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LE TEMPS D'UN RP

Les enfants de la lune. [PV Lulu] +18

Ezvana
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Sabrina
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Ezvana
Sam 7 Oct - 9:28

Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise.

Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.


Le vent glisse dans la cellule grise, mugissement qui siffle aux oreilles, soulève un petit de tas poussière, agite une longue crinière sombre sur ce corps monstrueux qui se tenait debout face aux barreaux du semblant de fenêtre en hauteur, cet espace si petit qui était le seul exemple du monde extérieur que connaissait la créature.
Yeux de lune qui observent ce qu'ils pouvaient apercevoir brièvement dans la nuit, cherchent le moindre signe de vie qui pourrait distraire son esprit embrumé par l'inquiétude. Des inconnus allaient le voir, certains le toucheraient, on marchanderait son existence pour des services tous aussi vils les un que les autres. Mais c'était le souhait de Mama, il ne pouvait pas désobéir et puis elle savait ce qui était bien pour lui n'est-ce pas ? De toute façon c'était ainsi que tous devaient agir, puisqu'il n'a connu que cela depuis toujours. Ce n'était pas à lui que revenait le choix de la décision.

Un reniflement bruyant alors qu'il essaie de capter des odeurs extérieures qui pourraient le libérer de son angoisse personnelle qui nouait lentement mais surement ses entrailles. Ses iris fendues tel ceux d'une vipère cherchent la présence de Chat quelque part, une ombre, un reflet, quelque chose. C'était son réconfort, son doudou personnel, une vie qui ne se méfiait pas de lui et de son apparence hors norme. Avec lui il pouvait discuter, exprimer les désirs profonds de son cœur sans être jugé, recevant de l'affection parce que lui-même pouvait en donner.
Dans son dos sa queue s'agite, la pointe effilé racle le sol dans un crissement dérangeant. Sheog se demandait quelle était la vie des habitants aux alentours, s'il y avait d'autre personne comme lui. Il ne pouvait être seul au monde. Ce poids serait trop écrasant pour ses épaules et cette réflexion serre sa gorge, une fatalité qui lui colle à la peau et rend ses pensées sombres.

Personne ne pouvait savoir ce qui pesait si lourd dans son corps large pourtant trop étroit pour un tel désarroi. On le traite de Monstre, d'Animal. Juste capable d'obéir et de plier l'échine pour se soumettre aux désirs les plus enfouis des êtres humains. Esclave. C'était ce que voulait dire son nom dans le dialecte ancien d'une race appartenant aux forêts. C'était ce que lui avait dit Mama, après qu'il est posé des questions sur ses origines. C'était une évidence qu'elle ne pouvait être sa mère biologique, elle si délicate et belle, si noble alors que lui était hideux. Il devait l'appeler Mama même si elle le considérait moins qu'un animal de compagnie. Mais cela Sheog n'en avait pas conscience. Comment se rebeller quand on ne connaissait rien d'autre que les quatre murs de sa chambre ? On ne remet pas en question une vie entière à obéir aux ordres d'une personne sans raison valable.
Être doué d'une sensibilité qui ne recherche que des réponses à ses questions, cherchent à plaire à tout prix aux personnes qui l'entourent. S'il se comportait bien, on le nourrissait. Une fois Mama a caressé sa crinière et ce geste est resté gravé dans son cœur.
Si personne ne voulait l'approcher, c'était qu'il y avait une raison. Dans les livres qu'il chérit tant, celui qui avait une apparence repoussante était toujours celui qui était méchant et seul. Peut-être qu'il l'est de nature et que Mama le contenait pour qu'il ne fasse pas de mal autour de lui.

Pourtant, il y a peu, il y eu une arrivée inattendue, qui avait bouleversé sa vie routinière. C'était Mama qui l'avait présenté devant la porte de sa chambre. Au premier abord, Sheog eu peur. Peur de cette apparence si différente des autres, ces griffes semblables aux siennes au bout de ses doigts fins, cette peau bleutée et ses oreilles pointues. Cette nouvelle domestique lui ressemblait un peu, dans une version adoucie de sa propre image. Elle aussi était un démon ? Il avait frémi de terreur, avait reculé au fond de sa pièce tel le chien craignant de recevoir une punition. Avait refusé toute nourriture tendue par cette elfe bleue pendant un temps.
Curiosité dévorante pourtant qui brillait dans son regard, cette façon de la dévisager pour retenir le moindre de ses mouvements, comprendre ce corps si gracile. Jour après jour, il accepta sa présence, apprécia la douceur naturelle qui se dégageait de ses déplacements. Animal sauvage qui se laisse approcher par un esprit de la nature. Car jamais il n'oubliait qu'il pouvait être dangereux et cette créature si belle ne devait pas être blessé par sa faute. Jamais. Jamais il ne se le pardonnerait. Pour la première fois il était abordé par quelqu'un qui n'était pas humain. Il y avait bien d'autres être différent dehors. Et dans son cœur était née une braise : peut-être qu'il n'était pas seul.
Une nuit, alors qu'il accepta qu'elle puisse s'approcher de lui il avait posé une main sur son torse nu et c'était présenté.

- Je suis Sheog.

Un chuchotement doucereux qui caresse les oreilles, jamais il n'utilise le vrai son de sa voix pour ne pas intimider son interlocuteur.
Bien évidemment qu'elle connaissait déjà son prénom, il en était conscient. Mais pour la Gargouille c'était un geste important. Jamais il ne c'était présenté de lui-même devant les autres. Jamais on ne lui a laissé l'occasion de fuir un contact. Il n'avait rien d'autre à offrir.
On toque à sa porte avec douceur et son cœur rate un battement alors qu'il sort de ses rêveries. Un mouvement de côté sur ses pieds de félin aux longues griffes, se tourner vers ce visage qui sortait de la pénombre, longues mèches de nuit qui coulissent sur ses hanches.
Un hululement doux tel celui d'une chouette qui sort de sa bouche en voyant la femme face à lui, faire face à elle en s'approchant de quelques pas pour se retrouver au milieu de la pièce. Machine musculeuse qui plisse les yeux tel un chat apercevant un proche.

Rituel qui c'était instauré depuis l'arrivée de la femme à la peau bleue quand il a accepté sa présence, cette préparation avant la rencontre à l'étage dans le salon du manoir. La domestique devait mettre des brassards en cuirs autour de ses poignets, les chaînes tintant doucement à chaque mouvement, ainsi qu'un étui sur la pointe de sa queue pour éviter toute mésaventure et un collier épais d'où pendait une laisse. C'était sa tenue de travail, une illusion pour adoucir les esprits en ébullitions des potentiels clients.

Ce bras qui se tend vers l'avant pour faciliter le travail, cette façon de presser ses doigts pour que les ongles longs ne soient pas menaçants. Il sent l'effleurement de ses griffes contre son poignet mais il ne dit rien, accepte le moindre contact même si léger. Depuis un temps déjà il ne se méfiait plus de la belle aux oreilles si délicatement pointus. Au contraire, sa présence était un réconfort qu'il chérissait particulièrement, une amie qui lui avait un jour offert un livre en cachette. Il lut, et relu des dizaines de fois ces lignes qu'il connaissait presque par cœur, des comptines parlants de créature fantastiques.
Ses longues oreilles se rabattent sur son crâne quand elle mit l'étui sur la pointe de sa queue. Il n'appréciait pas que l'on s'approche de cette partie de son corps bien trop sensible, surtout d'avoir la sensation que son moyen de défense le plus efficace est réprimé. Quand elle eut fini il la regarde intensivement comme s'il pouvait transpercer le secret de cette pierre sur son front. Lentement un doigt se relève, vient repousser une mèche sombre de la domestique du bout d'une griffe.
Non, d'Aksana.
Effleurer son épaule avant de retirer le contact. Un léger sourire vint fleurir sur ses lèvres alors qu'il s'avance vers la porte.
Ce soir Mama devait être fier de lui.

Lulu
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Lulu
Dim 8 Oct - 18:58

Aksana

Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués.

Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
AKSANA'S POV. Je connais un endroit qui voudra bien de toi. Confidence murmurée par la gardienne des chérubins oubliés, l'âme enfin soulagée de pouvoir déloger le diablotin à la peau bleuie de son nid. Enfin, je vais me libérer de toi, aurait-elle souhaité ajouter, cette vieille humaine aux cheveux tirés en arrière et à la mine austère. À l'origine, les diablotins étaient deux, nés sous l'égide de la même lune, puis abandonnés quelques heures à peine après leurs premiers cris, sur les marches glacées de l’orphelinat.
La maîtresse de ces lieux inhospitaliers avait décrété que ces parasites, livrés à leur sort, devaient s'éteindre dans la froideur nocturne, peut-être même espérait-elle qu'une bête sauvage viendrait les dévorer. Mais la nuit, clémente compagne, eut pitié d'eux, et la lune, telle une mère aimante, veilla sur ses enfants jusqu'à ce que le soleil ne la chassât du firmament. Finalement, la matrone, lassée de leurs pleurs incessants qui résonnaient jusque dans sa piaule, se résolut à les accueillir.
Et parvint, enfin, le jour funeste où la matrone, accablée et résolue, saisit l'occasion d'exorciser l'ultime azuré, fardeau insupportable qui depuis tant d'années avait troublé sa quiétude. Un sourire dément se dessina sur ses lèvres austères tandis qu'elle ourdissait un plan funèbre pour l'expédier vers un lieu maudit, où résidait une créature tout aussi impie que la démone.
Toutefois, dans le cœur de la jeune malhar persistait une mince lueur d'espoir. Elle avait rêvé que viendrait à son secours celle-là même qui, quelques années passées, avait recueilli son cher frère, offrant enfin aux âmes sœurs l'opportunité de se retrouver. Là où elle avait rêvé de la chaleur d’une étreinte fraternelle, elle fut à la place étouffée par le froid cruel de la déception, qui souffla sur elle tel un vent glacial, balayant les illusions.
La créature, précipitée dans les entrailles d'un nouvel enfer, se trouva sous l'implacable férule d'une autre mortelle à l'âme tout aussi austère. Son déni, semblable à la ténacité d'un cafard, lui servit de bouclier contre cette réalité amère, qui se jouait à nouveau d’elle.
Pour une fois, on désirait sa présence… Et elle ne décevrait pas.  
Réduite à un statut domestique, pour ne pas dire d'esclave, elle fut désignée pour prodiguer des soins à une autre créature démoniaque que nul humain, ni aucune autre créature, n'osait approcher, puisque tétanisés par la peur viscérale face à l’éventualité de devenir son prochain repas. Les maîtres des enfers l’avaient donc choisi précisément, car ils avaient discerné en elle une estime de soi des plus médiocres, une vulnérabilité qui la rendait prête à tout pour gagner quelques maigres sous. De surcroît, si par une funeste destinée elle venait à disparaître, emportée par les griffes de la créature, nul ne viendrait verser des larmes en sa mémoire, ni chercher querelle pour venger sa mort.

Elle commença donc à travailler dans cette demeure lugubre, où chaque jour lui rappelait la sinistre réalité de son existence. Elle se souviendra également de la première fois où elle découvrit la créature. C'était une vision qui aurait fait frémir les âmes les plus intrépides. Une bête cornue, à la crinière d'ébène qui semblait refléter l'obscurité des ténèbres elles-mêmes. Ses griffes acérées semblaient taillées dans la nuit, sa queue empoisonnée évoquait le venin de l'enfer, et sa musculature démesurée en imposait comme une créature mythique surgie des abysses que nulle n’aurait dû en extraire.
Lorsqu'elle posa les yeux sur cette abomination, la terreur la submergea. Elle ressentit une peur viscérale, une angoisse profonde qui étreignit son âme. Elle décela dans les yeux de la créature une lueur d'hostilité mêlée d'appréhension, qui scintilla dans ses prunelles comme le reflet de ses propres angoisses. Mais malgré la peur qui lui nouait les entrailles, la jeune malhar prit sur elle, ravala ses craintes et se mit à accomplir son travail avec résolution. Car elle avait besoin de cet emploi pour survivre, pour accomplir son souhait, tout comme la créature avait besoin d'elle pour ses soins.
Cependant, elle s'efforça de prendre sur elle, ravaler sa peur, et accomplir son travail malgré l'effroi qui la submergeait. Les jours s'écoulèrent, et peu à peu, une étrange alchimie opéra entre eux. Ils apprirent à cohabiter, à partager le même espace. La peur, tel un manteau usé, s'étiola, laissant place à une fascination curieuse. Les griffes acérées qui semblaient d'abord destinées à la déchirer ne se montrèrent pas si menaçantes, et elle découvrit qu'elles étaient simplement un peu plus longues que les siennes. Son apparence, auparavant terrifiante, se mua en une singularité à laquelle elle commença à s'identifier. Les heures s'écoulèrent, les jours s'enchaînèrent, et leur lien, étrange et improbable, commença à se tisser. La créature n'était plus un monstre à ses yeux, mais une âme solitaire, peut-être aussi perdue qu'elle-même. Ils partageaient une existence sombre et cloisonnée, unis par la cruauté des humains qui les avaient condamnés à cause de leurs différences.

