Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise. Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.
Mirage mirifique qui brille alors de mille feux devant ses yeux, éclats luminescents qui semblent rendre l’air aussi beau que des arcs-en-ciel. Créature fantastique qui c’était approché avec douceur, longiligne et élégante, telle une fleur dansant dans un courant d’air. En avait-il la douceur ? Subjugué le monstre qui s’immobilise aussitôt, se contente de frémir au son de cette douce voix, de la beauté surnaturelle de la créature face à lui. Avoir la preuve devant les yeux était tout de même une épreuve de croyance pour le Géant qui était bercé de compte depuis sa tendre jeunesse, idéalisant ses êtres incroyables aux pouvoirs inestimable, lien profond de la nature et don la bénédiction est rare. Souvent, enfant, il avait rêvé d’une telle rencontre, décrivant en souriant aux matrones servant d’éducatrices comment il imaginait de telles choses. Cela serait si merveilleux ! Mais à chaque fois, c’était à force de larmes que ses chimères étaient enterrées. Cela n’existait pas. Et il n’y avait que Dieu qui méritait d’être vénéré. Alors il avait oublié les rêveries, avait refoulé tout au fond de son cœur les petits plaisirs qu’offrait l’imagination. Pensait-il de la même chose en le voyait ? Étrange de se dire que pour une créature surnaturelle, il l’était peut-être tout autant. Après tout, il faisait peur à tout le monde, cela pouvait ne pas être différent dans les yeux du fée. La pointe des oreilles qui frémissent, les narines qui se plissent à l’approche de cette entité, plonge ses yeux dans ceux abyssaux du mâle. Ils auraient pu être effrayants à être aussi sombre, pourtant on pouvait y lire des reflets, presque aussi brillants que ses ailes délicates. Nul rejet, nulle horreur. Rien qu’une curiosité grandissante.
Avait-il vu d'autres créatures comme lui dans les parages ? Le cœur qui tambourine soudain, vertige qui menace de faire chuter le Titan tant les possibilités étaient effrayantes. Déstabilisante. Cela faisait bien longtemps que l'espoir était relégué en arrière-plan, bien loin de son esprit vagabond qui alimente le brasier de l'imagination. Mais la venue d'Aksana, celle de cette fée…. Tout était chamboulé. Les règles étaient tronquées et il n'a jamais eu les bonnes cartes en main.
Alors quand le fée relève le fait qu'il n'est pas pris les potions, la surprise se lit sur les traits de son visage, ainsi qu'une gêne impossible à cacher. Comment lui dire en face qu'il ne pouvait pas lui faire confiance et ingérer un possible poison ? Et pourtant, il lui demandait asile.
Mouvement de recul du buste alors qu'une potion semble arriver par magie dans la paume de sa vie. Oui, c'est de la magie. Ce n'était plus une expression, mais une réalité vive, qui le transperce de part en part. Rejet tout d'abord, comme un acte hérétique qui aurait dû mener la créature au bûcher comme à l'ancien temps. Parce que tout ce qui touche de près ou de loin à ce qui se rapproche de lui devait être rayé de la carte. Mais le doute est vite effacé, comme devenu poussière dans le vent bien vite emporté par les vagues de curiosité. Et d'un plaisir viscéral, celui d'un enfant émerveillé. Et c'est presque sans réfléchir qu'il saisit la potion tendue d'une main fine, n'osant même pas l'effleurer de ses griffes arrachées. Et s'il lui ouvrait la peau d'un simple contact au vu de son apparente fragilité ? L'espoir aussi, fébrile et délicat, qui vibre dans sa poitrine. Enfin, les petits pourront survivre !
La voix du fée est comme le bruissement des feuilles en haut des arbres, c’était doux et naturel, dans l’ordre des choses. Cela caresse les tympans, apaise les tensions et fait faiblir l’inquiétude. Pourtant, la question semble presque lourde soudainement, comme s’il y avait un poids indissociable des conséquences d’une réponse. Sensible le Gris, qui plisse légèrement les yeux, conscients du sous-entendu à peine insufflé. Mais le fée avait beau être d’une beauté étrange, le Titan ne se laisserait pas influencer par cela. Il était naïf, mais pas idiot. Grogner sa colère aurait été une façon d’agir, d’abaisser ses oreilles et de paraître menaçant. D’adopter une attitude qui ferait clairement comprendre à cet individu qu’il n’avait pas intérêt à mal agir. Mais c’était idiot et contre productif. Après tout, pour le moment, il l’avait aidé, lui donnait la possibilité de nourrir les chatons, de trouver un véritable abri.
Les ailes dans le dos, qui se redressent un peu dans un craquement audible alors qu’il remue des épaules pour soulager son dos perclus de crampe. Un soupir, bien trop long pour être une formalité. C’était comme s’il expulsait ses malheurs dans cet air vicié. Les yeux fouillent le sol de la forêt comme si le courage allait être insufflé par la Terre elle-même.
- Je… Nous ne refusons pas de vous rejoindre. C’est juste… Que l’expérience que nous avons des étrangers n’est pas très positive. Nous sommes méfiants. Pour notre survie.
Relever son visage, billes opalines qui brillent presque dans la clarté ouatée du jour. Se redresser tout à fait plutôt que d’être proscrit, comme un enfant terrifié par l’inconnu. Oh, il avait peur, bien entendus. Mais ne faisait-elle pas partie de son quotidien depuis quelques jours ? Quelques années ? Que sa volonté soit lisible dans ses prunelles, que le fée puisse-t-il lire en lui comme un livre ouvert.
- Si nous sommes encore en vie, c’est parce que l’on s’est protégé mutuellement. Pardonne-nous notre attitude, c’est juste le résultat d’une vie de labeur.
Une grande main qui se pose sur son cœur, pour en calmer les tambourinements incessants. Ce pli qui alourdit les sourcils et les froncent, les oreilles basses dont la pointe frémit un instant.
- À vrai dire… Tu es le premier qui soit venu vers nous avec de bonnes intentions. Et… Je veux te croire.
Sincérité d’un fervent qui avait arrêté de croire, d’une âme esseulée qui cherche tant bien que mal un chemin. Partagé le Gris, entre l’envie de s’ouvrir tout à fait à cette créature, de chercher fébrilement une échappatoire qui lui tendait les bras ou de se renfermer, de se protéger de tout danger quitte à se perdre. Être certains que si Aksana était là, elle aurait pu prendre la bonne décision.
- Mais je t’en prie, ne lui en veux pas. C’est grâce à elle que nous avons pu tenir jusque-là. Seulement le jour c’est levé, l’empêchant de sortir de notre abri. Nous ne pouvons pas prendre le moindre risque.
Protéger son Etoile envers et contre tous, de toute son âme. Si le Fée devait refuser la Féline, alors le Gris rejetterait sa proposition. Ils étaient indissociables, Lune et Etoile baignant dans le même vide interstellaire. Jamais, jamais il ne l’abandonnerait. Et cette assurance se retranscrit dans l’expression de son regard, plus haut, moins fuyant.
- Nous devons attendre la tombée du jour pour nous déplacer. Peux-tu nous retrouver à ce moment-là au seuil de la forêt ? Nous pourrons alors te suivre.
Puis il réalise quelque chose et il se sent mal à l’aise. Tremblement des ailes qui s’écartent naturellement, claquent vaguement dans l’air avant de se replier d’un geste sec malgré la douleur.
- Je me nomme Sheog. Et je voulais te remercier, Fée. Sincèrement.
Un hochement de tête pour réparer son erreur. Presser doucement la fiole dans sa paume, se raccrochant à l’espoir naissant. Il devait croire que cette créature n’était pas mauvaise, que dehors, il y avait autre chose qui les attendait. Que lui et Aksana avaient un avenir.
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Lulu
Ven 25 Oct - 22:03
Aksana
Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués. Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
Les yeux de la créature s’étaient rétrécis en billes curieuses, tandis qu’ils fouillaient le visage du Gris. Cherchant, peut-être, parmi les sillons de sa fatigue et les ombres creusées dans sa chair, une réponse. La méfiance, ça, il la comprenait ; elle était presque une religion pour les malhars, une seconde peau forgée par des générations d’exil et de violence. Mais un Gris, emporté par la peur ? Voilà ce qui accrochait sa fascination, comme une flamme brûlant là où elle n’avait rien à faire. Eux qui avaient été les seigneurs des cieux, qui avaient été, dans leurs jours de dorés, plus que des rois ; des dieux, pour lesquels la crainte était une étrangeté, une curiosité. Aucune montagne n’avait jamais plié sous le vent, pas plus qu’un Gris n’aurait tremblé devant quiconque. Il l’observait, ses antennes vibrant sous l’effet de la concentration. Il parlait bien, utilisait des mots qui, dans sa culture, étaient souvent utilisés par des lignées royales.
