Elle ne savait pas exactement ce qu’elle avait entendu. Un truc. Elle avait entendu un truc qu’elle avait peut être interprété à sa façon. June était une fille de la ville. La campagne c’était un peu le mystère pour elle, et encore plus la forêt comme ici. Lorsque Tobias lui avait demandé d’écouter les bruits dans la forêt tout à l’heure, d’y faire attention, elle s’était sentie comme oppressée. Elle ne connaissait pas la plus part des bruits. Ok elle était au courant qu’un hibou ça faisait houhou et un loup une autre sorte de hou ! Dans le contexte actuelle de sa vie, elle trouva ça plus prudent d’aller trouver Tobias. Et si c’était Lee Jong qui s’était pris les pieds dans la table de jardin ! Bon d’accord, c’était pas du tout ça qu’elle avait entendu, et elle l’imaginait plus futé que ça. Enfin bref c’était plus prudent que Tobias aille faire un petit tour non ?

Elle suivit ses directives et ferma la porte à clé, avant de s’asseoir en tailleur sur le lit en se rongeant les ongles. Elle avait presque envie de se cacher sous la couette. Ce fut long… Très long… Trop long… Son esprit se mis à imaginer les pires scenario possibles. Et si il les avait retrouvé ? Et si c’était pour ce soir ? Et si ils ne passaient pas la nuit ? Et si Tobias se faisait tuer ? Et si il s’était fait tué là maintenant ? Son coeur battait à une vitesse folle.

Un coup contre la porte. La jeune femme se raidit retenant son souffle. Elle laissa s’échapper un long soupire en entendant la voix de Tobias et elle se précipita vers la porte afin de la déverrouiller. Une envie folle de se blottir dans ses bras simplement parce qu’il était en un seul morceau, là devant elle. Mais elle se retint. « -alors ? » demanda t elle finalement tandis qu’il rangeait son arme. Le regard qu’il posa sur elle en disait long sur ce qu’il pensait. Il se foutait silencieusement de sa gueule. Elle se sentit conne. Très conne alors qu’il lui décrivait ce qu’elle avait pris pour un tueur sanguinaire. « -ahah ! Très drôle. Allez s’y foutez vous de moi ! » un regard sombre, les bras croisés sous sa poitrine. Elle ne répondit rien, tourna les talons et retourna dans sa chambre, vexée. Si ça avait vraiment été Lee Jong, Tobias aurait été bien content qu’elle vienne le prévenir. Mais après quelques longues minutes dans sa chambre, elle avait l’impression d’être de nouveau fixé sur tous les bruits possibles. Alors elle balaya son amour propre et retourna dans la chambre de Tobias à pas de loup, se coucha à côté de lui en lui tournant le dos, espérant qu’il ne dise rien.

Comment Tobias s’était retrouvé à faire le tour de son chalet, armé, vêtu d’un débardeur, un jogging et d’une paire de bottes même pas lacé, avec un 9mm en main ?! Parce que June était venue le réveiller, paniquée à la simple pensée que Lee Jong était arrivé jusqu’à eux ou tout autre individu qui en aurait à leurs vies. Finalement, le tueur à gage se retrouva devant un wapiti qui pris ses pattes à son cou lorsqu’il croisa le regard du tueur à gage. Ce dernier était revenu dans le chalet, avait remis en place l’alarme par précaution et était retourné dans sa chambre. Évidemment, il ne put s’empêcher de se moquer un peu d’elle, gentiment, affectueusement, pour la détendre, mais cette dernière s’offusqua « C’est drôle ! » conclut-il comme si c’était une évidence. Mais quand il lui proposa de dormir avec lui, June retourna aussitôt dans sa chambre. Quant à lui, il ferma les yeux et esquissa un sourire quand il entendit les pas de June dans sa chambre, et rétorqua un simple « Bonne nuit » sans ouvrir les yeux ou se retourner. Elle avait décidé de dormir dans son lit. Sans bouger, il tomba rapidement dans les bras de Morphée…

