground… Est-ce que tu penses qu’on pourra se voir… En vrai, je veux dire…

Tu n’as aucune idée de comment il pourrait réagir, ni de comment tu pourrais prendre un éventuel refus de sa part.

- Je veux dire… Faudra bien qu’on se croise à un moment. Mais cela m’étonnerait que je puisse venir là où tu vis, donc cela voudrais dire que tu devras venir toi. Sauf que je sais que tu es pas à l’aise là où il y a trop de monde. Donc…

Tu trifouilles un peu le tissu de la cape que tu portes, ne sachant pas vraiment comment te tenir pour le moment en attendant sa réponse...

Tu lèves les yeux vers elle quand elle dit qu’elle avertira sa nourrice pour le passage. Tu hoches la tête, plus rassuré d’une certaine manière. Tu affiches un léger sourire avant de baisser la tête, toujours en train de tripoter ta cape qui semble entretenue tout de même malgré le fait qu’elle semble de seconde main. Tu soupires un peu avant de revenir à Auria qui se met à rire. Tu fronces doucement les sourcils, basculant la tête sur le côté. Qu’est-ce qu’il lui prend d’un coup. Tu remets la cape sur les épaules et pouffes avec elle.

- S’passe quoi, Hael ?

Oui, tu gardes le surnom, tu ne sais même pas pourquoi. Elle se calme doucement avant de soupirer, comme si elle comptait révéler quelque chose d’important. Tu l’écoutes attentivement avant de te redresser, reculer et déglutir. Oh. Ce n'était pas prévu pour toi, si tôt. Si vite. Normalement, un lien prend du temps, prend des nuits. Même si vous vous voyez en vrai, ce serait le début de la fin. Le lien deviendra plus fort. Tu ne pourras plus te passer d’elle et elle de toi. Vous touchez dans le Rêve est un début. Vous touchez dans le monde réel, peau contre peau, c’est la dernière étape.

Tu continues de l’écouter, essayant de réfléchir rapidement à la situation. Tu penses à l’endroit où tu vis, te disant que non, elle ne mérite pas ça. Tu baisses la tête et serres les dents. Tu serres les poings, en silence, ne répondant pas de suite. Tu soupires et décides de te lever, les bras croisés sur ton torse et fait volte-face.

- C’s’rait mieux qu’non.

Tu secoues la tête négativement, dos à elle.

- J’ai rien à t’offrir… Rien…

Parce que tout le monde le sait. Être lié à un Récupérateur, c’est le risque de le voir partir un matin et que les autorités ramènent son arme et sa cape le soir. Ou quelques jours plus tard, des années plus tard. Ou jamais. C’est le risque de le retrouver en morceau, de sentir le lien qui se brise parce qu’il est mort dans d’atroces souffrances. Tu soupires de nouveau.

- T’f’rais mieux de te réveiller…

Que tu lui conseilles avant de te retourner vers elle, une dernière fois pour cette nuit.

- Ne montre pas tes yeux. Ne fais confiance à personne quand tu passeras la frontière, même si ta nourrice te dit le contraire. Ne donne rien à personne. Ne parle à personne de qui tu es. Ne rends pas service. Ne balade pas seule et surtout… Surtout…

Tu t’approches d’elle, les mains sur ses épaules, plantant ton regard dans le sien.

- Prends une arme. Si tu veux de mes nouvelles, cherche un certain Wendell. Yeux Bleu de naissance, brun. Il sera au bar des Pendu. Tu m’as compris ? Ne...

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Tu n’as pas eu le temps de finir que tu ouvres les yeux dans le vrai monde, surpris par un tremblement de falaise. Tu te redresses rapidement, cherches ton arme et mets ta capuche sur la tête pour te cacher dans un pan de mur, le temps que cela se calme. Tu fermes les yeux en tremblant, ne sachant pas combien de temps cela va durer… Tu attends avant de reprendre une respiration normale, pouvant sortir pour constater les dégâts. Tu soupires, voyant qu’encore une fois, ton instinct eu raison de toi. Il faut quitter temporairement ce logis pour ta migration… Les Vers des sables sont revenus…

Tu ne pourras pas dormir pendant quelques jours avant d’être arrivé à l’autre refuge…