Les traits du fée, pourtant, demeuraient impassibles, aussi lisses qu’un lac figé dans la nuit. Aucune surprise n’en troubla la surface lorsque le Gris lui confia qu’aucune main, humaine ou autre, ne s’était tendue vers eux. Il y a des siècles de ça, les humains avaient observé, l’œil vif et patient, les créatures plus puissantes qu’eux s’entredéchirer. Comme des charognards tapis dans l’ombre, attendant que les monstres s’entretuent pour régner sur les cendres. Et une fois le pouvoir saisi, ils avaient affamé le monde de sa magie elle-même, épuisant ses dernières forces jusqu’à l’agonie. Le fée inclina la tête en réponse à sa proposition, ses ailes délicates frémissant. Un air fasciné passa fugacement sur ses traits fins, alors qu’il constatait la loyauté inébranlable que ce Gris vouait à la malhar. Puis, les ailes du titan se dressèrent soudain au-dessus d’eux, et il put en remarquer l’état déplorable ; elles étaient ternes, grêlées de trous. Elles avaient le même air fané et rongé que des feuilles mortes. Des vestiges d’une grandeur autrefois inégalable, percés par la cruauté de ces parasites humanoïdes. Lorsqu’il entendit enfin son nom, Sheog, un éclat de reconnaissance se fit dans son regard, comme un écho venu d’un temps où la magie était encore reine.
— « Sheog », répéta-t-il avec respect, comme l’eau qui caressait la pierre.« Je suis Círdan. Et c’est à moi de te remercier. Vous avez survécu jusqu’ici. »
Car si un Gris, et un malhar s’étaient trouvés, cela signifiait pour lui, que la magie n’avait pas complètement disparu de ce monde.
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La forêt était peinte d’une lueur argentée, qui tombait, comme des serpents évanescents, entre les branches torsadées. Le silence y régnait, seulement troublé par le froissement des feuilles et le léger murmure du vent. Sur sa peau bleue, il ne restait plus aucune égratignure, plus la moindre morsure de ronce. Tout avait disparu, effacé par la potion du fée, qui avait agi sans qu'elle n'ait à bouillir sous l’étau d’une quelconque souffrance. La journée, elle l’avait passée à dormir. Un sommeil profond, où même les cauchemars étaient restés en retrait, laissant place à une paix inhabituelle. Et dans ce calme surprenant — la potion devait y être pour quelque chose —, il y avait eu les chatons, petits amas de chaleur blottie contre son ventre vide, mais chaud. Elle les avait gardés près d’elle, serrés doucement, comme on protégerait des fleurs d’un vent violent. À ses côtés, Sheog dormait également. Ils s’étaient enlacés, comme deux branches d’un même arbre, leurs corps épousant les courbes de l’autre sans vraiment se fondre, pour ne pas écraser les petites vies qui dormaient contre leurs corps. Lorsque Sheog était revenu, son visage était éclairé d’une lueur vive, un éclat, qu’elle avait jusqu’ici rarement observé sur la mine de l’ailé. Il avait apporté avec lui des bonnes nouvelles. Círdan, le fée, ne leur avait pas seulement donné son nom — il leur avait offert bien plus. Du lait pour les chatons, et un refuge. Ou plutôt, il lui avait réitéré son offre. Sheog avait un bon pressentiment. Alors, Aksana, allant à l’encontre de ses instincts aiguisés, avait tenté de dompter sa méfiance, d’étouffer cette crainte viscérale qu’elle portait depuis si longtemps. Décidant alors, de faire confiance à l’instinct de sa Lune.
Dès que la nuit s’installa pour de bon, dès que les astres brillèrent haut dans le ciel, ils s’en allèrent des ruines. La malhar ne prit aucun bagage, rien d’autre que les lambeaux de la robe qui couvrait son corps et trois des chatons blottis contre sa poitrine, contre laquelle ils pouvaient entendre les battements irréguliers de son cœur. D’autres dormaient encore dans les mains de Sheog, aussi vastes et douces pour eux qu’un coussin moelleux. Avant de s’envoler de leur modeste abri, la bleuet avait encouragé le Gris, à boire de la potion. Maintenant qu’ils étaient assurés qu’il ne s’agissait pas d’un poison, elle s’était dit qu'elle pourrait l’encourager à en prendre, sans craindre de voir sa peau pâlir et son corps se raidir. Enfin, après ce qui lui sembla une éternité, ils arrivèrent au lieu du rendez-vous. La clairière était baignée d’une lumière douce, presque irréelle, et, se confondant avec le tronc fin d’un bouleau, Círdan apparut. Aussitôt, il les invita à entrer dans le cercle qui commençait à scintiller sur le sol, un cercle tracé par sa poussière enchantée, aux contours parfaits. Curieux comme Aksana, eut l’impression de pouvoir sentir sa magie vibrer jusque dans ses os. Alors, elle hésita, un bref instant. Ses yeux glissèrent vers Sheog, cherchant une approbation silencieuse. Il resplendissait de confiance, d’impatience. Et à cette vision, elle sentit ses muscles se détendre. Alors, quand il fit le premier pas dans ce cercle, la malhar n'attendit pas davantage. Elle le rejoignit, ses pieds nus touchant la terre scintillante. Le sol sous leurs pieds sembla s’animer, la lueur devenant plus vive. Círdan, au centre du cercle, leva ses bras longs et fins, comme les racines d’un jeune arbre. Ses lèvres murmurèrent des mots que seuls lui comprenait. Et alors, le cercle s’ouvrit. Devant eux, un éclat apparut ; un passage vers un ailleurs que seuls les fées pouvaient invoquer. La lumière douce se fit plus intense, les contours du portail devinrent de plus en plus précis. Le cœur battant d'appréhension, les oreilles rejetées en arrière, la bleuet guettait la magie autour d'elle, comme une bête inquiète. La lumière dansait sur sa peau, des éclats mystérieux vibraient dans l’air, flottaient autour d’eux, comme une nuée de lucioles. Tout semblait mouvant, changeant — Aksana retint son souffle, et instinctivement, au cœur de cette tempête intérieure, son épaule se colla à celle de sa Lune, à la recherche d’un peu d’apaisement.
Enfin, une lumière chaude et réconfortante les enveloppa d’un coup. Et lorsqu’elle ouvrit les yeux, elle crut un instant avoir été projetée entre les pages d’un livre fantastique. Un royaume de verdure et de lumière s’étendait devant eux. Des arbres titanesques s’élevaient si haut qu’ils paraissaient toucher le ciel nocturne, leurs branches entrelacées formaient une voûte naturelle. Les racines étaient aussi larges que les rivières, et serpentaient entre des chemins de pierre moussue, créant des ponts naturels. Les fleurs ici, s’épanouissaient en corolles gigantesques, éclatantes de couleurs vives, et leur parfum envoûtant saturé l’air. Et là, juste à quelques enjambées d’eux, construit à même le tronc d’un arbre titanesque, se déployait, comme les pétales d’une rose, la structure d’un château, digne des contes de fée. D’un geste léger et gracieux, leur hôte se tourna vers eux, un sourire franc étirant ses lèvres fines.
— « Bienvenue à vous », lança-t-il avec un enthousiasme vif, aux deux errants.
Et alors, au loin, accourant de la bouche immense qu’était la porte du château, des silhouettes, semblables à celle du fée, se dirigeaient vers eux.
— « Mes domestiques prendront soin de vous… Et n’hésitez pas à être ferme avec eux, ils peuvent se montrer un peu indisciplinés, et curieux, avec les nouveaux arrivants », des fées malicieux et curieux, rien de très surprenant.« Surtout, prenez le temps de vous reposer. Vous en avez terriblement besoin. »
Les prunelles de la bleuet roulèrent en direction de l’ailé, et une lueur s'y immisça ; alors, enfin. Enfin, ils avaient réussi à trouver refuge, loin de l’humanité. Et ça, ce n’est que grâce à toi. Car elle sait pertinemment, que si ça n’avait tenu qu’à elle, elle serait perdue dans la forêt.
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Ezvana
Lun 28 Oct - 1:06
Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise. Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.
Ne rien porter d’autres que ses vêtements et les chatons dans ses grandes mains et pourtant chaque pas lui semblait être d’une lenteur exécrable. La potion avait été ingérée, pourtant, il ne ressentait pas encore les effets bénéfiques dans une attente insoutenable. Le corps au bord du craquage, manque de flancher à chaque racine surélevée qui lui demande un effort supplémentaire. Le doute l’assaille, fait remonter le cœur dans sa gorge et manque de lui couper le souffle alors qu’il tente de suivre le rythme de son Etoile. Pourquoi n’était pas soulagé ? Aurait-il dû prendre le remède plus tôt ? Il lui suffisait d’être simplement patient ? Peut-être cela agissait autrement sur son organisme ?
Ou c’était juste qu’il avait tellement peur que son corps faisait un blocage total et lui faisait croire qu’il ne pouvait pas rentrer ses ailes ? Partagé le Gris, entre la peur et le désespoir, à se croire si faible d’esprit qu’il était en train de s’autodétruire. Perfide murmure susurré par ce lac noir qui jamais ne se ride pourtant, aussi lisse qu’un miroir où il peut observer son reflet déchiqueté, image parfaite de son esprit vacillant. Il n’était pas assez fort. Après tout, regarde-toi. Tu es censé être plus que cela. Et pourtant, pourtant, tu n’es que ruine fumante d’un empire lointain. Tu n’es qu’un esclave.