Quand le tueur à gage ouvrit les yeux, il prit place sur le rebord du lit, avant de sursauter légèrement en sentant quelqu’un bouger dans ses draps. Une main dans ses cheveux courts en remarquant que ce n’était que June. Il avait presque oublié que cette dernière l’avait rejoint dans la nuit parce qu’elle avait eu peur d’un animal sauvage. Ce qui était légitime quand on avait passé sa vie dans la ville. Il se leva, récupéra quelques affaires et occupa la salle de bain de la chambre de June afin de ne pas la réveiller, et prépara le petit-déjeuner, décidant de boire son café sur la terrasse, profitant du temps plus que clément pour ce début d’automne. June ne le rejoignit qu’à sa deuxième tasse de café et il lui sourit avec douceur « Bonjour » et porta sa tasse de café à ses lèvres tout en fixant l’horizon. Il la laissa émerger tranquillement et silencieusement. Il se leva pour se resservir un troisième café et lorsqu’il revint sur la terrasse, rétorqua « Bien dormi ? Ou plutôt mieux dormi ? » parce qu’il se doutait que la première partie de la nuit n’avait pas dû être apaisante pour qu’elle craigne autant les bruits de l’extérieur ainsi. « Si vous voulez, vous pouvez redormir avec moi cette nuit, ou on peut échanger les chambres ». Une gorgée de café et posa sa tasse sur l’accoudoir de son siège en bois « Il va mettre du temps avant de trouver cette propriété. La maison a été achetée au nom de Louise Kaplan, une sexagénaire qui a un goût tout particulier pour les forêts d’épicéa ». Il avait tout prévu. « Ce soir, je vous lierai un comte pour enfant si vous préférez » tout en esquissant un sourire taquin. Il se mura ensuite dans son silence, comme à chaque fois, réfléchissant. Au bout de presque une demi-heure, il reprit la parole « Est-ce que vous baignez dans une source d’eau chaude naturelle vous séduirez ? Il en existe une à quelques kilomètres d’ici ».

Hé merde ! En se glissant dans les draps du lit de Tobias, June avait prié pour qu’il dorme déjà ! Ça n’était visiblement pas le cas, ou alors il avait l’oreille très fine. Elle repensa au sanglier en charge, à cette histoire d’être plus discrète. Dormir en ayant peur ou dormir à côté de Tobias, elle ne savait pas ce qui était le mieux. Non pas qu’elle avait encore peur de lui. Mais elle ne voulait surtout pas qu’il se fasse des idées. Mentalement elle se traita de débile. Une gamine. Voilà ce qu’il devait penser. Voilà qui la rassurait sur cette idée tordue qu’il puisse avoir une envie de la toucher. D’accord, il s’était montré plus tactile aujourd’hui, de là à lui sauter dessus. June mis un temps fou à trouver le sommeil. Et lorsque Tobias se leva au matin, elle se contenta de grimacer et de rouler sur le côté, le visage à moitié caché par la couette. A la base elle n’était pas une grosse dormeuse. Mais à force de faire des nuits pourries, sans compter le stress, June avait bien du mal à ouvrir les yeux. Ce fut bien trente minutes plus tard qu’elle s’étira dans les draps, tournant la tête sur le côté, trouvant une place froide. Il était déjà debout.

Dans sa propre chambre, le parfum de Tobias emplissait la pièce. La jeune femme se regarda rapidement dans le miroir. Elle prendrait sa douche plus tard. Pour le moment elle avait faim et une odeur de pain grillé lui chatouillait le nez. Son regard fit le tour de la pièce. Tobias était probablement sur la terrasse. Elle se prépara des tartines et fit coulé un café pour elle. Il devait déjà en avoir un entre les mains, peut être déjà deux dans les veines. Pieds nus comme souvent, elle emporta le tout dehors, histoire de prendre l’air et de profiter du soleil qui avait décidé de se pointer. « -bonjour » souffla t elle avec un léger regard, avant de s’installer. Elle apprécia son silence, et la vue tout en prenant quelques gorgées de café. « -non... » répondit June en levant son regard sur lui. « -mon cerveau n’a pas de bouton stop et en plus je savais pas comment m’installer. J’avais peur de vous gêner, de vous frôler, de vous toucher avec mes pieds froids. » malgré tout elle lui adressa un petit sourire avant de mordre dans une de ses tartines.

« -c’est gentil mais je vais mettre la tête sous l’oreiller et ça devrait aller. Enfin j’espère. » elle n’allait pas partager le lit de Tobias toutes les nuits. Il fallait juste qu’elle s’habitue au bruit de la nuit, ceux de la forêt aussi. Elle se gratta derrière l’oreille avant de réprimer un bâillement. Puis elle observa Tobias quelques instants. Et voilà qu’il faisait déjà son possible pour la rassurer. Mais elle plissa bien vite les yeux : « -vous allez vous foutre de ma gueule longtemps ? » demanda t elle en souriant. Comment lui en vouloir. Elle aurait fait pareil à sa place. June termina son petit déjeuner en respectant le silence de Tobias et elle venait de se lever lorsqu’il ouvrit à nouveau la bouche. Sa tasse et son assiette vident en main, June sourit et répondit : « -trente minutes pour dire ça ? » bon d’accord, c’était pour se venger quelque peu. « -j’imagine que ça me plairait, mais je vous rappelle que je ne sais pas nager. Donc... » une petite grimace. La plus part des femmes auraient sans doute sauter de joie non ? Encore une fois pour elle, c’était l’aventure de l’extrême ! Et donc c’était presque flippant. Encore une fois, elle baissa les yeux en se sentant idiote de ne même pas être capable d’imaginer à quoi cela pouvait ressembler.