Il était quelque chose quelqu’un comme elle.

Dans l'ombre veloutée de cette demeure ténébreuse, un moment inoubliable survint. Un soir, dans un chuchotement doucereux, il lui confia son prénom. Il était un mot d'une étrange beauté, un nom qui résonnait dans le silence de la demeure lugubre comme une mélodie oubliée.
Sheog, tel était son nom.
La domestique reçut cette confidence avec une émotion indicible, une tendresse qu'elle avait rarement ressentie. Car, jusqu'ici, personne ne lui avait jamais fait confiance, personne n'avait jamais partagé un secret avec elle, ni confié la moindre parcelle de son être. Elle était une malhar, une créature perfide, égoïste et cruelle. Alors, elle se promit de prendre soin de ce précieux nom, de le choyer comme on chérit un trésor inestimable. À chaque fois qu'elle le prononcerait, elle le ferait avec une douceur et une tendresse infinies, sachant qu'il représentait bien plus qu'un simple mot à ses yeux.

— « Je m’appelle Aksana. »

Tel était le nom de celle à qui Sheog venait de confier son unique trésor.
Aksana avait voulu répondre en nature, en murmurant à son tour son propre prénom, dévoilant ainsi un coin de son intimité, une part d'elle-même que personne n’avait désiré découvrir jusqu’ici. Depuis toujours, elle avait été réduite à une seule et unique facette de son être : son espèce. Elle était devenue un être sans nom, un être sans histoire, une ombre perdue dans l'obscurité. On la désignait davantage par le terme générique « la malhar » que par son véritable prénom, qu’elle offrait pourtant volontiers. Elle était devenue une étrangeté, une aberration, une entité qui suscitait la peur et le mépris, mais jamais la compréhension. Les murmures, les regards de dégoût, les rejets inlassables avaient été son lot quotidien. Pourtant, elle n'avait jamais renoncé à son identité, à sa capacité d'aimer, de ressentir, de souffrir, et ce soir, elle osa le confier à une autre âme conspuée.

( o u t f i t ) Dès la tombée de la nuit, Aksana, dévouée à sa tâche sordide, chemina d'un pas résolu vers la sinistre alcôve où gisait Sheog. La jeune malhar, animée d'une compassion profonde à l'égard de son compagnon infortuné, maudissait dans l'âme le rituel des chaînes, tout en sachant qu'il était nécessaire autant pour la sauvegarde de sa propre intégrité que pour celle de la clientèle de leur chère Mama.
S'attelant à cette tâche ingrate et animée par une douceur qui tranchait cruellement avec la brutalité des chaînes, se prit à l'ajustement des cuirs aux poignets de Sheog. Tel un orfèvre aux doigts délicats, elle fit épouser ces entraves à sa peau d’albâtre, tout en ajustant un collier épais à son cou de manière à ce qu’il n’y laisse aucune meurtrissure. Puis, avec précaution, elle entreprit de protéger la pointe de sa queue, afin d'éviter tout accident malheureux.
En ces gestes minutieux, ses mains effleurant la queue de Sheog, et elle perçut l'ombre de l'angoisse assombrir ses prunelles. Un silence soudain emplit la pièce, le temps semblant s'étirer en un interminable chapelet de secondes. Aksana suspendit sa besogne, non par crainte, mais par une forme d'attention toute empreinte de compassion. Leurs regards se rencontrèrent, une brève communion silencieuse, et l'approbation tacite perça le voile de l'incertitude. Alors seulement, avec précaution, elle poursuivit la tâche, refermant l'étui protecteur avec une tendresse infinie.
Lorsqu'elle eut terminé, elle se plaça en face de lui pour lui adresser un dernier regard d’encouragement. Mais elle fut surprise de ressentir le regard intense de Sheog caresser la pierre qui ornait son front, et elle abaissa légèrement sa mine, troublée par cette insistance. Certaines de ses caractéristiques, à elle, étaient si étranges aux yeux de ceux habitués aux formes humanoïdes plus communes, que le moindre intérêt qu’on portait à certaines d’entre elles, pouvait faire naître chez elle un profond inconfort.
Avec une tendresse inattendue, Sheog repoussa l'une de ses mèches de son visage, geste délicat qui toucha le cœur soucieux d'Aksana. Ses prunelles rencontrèrent celles du captif, et un sourire sincère menaça d'entrouvrir ses lèvres, un sourire si intense qu'elle se força à le réprimer, ne voulant pas dévoiler ses canines qui auraient donné à son visage un aspect effrayant en cet instant de douceur partagée. Alors, dans le silence de la cage, leurs regards se lièrent une dernière fois, avant qu’il ne soit obligé de se donner en spectacle aux prunelles avides de la clientèle… Un spectacle cruel auquel Aksana ne pouvait assister, car sa place n’était pas là-haut, mais ci-bas, avec Sheog.

— « Sheog… » susurra-t-elle, cherchant à capturer son regard avant qu'il ne soit englouti par les ombres de l'antique manoir. « Tu trouveras à ton retour une petite surprise », lui confia-t-elle, esquissant un sourire qui dansait au coin de ses lèvres, un sourire qu'elle maîtrisa de nouveau.

Aksana était bien consciente de la passion qui les unissait. Elle savait que les mots possédaient le pouvoir de susciter des évasions, de faire naître des rêveries enchantées et de devenir des compagnons réconfortants dans les longues nuits solitaires. C'est pourquoi, lors de ses déambulations quotidiennes, en cette douce soirée naissante, elle avait choisi avec soin un ouvrage à l'intention de Sheog. Une petite surprise, peut-être le prélude à une série d'autres... Même si elle devait veiller attentivement sur ses maigres finances, aussi restreintes que la liberté de l’être cornu.

— « J'espère qu’elle te plaira », souhaita-t-elle à voix basse, détournant brièvement ses yeux de l'albâtre. C'était un réflexe discret qui surgissait dès qu'une vague d'anxiété l'étreignait. Puissent mes choix s'avérer justes, murmura-t-elle en son for intérieur. « Je serai là à ton retour pour te l'offrir. Bon courage pour cette nuit », conclut la domestique, pleinement consciente que les mortels qui visitaient ce lieu n'étaient pas les plus tendres.
Ezvana
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Ezvana
Dim 15 Oct - 22:27

Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise.

Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.


Quand il entendit son nom, cela glissa à ses oreilles comme un murmure duveteux qui faisait pétiller son cœur. Cela l'arrête dans son mouvement et lui fait tourner la tête pour observer la femme a la peau bleue comme si son regard - ourlé de sombre - de reptile pouvait la transpercer. Intense à bien des égards sans se rendre compte de ses capacités à perturber les autres. Elle n'était plus qu'un papillon aux ailes teintés de nuit qu'il pouvait immobiliser ici dans cette étroite chambre. Pupilles fendues qui rend l'acier de son regard aussi tranchant qu'une lame de rasoir. Et pourtant quand il entend parler d'une surprise, un sourire d'enfant se dessine sur ses lèvres venant casser cette puissance qui le recouvrait d'un manteau miroitant.
La pointe de sa queue s'agite tel un chat repérant un oiseau sur une branche et un ronflement gronde dans sa poitrine étouffant un ronronnement naissant. Il ne pouvait pas se laisser aller, on comptait sur lui à l'étage.

- J'ai déjà hâte.

Chuchotis doucereux qui peine à masquer son excitation. Réprimer le tremblement, l'envie de piétiner sur place tel un fauve en cage alors qu'il désirait déjà que la soirée se termine, qu'il puisse retrouver le cœur de sa chambre et d'y découvrir son cadeau. C'était un bien tellement rare que c'était une étoile que l'on décrochait du ciel pour le lui offrir.

La voix de Mama trancha dans l'air, l'appelant d'une voix claire et sèche. C'était l'heure.
Ses pieds ne faisaient aucun bruit sur le sol, cette manière de relever les griffes pour ne pas griffer le bois. Certaines marches craques, couines sous son poids comme annonciateur de l'arrivée du monstre des enfers. Faire attention à ne pas que ses épaules frottent contre les murs.
Le corps musculeux se penche en avant, la tête se baisse pour que les cornes n'agrippent pas le chambranle de la porte et alors on tend des exclamations des étranglements. Chansons bien connues aux oreilles pointus de Sheog qui ne réagit plus à tous ces soubresauts et ces murmures désobligeant. Il s'avance lentement vers le centre du salon où se tenait un pentacle géant tracé à la craie, d'ordinaire caché pour un tapis épais que l'on a repoussé sur le côté, mise en scène pour mettre en valeur la pièce de théâtre qui allait se dérouler ce soir, piètre consolation pour les invités qui pensent être ainsi protégé de l'entité démoniaque.

De hauts chandeliers portant des bougies rouges allumé dans tous les coins de la pièce, tout autour du pentacle, illuminant le salon d'une lueur tamisée, faisant danser les ombres sur le mur, rendant vivant les cauchemars de certains alors que Sheog s'approche. Des odeurs d'encens qui planent dans l'air, faisant tourner les têtes et plongeant les Humains dans des pensées interdites. Tout était mis en place pour qu'ils voyagent, qu'ils rencontrent le fils du Diable en personne et qu'ils se laissent tenter par leurs pêchers les plus intimes. Sa mère aimait le sensationnalisme.

Mama parle, le présente d'un monologue appris il y a longtemps. Sheog n'en comprenait pas tous les sous-entendus et surtout il ne se fiait pas à ce qu'elle pouvait dire. Il savait que c'était comme la description d'un de ces personnages dans ces livres, il fallait qu'il incarne un pion que l'on pouvait amadouer. On le décrivait comme une entité incroyable, capable de toutes les prouesses que l'Humains pouvaient imaginer
Regarder la puissance de l'incube, maîtrisez sa puissance du bout des doigts, venez caresser l'interdit sans que cela n'ait de conséquence sur votre intégrité.
Regardez sa musculature incroyable, la puissance qui se dégageait de son corps fait pour briser des os. Admirer les courbes de ses cuisses, la longueur de ses doigts. Ne doutez pas l'expertise de sa langue pour vos nuits les plus endiablés. Il n'y a pas plus obéissant, il exécutera toutes vos demandes et ne vous posera aucun problème.

Avant, Mama découvrait l'arrière de son pagne et ce morceau de cuir qui recouvrait ses parties intimes pour l'exhiber et exciter la convoitise des potentiels clients. Mais Sheog n'aimait pas cela, mal à l'aise devait cette démonstration. Souvent il avait renâclé, c'était fait sévèrement réprimander par Mama. Mais elle avait arrêté d'agir ainsi en voyant qu'il était toujours aussi embarrassé et pour ne pas décourager les invités.
Après tout on le décrivait comme une bête docile presque un peu stupide, incapable de comprendre les pensées du communs des mortels seulement capable d'effectuer les tâches demandées. Peut importe ces tourments, ses envies. Après tout il était inférieur aux humains et cela Sheog le comprenait et l'avait assimilé depuis son enfance. Il était un monstre qui ne méritait pas d'être au niveau des Humains bien plus beaux et élégants que son apparence difforme.
Ses lectures étaient un secret qu'il ne devait pas dévoiler et qu'il gardait précieusement, craignant qu'on lui retire ce plaisir. S'il fallait plier l'échine pour être accepté il le fait sans sourciller.

Ses yeux se perdent sur les murs, sur les grandes bibliothèques qui habillent le salon en ce demandant ce que pouvait renfermer en leurs cœur ces livres qui chatouillent sa curiosité depuis toujours. Bien évidemment il n'avait pas le droit de s'en approcher, seulement confiné à ce cercle de craie et sa chambre dans la cave. Il y avait de grands tableaux, certains étaient des membres de la famille que Sheog n'a jamais connue mais Mama lui avait parlé de ces ancêtres qui ont toujours vécut ici, un nom réputé et une richesse bien connue dans les environs. Lui n'avait pas conscience de l'importance de l'argent, il le voyait parfois être échangé de mains en mains, il savait que c'était ce qui maîtrisait le monde mais n'en a jamais possédé. A quoi bon de toute façon ?
Ce qui était important pour lui c'était la nourriture. Cette faim dévorante qui lui broie les entrailles et l'empêche de réfléchir correctement, comme si la viande crue offerte en fin de séance ne lui suffisait pas. L'impression de n'être jamais rassasié. C'était pour cela que Mama le privait de cet apport quand il n'était pas asse obéissant et qu'il se gardait bien de déroger aux règles établis depuis des années.