Fermer les yeux si fort que cela en est douloureux, se rattraper maladroitement à la branche basse d’un arbre pour ne pas chuter. Aucun juron ne franchit ses lèvres, après tout, il n’en connaissait pas vraiment. Mais la façon dont il se culpabilisait silencieusement était bien plus délétère. Les petites boules de poils contre lui ne méritaient pas d’être ainsi secouées, Aksana ne devait pas être ralenti par son incompétence. Aussi, il se raccroche si fort à ce nouvel espoir que cela fait mal au cœur, comme s’il devait sauter dans le vide sans connaître la profondeur. Si le fée était aussi bon qu’il le prétendait, ils seraient sauf. Ils pourront enfin trouver un refuge, un lieu ou enfin, ils pourraient se reposer et pourquoi pas en apprendre plus sur le monde qui les entoure. S’il avait trouvé une pomme pourris alors…. Tout s’effondrerait.
Parce que Aksana lui avait fait bien trop confiance pour un tel échange et jamais plus elle ne pourra lui accorder un tel bénéfice. Parce qu’il devait se battre à nouveau, soit il chute lamentablement, soit il plonge dans autre chose, dans ce lac sombre qui l’avait déjà englouti cette fameuse soirée. Son esprit serait alors brisé en millier de morceaux incapables d’être recollé. Alors l’angoisse lui donne des sueurs froides qui collent son haut à ses reins, l’hésitation et le doute qui l’accable qui l’empêche d’articuler un mot. Trop essoufflé le Titan de toute façon, qui garde la bouche ouverte pour mieux gonfler ses poumons brûlants.
Aussi, quand il aperçoit Círdan, une pierre se fait moins lourde dans son estomac. Il était bien là, les attendant comme convenu. Léger soupir qui filtre entre ses lèvres, soulagement bien trop grand d'un esprit trop accaparé par ses flagellations. Puis le Démon se redresse tout à fait devant ce cercle qui semblait presque… pulser. C'était une sensation étrange, fourmillements qui remontent le long de ses membres et s'infusent en picotement agréable, comme quelque chose d'oublier, mais de ravivé. Plaisir curieux qu'il goûte du bout de la langue, s'avance sans flancher. Un échange de regard avec son Etoile pour se rassurer, pour ne pas se poser de question. S'il avait pu, il lui aurait tenu la main. Lui c'était imaginé un refuge au fond des bois non pas un portail vers un autre monde. C'était grisant et terrifiant. Mais alors qu'il doute, l'épaule d'Aksana se colle à la sienne. Oui, ensemble.
Impossible de fermer les yeux, comme si c'était ses derniers instants. Se gorger de cette lumière qui lui brûle les rétines, manque de le faire larmoyer. Puis soudainement, le monde change. Ce qui le frappe instantanément, c'est la température, douce et soyeuse, comme si le vent était une caresse agréable sur la peau. Puis les couleurs. Chatoyantes. Des éclats colorés çà et là, des fleurs immenses qui parsèment la verdure grasse et luxuriante comme des pierres précieuses.
Le cœur en fête qui bat follement alors que le regard se lève, tente de chercher la cime des arbres géantissime. C’était presque effrayant, comme une cage de verdure à perte de vue. C’était magnifique, comme un rêve prenant vie. C’était fantastique comme le plus beau des contes.
Fébrilement, il s’avance de quelques pas, regarde autour de lui comme un gamin émerveillé, incapable de cacher son enthousiasme. Ils avaient réussi. Se tourner vers son Etoile et venir coller son front contre le sien avec délicatesse, les narines frémissantes et le sourire au bord des lèvres. L’exaltation s’échange dans le regard partagé, comme une promesse qu’il c’était faite qui venait de se réaliser. Malgré les épreuves, malgré le doute et la peur, ils avaient réussi. Ce nez qui vient se frotter contre celui de la Féline, un baiser tendre de deux créatures ayant échappé à la mort.
Alors Círdan parle, les accueillants en bonne et due forme. Ses domestiques ? Il était le dirigeant des lieux ? Comme Mama ? Surprise quand il voit des silhouettes au loin s’approcher avec enthousiaste. Cela le tétanise un instant, frisson qui secoue ses ailes meurtris. Trop de monde, trop de personnes inconnues. Battre des cils alors qu’ils s’approchent, qu’il peut enfin lire sur les visages. Aucune malveillance dans les expressions de ses fées, rien qu’une curiosité grandissante et des sourires lumineux. Mais il y avait quelque chose de plus dans cette façon de le regarder, comme s’il voyait autre chose. Comme s’ils tentaient de comprendre quelque chose qui lui échappe.
Une fée s’approche, ses longs cheveux d’un blond polaire flottant dans le vent, et vient s’incliner devant lui d’une courbette respectueuse. Ses ailes frémissent dans son dos, renvoyant des éclats de lumières scintillants. Le Gris ne comprend pas cette attitude, alors pour ne pas paraître impoli il fait de même, incline son buste vers l’avant en gardant précieusement les chatons contre lui. Les réactions sont encore moins compréhensibles, alors que des murmures se font entendre, que des exclamations douces parcourent les domestiques. Avait-il fait quelque chose de mal ? Se redresser brusquement, un air contrit plissant les traits de son visage. Ils venaient à peine d’arriver et déjà il faisait les choses de travers. Le pli de cette bouche, la façon dont les ses sourcils se froncent. Tenter de comprendre sans connaître les règles était pénible, met à rude épreuve son calme.
Alors il fait un pas en avant, tend les mains vers la douce créature et penche son visage sur le côté.
- Je vous prie de nous aider. Nous avons des chatons de quelques jours, mais nous n’avons rien pour les sauver. Pouvez-vous nous aider s’il vous plaît ?
Un bruissement dans le vent, des murmures qui se font entendre. Certains sont en joie, comme s’il était incroyable qu’un être comme lui soit si prévenant. D’autres sont surpris d’une telle demande, incrédule de la formulation. Mais le Gris se fait plus ferme avec lui-même. Il était question des petits, leur sauver la vie était bien plus important que les doutes qui l’assaillent.
On s’approche de lui avec des sourires et des interrogations pleins les yeux. Puis les chatons sont saisis des mains des deux nouveaux venus, emportant bien vite les petites boules de poils sombres ailleurs, certainement vers ce grand château incroyable. Des yeux argentés qui suivent le chemin parcouru, partagé entre l’inquiétude et le soulagement. Croire fermement qu’ils survivront, bien entourés par des âmes bienveillantes.
Fumée sombre qui vient perturber la vision du Gris, brouille sa vue et le fait vaciller. Titan d’argent qui trésaille, trahit un épuisement viscéral. Le corps se penche, manque de chuter, alors qu’il tente de chasser les points de lumières qui dansent devant lui. Une plainte alors que les élancements de son corps deviennent insupportables, que tout cet optimiste qui l’avait maintenu jusque-là s’évapore. Concrètement, ils étaient arrivés à une oasis de repos. Alors le fils tendu, c’était rompu, laissant enfin le corps s’exprimer. On se précipite vers lui, il sent des mains sur ses bras. Trop engourdis pour seulement réaliser à qui appartenait ses pressions douces et fébriles, il ne réagit même pas. Une voix féminine qui s’élève, certainement la fée qui c’était incliné. Sa voix mélodieuse pose des questions qu’il n’arrive pas à comprendre, trop embrumé dans un malaise qui lui colle à la peau.
Dans la périphérie de sa vison, il voit Círdan se pencher lui et articuler consciencieusement.
- As-tu pris la potion ?
Hocher vaguement la tête, concentré alors que les vagues lui lèchent le dos, lui donne une nausée difficile à contenir. Le fée fronce des sourcils, tente visiblement de poser des questions à Aksana qu’il ne saisit pas une nouvelle fois. Cet état second le perturbe, le déstabilise. Pourtant la voix est de nouveau près de son oreille, lui disant que les barrières étaient là à cause de son subconscient, qu’il fallait accepter d’aller de l’avant pour que son corps accepte la magie, qu’il la reçoive pleinement.
Pourtant, le Gris se refuse à cette acceptation libératrice. Parce qu’avant, il allait souffrir. Il le savait jusqu’au fond de ses tripes qui se tordent tels des serpents froids. Mais il n’en pouvait plus de la douleur. Mental ou physique. Trop d’images qui viennent le percuter de pleins fouets, se heurtent à ses pensées pour les fracasser avec acharnement. Trop de sang, trop de blessures, trop d’horreur. Trop d’angoisse. Il avait cru mourir tant de fois en si peu de temps. Et son corps n’a jamais baigné dans la magie, artefact oublié depuis longtemps dans une chambre sans fenêtre, poussiéreuse et hors du temps. Vaguement, de façon hachée, il entend son Etoile à ses côtés. Cela l’arrache un temps à ce lac sombre, lui donne une longue bouffée d’oxygène alors qu’il tente d’un élan de franchir sa surface miroitante. C’était comme cette nuit, après le conflit avec sa tendre. L’impression de couler, de sentir les poumons se comprimer jusqu’à brûler, de glisser vers la vase qui s’accroche à ses membres telles des algues sombres qui le tirent vers le fond. Mais il ne pouvait pas se laisser ainsi aller. Là-bas, dans le ciel immense, Elle l’attendait.