Assis sur la terrasse du chalet pour profiter du calme ambiant et de la chaleur du soleil de ce début d’automne, une deuxième tasse de café entamée, Tobias releva la tête vers June qui s’était décidé à le rejoindre pour prendre le petit-déjeuner. Apparemment, le fait d’avoir dormi avec lui n’avait en rien arrangé sa nuit, bien au contraire. Il hocha lentement de la tête, laissa son regard se perdre dans l’horizon un bref instant, et tourna de nouveau la tête vers la jeune femme « Vous auriez pu bouger, et je n’aurais pas pris vos gestes pour une invitation à danser sous les draps » tout en esquissant un sourire en portant sa tasse à ses lèvres. Il lui avait proposé de dormir à ses côtés sans la moindre arrière-pensée. Elle n’était pas rassurée seule dans sa chambre, il était donc légitime de lui offrir sa compagnie pour qu’elle puisse enfin dormir paisiblement. Ce fut pour cela qu’il lui proposa de réitérer cette nuit et les suivantes si elle le souhaitait. Il posa sa tasse sur l’accoudoir de son siège et acquiesça « Si jamais vous changez d’avis, sachez que ma porte sera toujours ouverte » sans la regarder, continuant de fixer le paysage sauvage devant lui. Il lui proposa tout de même la lecture d’un comte pour enfant. La réponse de June le fit presque rire et haussa les épaules « Je n’ai pas encore décidé » alors qu’il posa ses yeux sombres sur elle, avec une lueur espiègle dans le regard.

Tobias laissa de nouveau le silence les envelopper et la jeune femme respecta cela, prenant son repas en silence. Il ne reprit la parole que lorsque cette dernière se leva de sa chaise, esquissant un sourire en coin « Vous allez vous foutre de ma gueule longtemps ? » et termina sa tasse d’une gorgée, se levant pour la suivre dans la cuisine, lui prenant sa vaisselle des mains afin de la laver « C’est une source où vous aurez pied. C’est un coin d’eau où l’eau est naturellement chaude… Je me dis que ça nous ferait du bien de passer une journée loin de Lee Jong et des Wapitis » tout en relevant son regard taquin sur elle. Oui, il se foutait encore d’elle pour cette nuit, mais c’était amusant. Il termina la vaisselle, retourna dans sa chambre pour enfiler un short de bain sous ses vêtements et pendant que June se préparait, cuisina des club sandwich pour le repas de ce midi, glissa cela avec des chips, des biscuits et des bouteilles d’eau, dans un sac à dos et fit signe à June qu’ils pouvaient y aller. Il prit soin de prendre son arme avec lui, juste par précaution, et c’était parti pour prendre la voiture et descendre jusqu’à la source chaude.

Quelques minutes de route et il gara la voiture vers une source d’eau chaude arboré et calme « Nous sommes arrivés » et quitta la voiture. La température extérieure n’était pas si froide que ça, leur permettant de retirer leurs vêtements sans greloter de froid et Tobias se glissa dans l’eau en premier, plongeant entièrement sous l’eau, et se redressa sur ses jambes, et s’approcha de June, lui tendant la main « Faites-moi confiance » et l’entraina dans l’eau sans la quitter des yeux « Vous avez toujours pieds ? » et lui lâcha la main en douceur « Vous voyez, c’est agréable, non ? ».