Un portrait attire son attention, une femme au port altier qui posait dans un épais fauteuil de velours. La mère de Mama. Pouvait-il la considérer comme sa grand-mère ? Sheog n'était pas dupe, comment une femme telle que Mama pouvait-elle enfanter un être tel que lui. Elle n'était pas sa génitrice et cela lui pesait sur le cœur chaque jour qui passaient. Il a déjà posé la question sur sa provenance mais toujours elle a esquiver les questions, se montrant ferme et bloquer dans sa position. Il n'avait pas à savoir. Elle était sa Mama, c'était tout ce qu'il devait savoir. A quoi bon se torturer à savoir qui avait bien put l'abandonner, elle était là pour prendre soin de lui.
Ourlet de cils noirs qui balayent presque ses pommettes saillantes alors qu'il se détourne du portrait pour regarder Mama. Depuis quelques temps il voyait bien des mèches grises s'insinuaient dans sa chevelure châtaine. Parfois elle sentait un produit et le gris disparaissait pour un temps de ses racines. Mais rien ne pouvait camoufler les ridules aux coins de ses yeux et de sa bouche, qui pourtant ne gâcher en rien la beauté naturelle de cette Humaine.
Puis par nervosité il baisse les yeux, fuit le regard oppressant de toutes ces personnes autour de lui qui le fixent. Il avait peur de les effrayer s'il osait les regarder de face alors il se contente de les écouter, d'essayer de humer leurs odeurs pour mieux comprendre leurs mondes.

Une femme s'approche, ses pas dépassant le marquage à la craie et Sheog plaque ses oreilles en arrière, renâcle doucement tel un animal. C'était la peur qui fouaillait dans son ventre, celle de pouvoir lui faire du mal sans le vouloir. Le claquement sec de la cravache entre les mains de Mama l'immobilise aussitôt. L'inconnue saisie la laisse au bout de ce collier en cuir et d'un mouvement brutal elle la tire vers le bas, claquement sec qui raisonne autour d'eux tel un coup de fouet. Sheog était bien trop imposant pour souffrir d'un tel acte et pourtant il baisse la tête, suit le mouvement ordonné avec la docilité d'un chien bien dressé. Elle tire encore, toujours plus bas et il suit la demande tombant les deux genoux à terre.

Vision étrange une cette montagne monstrueuse qui se plie ainsi à la volonté d'une frêle humaine qui affichait un sourire satisfait sur ses lèvres. Elle tendit la main, caressa la courbe des cornes sombres qui ornait le crâne de Sheog, entremêlant ses doigts dans la crinière épaisse du monstre, tire dessus comme pour voir si cet être à ses pieds était capable de ressentir la douleur. Plus bas, toujours plus bas. Son menton se baisse, son corps se ploie vers l'avant alors qu'il glisse sur le sol et que le pied de la dame appuie sur la corde de cuir. Un son sort de cette bouche aux lèvres pulpeuses alors qu'il relève un œil argenté vers elle, ne comprenant pas cette expression qui s'affichait sur ce visage, le teintant de folie. Une plainte alors que le cuir serrait de plus en plus sa gorge de façon dérangeante et que le talon de l'Humain vient appuyer sur sa queue pour l'immobiliser alors qu'elle s'agitait.

Un mouvement de menton qui lui érafle la peau alors qu'il jette un regard perdu vers Mama qui l'incendie de ses prunelles. L'ordre était muet bien qu'évident.
Quelque chose lui fait mal au cœur, s'enfonce comme une épine dans ce muscle douloureux, bien qu'il n'en comprît pas la raison. C'était ainsi depuis toujours, il ne pouvait pas déroger à la règle.

Ses sourcils se froncent alors que la pression sur sa queue se fait plus brutale, que le poids de l'humaine se déportait sur ce pied. Elle lâche la laisse mais il se garde bien de se redresser, comprenant parfaitement les intentions de cette femme. Il avait déjà vu cette expression sur d'autre visage, avait déjà subi les fantasmes de dominations de bons nombres de personnes.

Sentir sa main sur son dos, ses griffes telles des rainures acides qui marquent sa peau de trace violettes. Son pied qui quitte sa queue douloureuse pour le poser sur son dos et écraser le corps puissant comme si elle pouvait le maîtriser.

La Gargouille n'a même pas le réflexe de grogner, bien que ses lèvres le démangent. Il était mal, il ne se sentait pas bien. Il comprenait bien qu'il y avait quelque chose d'anormale à ce type de comportement, qu'il y avait quelque chose d'interdit. En son for intérieur il n'appréciait pas d'être traité ainsi. Pourtant, il ne disait rien et se pliait à la volonté des Humains, l'esprit bien trop endoctriné depuis un trop grand nombre d'années.
Autour de lui les Humains murmurent, certains poussent des exclamations surprises et d'un plaisir certain. Il y en a même qui applaudissent, visiblement époustouflé par la soumission de la Bête.
Mama sera contente.

- Je le veux.

Cela tombe et Mama affiche un sourire ravi. D'autres personnes s'approchent d'elle, demande comment, quand et combien. Certains sortent déjà des billets de leurs poches, d'autres s'approche de la convoitise toujours au sol pour l'inspecter de plus près. Sheog se contente d'éviter leurs regards alors que quelque chose au fond de lui demande de montrer les crocs et de chopper les doigts qui se tendent vers lui. Il se contente de se relever lentement, redresser sa longue carcasse qui domine les Humains qui ne se méfiaient plus du tout. Un homme traverse le cercle pour attraper une de ses mains, immense et grise, armée de longues griffes. Il la retourne, l'inspecte demande s'il était possible de lui retirer ces armes blanches.
Un mouvement de tête de Mama pour ordre et Sheog vient enfoncer son doigt dans sa bouche et d'une formidable pression de mâchoire il vient sectionner la griffe à ras, donnant presque un semblant de ressemblance avec celle d'un humain.

A partir de ce moment-là, la Gargouille était mise de côté. Comme d'habitude les Humains parlaient entre eux de contrat passé à l'amiable, de ce qu'il était vraiment possible avec cette créature. Il n'y avait pas de réelle limite tant qu'il n'y avait rien pour incriminer la Bête et la Famille.
Mais Sheog n'écoutait pas, peut intéresser par les spéculations des invités. De toute façon, peut importe pourquoi il était demandé, il devait obéir. Au moins il n'était plus craint comme au premier abord et pouvait observer les Humains sans être punit.

Il était curieux comme il les trouvait beau et pourtant manquant de quelque chose. Ils étaient nobles, ils étaient supérieurs à bien des égards. Pourtant aucune griffe n'orne leurs mains, aucun de moyen défense n'étaient évident. Leurs oreilles sont trop rondes, leurs mouvements disgracieux. Il ne maîtrisait pas leurs corps comme lui pouvait le faire. Ils avaient des teintes roses, marrons, jaunes, mais s'arrêtait là la colorimétrie des Humains.
Ils leurs manquait des teintes de bleues.

Le temps passe alors qu'il reste debout au milieu du salon, que les heures s'écoulent à élaborer des dates pour s'approprier le Monstre pour une nuit. Et une fois que tout fu mit en place il eut l'autorisation de partir.
On demande à Mama pourquoi le laisser agir tout seul ainsi, c'était peut-être dangereux ? Elle les rassure. Bien sûr sur que non, Sheog était fiable.
Alors il s'éclipse, descend dans les tréfonds frais de la maison là où était sa véritable demeure. Descendre les marches en faisant attention, s'avancer dans le couloir en ignorant toutes les pièces, il n'y avait que sa chambre qui l'intéressait.
Son cœur soudainement bat un peu plus vite.
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Mar 17 Oct - 18:42

Aksana

Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués.

Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
AKSANA'S POV. Dans l'antre obscur de Mama, et plus exactement, sous les planchers que les mortels foulaient quotidiennement, les domestiques mortelles débusquèrent leur consoeur surnaturelle, chargée de bichonner la créature des ténèbres. Celles-ci lui informèrent qu’il avait su ce soir se démarquer par sa docilité, et qu’il méritait donc un frugal festin. Dès que la servante ingénue reçut cette précieuse information, une lueur d'allégresse teinta les contours de ses lèvres mordues de pourpre. Les propos, en apparence insipides, prononcés par ces femmes aux visages usés par la rigueur, furent interprétés par l’autre créature d'une manière bien particulière… Ils suscitèrent en elle une fierté éclatante. Cette nuit, Sheog avait été exceptionnel.
Une fois les autres servantes parties en hâte, la malhar gravit les escaliers grinçants qui menaient aux cuisines, désertes à cette heure tardive. Là, elle se résolut à préparer un festin savoureux pour lui. Bien que consciente que son talent culinaire et sa créativité seraient contraints par la maigreur des provisions, quand bien même cet être aux proportions gargantuesques transcendait celles des humains qui se goinfraient quant à eux de festins opulents.
Sous les lueurs diaphanes de la cuisine, la lame du couteau virevoltait avec grâce, dépeçant la viande de bœuf en fines tranches, révélant la trame vermeille de ce mets destiné à Sheog. Puis, ses doigts trempèrent la viande dans un mélange de poivre noir et de mélisse, et les saveurs s'élevèrent dans l'atmosphère, créant un parfum à la fois subtil et alléchant. Une fragrance à laquelle la créature nocturne ne demeura pas insensible, sa bouche salivait, quand bien même celle-ci avait déjà reçu son ultime repas de la nuit. Pour Aksana, les restes des maîtres du manoir étaient sa portion, et ces derniers, affamés et insatiables, l'avaient condamnée à se satisfaire d'un modeste bouillon froid, bien peu rassasiant pour l’appétit féroce d’une jeune malhar.
Appliquée dans sa tâche, le doux murmure d'une porte s'entrouvrant avec précaution brisa brusquement sa concentration. Le cœur d'Aksana s'emballa immédiatement, ses prunelles se précipitèrent pour fixer l'intrus. Nerveuse, et encore trop jeune pour maîtriser les réactions impulsives de son corps, ses oreilles s'aplatirent en arrière.
L'invité, par sa silhouette élégante, laissait supposer qu'il faisait partie de l'illustre assemblée de Mama. Celui-ci s’était, sans doute, égaré dans les sinuosités de ce manoir aux dédales infinis. Mais ce qui troubla le plus Aksana, fut son apparence… Indéniablement humaine.  En un souffle, les souvenirs d'une enfance marquée par le mépris et la solitude affluèrent douloureusement, serrant le gosier de la surnaturelle. Parmi les murs impavides de l'orphelinat, la malhar s’était dressée à son insu telle une paria surnaturelle, une proie de choix pour les railleries cruelles et les regards teintés de dédain.
Les deux inconnus échangèrent des regards prolongés, la servante demeurant pétrifiée et vigilante, tel un faon aux aguets devant les crocs acérés d'un fauve, prête à ployer le genou pour satisfaire un appétit vorace. Prisonnière du silence, elle aurait souhaité puiser la force d'émanciper ses lèvres, de surmonter ses frayeurs pour offrir une chaleur bienveillante… Être aussi confiante et rassurante que les mortels.  
Décelant la nervosité de la domestique, un sourire bienveillant éclaira le visage de l'homme. Ce sourire inattendu, telle une brise bienfaisante, rompit la glace qui les séparait, apportant une douce sérénité à l'âme de la soucieuse. Cette lueur d'humanité, qu'elle crut discerner dans le regard de l'inconnu, fit naître en elle un léger espoir, créant une faille dans le rempart de sa méfiance. Une ouverture dans laquelle l'homme s'engouffra promptement.

— « Excusez mon intrusion. Je cherchais les toilettes, et je me suis manifestement trompé de porte », déclama-t-il d'une voix à la fois douce et un brin rocailleuse.

Aksana détourna ses prunelles azurées de la silhouette du mortel, ses lèvres esquissant un léger sourire amusé, lequel s'évanouit aussitôt qu'elle nota l'éclat cramoisi de l'hémoglobine qui souillait ses mains. Par souci de ne pas corroborer les stéréotypes affublés à son espèce, la jeune créature s'empressa de laver ses mains sous un filet d'eau, laissant le sang se dissoudre dans l'antre de l'évier.