Un cri qui s’échappe de cette bouche crispée alors qu’il tombe en avant, une longue expiration douloureuse alors que les ailes se tendent dans le dos avec brutalité, manquant de blesser les personnes l’entourant. Cela fuse dans son dos, des lames de feux qui semblent lui fendre la peau. Les doigts labourent la terre, s’enfoncent dans l’humus parfumé avec force. Ce grognement presque sauvage qui menace de déborder, résonne dans sa poitrine tel un avertissement funeste. Entre deux choses le Démon, d’une nature refoulée et oublié et celle si présente depuis le début qui lui demande, le supplie presque d’arrêter ce tourment. Et alors, tel un miracle, les ailes se résorbent dans un scintillement argenté, semblent être absorbées pars ce dos noueux. La peau tachetée d’ecchymoses violacées reprend sa teinte presque nacrée, les longues estafilades rouges se referment en grandes parties ne laissant que de longues lignes blanchâtres. Les yeux qui se ferment sous la sensation, comme si la magie prenait pleinement possession de son corps et gorge ses muscles d’une drogue douce. Les longs crocs trop proéminents disparaissent, les griffes ne sont plus fendillées et se raccourcissent.
Une expiration qui devient buée devant ses lèvres, le corps bouillant d’une énergie retrouvée. Adieu l’apparence négligée d’un soldat tombé au combat, il retrouve enfin une liberté de mouvement, une légèreté qui lui avait manqué. Enfin, il ne possédait plus cette apparence de Monstre qui le dégoûte profondément. Lentement le Gris se redresse, secouant ses épaules soulagées, agitant le bout des doigts pleins de terre, battant des cils pour reprendre contenance. Autour de lui s'agite comme un nid d'abeille. Certains sont… Effrayés ? D'autres encore frappent dans leurs mains avec enthousiasme. Quelques-uns lui effleurent la peau du bout des doigts dans un acte qu'il ne saisit pas. Et bien qu'il soit frémissant à ce contact doux mais intrusif, il ne renâcle pas. Leurs coutumes étaient certainement différentes des Humains, ne voulant pas le posséder en le privant de sa liberté. Lui, ne cherchait qu'une femme à la peau bleue, qui était encore et toujours à ses côtés. Ne rien dire, laissant parler ses yeux d'argent qui brille d'une tendresse intense. Grace à elle, il était encore vivant.
L'impression que le monde tournait de nouveau dans son axe normal, qu'il ne pesait plus des tonnes à subir le moindre mouvement. Et même plus, comme s'il avait retrouvé quelque chose qui lui manquait depuis si longtemps, filet de vie qui pulse dans ses veines. La fée aux longs cheveux blonds s'approche à nouveau, tend cette main vers le château en une invitation muette, un délicat sourire ourlant ses lèvres. Saisir la main de son Etoile avec douceur, pressant affectueusement cette peau d'azur, s'avançant enfin vers ce monde onirique.
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Lulu
Mer 30 Oct - 16:46
Aksana
Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués. Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
Les fées étaient rassemblées autour de sa Lune, comme une armée de phalènes en transe autour d’une lampe à l’huile. Leurs ailes vibraient en chœur, leurs mines étaient à la fois curieuses et lourdes d'inquiétude. Et elle, était restée en retrait, tapie dans l'ombre d'un tilleul, ses griffes effleurant sa peau, y marquant des sillons légers qui trahissaient son hésitation — un état de confusion vif et profond, comme une cicatrice mal refermée. C’était exactement ça, le souci. Cette cicatrice, cette vilaine blessure qu’elle traînait depuis sa naissance et qui ne se refermerait sans doute jamais. Dès qu’elle avait mis pied dans cette clairière, elle avait perçu leur regard, qui l’avait clouée au sol comme une proie. Pas besoin d’entendre le contenu de leurs murmures, pour savoir que sa présence ici dérangeait comme un caillou dans la chaussure. Elle ignorait ce qui, dans sa présence, suscitait une défiance aussi lourde. Mais l’image lui revint, avec la puissance d’un courant destructeur — ce qu’elle oubliait, à chaque instant passé dans la présence du Gris. Oh, sa peau bleue comme celle d’un cadavre, ses griffes félines, ses crocs menaçants, et ce visage strié de cicatrices, reliques tenaces d’affrontements récents. Dans leurs yeux, elle était l’incarnation même d’un cauchemar malhar, celui qui avait réduit en cendres les rêveries anciennes, qui entouraient ce peuple autrefois pacifique. Ils la traiteraient, comme si elle était un loup enfermé dans la bergerie. Alors, elle restait là, oreilles plaquées, muscles bandés, observant Sheog, figée dans une frustation étouffante, incapable ni de parler, ou de se mouvoir. Elle aurait pourtant voulu s’approcher, sentir la chaleur qui émanait de lui, l’accompagner dans ce brouillard qui le faisait suffoquer. Franchir cette foule de créatures lumineuses, qui tournaient autour de lui comme des astres fascinateurs — mais elle se retint, le souffle coupé, redoutant que le moindre mouvement ne soit interprété comme une menace ; qu’elle détruise ce rêve, qui l’avait fait sourire pour la première fois depuis des jours. La bleuet porta alors son regard sur Círdan, ce dernier contemplant le Gris comme on contemple un miracle en train d’éclore. Et alors, le calvaire de sa Lune sembla enfin prendre fin. Et des terres ravagées par sa souffrance, s’éleva sa silhouette immense. Sa peau avait été lavée des marques violacées et des stries de ses blessures, retrouvant alors son envoûtant éclat nacré, qui n’était pas sans rappeler la peau douce de la lune. Griffes et crocs avaient disparu, au profit d’une mine non pas moins belle à admirer, mais qui lui parut plus altière. Un murmure de stupeur parcourut les fées présents — certaines battaient des mains avec une joie enfantine, d’autres, plus audacieux, effleuraient sa peau, comme pour s’assurer que ce qu’ils voyaient était bien réel. Et puis, leurs regards se croisèrent, dans un mélange de bleu et d’argent. Un instant suspendu, durant lequel son pauvre cœur faillit s’arrêter. Elle sentit ses oreilles frémir, et un frisson d'émoi secoua sa nuque. Le voir ainsi, debout, guéri, illuminé, emplissait son être d'une chaleur soudaine, un bonheur qui semblait beaucoup trop intense pour être vrai, et qui la fit presque soupirer de douleur ; depuis des jours maintenant, que le palpitant ne s’était pas autant agité, et encore moins gorgé d’euphorie. C’était comme nourrir une terre craquelée par la sécheresse de pluies violentes. Il n’y avait pas que le bonheur ; la bleuet se sentit fière. Fière de le voir ainsi renaître, d’avoir enfin la confirmation que ses instincts les avaient bien guidés, qu'elle avait eu raison de le suivre jusqu'ici, dans ce royaume étrange. C’était grâce à lui, à lui et à sa douceur, à lui et à sa bonté, à lui et à ses espoirs, qu’ils étaient ici. Enfin, il la rejoignit, et sa main se lia aussitôt à la sienne. Aksana ne put réprimer un discret râle de bonheur à ce contact, qui semblait sceller leur première grande victoire ; celle d’avoir enfin, réussi à trouver un abri où ils seraient en sécurité. Avant qu’ils ne s’éloignent vers le château, elle l’arrêta en douceur, laissant les silhouettes des fées les dépasser. D’un geste tendre, elle ramena sa main jusqu’à ses lèvres, déposant un long baiser sur le dos de celle-ci, puis dans le creux de sa paume. Ses prunelles scintillaient d’une euphorie sincère, comme une nuée d’étoiles la nuit d’un ciel estival. Et elle l’embrassa cette main guérie, encore et encore, dans une effusion de tendresse, jusqu’à ôter un nouveau sourire à sa Lune. Rien, absolument rien, ne pourrait surpasser cet instant, ce bonheur intense qui l’enveloppait enfin, après des jours d’aridité.
Puis, le château les engloutit. Le hall d’entrée s’étendait sous leurs pieds, le sol en bois poli était d’un blanc ambré, presque opalin. Les veines du bois luisaient légèrement, et ses lueurs s’élevaient jusqu’aux murs de cèdre sombres, et ornés de fresques usées par le temps. L'air était lourd, chargé d’effluves de résine et de bois chauffé par le soleil. C’était une odeur âpre et entêtante, qui imprégnait chaque fibre des meubles anciens qui remplissaient le hall de leur présence imposante. La malhar se sentit prise d’un léger vertige, elle n’était pas habituée à autant de faste, à autant de beauté — sauf quand ses yeux avaient le loisir de se perdre sur les traits majestueux de Sheog. D’ailleurs, se dit-elle, il sied à ce lieu comme un roi à son château, comme un arbre centenaire au cœur d’une forêt séculaire, comme un dieu dans son temple. Il dominait d’une tête tous les sujets, et d’une demi Círdan, et pourtant, les portes semblaient être parfaitement ajustées à sa taille. Il pourrait même se hisser sur la pointe des pieds, que sa tête n’effleurerait même pas les encadrures. D’ailleurs, celles-ci semblaient être même suffisamment vastes, pour que ses ailes y passent. Curieuse était, cette impression d’harmonie totale, du Gris avec ce lieu, et la malhar se demanda, s’il ressentait cette même sensation.