« -j’en suis convaincu mais je n’avais pas envie de vous empêcher de dormir plus encore. » elle avait déjà débarqué dans sa chambre la trouille au ventre et l’avait fait sortir dehors en pleine nuit pour rien ! Alors en plus elle n’avait fait que brasser. Elle refusa sa proposition et souffla un : « -merci. » pour le reste. Jamais personne n’avait été aussi prévenant à son égard, encore moins un homme. C’était un peu déstabilisant. Surtout en sachant qu’il n’attendait rien d’elle en retour. Avec Tobias il n’y avait jamais d’arrières pensées mal placées et c’était vraiment plaisant. Apaisant même. Enfin depuis quatre ans, dans sa nouvelle vie, le regard des hommes avaient changé sur sa personne. Comme si avoir un bon job et un peu d’argent avait changé ce qu’elle pouvait représenter à leurs yeux. Il n’en restait pas moins qu’elle avait une poitrine avantageuse, des courbes t des rondeurs qui d’ordinaire ne laissait pas de marbre. Mais lui, ne l’avait jamais regardé ou détaillé des yeux en ne voyant que ça.

June aimait également la petit lueur taquine qui brilla dans les yeux de son protecteur. Peu à peu il se détendait à son contacte. Ça aussi c’était plaisant. Et rassurant parce qu’il était capable d’avoir des sentiments et des émotions. Chose dont elle avait pu douté lorsque de leur première rencontre. Elle se contenta de plisser un peu plus les yeux, comme si cela pouvait être une sorte de menace s’il ne cessait pas.

Et puis le silence reprit sa place entre eux. L’un comme l’autre dans leurs pensées respectives. June appréciait le chant des oiseaux, la caresse du soleil d’automne. La journée s’annonçait belle. A son tour de se foutre de lui lorsqu’il ouvrit à nouveau la bouche. « je n’ai pas encore décidé... » répondit June avec un petit sourire en coin. Elle déclina son idée pour la simple raison qu’elle ne savait pas nager et qu’elle ne savait pas à quoi s’attendre. Au chalet, elle se sentait plus ou moins en sécurité. Mais dehors ?! Même avec lui… June fut surprise qu’il lui veuille lui prendre son assiette des mains. Elle était encore capable de faire sa vaisselle seule. Elle l’écouta avant de lever les yeux au ciel, souriante. « -d’accord… je vais m’habiller alors. » un pincement de lèvre en regardant l’assiette mais il avait déjà prit l’éponge.

Elle enfila son maillot de bain, ainsi que des vêtements des plus pratique par dessus. Un pantalon cargo en toile de couleur kaki et un tshirt dans les tons sables sur lequel était placardé le nom de son entreprise. Un soupire avait passé ses lèvres en l’enfilant. Il fallait qu’elle se fasse une raison, cela appartenait au passé. Dans la voiture elle pris soin de tresser ses cheveux sur le côté, histoire de discipliner un peu les boucles folles. Adieu lisseur… Bonjour les boucles. Un léger froncement de sourcils. Arrivé ? Déjà ? Très bien. Elle s’était imaginée que ça serait plus loin. Mais elle descendit de la voiture à son tour. Puis elle ouvrit de grands yeux devant la spectacle que lui offrait ce petit coin de paradis.

June jeta quelques regards à Tobias alors qu’il retirait ses vêtements. Et sans doute par pudeur, elle en fit de même juste après qu’il ait disparu sous l’eau, en lui tournant le dos. C’était complètement con puisqu’il allait bien la voir en maillot de toute façon ! Et depuis quand elle était pudique d’ailleurs ?! La jeune femme mis un pieds dans l’eau, puis un second avant de relever les yeux sur la main que lui tendait Tobias. Une seconde d’hésitation, plus pour l’eau que pour lui. Puis elle glissa ses doigts dans les siens avec un léger sourire timide. « -oui… oui, oui… c’est bon... » souffla June en avançant avec la plus grande prudence. L’eau lui arrivait à la taille, elle la caressa avec lenteur, savourant la chaleur, regardant à nouveau autour d’elle. C’était magnifique. « -très... » répondit a jeune femme en jetant un regard à Tobias. Ses yeux glissèrent sur son torse et elle vit les trois cicatrices. C’était autre chose que celle qu’elle portait de l’appendicite. June finit par détourner les yeux en rougissant presque. C’était n’importe quoi, pourquoi est ce qu’elle se sentait gêné de cette façon près de lui. Après tout, il savait très bien que ça n’était pas son genre vu qu’il l’avait surprise en soirée avec un inconnu la tête plongé entre ses seins. "-pourquoi vous ne vivez pas ici tout le temps? Loin des gens, de la ville, du bruit?" comment détourner l'attention et la conversation. Ce cadre de vie semblait mieux coller à la personnalité d'introverti qu'il était.