— « Ne vous en faites pas », répliqua-t-elle, saisissant un linge pour sécher délicatement ses mains. « Les toilettes se trouvent derrière la porte d’en face », indiqua-t-elle, replaçant son regard sur la noble silhouette qui lui faisait honneur de sa bienveillance.
— « Je vous en remercie… Je ne saurais prolonger davantage cette indiscrétion, bien que l'envie ne manque pas » susurra-t-il, humidifiant ses lèvres, son sourire demeurant de mise. « Je suis Monsieur Tyndall... Et vous, comment vous nommez-vous ? »
— « Je m’appelle Aksana. C'est pour moi un honneur de faire votre connaissance, Monsieur Tyndall », assura-t-elle, inclinant légèrement la tête en signe de respect.
— « Le plaisir est réciproque, Aksana. »

Après ce bref échange où les mots s'étaient épanouis comme des fleurs de velours, Aksana esquissa un sourire, lèvres closes, tout en fixant Monsieur Tyndall. Une douce sensation d'apaisement s'insinua en elle, une émotion étrange et nouvelle qui lui fit l'effet d'une mélodie inattendue au milieu du chaos. Cependant, une gêne subtile, telle une ombre furtive, vint semer le trouble au sein de ce moment fugace. Elle se hâta de réprimer cette sensation inconfortable. Pourquoi éprouvait-elle de la méfiance alors que l'âme en face d'elle était manifestement charitable ? Il n'y avait aucune raison de répudier la lueur d'humanité qui lui tendait la main. Serait-ce ses instincts profonds qui menaçaient de torpiller cette harmonie offerte par l’humain ? Dans ce cas, il convenait d'autant plus de reléguer ces appréhensions. Et pour cela, Aksana s’aida en se rappelant que la bienveillance n’avait rien d’une menace.
Tyndall, d'un geste courtois, inclina légèrement sa tête. Il referma la porte derrière lui, sans prononcer un mot de plus, laissant Aksana à ses activités premières, au milieu des arômes d'épices et de la chair cramoisie.

Quelques minutes s'écoulèrent, un intervalle où Aksana s'était consacrée entièrement à terminer la préparation du repas de Sheog. Puis, avec le plat soigneusement couvert d'un linge et un grand verre d'eau fraîche dans l'autre main, elle quitta la cuisine pour retourner aux tréfonds du manoir, descendant les escaliers qui menaient aux chambres, celles de Sheog et la sienne, nichées à quelques pas l'une de l'autre.
Dans la chambre de la créature majestueuse, Aksana déposa le plat et le verre sur une petite table en bois d’une propreté immaculée. Avant d’être envoyée en cuisine, la domestique avait veillé à ce que tout soit parfait au retour de l’occupant des lieux, et cela incluait l'entretien minutieux de sa chambre. Elle avait écarté les toiles d'araignées et balayé les poussières, dégageant l'atmosphère d'une certaine mélancolie pour laisser place à une odeur florale, plus douce que celle de l'humidité ambiante. Après son ménage, la jeune malhar avait également pris soin de déposer le fameux livre sur la couchette de Sheog.
Le livre était une relique de cuir vieilli orné d'élégantes gravures antiques. La couverture portait une illustration envoûtante de la lune, son éclat argenté se reflétant dans des eaux calmes, encadré par des étoiles scintillantes. L'ouvrage présentait une série de trois nouvelles censées capturer la magie de la nuit et de l'astre céleste. Le premier racontait l'histoire d'un homme obsédé par la lune, qui avait sacrifié sa vie pour atteindre son éclat argenté. Le second narrait l'histoire d'un amoureux éploré qui, à la lumière argentée de l’astre nocturne, cherchait désespérément à retrouver l'âme sœur qu'il avait perdue. Enfin, le dernier décrivait les mystères d'une cité mythique gouvernée par les cycles lunaires, aujourd’hui disparue.
Aksana se souvenait avoir dévoré ce livre quand elle était encore à l'orphelinat, une précieuse échappatoire lors d’une période particulièrement sombre de sa courte existence, quand une partie de son âme lui avait été arrachée. Ce soir, elle brûlait d'impatience de partager cette œuvre avec Sheog, espérant que ces récits inspirés par la lune pourraient éclairer ses nuits, et le faire voyager dans des contrées plus lumineuses que cette chambre dans laquelle il était enfermé.

Alors que, d'un pas feutré, Aksana s’apprêtait à quitter les appartements de Sheog, pour regagner sa propre chambre, elle capta les plaintes des escaliers, foulés par une masse lourde. Les oreilles de la belle malhar, telle une créature en éveil, se dressèrent au son d'une mélodie familière, celui des chaînes. Sheog.
Son cœur s'enroba d'une chaleur agréable à ce doux présage. Elle percevait presque, dans l'obscurité, la cadence régulière de sa respiration.  À chaque pas qui le rapprochait d'elle, l'impatience se faisait plus présente. Ses céruléennes se ruèrent en avant, cherchant la silhouette qui, peu à peu, prenait forme dans le voile nocturne, tel un spectre majestueux émergeant de l'obscurité. Son cœur, particulièrement loquace, tressauta à la vue du cornu, invoquant dans son sein un tourbillon de joie mêlée de fierté et d’impatience. Car, sans nul doute, elle brûlait d'offrir à l'être ténébreux le festin savamment préparé, ainsi que le livre qui viendrait couronner son labeur acharné de la soirée.
Et pour accueillir le victorieux, un doux sourire ourla ses lèvres violines, sans pour autant révéler le tranchant de ses lames nacrées.

— « Félicitations, pour cette soirée… J'ai cru comprendre tu avais su ensorceler les convives de Mama », chuchota-t-elle, ses prunelles pétillant d'une admiration muette envers cet être capable de charmer les âmes humaines.

Aksana s'approcha ensuite de la porte de sa chambre, laissant la faible lumière lunaire sublimer son visage éthéré. D'un geste subtil, elle l'invita à la suivre, entrouvrant la porte pour l'encourager à se glisser à l'intérieur. La pièce dévoilait une modestie feinte, un repas préparé avec soin et une surprise qu'il connaissait déjà. Elle avait souhaité lui offrir ce moment, une parenthèse de lumière au sein de cette nuit éprouvante. Un repas simple, mais chargé de reconnaissance, reposait sur une table près du soupirail, baigné par les lueurs timides de l'astre nocturne en déclin.

— « Je présume que tu brûles d'impatience à l'idée de déguster ce repas et de découvrir ce livre... Cependant, avant toute chose, je me dois de te délester de tes chaînes. Tu me le permets ? »

Dès qu'elle eut son consentement, Aksana s'approcha de lui en douceur, avec la tendresse d'un chat foulant les toits la nuit, les mains prêtes à le libérer de ces entraves. Ses doigts, semblables à des spectres, effleurèrent avec une infinie douceur le cou de Sheog, où le collier et la laisse représentaient les chaînes d'une servitude qu'il était temps de briser pour cette nuit.
Lorsque le collier fut ôté, ses prunelles scrutèrent chaque millimètre du cou du cornu, veillant à ce que les chaînes n'aient laissé aucune empreinte profonde, aucun stigmate de souffrance. Hélas, elle dénicha quelques marques, fines et subtiles, des marques qui firent palpiter son cœur d'une douleur empathique. Elle serra les dents, un frisson de culpabilité la parcourut. Peut-être avait-elle été trop brutale, trop impétueuse dans ses préparations ou dans sa libération. Ou peut-être les convives avaient-ils été plus cruels qu'elle ne l'avait supposé. Elle s’empressa de chasser cette pensée insupportable, et invraisemblable. Mama ne tolérerait pas de telles attitudes vis-à-vis de son trésor adoré.
Elle prit une profonde inspiration pour apaiser les tempêtes de sa conscience agitée. Alors, ses doigts devinrent aussi légers que des plumes, et se mirent à caresser délicatement les traces laissées sur sa peau tout en faisant attention à ne pas le griffer. Chaque cajolerie était une promesse de douceur, un acte de réconfort pour apaiser ces meurtrissures. Et dans le silence de sa culpabilité, elle souffla doucement :

— « Excuse-moi, je serrais moins la prochaine fois… »

Ses mots étaient un engagement à le protéger, à l’apaiser, à le préserver. Elle devait apprendre de ses erreurs, elle devait apprendre à être plus douce, plus humaine, à l'image de ceux qu’elle admirait secrètement.
Après avoir déposé délicatement le collier au sol, elle porta son attention aux poignets de Sheog, où les brassards en cuir étaient encore présents. Le cuir glissa de sa peau, avec une grâce presque aérienne, dévoilant une autre parcelle de chair enfin libérée. Elle avait veillé à ce qu'aucune marque indélébile ne demeure. Cette fois-ci, elle trouva le soulagement dans le fait qu'il n'y avait aucune empreinte douloureuse à révéler, à dénoncer. Juste une griffe rongée, un détail qui fit brièvement froncer ses sourcils.

— « Ça n’a pas trop été douloureux ? », s'enquit-elle, soucieuse.

Là où ses paroles étaient empreintes d'inquiétude, ses gestes étaient imprégnés d'une douceur plus profonde encore. Aksana avança alors vers la queue de Sheog, prête à accomplir l'acte ultime de délivrance. Elle exposa ses intentions, laissant une opportunité tacite pour une objection, prête à se retirer au moindre signe de désapprobation.
Quand le consentement silencieux fut acquis, elle se pencha avec une tendresse encore plus accentuée, libérant la queue de la créature de son dernier lien. Les serres qui avaient enserré cet appendice étaient maintenant relâchées, accordant à cette partie de son être la liberté qu'elle méritait tant. Puis la malhar se pencha pour recueillir l'équipement abandonné, et se mouva avec la grâce d’une panthère, jusqu’à la malle où les entraves étaient entreposées. D'un geste solennel, elle le disposa dans un coffre, refermant le couvercle pour clore de façon définitive cette nuit de servitude. Aksana se redressa ensuite et l'observa avec une lueur d'anticipation dans les yeux, attendant qu'il se délecte du festin nocturne et de la surprise qu'elle avait réservée. Des heures plus douces s'annonçaient désormais.
Ezvana
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Ezvana
Mer 25 Oct - 21:42

Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise.

Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.


Il sut sans la voir que Aksana était dans sa chambre, il n'y avait que quelques pas qui les séparaient. Aucune accélération dans le pas lent et sûr de ses pattes félines, seulement une expiration profonde pour chasser toutes les odeurs provenant de l'étage supérieur.
Gargouille de chair qui laisse apercevoir une peau grise sous le rayon argenté de la lune qui arrive à percer malgré les barreaux au semblant de fenêtre. Visage d'une beauté étrange qui se dévoile, yeux de nacre qui brillent, surmonter de deux cornes aussi sombres que la nuit sans étoile. Cette façon de baisser la tête pour ne pas abimer un peu plus le bois de la porte, nombreuses éraflures imprimées dans la matière qui prouve les passages fréquents de l'entité démoniaque.

Sheog reprend sa respiration à ce moment-là, hume cette odeur si particulière qui recouvrait tous les murs, enveloppé l'air d'une douceur agréable. Il y avait la nourriture aussi, et au vu des notes parfumés, Mama avait été contente. Ce soir il a le droit de manger, mieux encore, il ne mangera pas la viande crue habituel, sans assaisonnement. Parfois on lui offrait un repas particulier, une fois dans l'année en lui disant que c'était son anniversaire. Sheog n'avait pas réellement conscience de ce que cela pouvait signifier, n'ayant aucune notion du temps qui passe. Son quotidien était rythmé d'une telle manière depuis si longtemps qu'il ne se souciait guère d'une chose aussi futile qu'une date précise. Il savait juste que plus le temps passait, plus des rides se lisaient sur les traits de Mama et celui lui faisait peur.

Mais surtout, ce qui faisait plaisir à la Bête, c'était la présence de l'elfe bleue dans cette pièce. Un son sort de son corps, cette sorte d'hululement de plaisir qui accompagnait toujours la présence d'Aksana. Et quand elle le félicite, sa queue bat l'air tel un serpent sans tête et ses oreilles vibrent d'émotions. D'un naturel placide dû à une éducation restrictive, il ne savait pas comment montrer son plaisir aux autres. On ne lui a jamais appris. C'était son corps qui s'exprimait avec intensité bien malgré lui, ce côté animal qui ne faisait qui ne faisait qu'accroître sa différence avec les humains. Et depuis la présence d'Aksana, il se sentait moins seul et mieux compris, elle qui avait aussi des oreilles expressives, des yeux brillants et un sourire magnifique.

Ses billes hivernales glissent sur la femme avant de se détourner et d'apercevoir le trésor qui se nichait dans son lit militaire. Ses pupilles se dilatent sous l'émotion, un ronflement souffle dans sa poitrine alors qu'il se retient de piétiner sur place. Il fait des allé et retours entre les yeux de la domestique et ce livre qui lui était offert, incapable de savoir quoi choisir et comment l'exprimer. L'émotion lui noue la gorge et ses yeux brillent. Se baisser naturellement pour être un peu plus à la hauteur de sa divine gardienne, fléchir sur ces grandes jambes et presque se retrouver à quatre pattes alors qu'une main se pose sur le sol.

- Merci.