Suivant une fée à la chevelure polaire, qui s’était avancée pour les guider, ils montèrent un escalier en colimaçon, ses marches en bois luisaient d’une lueur ambrée sous les caresses des torches suspendues un peu partout. Et enfin, au bout de quelques pas, la fée ouvrit une porte massive, sculptée de motifs en relief représentant des créatures sylvestres, dansantes autour de ce semblait être un vieux chêne. La pièce formait un cercle parfait. En son centre, s’épanouissait un grand lit couvert d’un drap soyeux et aux reflets pourpres. Celui-ci trônait sous un dais de mousseline légère, qui semblait presque se mouvoir tant elle était fine. À sa gauche, une grande cheminée ornée de motifs floraux brûlait déjà, et juste devant elle, se trouvait une baignoire vide, en bois, et suffisamment grande pour accueillir Sheog tout entier. Près de l’immense fenêtre, qui donnait sur des branches que le vent faisait gentiment sautiller, se trouvait des tapis moelleux, aux recoins couverts de coussins qui semblaient être aussi doux et dense que le ventre clair d’un nuage polaire. La malhar ne put résister à l’envie de se projeter là, étendue sur cette mer onctueuse, à contempler les branches et les feuilles danser. Elle sentit son cœur se soulever de nouveau de bonheur, tout particulièrement, dès qu’elle remarqua, sur le mur opposé à celui dans lequel la cheminée était incrustée, une bibliothèque débordante de livres anciens. Ses prunelles se dirigèrent vers le féru de lecture, lui adressant une œillade complice alors qu’elle lui désigna d’un léger mouvement de tête cette armoire pleine de trésors.
— « Le souper est dans trois heures, je viendrai frapper à votre porte pour vous en avertir, »dit la fée, en tournant gracieusement sur elle-même.« Pour vos habits, Iantha viendra sûrement avant le repas pour prendre vos mensurations. D'ici là, vous êtes libres d’explorer les lieux, tant que vous ne franchissez pas les limites du cercle, au-delà de la forêt de bouleaux. Auparavant, notre territoire était bien plus vaste, mais les pouvoirs de Círdan se sont affaiblis… Il vous parlera de ça lui-même, je pense. »
L’ailée posa alors un regard prolongé sur Sheog, ses yeux brillant d’une intensité qui n’échappa pas à la malhar. Et aussitôt, cette dernière sentit une tension gonfler dans sa poitrine, qui l’incita à enrouler son bras autour de celui de son doux, comme si leurs mains toujours liées, ne suffisaient pas à satisfaire son besoin de contact. Ou alors, essayait-elle de délivrer discrètement un message à la fée. Les oreilles dressées, ses yeux commencèrent à scruter attentivement chaque geste gracieux de la fée jusqu’à ce qu’elle quitte la pièce, refermant la porte derrière elle. Et alors, les muscles de la bleuet se relâchèrent enfin. Après son départ, il n’y eut plus que les crépitements du feu et leurs respirations apaisées qui résonnaient dans cette pièce, qui était désormais, la leur. Pour combien de temps encore ? Aksana l’ignorait, et tout ce qu’elle savait en cet instant était qu’ils allaient enfin pouvoir profiter d’une pause bien méritée, à l’abri des horreurs, des souffrances, du froid et de la famine. Comme si la lune elle-même avait fini par répondre aux prières de ses enfants, sachant que si leur calvaire se poursuivait, il n’y aurait bientôt plus aucune nuit pour eux.
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Ezvana
Jeu 31 Oct - 21:47
Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise. Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.
Léger le Gris, d’une manière presque dérangeante. Comme l’impression de flotter au-dessus de son corps, les muscles mous et les mouvements restreints. Après tant de journée à être courbaturé et douloureux, cette nouvelle sensation n’était pas forcément agréable. C’était comme s’il avait pris quelque chose qui le laissait mollasson et endormi, un peu ailleurs. C’était comme un rêve éveillé, c’était encore plus frappant alors qu’ils passent les portes du château. Leurs pieds nus ne font aucun bruit sur le sol lisse et curieusement chaud, comme s’il vibrait de vie et s’imprégnait des rayons du soleil. Le visage se lève et les yeux parcourent chaque détail, totalement émerveillés parce qu’il voyait, essayant de retenir tous les détails fantastiques du bois et des fresques gravées à même les murs. Ces œuvres étaient faites à la main ? Où manier par le chant des elfes comme dans ses livres ?
Une main se pose sur un meuble lisse et les doigts en caresse la surface, osant à peine l’effleurer pour ne pas l’abîmer de sa maladresse. Un sourire enfantin étiré les lèvres du Démon qui s’aventure un peu plus dans le hall, admiratif d’une telle opulence, d’une telle beauté. Jamais il n’aurait pu croire qu’un tel lieu pouvait exister, ailleurs que dans ses romans fantastiques. C’était irréel, magique. Cela en était beaucoup pour ce cœur au bord de l’implosion, qui tente frénétiquement de se maîtriser dans sa poitrine. L’inquiétude de ne pas laisser de traces à son passage, de ne pas érafler du bout de sa queue, d’une main trop abrupte, d’un mouvement de tête trop appuyé. Lui qui n’avait vécu que dans le béton et la pierre, le bois lui semblait fragile. Il se souvient encore des encadrures des portes éraflées par ses passages incessant dans le salon, ses longues cornes entaillant la matière noble malgré ses précautions. Pourtant ici, tout était grand. Si large qu’il pût se mouvoir sans percuter un lustre, sans bousculer un meuble. Savoir que Mama n’était pas pauvre pour une humaine, mais ici… Ici elle n’était rien. Et c’était… Agréable. Ne plus se sentir compressé entre quatre murs, ne plus avoir l’impression d’être un géant dans une cage. Même si la folie des grandeurs lui donne toujours des frissons, lui si habitué à vivre cloîtré.
Comme un rappel, la voix de la fée se fait entendre, l’arrachant à sa contemplation silencieuse. La suivre en se posant mille questions, essayant tant bien que mal de faire taire les questions insidieuses qui tentent d’infuser leurs venins de leurs langues vipérines. Et si finalement, la normalité n’était pas sa chambre comme chez Mama ? Le château semblait grand, immense, les fées bienveillantes. Mais ils pourraient tout aussi bien le bloquer dans une pièce juste un peu plus grande, l’enfermant à clé comme un chien mal éduqué qui ronge les barreaux de sa cage.
Intimidé le Gris qui n’ose pas poser la moindre question, l’esprit torturé et le corps en déroute. Et alors qu’ils entrent dans la chambre, les pupilles se dilatent, un frémissement hérisse sa crinière qui tombe dans son dos. C’était à peine croyable, digne…. D’un conte de fée. Encore une fois. Faire quelque pas dans la pièce, ne pouvant s’empêcher d’admirer le luxe de cette pièce. Comment pouvait-elle lui être désigné ? Il n’était rien, rien qu’un esclave. Quel droit avait-il obtenu pour mériter cela ? Chercher des yeux Aksana avec rapidité. C’était forcément pour elle. C’était une évidence. Peut-être avait-elle une lignée particulière ? Le cœur qui se gonfle en imaginant cela, une fierté brillant dans les yeux d’argent. Oui, à ses yeux, elle méritait d’être sertie de bijoux, une couronne soulignant cette pierre à son front, de la soie ornant son corps élancé aux muscles effilés. Elle était Reine de son cœur, Guide de son existence. C’est presque cette envie de mettre un genou à terre qui le fait vibrer.
Cette œillade qui le sort de sa rêverie et alors qu’il voit la bibliothèque un son s’extirpe de sa gorge, presque un gémissement de plaisir enthousiaste. La queue se relève, ondule dans l’air tel un serpent sinueux. Sourire qui vient naître sur ses lèvres, cette façon de presser la main de sa tendre pour partager ce moment de bonheur. Car toujours, il voulait tout accomplir avec elle, comme sa seconde moitié qui faisait partie de lui. La fée lui parle et il hoche la tête pour affirmer qu’il ne désobéira pas. Le concept de liberté lui était étranger, comme une langue inconnue qui lui fait vibrer les oreilles et bien qu’il en ai goûté la saveur ces derniers jours avec son Etoile, il n’était pas dans son éducation de rompre les règles. C’était inscrit depuis sa tendre enfance, à même sa chair.
Sentir le poids insistant d'un regard se porter sur lui. Instinctivement, il baisse les yeux, observe le tapis au sol pour ne pas croiser les yeux de la fée. Timidité aussi, qui le rend penaud et agite cette queue d'un soubresaut malvenu. Les oreilles basses, il s'attendait presque à de nouveaux ordres qui claqueraient dans l'air comme avait fait Mama et les matrones pour lui inculquer leur vision de l'éducation. C'était après tout normal pour le Titan marmoréen, une juste façon de vivre dans un lieu qui ne lui appartenait pas. Pourtant, rien ne vient et elle s'éloigne, sort de la pièce sans un mot de plus. Intriguer le Gris qui relève enfin son visage, ne comprenant pas cette situation. Ni pourquoi Aksana lui enserrait le bras avec autant de vigueur. C'était certainement seulement un geste d'affection, aussi, il ne se soucie de rien.
Il s'éloigne alors, fait quelque pas dans cette pièce circulaire. Encore étourdis le Gris, par tout ce faste qu'il ne connaissait pas. L'impression d'être un miséreux au milieu d'une cour de noble, le sentiment étrange de ne pas se sentir à sa place à cause de son passif d'esclave. Il n'arrivait pas encore à assimiler que tout cela était pour eux. Heureusement que Aksana était là. Sinon, peut-être qu'il n'aurait pas eu une chambre aussi fastueuse. S'approcher de la grande baignoire, qu'il touche du bout des doigts, intimidé par son aspect lisse. Il devinait son nom et son utilisation grâce à ses lectures, mais jamais il n'a pu en prendre de sa vie. Son nettoyage, c'était une bassine d'eau froide, une serviette rêche sur la peau et c'était tout. Il n'y avait que depuis l'arrivée de la Bleuter dans sa vie qu'il connut l'eau chaude et le bien-être d'être propre. Alors imaginer ce récipient géant se gorger d'eau brûlante le laisse perplexe et curieux. L'envie de tenter de rentrer dans la baignoire pour connaître la sensation.
Mais il réfrène cette lubie enfantine. De toute façon, ils seront obligés de se laver avant de prendre un repas avec Círdan, une forme de politesse eux qui sortaient d’une errance boueuse. Puis il réalise à nouveau l’importance des tournures de phrases. Le stress qui parcoure sa peau, agite la pointe de la queue qui remue derrière lui. Jamais encore, il n’a dîné avec quelqu’un. Ses repas ne se constituaient principalement que de viande, sans forme d’éducation quelconque. Il ne savait même pas si les couverts tiendront dans sa main, ni comment les utiliser.
Narines qui se plissent, les muscles du dos qui se tordent, de ce corps trop noueux encore malmené par une fuite éperdue. La fatigue qui l’accable soudainement, le force à s’approcher de ce lit gigantesque. S’asseoir au bout du matelas, comme si son corps aux arêtes acérées pouvait effilocher le fin tissu. Puis il en a marre de ses nervosités parasites qui lui donnent la nausée et l’empêche d’agir. Alors il se laisse tomber en arrière, les bras écartés, froissant la couverture qui amortit sa chute. Peu importe si ses cornes éraflent le drap, il se confondrait en excuses une autre fois. Les bras qui glissent comme s’il faisait un ange dans la neige, apprécient la douceur du toucher. Et jamais encore, un matelas fut aussi confortable. Un petit bruit de plaisir, les yeux qui pétillent d’allégresse. Il roule alors, tel un gamin heureux. La joue posée sur le lit, la queue qui est relevée et balaye l’air doucement alors que ses jambes sont encore dans le vide, il expire longuement.
- Tout va vite. J’ai encore du mal à croire qu’on est… Ici.
Dire à voix haute ce qu’il pensait tout bas. Tout était si beau que c’était difficile d’être un fervent croyant, encore craintif à l’idée que tout ceci n’était peut-être qu’un mirage de plus. À quatre pattes sur le lit pour passer de l’autre côté, ses genoux s’enfonçant dans le matelas, pour venir tout près de son Etoile avec un tendre sourire.
- Un château pour ma Reine.
Repousser cette longue mèche de cheveux sur le côté pour dévoiler ce pan de visage camouflé et y déposer un léger baisé, là où la chair ne devait plus faire mal. C’était devenu une de ses habitudes, il lui sera difficile de se départir de celle-ci. Car elle était belle, au-delà de toute considération. Elle était l’Unique, celle qui faisait chanter son cœur. Mais trop électrique le Titan fatigué, qui ne peut rester en place tant la curiosité le dévore. Aller vers cette fenêtre qu’il ouvre en grand, inspirant à fond cet air qui sentait la forêt. Se pencher un peu pour observer les alentours, mais un sentiment étrange lui serre la gorge. Jamais encore il eu l’occasion de regarder en-dehors d’une pièce en étant en hauteur. Toujours enfoncé dans la terre pendant des années, dans une chambre trop étroite ou des caves sordides. Et quand il avait le droit d’aller à un étage, il lui était formellement interdit d’aller à une fenêtre. Certainement pour l’empêcher de s’enfuir lui pourtant si docile.
Cette nouvelle première fois l’émeut, lui donne la nausée tout à la fois. Pas vraiment de sentiment de vertige qui lui soulève le cœur, juste une appréciation des distances qui mets en déroute ses sens. Reculer pour s’approcher des livres qui l’attendaient sagement. En prendre un au hasard avant de réaliser qu’il ne comprenait pas la langue. Le ranger soigneusement avant d’en prendre un autre. Et alors qu’il l’ouvre et tombe sur des runes et des dessins, une lumière vive s’échappe d’une représentation. Claquer le livre tant il met de la force à le refermer au plus vite et le ranger en tremblant et les yeux écarquillés.
Se tourner vers Aksana, l’air complètement désemparé. Puis un rire monte, lentement, presque discret au début. Mais à chaque seconde passé, il prend de l’intensité, jusqu’à cette main qui se pose sur son ventre creusé, l’hilarité teintant ses billes opalines de reflets argentés alors que des larmes menacent de déborder. Il rit comme il n’a presque jamais ri, d’une hilarité sincère d’une euphorie étrange, d’un cocktail détonnant entre la fatigue et la peur, l’enthousiasme et le bonheur. Essuyer d’un revers de main cette larme qui coule sur sa joue.
- Pfiou, ça fait du bien !
Encore un ou deux hoquets avant qu’il ne se calme tout à fait. Pourtant, le sourire n’arrive pas à quitter ses lèvres. Parce que pour la première fois il est libre de rire comme il l’entend.
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Lulu
Sam 2 Nov - 15:38
Aksana
Est la descendance oubliée d’abominations morales, fruits maudits de malhars, le temps a ravi ses traits juvéniles, pour qu'elle devienne l'image fidèle d'une mère sans nom, égarée dans les ombres de l'abandon. Palpitant vacant qui ne demande qu’à ronronner sous la moindre caresse, mais les rares curieux craignent d'être engloutis par les ténèbres qui l'entourent. Ces malheureux ignorent que l’âme de l’orpheline brille d'une lueur douce, condamnée à suffoquer sous le poids des préjugés. Domestique qui frise l'esclavage sans même s'en douter, convaincue que, grâce à ses efforts infatigables, elle lavera l'honneur terni de sa lignée. Dévouée qui s'échine, jour après jour, entre les murs du manoir de Mama, la lueur d'espérance continue de briller dans ses yeux fatigués. Enfin, le monde m'offre une main secourable, une opportunité d'ériger la preuve que mon lignage n'est pas aussi vicié que l'insinuent les sinistres murmures. Mes mains, maculées du bleu de l'infamie, sont prêtes à démontrer au monde qu'elles ne furent point créées pour disséminer que mensonges et tourments. En ce sanctuaire, j'ai trouvé asile, un rayon d'espoir scintillant faiblement... Et une étrange compagnie, dont la singularité miroite dans le miroir de la mienne. S h e o g, est son nom.
La chambre était diablement immense, et pourtant, Aksana avait l’impression qu’une main glacée lui pressait le palpitant, le faisant suffoquer. Jamais elle n’avait eu d’espace aussi vaste, dédié à son intimité. Seulement un pauvre lit aux ressorts perçant le matelas, perdu dans une chambre truffée d’orphelins, tout au mieux. Ça a été ça, son intimité pendant longtemps ; se résumant aux dimensions ridicules d'un lit miteux. Et encore, c’était en passant sous silence, les invasions répétées des autres enfants, désireux de l’en déloger parce que mine de rien, le chat qu’ils maltraitaient à longueur de temps, méritait un peu plus qu’elle ce lit délabré. Difficile de nettoyer son cœur de ce sentiment poisseux, qu’était la méfiance qui la ravageait silencieusement. Quoi que, silencieusement, ça se voyait rien qu’à ses yeux, rien qu’à son corps crispé, qu’elle n’était pas à l’aise. Ici, ce n’était qu’une oasis trompeuse, une mauvaise saynète jouée pour leur donner l’illusion d’une liberté qu’ils n’avaient pas encore méritée. Elle avait appris à se méfier des apparences, à ne pas tendre les mains vers les fruits trop mûrs. Ni pourris, finalement. En fait, la malhar, n’a jamais réussi à tendre ses mains vers qui que ce soit, menottées par une méfiance tenace — le Gris était une douce exception, parce qu’il n’existait pas deux comme lui, dans ce monde aussi hostile qu’un nid de vipères. Il devait y avoir un loup, tapi dans l’ombre, parce qu’elle ne pouvait pas croire en cette offrande de paix après tout ce qu’ils avaient traversé, pas comme ça, pas aussi simplement. La malhar était crispée, se tenant droite, les muscles tendus comme ceux d’un animal acculé, prêt à bondir à tout instant. C’était trop beau, trop parfait pour n’être qu’une bénédiction. Elle sentait au plus profond d’elle que tout cela devait être une mise en scène, qu’ils étaient des proies engourdies par le confort pour mieux être dévorées. Et s’ils avaient franchi le premier portail avant le véritable enfer ? La peur était aussi tenace qu’une racine, s’enroulait autour de ses pensées, étouffait toute raison, lui murmurait que le sol allait se dérober, que les murs s’écrouleraient, qu’elle se retrouverait là où elle avait toujours été – dans l’affreuse et familière sainte trinité qu’était la froidure, l’étroitesse et la douleur.