Doux murmure soyeux de celui qui ne sait pas comment agir hormis en se soumettant, qui agit pour paraître plus petit, lui si grand qu'il peut rayer le plafond de ses griffes. Quand il recevait un présent, peu importe quel qu'il soit, son interlocuteur aimait qu'il s'abaisse, qu'il montre sa reconnaissant. Il l'était réellement, reconnaissant, aussi se montra-il le plus inoffensif possible.
Glissant sur le sol avec une fluidité étonnante pour sa carrure, il la contourne, cette queue qui manque de riper sur les jambes de la femme et qui pourtant n'effleure même pas le bas de sa tenue sombre. Monstre qui révèle une partie de sa nature avec une beauté interdite. Pourtant la voix de sa partenaire l'arrête dans son élan alors qu'il souhaite se pencher sur ce précieux cadeau. Tout à son excitation il en a presque oublié ce qui lui ceignait la peau.
Se redresser un peu, se tenir droit pour canaliser cet aspect presque félin qui transparait quant il relâchait son attention. Quand le collier est retiré il déglutit plus librement et la caresse des doigts le surprend, le trouble. Douce tendresse sur ses blessures qui lui arrache un ronronnement d'appréciation. Les larges épaules se détendent, les muscles saillant des abdominaux se décontractent. Se baisser d'un cran pour mieux apprécier ce geste d'un naturel déconcertant, n'osant pas bouger pour ne pas troubler ce doux moment qu'il ne connaissait pas. Il en a eu des avant-goûts, des miettes qu'il avait récupérées malgré tout pour en secret les garder précieusement dans son cœur. Il était quelque part toujours cet enfant qui ne demandait que des réponses à ses questions et de l'amour pour apaiser ses craintes.Il n'y avait que Mama qui osait l'approcher, bien trop laid et faisant trop peur aux autres. Les clients parfois étaient doux dans les étreintes intimes, il pouvait voler une caresse, un baiser sur la joue, mais trop souvent on lui pétrissait la chair à vif et on malmenait ses os. Ce n'était rien, les humains étaient ainsi.
Sheog entend Aksana lui parler du collier, il se contente de hausser les épaules. Il ne comprenait pas en quoi le fait qu'elle est serré ou non est une incidence sur l'acte de l'humaine. S'il y avait des marques sur sa gorge, ce n'était pas grave.

- J'ai l'habitude.

Douce créature qui pensait qu'elle parlait de sa rencontre avec la dominatrice et non de cette griffe sectionnée par un coup de dent brutale.
Quand elle se positionne à l'arrière, Sheog plisse ses grands yeux ourlets de longs cils noirs et approche lentement la pointe de cuir vers les mains bleutés. Leurs touchés lui arrache un frisson étrange, qui remonte le long de son dos couvert de griffures, se glisse sous l'immense crinière noire qui danse jusqu'à ses hanches. C'était agréable, comme un secret murmuré au creux de l'oreille.

Une fois libéré de toutes ses contraintes une s'ébroue tel le chien qui a pris la pluie. Un grognement appréciateur sort de sa bouche et il se tourne vers le lit. Les yeux agrandis par l'anticipation il tend une main grise vers ce livre en cuir, fait bien attention à ne pas l'abîmer de ses griffes. Il le relève dans l'air, admire les reflets argentés comme s'il était empreint de magie ce qui impressionne l'esprit fébrile. Son premier réflexe et de le sentir, inspirer l'odeur de vieux livre, du cuir craquant et des pages jaunies par les années. Il y avait l'odeur délicate d'Aksana aussi, mais cela il le gardait pour lui. D'un doigt précautionneux il en parcourt quelque page, lit des mots à droite et à gauche comme pour s'imprégner du contenu inédit.
Sans s'en rendre compte il dévoile un sourire, laisse apercevoir sa dentition et ses canines pointues, gamin qui reçoit un cadeau en avance et qui ne peut cacher sa joie.

Déposer le livre sur le lit avec délicatesse comme s'il était fait de porcelaine. Il se redresse tout à fait, déplie ce corps musculeux comme il le faisait rarement. Son ombre s'allonge, recouvre le corps bleuté de la femme face à lui. Pourtant dos à la lumière ses yeux semblaient prendre vie comme si une flamme blanche dansait derrière l'argenter de son regard.
A ses hanches dansaient les lanières de cuirs, teintant doucement contre le métal de la coque décorative. Son torse est nu, car jamais on ne lui a donné la possibilité de cacher son corps. Statue d'albâtre, Adonis dévoilé aux yeux de tous. Souffle profond alors qu'il fait un pas en avant. Monstre de puissance qui semble épingler la femme face à lui, la dévore du regard intensément.
Un autre pas en avant. Ce bras qui se tend et cette main chaude qui attrape celle d'Aksana pour la lever et la poser sur l'emplacement de son cœur, ou du moins le prêt possible. Elle pouvait sentir la chaleur intense de ce corps, le duveteux de cette peau de pêche qui semblait vibrer de vie.
Cette main grise qui recouvre la sienne pour qu'elle sente le cœur battre fort, qu'elle sente sa respiration.
Mue par l'instinct, il se penche en avant, penche son visage vers celui d'Aksana, jusqu'à que son front se colle au sien et qu'il sente cette pierre précieuse se coller à sa chair. Jamais il n'a vu quelqu'un vers cela, pourtant c'était naturel, c'était ce que son cœur lui indiquait de faire. Il reste ainsi quelque seconde, les yeux fermés pour savourer le moment.

- Merci infiniment Aksana.

Voix plus rauque, plus puissante. Une façon de se dévoiler avec une timidité tendre. Sheog ne pouvait identifier ce qui faisait qu'en la présence de cette créature incertaine il était apaisé. Peut-être parce qu'elle lui ressemblait quelque part.
Les paupières qui se relèvent, cette façon dont leurs regards s'échangent, de ce bleu si intense et de cet argenté qui ne forme plus qu'une nuit sublime et qui n'appartenait qu'à eux.
Étrange cette sensation qui pétillait à l'intérieur de lui, c'était comme des éclats de lumière qui ne cessaient de vouloir chasser les ombres de l'incertitude et de la solitude.

Se décoller d'elle, relâcher cette main, la libérer de cet échange presque intime. Pas un regard vers la nourriture, il n'aimait pas que l'on puisse le regarder pendant qu'il se nourrissait. La Gargouille avait l'impression d'être un animal quand il arrachait de ses dents la chaire sanguinolente et cela crevé les rétines qu'il n'avait rien d'humain.
Il recule et passe alors ses griffes dans de longues mèches d'encre pour essayer de retirer les nœuds qui se formaient malgré des tresses et des soins quotidiens.

- Dans quelques jours, je serais chez une femme. Je ne sais pas pour combien de temps, mais au vu de ses désirs cela devrait juste une nuit, ou deux.

Et je ne veux pas y aller.
Il se garde bien de laisser glisser un tel aveu. Il n'avait pas le droit de décision, il n'avait pas son mot à dire. Obéir et c'était tout. Il ne pouvait pas manquer de respect à Mama ainsi, elle qui l'avait pris sous son aile malgré son apparence, qui l'avait logé et nourrit.
Passer sous silence ce qu'il préméditait lors de ses nuits puisque c'était habituel.
Et pourtant, il sentait une lourdeur dans le creux de son ventre, comme une boule d'appréhension qui grandissait en repensant à cette cliente.
Lulu
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Lulu
Sam 28 Oct - 1:47

Aksana

Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués.

Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
AKSANA'S POV. Beauté marmoréenne s'étala pour dévoiler sa splendeur céleste, sous les orbites abyssaux de celle qui, sans nul doute, venait d’insuffler en lui les braises d'une joie immaculée. L'infâme entité s’émerveilla face à cette silhouette lumineuse, dont l'ombre l'avait engloutie tout entière. Puisse-t-elle ne jamais la régurgiter, souhaita l'âme de l'elfe supposée, qui s'épanouissait dans l'obscurité de cette éclipse aux lueurs argentées.
Merveille expira un souffle profond, arrachant à l'écrin bleuté de sa gardienne une multitude de frissons exquis. La contempler équivalait à l'observation d'un chef-d'œuvre animé, et ses prunelles palpitaient d'une extase que nulle autre entité ne saurait éveiller. Aux yeux de la servante, il était d'une beauté unique, que nulle âme ne saurait diminuer, en dépit de son étrangeté. Elle comprit pourquoi tant d'êtres humains osaient traverser les océans pour l'admirer.
Embrasée par ces perles dévorantes, la jeune malhar sentit ses membres chanceler, sa chair se fondre. Il aurait pu la dévorer, qu'elle n'aurait opposé aucune résistance, tant son être palpitait d'adoration.
Puis leurs mains se rejoignirent, et Sheog posa celle bleuâtre, sur sa poitrine, là où était lové son cœur. Le souffle de cette dernière se suspendit, coupé net par ce geste d'une inestimable générosité qu'il venait de lui accorder. Sous ses doigts, elle pouvait déceler les battements de ce qu'il avait de plus précieux, ce trésor débordant de richesse et méconnu de tous les mortels. Une fois de plus, celle qui, au gré des traitements cruels, avait été contrainte d'endurer le fardeau de l'infortune, se voyait aujourd'hui favorisée. Pour la première fois au cours de sa brève existence, on offrait à cette créature maudite un statut privilégié : celui de percevoir, sous sa main griffue, les palpitations d'un joyau inestimable. Dans le silence de ce moment béni, l’orpheline ressentit une émotion qui la submergea, une tendresse inattendue qui l’enveloppa, et qui la lia enfin, à la beauté du monde. Ses prunelles se mirent à scintiller, telle la mer brillante d’une lueur nacrée quand la lune la caressait.
Peau contre peau, chaleur contre froideur, la jeune malhar fit l'étonnante découverte de la glace qui parcourait son propre épiderme. Jamais elle n'avait permis à ses mains griffues d’embrasser aussi intensément celle d'autrui, si ce n’est à travers des caresses éparses, pas même celle d'une bête. Les animaux les plus communs ici, tels que les chiens, avaient été dressés pour pourchasser la vermine malhar. Quant aux félins, Aksana les craignait intensément, terrifiée à l'idée qu'eux aussi, comme les humains et les chiens, ne fassent preuve de mépris envers les êtres de son espèce.
C’était avec une fascination presque enfantine, qu’elle découvrit la chaleur de la peau duveteuse de Sheog. Le bout de ses doigts tremblait, à la fois hésitant et avide, se glissant avec une infinie délicatesse sur la parcelle d’épiderme qu’il l’invitait à découvrir.
Le front de Sheog se posa doucement contre le sien, un geste inattendu qui la prit de court. Cette proximité nouvelle l'étonna de prime abord, faisant naître en elle une légère appréhension. Cependant, cette hésitation s'estompa rapidement pour céder la place à une étrange et précieuse sensation de communion. La servante avança même légèrement son visage pour accentuer le contact, laissant Sheog découvrir la douceur des reliefs polis de la curieuse pierre qui ornait son front, tandis que ses prunelles se fermèrent.
Dans les ténèbres, une sensation d'être rien de plus qu'un réceptacle des tendresses qu'il daignait lui octroyer. Nulle chaîne, nulle lucarne, nulle geôle, en cet unique instant, seulement eux, et leurs âmes s’enveloppant mutuellement de leur tendresse infinie.
Louanges murmurées d'une voix profonde, qui effleurèrent les sens de la jeune malhar. La gratitude se dévoilait rarement, et c'était peut-être même la première fois qu'elle s'exprimait ainsi à son égard. Sa gorge vibra légèrement, traversée par un souffle de ravissement. Ses expressions demeuraient délicates, animées par le désir de préserver la douceur qui enveloppait cet instant.

—  « C’est plutôt à moi de te remercier… Le plaisir est mien », souffla-t-elle, même l'aigu de sa voix cristalline s’était adouci.

Le plaisir tournoyait en son sein telle une danse légère, tourbillonnant au rythme de l'émerveillement, de l'extase, de la béatitude, que ce modeste présent avait su éveiller sur le visage resplendissant de l'Adonis immaculé
Avec une grâce qui était sienne, il s'éloigna alors, laissant l'orpheline tenter de maîtriser la voracité de ce cœur affamé qui s’était longtemps languit du moindre contact. La domestique reprit son chemin sur le devant de la scène, sans pour autant que l’émerveillée débarrasse du plancher. Telle une tendre créature tapie dans l'ombre, elle demeurait en embuscade, prête à déverser sa douceur sur le beau au moindre appel.
Sous le voile des soucis dissimulés, il lui dévoila, avec une légèreté feinte, qu'une nuit, peut-être deux, il risquerait de se volatiliser. Un laps de temps bref, suffisant pour offrir à une inconnue, sans doute fortunée, le trésor tant convoité de sa présence. Monstre d'égoïsme, le palpitant de la jeune malhar sombra dans la désolation à l'idée qu'une créature humaine viendrait lui ravir son Éden. Avant que sa douleur ne puisse éclore dans son sein, Aksana réprima ces émotions naissantes. Elle se devait d'être comblée, comblée de découvrir que certains êtres humains convoitaient leur présence, malgré leur réputation d’abominations.

Comblée de découvrir,
que les mortels convoitaient leur douceur.


—  « J’ai cru comprendre que certains humains n’étaient pas friands de l’obscurité, que la nuit pouvait les effrayer… Elle doit vraiment la craindre pour solliciter ta protection. Ou peut-être souffre-t-elle d’un sommeil agité… »

Comblée de découvrir,
que des êtres d'origines contraires,
pouvaient s'apporter mutuellement amour et lumière.