Puis elle le vit lui. Titan dont la fatigue s’étalait sur son dos comme un poids, se laissant tomber avec une grâce décharnée sur ce lit gigantesque, même pour lui. Elle retint son souffle. Elle s’attendit à ce que quelque chose se passe — qu’un piège se révèle juste quand l’ailé s’y pose, un piège aussi affuté que les angoisses qui lui bouffent le crâne. Mais il se laissa tomber en arrière, ses bras tendus étirant légèrement la couverture dans un froissement léger, et elle le regarda, stupéfaite, comme elle ne l’avait jamais regardé. Parce qu’elle ne l’avait jamais vu, dans cet état ; aussi scintillant d’une candeur poignante, comme une étoile qui n’aurait jamais été touchée. Un émerveillement si sincère qu’il eut suffi, en d’autres circonstances, à la faire sourire. Pourtant, ici, la bête à la peau bleue demeurait scellée à ses craintes, ses pensées vomissant un défilé d’absurdités — des piques dissimulées dans le matelas, des lames logées sous le parquet, du poison dans l’eau mise à leur disposition. Et puis, l’esprit eut besoin de s’envoler un instant ; loin, et au-dessus, de toutes ces pensées parasites qui menaçaient de la faire chavirer. Comme cette nuit, au lac. Et alors, elle se trouva rapidement ridicule, absurde, idiote d’être incapable de lâcher prise alors qu’ils avaient été projetés au coeur même du saint Eden.
Puis, doucement, l’Aimé s’approcha d’elle, comme un ange descendu du ciel, ses opalines s’ancrant dans ses prunelles avec une intensité qu’elle n’aurait su soutenir s’il s'était agi de quelqu’un d’autre. « Un château pour ma reine », murmura-t-il, et ces mots glissèrent dans son esprit avec une douceur déconcertante, comme de l’eau fraîche sur une roche brûlante. Aksana sentit son cœur tressaillir, une onde de tendresse inonder tout son être pollué par la froideur de l’angoisse. Alors, sans y penser, elle inclina la tête vers lui, et sentit ses lèvres s’appuyer avec une tendresse absolue sur la chair blessée de son visage. La douleur, qui ne la quittait jamais, sembla s’estomper sous ce baiser ; elle avait presque l’impression que, chaque fois qu’il l’effleurait ainsi, il effaçait un peu de la cicatrice qui enflammait ses jours et ses nuits. Et la malhar se laissa faire, jusqu’à ce que toute autre pensée s’évanouisse sous la chaleur bienfaisante de son amour. Et puis douceur se leva alors, s’éloignant, et elle resta là, en suspens, l’observant comme on contemple un miracle inespéré. Il déambulait dans la pièce avec une légèreté enfantine, une liberté qu’elle-même ne parvenait pas encore à s'approprier. Mais elle essayait, oui elle essayait, elle aussi. En essayant de desserrer ses poings fermés, de laisser retomber cette muraille qu’elle avait érigée autour de son cœur pour se protéger des trop belles promesses. Elle voulait y croire, avec la même sincérité que Sheog. Elle voulait y croire, comme un souffrant espérait guérir du mal menaçant de l’emporter sur les eaux de Charon. Elle posa alors ses mains sur le lit, lentement, comme pour vérifier la douceur de l’étoffe sous ses doigts, et elle essaya de s’ouvrir ne serait-ce qu’un peu. Ce serait déjà une belle victoire. Soudain, le rire clair de Sheog se répercuta dans la pièce, inondant les hauteurs démesurées de la chambre, remplissant et éclairant le moindre recoins, même les plus poussiéreux et obscurs de ce lieu. Et dans son cœur, ce rire résonna comme un chœur, qui condamna au néant l’obscurité dans lequel elle suffoquait. Il riait, il riait de toute la force de son être, décrassant ses poumons de tous les sanglots qui avaient pu les souiller jusqu’alors. Ce rire, ce rire… sa gorge se serra, et sans même qu’elle ne s’en rende compte, des larmes commencèrent à affluer, brûlant ses prunelles, plissant ses sourcils. Elle était heureuse, c’était bien plus que cela, un bonheur si éclatant qu’elle n’avait même pas de mot pour le décrire, un bonheur qui la soulevait et lui donnait le vertige. Une euphorie si vive, qu’au lieu de sourire à son contact, elle crut s’effondrer en larmes — parce qu’elle n’avait jamais rien vécu, d’aussi beau et intense. Rien, non, rien, même pour sauver le monde entier, elle ne renoncerait à ce souvenir. Elle voudrait au contraire, en faire un sanctuaire où elle reviendrait sans cesse. Ses mains, enfin, relâchèrent le tissu du lit, et elle laissa son cœur, juste un instant, se remplir du bonheur de le voir rire et libre, à ses côtés.
Il y eut un éclat discret, qui s’échappa de son œil droit, et dévala les stries qui meurtrissaient sa joue aux lambeaux légèrement décolorés. Une larme, et pour la première fois, féline ne chercha pas à la chasser. Il n’y avait aucune honte, aucune crainte que cette vulnérabilité soit retournée contre elle, la larme acérée comme une lame affûtée. Non, pas en cet instant, plus devant Sheog — elle l’aimerait, en tout cas. Quoi qu’il en était, elle avait laissé visible cette émotion-ci, qui débordait de ce cœur poignardé de tendresse. Elle leva alors le museau, malhar s’avança d’un pas timide vers Sheog, le regard illuminé d’une lumière intense et vibrante, comme si le soleil qu’elle ne pouvait pas toucher s’y était logé. Joie ardente et sincère qui la saisissait soudainement, alors qu’elle découvrait la beauté éclatante d’une lumière qu’elle avait cru ne jamais pouvoir admirer de nouveau. La bleuet se hissa sur la pointe des pieds, ses mains se glissant avec une délicatesse totale jusqu’aux traits anguleux de son amour. Sa peau contre la sienne, était chaude, réconfortante, et l’aidait à s’assurer que ce monde merveilleux était bien réel — qu’il ne s’agissait pas là, d’un vilain effet secondaire de la potion ingurgitée plus tôt. Doucement, Aksana le tira vers elle, ses doigts encadrant ses joues, sa mâchoire saillante, chaque courbe qu’elle apprenait encore à connaître. Avec toutes ces péripéties, ils n’avaient jamais eu énormément le temps de s’aimer ni de se découvrir en paix. Alors, sans retenue, elle se mit à parsemer son visage de baisers, imprégnant chacun d’entre eux de cet amour immense qui faisait flancher son palpitant. Elle embrassa la courbe de sa joue, l’ombre de son sourire, le creux de son oreille, tout ce qui était accessible à ses lèvres. Tout cet amour, contenu si longtemps dans les retranchements de son cœur, se libérait enfin, jaillissait dans un flot qui renversait toutes les digues de sa pudeur et de ses peurs. Elle sentait son cœur battre avec une intensité nouvelle, comme si l’armure rigide qui le protégeait s’effondrait, morceau après morceau, sous les vagues de tendresse qui l’inondaient. Puis, d’une voix douce, les lèvres tout près de son oreille, elle murmura ;
— « J’aimerais en entendre plus », mots, empreints d’une ardeur sincère, flottaient dans l’air, aussi légers que le battement d’ailes d’un phalène. « De ton rire. »
Et elle recula légèrement, libérant son visage, pour lever ses prunelles scintillantes vers lui, qui régnait dans des hauteurs que seuls lui connaissaient. C’était lui, le roi ici, lui. Et dans son regard brillait cette émotion pure, comme si une étoile venait de naître au creux de sa poitrine. Elle sourit, un sourire presque timide, mais épanoui. Pour la première fois, osait se dévoiler, et bien que l’exercice lui était effrayant, elle avait envie de poursuivre sur ce sentier ; elle n’aurait qu’à suivre les lueurs de la Lune pour ne plus se perdre.
— « Je n’ai jamais entendu de mélodie aussi belle, »souffla-t-elle, un peu embarrassée par l’aveu, mais l’émotion qui l’inondait était trop grande pour être dissimulée.
Elle n’avait jamais été aussi sentimentale, aussi vulnérable, et pourtant, cette liberté nouvelle lui donnait des ailes, comme si Sheog lui avait gracieusement prêté les siennes. Elle se sentait invincible, comme si la force tranquille de sa Lune l’enveloppait, la protégeait, lui donnait le courage d’abattre les remparts qu’elle avait dressés autour de son cœur. Et enfin, pour la première fois, elle se sentit libre à son tour. Libre de rire, de pleurer, d’aimer, sans limites, sans peur.
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Ezvana
Dim 10 Nov - 2:27
Sheog
Démon, c'est ainsi que l'on m'appelle. Personne ne me ressemble et je vis dans ma chambre, dans la cave de Mama. Depuis toujours, elle me marchande pour les lubies d'humains lors de soirées privés. Je me plie à ses ordres, ne connaissant rien d'autre, cherchant l'amour maternel et l'affection des humains que je croise. Tant d'année se sont écoulés, je cherche toujours a savoir ce qui ce passe de l'autre côté de ces murs. Les livres ne suffisent plus à apaiser mon besoin de liberté. Depuis peu, Mama a engager une domestique si différente des autres. Aksana.
Boule de chaleur qui remue dans son estomac tel un feu lové dans ses entrailles et diffuse un bonheur dans ses veines, parcourant alors son corps de vagues doucereuses. Confort inconnu, félicité ouatée qui apaise les contours anguleux de sa fatigue et de sa peine. Un peu soulagé le Gris, un peu plus léger soudainement, comme si on avait retiré une pierre volcanique de son corps. Rire ainsi était donc une thérapie pour ses malheurs, une nouvelle leçon qu’il a apprise. Un pas de plus vers la maturité, vers la connaissance de la vie. Trop longtemps privé de sensations et de liberté, son esprit est alors avide d’amasser de nouvelles sensations. Les derniers jours furent rudes, tellement qu’il avait cru flancher et sombrer. Pourtant, chaque enseignement le fait grandir un peu plus et il en prenait conscience maintenant.
Et alors qu'il se tourne vers son Etoile, la surprise se lit sur les traits de son visage, tandis qu'il aperçoit cette larme sur sa joue. À peine le temps de faire un pas, l'inquiétude brillant dans le fond des prunelles qu'elle se relève, comme s'ils ne faisaient qu'un et répondaient au corps de l'autre sans même y penser. Le contact de ses mains sur son visage qui naturellement le fait se courber un peu, pour être un peu à sa hauteur et recueillir chacune de ses caresses. Les yeux qui se ferment en sentant des baisers être parsemés sur sa peau. Chaque fois que les lèvres de la Bleuter se posent ainsi sur son épiderme, une chaleur si diffuse, tout aussi touchante et appréciable que celle de son estomac. Se réchauffer de cette sensation si délicieuse, si enivrante. Aksana ne devait pas s'en rendre compte, mais chaque geste de tendresse était une bénédiction pour son cœur en manque d'amour, un besoin à combler après tant d'années à être seul par obligation. Alors il ne dit rien et reste immobile, se contentent d'accepter les effusions d'amour avec un plaisir évident, son corps trahissant l'émoi qui enflait en lui. Les oreilles un peu trop hautes, cette façon dons la queue ondule dans l'air jusqu'à trouver une jambe et de s'enrouler autour. Ce ronronnement bas, presque discret, qui résonne dans sa large poitrine. La brillance de ce regard d'hiver alors qu'il ouvre les paupières en entendant les paroles si douces de sa tendre, cette façon dont les pupilles fendus laissent place au miroir d'argent où elle pourrait voir son propre reflet, lui qui n'avait de yeux que pour elle.
Parce que devant ses prunelles, se déployait une beauté sauvage qui fait patte de velours, panthère du cosmos qui s’étire, daigne le regarder de face pour qu’il puisse l’aimer d’un simple échange. Ce doux sourire qui dévoile la pointe des crocs, cette façon dont ses oreilles s’agitent un instant alors qu’elle est face à lui. Tous ces petits détails qu’il dévore, elle qui communiquait comme lui. À croire que depuis toujours, ils étaient faits pour se comprendre, telles deux faces d’une même pièce qui ne cesse de tournoyer. Une autre espèce qui pourtant semble indissociable de la sienne. Amour qui brille intensément dans les yeux plissés de tendresse, cette façon dont il est touché par ce doux sourire qui le chamboule. Elle était si belle quand elle n’était pas rongée par l’inquiétude, quand elle dévoilait un peu de personnalité si aimante. Privilège de pouvoir l’observer ainsi, sans craindre son courroux, faveur exceptionnelle d’être celui qui pouvait la rendre ainsi. Le cœur chante d’allégresse, un soupir qui glisse sur sa langue alors que le plaisir lui donne des remous dans l’estomac, que l’on nomme « papillon dans le ventre ».
- Qui aurait cru qu’un jour je me retrouverais dans une chambre d’un château enchanté aux côtés de celle qui est mon tout.
Qui aurait cru qu’il existait autre chose que les nuits dans la chambre et chez les clients, qui aurait cru que même lui, le Monstre, la Bête, puisse trouver une âme asse bonne pour l’aimer tel qu’il était.
- Je suis chanceux de t’avoir à mes côtés. J’en prends conscience chaque minute près de toi.
Regard amoureux de celui qui caresse le visage de la Bleuter de ses prunelles, le corps vibrant d’une émotion intense et idéalisée, comme un vœu qui fut exaucé et qui exalte l’âme. Prendre en coupe ce visage avec la délicatesse d’un ange tombé du ciel, pression mesurée sur cette peau d’azur comme on tient de la porcelaine fragile. Monstre qui mesure sa puissance et la longueur de ses griffes, qui souhaite transmettre un peu de son cœur dans des gestes longtemps désirés. Ce nez qu’il glisse contre le sien tendrement, tel un animal frottant son museau dans un geste d’affection, avant de se pencher un peu plus pour déposer un doux baiser sur les lèvres de la tendre. Jamais on ne lui a appris tout cela, à savoir exprimer sa tendresse. Après tout, il a couru après cela toute sa vie, mais jamais on ne lui a témoigné autre chose que du désir. La passion, le coït, c’était déjà assimilé depuis longtemps. Pourtant, alors qu’il est capable d’offrir les plaisirs les plus inavoués à tout type de personne, la pureté des sentiments lui était nouvelle. Précieux diamant perdu dans des draps de soies, qu’il chérissait de tout son être. Plus rien n’avait de valeur ou d’importance en comparaison. Alors fébrilement, il tente de le transmettre, de faire comprendre à Aksana qu’elle était tout ce qu’il avait rêvé. Et plus encore.
- Rien n’est plus doux que tes paroles. Rien n’est plus suave que tes baisers. Rien ne me satisfais plus que d’être avec toi, tous les jours que Dieu fait. Rien n’est plus enchanteur que tes sourires. Rien n’est plus étincelant que ta peau parsemée d’étoile.
L’embrasser à nouveau, de façon plus appuyée, alors que l’émotion roule et remonte jusqu’à son esprit, que le frémissement de la peau de velours se fait ressentir, tel un tremblement de terre qui anime le corps du Gris. Happer son souffle un instant, vole ce moment suspendu et précieux, ou rien ne pouvait les atteindre, seuls et en sécurités. Délicatement il demande la permission d’aller plus loin, de franchir la barrière de ses dents pour caresser sa langue. Valse sensuelle ou les pas de danse sont maîtrisés de chaque côté, une harmonie languissante d’un partage amoureux. Délicat pourtant le doux géant, qui réfrène les envies de plus et ne pas blesser son aimée d’une pression trop insistante sur cette joue abîmée. Frémissant, il tente de ne pas se laisser trop aller, de ne pas franchir la barrière invisible, bien que ses mains glissent sur le visage près du sien, enserre un peu plus les contours du crâne pour la garder contre lui, enfouissant des doigts dans la chevelure céruléenne. Baiser plus appuyer encore, tant que le souffle manque, que la respiration est sifflante. La valse se fait Tango, monte en intensité jusqu’à laisser les questions de côtés et ne plus devenir qu’un corps en demande. Cette langue qui balaye une lèvre inférieure, la pointe d’un croc qui s’amuse à faire rouler la pulpe des lippes. Et alors il s’arrête, rouvre les yeux fermés avec force tant l’envie avait pris de l’ampleur, restant près du visage de son Etoile, leurs souffles heurtés s’entremêlant. La poitrine qui se soulève avec force alors que le Gris tente de reprendre contenance, retrouvant toute une éducation ancrée à même sa façon d’être, incapable de transporter sa tendre vers l’après, ce basculement qu’ils n’ont encore jamais partagé. Attentionné le Démon, qui préfère se frustrer lui qui a toujours su maîtriser cet art sur le bout des doigts, plutôt que de briser une confiance si belle. Papillonner des cils alors que le monde semble presque tourner autour de lui, n’ayant plus qu’un seul point central : Elle.