Voici, les stigmates d'une enfance cloîtrée, d'une existence privée de toute instruction, de toute attention. Marâtre des chérubins oubliés, l'avait condamnée à un second abandon, la laissant flétrir dans les ombres de l'orphelinat, implorant à chaque hiver, que le givre emporte vermine griffue. Telle une enfant sauvage, elle s'était instruite à tâtons, apprenant à marcher par l'observation de ses pairs, assimilant la parole en épigone, modulant son comportement en de pâles mimétismes, et s'initiant à la lecture en épiaisant les mortels. Les volumes dénichés dans la bibliothèque lui avaient offert la possibilité d'épier davantage l'humanité, d'apprendre d'elle. Hélas, tout ce qu'elle avait pu glaner n'étaient que des récits enfantins, des contes qui, jamais, ne sauraient sculpter une âme adulte.
Et elle, dans toute sa candeur, aurait été comblée de découvrir un sommeil à ses côtés. Où elle s'enlacerait dans l'étreinte de ses bras, se nicherait contre son cœur battant. Ou bien, de ses bras délicats, où elle envelopperait sa masse imposante pour le serrer contre son sein. Qu'il réchaufferait sa peau glacée, qu'elle apaiserait les brûlures de la sienne. Que leurs rêves se mêleraient, pour se perdre ensemble dans des contrées oniriques. Qu’ils affronteraient ensemble leurs cauchemars, à coup de tendresses. Qu’ils se murmuraient des doux secrets, des confidences qu'ils n’auraient jamais partagées auparavant. Qu'ils se découvriraient l'un l'autre, somme après somme. Mais jamais, Mama ne tolérerait la naissance d’une telle affinité, puisqu’ils n’étaient que des vermines au service de l’humanité. Toutefois, lèvres mauves confièrent :

« Mes nuits seront fades en ton absence » révéla l’ingénue, prunelles échouées sur le sol. « Je penserai à toi », très fort, et puissent mes songes t’enlacer tendrement.

Mirettes se relevèrent pour se lover dans celles de l’albâtre majestueux, et un souvenir frappa sa mémoire.
Réminiscence de ces longues griffes insinuant leur chemin dans une crinière ébène, truffée de nœuds. Peut-être pourrait-elle lui apporter son aide. Alors, dans un geste d'une audace tendre, la domestique posa sa main délicate sur le bras d'ivoire de Sheog pour capturer son attention. Un sourire discret s'épanouit sur les lèvres de la douce, qui d'un geste gracieux, lui proposa de prendre place sur sa couchette. C'était l'endroit où, pensait-elle, il ne serait pas contraint à des contorsions inconfortables pour lui permettre d'accéder à ses mèches.
Pauvre inconsciente ou renégate naissante, qui saisissait chaque opportunité que son labeur lui offrait pour commettre l'interdit : choyer celui qui devait être ignoré.
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Ezvana
Lun 30 Oct - 21:38

Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise.

Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.


Créature docile qui se laisse aller, qui obéit sagement à la demande d'Aksana, s'installant sur son lit qui grince sous son poids. Il lui était si agréable d'être ainsi proche de quelqu'un, qu'elle puisse s'occuper de lui comme s'il était vraiment quelqu'un et non un animal que l'on rejette pour sa difformité. Distraitement il essayait tant bien que mal de dénouer un nœud sur une mèche basse, de renouer une tresse maladroitement avec ses ongles trop longs. C'était un geste qu'il faisait depuis qu'il était enfant, cette façon d'entortiller une mèche d'encre autour d'un doigt pour venir l'écraser de la pulpe du pouce, comme si cette friction douce pouvait apaiser son âme. Mais en grandissant il lui était devenu compliqué de manier des mèches de cheveux avec la taille de ses mains.

Plusieurs fois Mama l'avait menacé de le tondre s'il se comportait mal, ce qui lui meurtrissait le cœur, pour une raison inconnue il aimait sa longue chevelure de nuit et ne supportait par de perdre ainsi ce qui était pour lui comme une seconde peau.

- Oui, beaucoup n'aiment pas la Nuit, comme s'ils avaient peur de ce qui se passait quand le soleil se cache à l'horizon. Mais cette Humaine, elle, n'a pas peur.

C'est moi qui ai peur.
Triturer nerveusement une perle qui habillait une tresse malmenée par le temps. Cette humaine était plus forte que lui, cela il en était certain, car c'était lui qui avait un nœud dans le ventre.
Une main vient frotter les abdominaux pour essayer de chasser cette sensation d'avoir un serpent glissé dans l'estomac. Se rappeler avec une netteté terrifiante l'expression sur ce visage déformé par quelque chose d'interdit.

Lui il savait que les Humains aussi pouvaient être des créatures de la Nuit, de celles que l'on ne doit pas répéter et garder pour soi. C'était ce qui lui avait dit Mama, ce qu'il se passait lors de ces Nuits chez les clients devaient rester là-bas et devenir un secret. Parfois elle lui avait ordonné de faire un rapport de ce qu'on lui avait demandé, mais cela c'était avant, au début, quand il ne savait pas encore faire ce qu'on lui disait par ignorance. Parce qu'il ne fallait pas trahir la confiance acquise et se plier aux ordres. Pour qu'ils soient contents, il devait se taire. C'était cela la normalité.

Peut-être qu'il avait cette apparence par ce qu'il était une créature de la Nuit. Peut-être que si la lune se lève là-haut dans le ciel, ce qui devait être invisible se réveille et les Humains, créatures du Jour, devenaient pervertit parce qu'ils pouvaient côtoyer quand ils étaient proches des noctambules. Mais Mama n'aurait jamais permis que sa présence puisse nuire aux autres. C'était peut-être autre chose.
Est-ce que lui s'il sortait au grand jour il devenait un être de Lumière ? Pouvait-il devenir meilleure aux yeux de tous et sortir enfin de l'Ombre ? Ou alors les rayons solaires lui brûleront sa peau de Démon et il ne deviendra qu'un être répudié par la journée même ?
Parfois quand le soleil arrivait à passer à travers les barreaux de sa chambre, il évitait les rayons par peur de se faire punir d'avoir osé espérer. Pourtant la douceur des températures l'attirait comme un aimant.

Sheog est silencieux depuis un moment, plongé dans ses pensées tortueuses qui lui blessent la conscience. Il reprend vie à la réalité alors qu'il se rend compte qu'il a oublié de répondre.

- Moi aussi je penserais à toi.

Le bout de la queue remue sur le sol, balaye le béton brut d'un raclement dérangeant. C'était dit du bout des lèvres, tel un aveu sincère que personne d'autre ne devait entendre. Un tendre sourire étire ses lippes, un ronronnement doux fait vibrer son corps alors qu'il sent à nouveau une main passant dans sa chevelure. C'étaient des caresses presque maternelles qu'il avait tant espérées, même à l'heure actuelle. Mama avait bien fait de la prendre comme domestiquer malgré son apparence, parce que son cœur était pur. Même lui, Monstre qu'il était s'en été rendu compte.
Et puis elle était belle, d'une beauté qui le touchait en plein cœur, mais cela il ne pouvait pas le dire.
Prit d'une brusque peur, il pose une main sur Aksana et se tourne pour la regarder dans les yeux.

- Tu seras là n'est-ce pas ? A mon retour ?

Ses pupilles se sont agrandis dans une terreur qui lui étreignait le cœur avec la brutalité d'un poing qui se referme brusquement, cette peur de l'abandon qui attise les liens froids qui s'insinuent lentement mais surement en lui.
Soudain il entendit des pas dans l'escalier. Ses longues oreilles se plaquent en arrière et il le lève brusquement, tirant l'elfe bleue pour le mettre debout derrière lui, une torsion du torse pour recouvrir le livre d'un pan de couverture. Cette rythmique ne pouvait appartenir qu'à une personne et une autre peur s'infuse dans ses veines, venin glacé qui lui électrise la peau.
Mama apparut à l'entrée de la porte ouverte, le port altier et le regard inquisiteur. Ses yeux d'un gris soutenu glissent sur lui pour se poser sur la présence de la domestique derrière lui. Ses fins sourcils se fronce, un pli vient rider sa bouche pincée. Visiblement elle ne s'attendait pas à la présence de la femme aux côtés de son Fils et elle n'appréciait pas que ses plans ne se déroulent pas comme prévu.

- Tu as bien travaillé, Sheog.

Celui-ci essai tant bien que mal de contenir ses mimiques et autres expressions que son corps transmettait malgré lui, car la présence de Mama n'était pas anodine. C'est rare qu'elle vienne en personne le féliciter, ce qui voulait dire qu'elle cachait autre chose.
La propriétaire des lieux croise ses mains devant elle et le regarde sans ciller, aucune trace de bienveillance n'égayant ses traits alors qu'elle félicite Sheog.

- Demain soir tu iras chez Mme Blondel. Tu y passeras une nuit entière, tu reviendras à l'aube. Tâche de la satisfaire.

Sheog baisse la tête en réponse, montrant qu'il avait compris ce qu'on lui demandait. Un frisson lui hérisse une crête tout le long de sa colonne vertébrale, car il anticipait déjà ce qui allait se produire.
Le regard de Mama glisse sur la nourriture posée sur le côté et elle fronce des sourcils. Il n'avait pas encore mangé, cela ne lui ressemblait pas. Pour elle, il était une créature qui se jetait sur la nourriture, tel le chien qui se précipite sur sa gamelle.

- Je ne doute pas que vous ayez du travail.

Voix sèche, sans réel émotion bien que le sous-entendu fût clair. Elle s'adressait à Aksana alors que sa présence la dérange pour une raison inconnue. La domestique sort de la pièce, les yeux vers le sol, la mine basse, n'effleurant même pas la robe sombre de Mama.
La Gargouille ne réagit pas au départ précipité de son amie bien que son absence laissait le froid envahir de nouveau la pièce.

- Tu devras te plier à toutes ses demandes. Je ne veux pas entendre de mauvais retour, je compte sur toi.

Elle baisse son regard, balaye d’une main un pli imaginaire sur sa robe impeccable.

- Si tout se passe bien, j’autoriserais Aksana à venir lors des soirées pour qu’elle effectue son travail.

Cela voulait dire qu’elle avait clairement vu que la présence de la femme bleue influait sur Sheog et elle mettait sur les larges épaules grise une pression monumentale. Mais l’esprit trop pur de la Gargouille de chair ne voyait pas cela. Il ne pouvait voir que ce reflet miroitant de la gentillesse de Mama, de sa générosité sans borne.
Il chuchote un remerciement sincère alors qu’elle lui ordonne de manger sa nourriture avant de partir en refermant la porte derrière elle.
Le jour ne tarderait pas à pointer à l’horizon et tout le monde devait se reposer.


Lulu
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Mer 1 Nov - 17:52

Aksana

Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués.

Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
AKSANA'S POV. Doigts délicats, aux reflets d'ébène nocturne, s'enlacèrent dans cette cascade d'obscurité, dénouant ses entraves pour lui rendre sa magnificence. Comme à son habitude méticuleuse, Aksana garda ses lèvres scellées, tandis que ses pensées se cristallisèrent en durant cette douce besogne, dans laquelle elle parsemait des éclats de tendresse çà et là.
Soudain, le captif lança sa main en sa direction, la scrutant de ses grands yeux écarquillés, noyés dans l'effroi. Une vision qui transperça son cœur, comme si ces prunelles innocentes avaient enfoncé un pieu en elle. Ses propres yeux, à elle, se dilatèrent à leur tour, se noyant dans un océan profond de chagrin et d'affection. Il s'était inquiété de ne pas la retrouver à son retour, et la douceur azurée se hâta de poser sa main sur celle de l'Adonis griffu, la saisissant avec tendresse.
Jamais elle ne l’abandonnera.
Pensée fulgurante qui frappa sa conscience, la précipitant dans les dédales d'un sombre souvenir. Petite enfant solitaire vivant ses derniers moments avec son frère, des voix frêles échangeant des promesses que les mortels avaient empêché.
Cette fois-ci, ils n’y arriveront pas.
Promesse de cette jeune femme, jadis orpheline solitaire, qui rejetait avec force le destin de s'abattre à nouveau sur elle, sur eux. Sa prise se renforça autour de la main d'albâtre, tandis que ses yeux demeurèrent farouchement fixés dans les siens.
C’en était terminé des abandons.

— « Je serai là, je te le promets », souffla-t-elle sur un ton assuré.

Soudain, des pas funestes résonnèrent au loin, les séparant brusquement. La jeune Malhar se dissimula derrière l'immense carcasse de la Gargouille, et tout comme les siennes, ses oreilles se plaquèrent en arrière. Une peinture angoissante et désolée de deux êtres acculés dans leur propre repaire par l'incarnation de l'inhumanité, qui venait de surgir tel un oiseau de mauvais augure à l’embrasure de la porte.
Le Corbeau observa l’intruse avec ses yeux perçants, où palpitaient les braises de sa colère. Une vision qui coupa le souffle de l'elfe, dont les yeux azur se réfugièrent sur le parquet, comme si le simple fait de ne pas la contempler lui permettrait de se fondre dans l'obscurité.
La voix de Mama s'éleva, et la mélodie lugubre qui teintait sa voix s'empara d'un semblant de fierté pour acclamer son Fils. Le souffle d'Aksana se détendit, sa tête cessa de tournoyer, mais les battements de son cœur ne cessèrent pas leur tumulte. Elle savait qu'elle n'avait rien à faire ici, qu'en cet instant, elle n'était pas mieux considérée qu'un vilain nuisible et  qu'elle ferait bien de quitter rapidement la scène. Cependant, sa curiosité s'éveilla, et la jeune domestique recueillit le nom de la femme qui aurait le privilège de partager une nuit avec Sheog.
Madame Blondel.
Syllabes tout à fait banales dans cette contrée, rien d'excentrique, ni d'exotique. Une énième mortelle de ce lieu, probablement affublée de cette mine austère que toutes les âmes arboraient ici. D’après ce qu’elle avait compris en grandissant ici, il incombait aux créatures d'apporter un brin de réconfort. Peut-être, à la longue, réussiraient-elles à éclaircir ces visages et à les amener à accepter l'étrangeté qui les entourait.
Caboche se retira des dédales de ses pensées, dès que ses yeux observèrent la nuque de Sheog s'incliner. Son cœur se mit à palpiter à nouveau, dans une douleur lancinante. Elle aurait souhaité tendrement entrelacer sa main à la sienne, mais le regard de la harpie pesait si lourdement sur elle que son être demeura pétrifié.
Il ne se réjouissait pas à l’idée de passer du temps avec Madame Blondel, pourquoi donc ?
Et elle se souvint de la froideur des êtres humains envers eux. Il était évident qu'il n'avait aucune envie de partager une soirée avec cette dame. Cependant, Aksana gardait l'espoir que, après avoir dépensé une telle fortune pour obtenir sa compagnie, Madame Blondel le traiterait avec délicatesse, tel un joyau précieux.
Malheureusement, la servante n'eut guère l'opportunité d'en apprendre davantage, car Mama lui ordonna de quitter les lieux, et Askana obéit immédiatement, sans manifester la moindre résistance. Elle avait déjà trop tardé ici, et elle avait été indulgente en ne lui demandant que de partir. Cependant, en quittant la pièce, elle ne put s'empêcher de penser à Sheog, se maudissant de ne pouvoir lui transmettre l’essence de celle-ci ; elle aurait été comme une étreinte tendre et longue, celle que l'on offre à ceux à qui l'on souhaite apporter un soutien inébranlable. Mais sa silhouette s'estompa, engloutie par les ténèbres du manoir.
La jeune Malhar eut un instant de tentation pour laisser errer ses oreilles, mais elle refréna sa curiosité. Elle ne voulait pas qu'elle puisse causer du tort, car si elle ne voulait pas renoncer à Sheog, elle se savait contrainte de se plier aux règles de Mama.

Aksana regagna sa chambre, veillant à fermer soigneusement la porte derrière elle. L'endroit était d'une propreté immaculée, exempt de la moindre poussière, et tout était soigneusement rangé à sa place. Une fenêtre, plus grande que celle de Sheog, occupait un pan de mur, mais elle restait inutilisée, un épais rideau sombre l'occultant de toute lumière extérieure. Les malhars étaient des créatures sensibles à la clarté du jour et risquaient des brûlures cutanées en quelques instants seulement, obligeant ainsi Aksana à sceller cette fenêtre à jamais.
Pour éclairer l'intérieur, elle se fiait aux bougies disséminées çà et là, certaines disposées par terre dans les coins, d'autres sur une coiffeuse en piteux état, autour d’un sceau à l’eau clair, face à un miroir brisé, et sur sa table de nuit.
Une armoire occupait une partie de l'espace, renfermant plusieurs exemplaires de la même tenue grisâtre qu'elle portait en cet instant et deux robes de nuit. Askana n'était pas habituée à tant d'espace pour elle seule, elle qui avait partagé des dortoirs bondés à l'orphelinat.
Quant à ses possessions, elles se limitaient à un vieux livre épais et abîmé, acquis auprès d'un marchand qui l'avait présenté comme une sorte de bible malhar. Malheureusement, elle restait incapable de déchiffrer les caractères qui le garnissaient, mais l'espoir demeurait en elle, un jour, de percer le mystère de ces signes énigmatiques.
Le moment était venu pour elle de chercher un repos bien mérité. Avant cela, Aksana s'assura que le rideau occultant était correctement en place, puis avec délicatesse, elle se dévêtit et plia soigneusement ses vêtements, les disposant avec précaution sur la coiffeuse.
À pas de velours, elle évolua dans la pénombre partielle de sa chambre, glissant devant le miroir fendu qui lui refléta son propre être. Durant quelques instants, elle ne put s’empêcher de s'observer avec une attention extrême, son cœur se serrant dans sa poitrine dès qu'elle constata ses mains aux doigts griffus, et les légers sillons qui ourlaient sa poitrine, ses côtes, son ventre, le creux de ses reins et de ses omoplates ainsi que le haut de ses cuisses.
Ces délicates entailles, conférant une texture rugueuse à son épiderme, et dessinaient des motifs presque identiques à d'élégantes arabesques. On racontait que nulle lame ne pouvait pénétrer cette armure naturelle, à l'exception de celles conçues par les elfes traditionnels.

Pendant ces longues minutes passées à soigner sa toilette avec minutie, Aksana prit grand soin d'ignorer son propre reflet dans le miroir qui semblait danser au loin, tel un spectre fugace.
Une fois propre, elle s'enveloppa dans sa robe de nuit, toute aussi grise et terne que sa tenue de travail. Puis, elle glissa avec grâce sous les draps de son lit, s'abandonnant à l'obscurité de sa chambre. Étendue là, elle contempla le plafond pendant de longs instants, ses pensées voguant comme des nuages capricieux, le sommeil refusant de la rejoindre facilement. Les années passées à être forcée d’être constamment en alerte avaient laissé leur empreinte, et la tranquillité semblait lui échapper.
Inévitablement, ses pensées dérivèrent vers Sheog, vers les seuls songes qui réchauffaient son cœur et la rassuraient. Elle se laissa emporter par le souvenir de leur intimité partagée, et des frissons parcoururent son corps à la simple réminiscence du contact de leurs peaux. Cependant, malgré le réconfort que cela lui procurait, inévitablement, son esprit retourna à l'intrusion brutale de Mama, qui avait interrompu leur instant de complicité… Et la chaleur qui avait envahi sa poitrine laissa place à une pointe d'angoisse.
Elle se souvenait distinctement de la réaction de Sheog lorsqu'elle avait évoqué Madame Blondel, ce nom qui semblait peser comme une menace sourde. Sa mâchoire se crispa, et ses yeux demeurèrent grands ouverts, l'esprit empoisonné par l'anxiété, la condamnant à une veille angoissée. Ce ne fut qu’en fin d'après-midi que le sommeil l’enlaça, lorsque les bruits du village s'apaisèrent, deux petites heures seulement avant le début de sa nuit.
Aksana s'éveilla naturellement, sans difficulté, car l'impatience de retrouver Sheog l'animait intensément, ne serait-ce que pour lui offrir un peu de douceur avant son départ.
Sortant de son lit, Aksana enfila l'une de ces robes grisâtres qui semblaient être les éternels compagnons de ses soirées de travail. Les tissus simples et dépourvus de couleur avaient depuis longtemps remplacé les rares vêtements qu'elle possédait, tout comme le décor de sa chambre, épuré et sombre, où aucune touche de couleur ne venait briser la monotonie.
Une fois parée, la jeune domestique s'empressa de quitter sa chambre pour se rendre à celle de son ami. Son rôle était de le préparer pour la nuit, une tâche qu'elle accomplissait avec une régularité quasi mécanique. Cependant, cette soirée se distinguait par son exceptionnalité, et elle se demanda si elle devait le revêtir des mêmes chaînes que d'habitude ou si, en cette nuit particulière, il serait paré d'une tenue différente. Ses questions tournoyaient dans un coin de son esprit, mais les laissa dans un lointain recoin de son esprit, et d'un geste confiant, elle frappa à la porte de Sheog.

— « Sheog, c’est Aksana. Est-ce que je peux entrer ? » lui demanda-t-elle, d’une voix douce.
Ezvana
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Ezvana
Jeu 2 Nov - 23:47

Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise.

Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.


Billes de lune qui fixent le plafond, longs cils noirs qui balayent des pommettes saillantes. Parcourir cette zébrure qui s'était agrandis au fils des années, l'admirer comme une trace indélébile du temps qui passe, des heures à regarder cette partie de sa chambre alors que le sommeil, pernicieux, refuse de le prendre dans ses bras de velours.
Un bras sous la tête pour la relever, un genou contre le mur alors qu'il chasse négligemment la couverture inutile plus loin. Son corps était bien trop fiévreux pour que le froid de la Nuit puisse l'atteindre. La pointe de sa queue bat l'air d'un mouvement régulier alors qu'il était songeur, plongée dans des images et des sensations qui retenaient son attention et refusaient de le laisser en paix.

Il se remémore la douceur des pointes des griffes d'Aksana dans sa chevelure, la tendresse particulière de cette femme qui prenait soin de lui, malgré son apparence.
Négligemment il entortille une mèche d'encre autour d'un doigt, s'agite sur son lit qui grince sous son poids. Il ne comprenait pas pourquoi cette sensation chaude continuait de se blottir dans le creux de sa poitrine, c'était agréable et doux comme la fourrure de Chat. Sa voix aussi, qui résonne dans ses oreilles en boucle telle la douce mélodie d'une sirène. Cette promesse qui avait résonné dans la pièce comme dans son cœur et l'avait rassuré tel le baisé d'une mère sur le front de son enfant. C'était une sensation indescriptible.
L'émotion lui noue la gorge, une grande main grise vient balayer le visage pour chasser la sensation dans ses yeux. La nuit en dehors devenait de plus en plus claire, le rouge perçant le voile de la nuit alors que le soleil pointe lentement mais surement vers l'horizon.
Se tourner sur le côté pour chasser de ses rétines le nouveau jour. Et sur ce mur gris, il dessina de son imagination les traits fins de la femme bleue, s'attarde sur le contour de ses lèvres, de l'ombre de ses pommettes, de l'angle de cette pierre intrigante sur son front. Incapable de manier le crayon de ses mains monstrueuses, il comblait cette déficience par une imagination fertile. Seul dans sa chambre plongée dans la pénombre, il sourit, d'un sourire en coin, presque timide, mais heureux. Il parfait le sourire en retour, il invoque la façon dont ses yeux se plissaient quand elle osait dévoiler un pan de sa beauté.
Cela le touche, lui fait glisser les mains sous sa joue comme oreiller. C'était bizarre. C'était nouveau. Cela chamboule son cœur qui encaissait tant bien que mal toutes ces émotions.

Et grâce à sa nouvelle amie, il put chasser de ses pensées l'angoisse de cette prochaine nuit, de ce qui allait arriver à son corps et à son esprit. Il n'était personne, rien qu'un objet au service des Humains. Il ne pouvait pas influer sur ce qui pouvait arriver. Alors autant se laisser aller, de penser à de douces choses qui calmeront son esprit.
La journée fût ponctuée de grimace et de spasmes alors que ses rêves prennent vie et que ses peurs se transforment pour devenir une réalité troublée. Rêve lucide où il était difficile de délier la réalité du fictif, ouvrant la bouche d'un hurlement silencieux ou cette impression de courir au ralentit alors qu'on l'attrape et le tire en arrière. Parfois il y a des nuances de bleue et de violet qui l'apaisent et font disperser les fumées trompeuses.
Pour aucune raison la Gargouille de chair ouvre brusquement les yeux, le sommeil s'étant retiré avec brutalité. C'était comme s'il devait être opérationnelle dès que sa conscience reprend le contrôle et ceux depuis toujours. Le jour descendait à l'horizon, laissant une traîné rose sur le fond du ciel qu'il pouvait apercevoir malgré les barreaux et les bâtiments environnants.

Les narines frémissent alors qu'il sent l'odeur humide de la soirée s'installer dans sa chambre. Il aimerait tant pouvoir être dehors pour se remplir les poumons entièrement et pouvoir dévorer le ciel de ses yeux admiratifs.
Sheog rejette bien loin ses rêves d'enfants en prenant délicatement le présent d'Aksana. Avec toute la douceur du monde il tourne les pages du bout d'une griffe alors qu'il prend appuie contre le mur, repliant sa longue queue sur ses jambes repliées. Religieusement il lisait chaque mot, chaque phrase pour ne rater aucun sous-texte, ne rater aucune miette de ce que pouvait offrir la capacité de lire. Plongé dans une autre réalité il dévore la première histoire avec le plaisir du calme et de la sérénité. En ce moment, il pouvait imaginer un autre monde, il pouvait vivre mille aventures que son cœur quémande, pouvoir s'imaginer à la place de cet homme qui recherche désespérément les caresses de la lune. C'était un jeu que d'imaginer la douce étreinte des rayons argentés, de voir les ombres êtres allongés par la nuit, que de concevoir l'éclat brillant des étoiles pour le guider.
La tristesse aussi, duveteuse et ouaté, que d'imaginer pouvoir s'élever vers le ciel, de pouvoir activer ce qu'il possédait sans jamais l'utiliser.
Il termine cette première histoire et pendant un temps il regarde vers l'extérieur, essayant de chasser les images de cette conquête lunaire.

Un son attire son attention et la voix d'Aksana le tire de sa rêverie. Son visage se tourne vers cette porte close, l'étonnement se lisant sur les traits de son visage. Jamais on ne lui demandait l'autorisation d'entrée dans son seul refuge. Les autres domestiques avant, ne prenait pas la peine de savoir ce qu'il pouvait ressentir, ou même s'il était dans un moment inadéquat. Peu de personnes osaient entrer en sa présence, changeant son pot de chambre et déblayant sa chambre d'un rapide coup de balais sans jamais croiser son regard.
Après tout, même domestique, ils étaient des Humains et de ce fait supérieur à lui.

- Oui bien sûr !

Il la voit entrer et il repose donc le livre à ses côtés, ayant un sourire qui nait naturellement sur ses lèvres en la voyant entrer. Une main sur le mur pour se pousser vers l'avant et sortir du lit, cette fluidité étrange et féline de ce titan de chair qui s'avance vers elle. Un courant d'air siffle de l'ouverture sur l'extérieur, agitant les mèches sombres de leurs deux chevelures. Il faisait nuit désormais, mais la pénombre ne semblait pas déranger les deux individus.
L'esprit en fête, Sheog aurait voulut lui prendre la main, la faire tournoyer sur elle-même pour admirer la grâce innée qu'elle dégageait en toute circonstance tel une danseuse étoile. Pourtant la réalité le rattrape très vite alors qu'il se détourne et qu'il essaie d'apercevoir la hauteur de l'astre lunaire. Cette nuit, il allait devoir partir. Si Aksana était présente, c'était pour le préparer.

Il se recule, fait presque de respect plutôt que d'agir sous une pulsion enfantine. C'était la première fois qu'elle était là pour la préparation d'une de ces fameuses nuits et une honte lui fit baisser les yeux. Au fond de lui il savait qu'il y avait quelques choses d'anormal à tout cela, mais comment renverser une vie de servitude ? Son esprit était emprisonné d'une paroi impénétrable, son caractère forgé pour être maniable. C'était seulement en imaginant Aksana le voir dans de telle situations qui le rendait nerveux.

- Dans la malle. Il y a d'autres accessoires, ceux avec une plaque de métal et du cuir noirs.

Faire un pas de côté, puis deux. S'agiter sur place tel un animal en cage. Il savait que c'était ce que Mme Blondel aurait désiré pour cette nuit. Elle voulait un show, elle voulait le spectacle grandiose qu'elle s'imaginait. Parfois c'étaient les simples lanières de cuirs, parfois c'était cela. Mama lui avait dit qu'il était inspiré de compte inspiré d'individus qui lui ressemblent. De temps en temps elle demandait à ce qu'il se présente ainsi lors des soirées avec les futurs clients. C'était un assemblage ressemblant à ce qu'il portait autour des hanches pour ses mains et ses avant-bras, un cuir étrange, sombre et souple, des plaques de métal assemblées aux lignes presque elfiques. Il y avait également de grandes plaques de cuir à mettre autour de ses tibias, jusqu'en dessous du jarret et un épais collier bien plus large que celui habituel. L'ensemble portait des anneaux solides disposaient à des endroits stratégiques.
C'était un peu son véritable habit, même si c'était souvent pour que l'on puisse l'attacher plus facilement.

Alors que Aksana s'occupe de lui, il n'ose plus bouger de peur d'être maladroit et de l'empêcher d'effectuer son travail correctement et se concentre plutôt sur sa respiration et les battements de cœurs pour les maitriser.
Mama ne serait pas contente si elle le voit stressé.


Lulu
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Lulu
Dim 5 Nov - 18:53

Aksana

Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués.

Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
AKSANA'S POV. Mélodie enivrante, dont le charme séduisait malgré les banalités soufflées. Aksana se hâta d’honorer ces dernières, en dévoilant sa silhouette azurée au colosse immaculé. Désobéissance discrète et inconsciente qui s’incarna en cette porte qui resta entrebâillée, leur permettant de profiter d’un semblant d'intimité.
Une brise discrète souffla, balançant délicatement quelques mèches d'ébène qui ornaient leurs épaules. Les deux créatures se firent face, envoûtées par le mutuel désir de se dévorer du regard en silence. Bien qu'éprises de tendresse, elles surent refréner les étreintes ardentes qui, dès que leurs yeux se croisèrent, s'insinuèrent en eux.
Elle, rêvait secrètement de laisser ses mains gracieuses plonger dans cette ténébreuse crinière, d'y semer une pluie de caresses, tout en veillant à ne pas le griffer. Elle aurait espéré lui ôter ces doux hululements, qui avaient le pouvoir de réchauffer son cœur avide. Mais les regards des entités nocturnes se dérobèrent vers l'astre lunaire qui les illuminait faiblement, leur rappelant qu'ils n'avaient pas une seconde à perdre pour des frivolités et des interdits.
À peine eut-il pris ses distances que les prunelles d'Aksana se ruèrent sur sa silhouette, cherchant les précieuses perles d'argent qui se fracassèrent sur le sol. La légèreté qui l'habitait s'évapora soudainement, laissant place à l'inquiétude qui, la veille, avait tourmenté son cœur. Quelque chose n'allait pas, et ce trouble semblait lié à la mystérieuse Blondel.
Sheog avait juré que cette humaine ne tremblait pas face à l'obscurité, et Mama lui avait enjoint de satisfaire tous ses désirs. Mais quels étaient ces désirs ? Ses lèvres s'entrouvrirent, prêtes à formuler quelques questions, mais le captif prit les devants en évoquant la nécessité de revêtir d'autres accessoires pour cette soirée exceptionnelle.
Intriguée par cette nouvelle, la jeune servante s'approcha de la malle, qu'elle avait jusqu'à présent négligée d'explorer en profondeur, tout simplement parce que son contenu ne semblait en rien merveilleux.
De ses longs doigts, Aksana s'appropria ce nouvel attirail, qui, bien qu’un tantinet plus couvrant que le précédent, ne suscita chez elle pas plus d'enthousiasme. Elle le scruta, en quête d'un indice quelconque qui pourrait éclairer le mystère de cette soirée. Hélas, ses prunelles ne découvrirent pas la moindre révélation, si ce n'était davantage d'interrogations.

— « Est-ce que tu as déjà… Est-ce que tu t’en es déjà pris à quelqu’un ? » s'enquit-elle, observant les anneaux qui semblaient destinés à accueillir des chaînes.

Pourquoi l'entraver ainsi, alors qu'il n'avait jamais porté atteinte à quiconque ? Peut-être que l'humanité se drapait invariablement dans la méfiance en leur présence, et l'orpheline en avait une connaissance profonde.
Elle qui n'avait jamais trahi leur confiance, ils avaient toujours persisté à douter d'elle.
Sauf peut-être le gentilhomme qu'elle avait croisé la veille.

Instantanément, la jeune servante regretta ses interrogations, ses suspicions. Sheog n'était nullement la créature féroce que ces chaînes dépeignaient, mais une âme innocente et craintive.

— « Pardonne-moi… », articula-t-elle, pivotant sa silhouette en sa direction, ses prunelles étincelantes d'une lueur empreinte de regret, tandis que ses oreilles s’abaissèrent de honte. « J’essayais juste de comprendre l’utilité derrière tous ces anneaux. J’ai l’impression que certaines choses m’échappent. »

Le doute s'insinuait, s'étendait en elle, tandis que les interrogations se multipliaient telles des ombres grandissantes. Telle une résonance de la peur éprouvée par Sheog, l’inquiétude se développait peu à peu en elle.
D'un pas lent, Aksana se préparait à entreprendre une tâche qui ne lui procurait aucune satisfaction. Comment expliquer aux mortels qu'ils n'étaient pas ces créatures féroces, dénuées d'empathie et d'intelligence qu'ils croyaient ? Elle avait choisi de se montrer soumise, de se plier à leurs désirs, dans l'espoir de démontrer la vérité. C'était là l'enseignement reçu à l'orphelinat, et jusqu'à présent, elle peinait à en discerner les répercussions positives. Tout particulièrement lorsque cela impliquait d’enchaîner Sheog et de le revêtir d'ornements aussi extravagants qu'effrayants.
Cependant, il lui était impossible de croire qu'il n'existait aucune issue face à ce dilemme, à moins de s'enliser dans l'obscurité, de se laisser engloutir par la crasse des préjugés, ou de se transformer en ce qu'ils redoutaient. Ce n'étaient pas ces héros-là, ceux que les récits enjolivaient. Alors, où se nichaient les alternatives ? Assurément pas dans les entrailles obscures du manoir de Mama, ni dans les maltraitances, ni dans les mines épuisées des créatures vouées à l'esclavage. Le monde ne pouvait leur refuser toute grâce, la providence ne pouvait leur être interdite. C'était inconcevable, aux yeux de celle qui avait grandi en s'imprégnant de contes où les âmes vertueuses étaient constamment récompensées et où chaque histoire trouvait sa fin heureuse.
Pourtant, la voilà enchaînant l'un de ces cœurs purs. Quelle que soit la tendresse qu'elle déployait dans cet acte, elle ne saurait le soustraire à l'animosité des êtres humains. Toutefois, elle persévérerait dans la douceur de ses actions, car c'était tout ce qu'ils avaient pour subsister, ces maigres éclats de douceur semés ici et là.

— « Dis-moi… Est-ce qu’il y a quelque chose qui te ferait plaisir d’avoir à ton retour ? » interrogea-t-elle, élevant son regard vers le sien tandis que ses mains ajustaient les sangles autour de ses poignets. « Une nourriture particulière, un livre supplémentaire, un vêtement neuf, autre chose ? »

La moindre petite douceur, qui serait capable d'apaiser un peu ses tourments. C'était tout ce qu'elle était prête à lui offrir… Pour l'heure. Aksana était prête à dévouer sa nuit pour obtenir le présent désiré, et peut-être même, à enfreindre les interdits. Mais cette pensée la fit frissonner d'effroi, et elle la chassa promptement. Non, une telle conduite ne ferait que jouer en sa défaveur. Elle ne gagnerait pas l'estime ni l’affection des mortels en adoptant une attitude pareille, bien au contraire. Tout comme cette proximité qu’ils entretenaient… Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de la cultiver. Car ils en avaient désespérément besoin, l'un comme l'autre. Du moins, c'était la conviction profonde de la jeune malhar.

— « Je ferai de mon mieux pour te le dénicher… Et même si je n’y parviens pas, je serai là à ton retour, comme promis. »

Aussi étrange que cela puisse paraître, et plus encore pour elle, Sheog lui avait enseigné que sa présence pouvait apporter un certain apaisement. Cependant, Aksana demeurait convaincue que cela ne suffisait pas, que d'autres présences plus plaisantes devaient exister, dépassant le maigre bien-être qu'elle pouvait lui procurer.
Jamais ne serait-elle suffisante, mais c’était tout ce dont le cœur de l’Adonis avait à sa disposition en cet instant, et elle était prête à tout lui offrir.  
La bleutée ajusta l'ultime ornement sur l'argenté, s'employant avec une délicatesse inégalée, avant de contourner la silhouette enchâssée pour s'arrêter face à elle. Consciente de l'inéluctable servitude imposée par les chaînes, elle ne put réprimer la douleur qui lui dévora le cœur, irradiant sa poitrine tout entière.

— « Ça va aller, Sheog », lui souffla-t-elle, mêlant ses prunelles scintillantes aux siennes.

Mains griffues qui s’entremêlèrent aux siennes, dispersant quelques caresses tendres et sincères, dans l’espoir de chasser un peu de son angoisse. C'était tout ce dont elle était capable.
Ses mains étaient aussi douées pour le cajoler que pour l’enchaîner, et ses lèvres étaient aussi douées pour lui sourire que pour lui mentir. En elle, l'amour et la tromperie, étaient enlacés, et elle ne serait jamais rien de plus qu’une vermine à éradiquer.
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