« Vous le saurez pour la fois prochaine » comme s’il s’attendait à ce que June débarque dans sa chambre à nouveau, en plein milieu de la nuit, pour y trouver refuge. Elle le remercia et il n’esquissa qu’un sourire pour réponse. Alors qu’il était habitué au jour sans lendemain, ou plutôt sans la certitude d’un lendemain, ce n’était nullement le cas pour June qui se retrouvait dans une situation où elle était incapable de se projeter. Alors s’il pouvait apporter un peu de quiétude face à tout cela, il le faisait. Peut-être parce qu’il se sentait responsable de ce grand branle-combat dans sa vie ou peut-être parce qu’il éprouvait une certaine affection pour elle, et qu’il souhaitait réellement qu’elle puisse reprendre paisiblement son quotidien lorsqu’ils se sortiraient de tout cela. C’était aussi pour cela qu’il lui proposa de lui lire un comte pour enfant. Évidemment, June lui demanda s’il comptait arrêter de se foutre d’elle, mais il n’avait pas encore décidé. Peu à peu, le tueur à gage se dérider au contact de la jeune femme, se découvrant une nouvelle facette de sa personnalité, qui était plus détendue, plus taquine aussi, mais toujours dans la retenue. Il ne pouvait en faire autrement, mais ça semblait plaire à June qui entra dans son jeu de bon cœur, apparemment. Il se mit à rire discrètement, baissant la tête, et releva seulement son regard sur elle, amusé par sa manière de le menacer silencieusement. Ces moments de complicité étaient agréables et lui permettait d’oublier le danger qui allait survenir d’un moment à l’autre…

Le silence reprit ses droits et ils restèrent ainsi prendre une longue demi-heure, jusqu’à ce qu’il ne prenne l’initiative de briser le calme ambiant. Une occasion rêvée pour June de lui rendre la pareille, jusqu’à sa réponse, ce qui le fit sourire avec une certaine tendresse et un certain amusement. Il plissa donc le regard, comme elle avait fait auparavant et se saisit de la vaisselle pour nettoyer le tout, poursuivant leur conversation en même temps. Un hochement de tête quand elle accepta sa proposition et c’était donc parti pour quelques minutes de route jusqu’à une source d’eau chaude non loin du chalet. Arrivé au bord de cette dernière, Tobias ôta ses vêtements pour rester en simple short de bain, et alors qu’il aurait pu profiter de la vue que lui offrait June en bikini, il décida plutôt d’entrer dans l’eau en premier, avant de venir jusqu’à elle, afin de l’entrainer avec lui. Il ne répondit rien quand elle lui confirma avoir pied et sourit à son simple mot qui voulait dire beaucoup. Il ne put retenir un sourire quand elle regarda son torse, suivant son regard jusqu’à ses cicatrices, et reporta aussitôt son attention sur elle qui détourna le regard avec une certaine hâte. Était-elle gênée d’avoir vu ses cicatrices ? Ou gênée parce qu’elle l’avait regardé comme une femme pourrait regarder un homme torse nu sur une plage ? Il n’obtiendrait sûrement pas sa réponse, en tout cas pas maintenant, alors qu’elle lança la conversation. Un regard pour le paysage et s’enfonça dans l’eau « Parce que j’ai ma famille en Californie… Et pour être honnête, je n’ai jamais passé vraiment de temps ici. Je suis venu deux ou peut-être trois fois, pas plus d’un jour ou deux. Mais je pense y réfléchir sérieusement… ». C’était un endroit qui le correspondait. Calme, loin du bruit ambiant des grandes villes, brut de pomme et isolé de tout. Il s’éloigna pour nager un peu, laissant apparaître son dos et les cicatrices qui le composait, souvenirs de sa dernière mission en Irak où il avait bien cru mourir. « Ici, vous n’aurez pas pied » en se retournant alors qu’il se trouvait près de la cascade « Vous voulez que je vous apprenne à nager ? » alors qu’il revint vers elle « Je l’ai appris à Maggie… enfin ma nièce ».

La source d’eau chaude était un endroit magnifique. June était ravie que Tobias est insisté pour l’emmener ici aujourd’hui. Tout dans cet endroit était calme et reposant. Pas de bruit de voiture, de klaxon, de sirène de pompier ou d’ambulance. C’était un peu comme si le temps s’était arrêté. La jolie brune réalisa que son stress et ses angoisses s’étaient apaisés. Elle savoura pleinement ce moment de paix. Simplement parce qu’elle gardait à l’esprit que ça serait peut être le dernier. La vie lui semblait bien trop courte maintenant. Elle n’avait jamais réalisé aucun de ses rêves. Ni même seulement voyagé. Ce chalet perdu dans la forêt, cette source chaude, c’était un peu comme des vacances au bout du monde. Alors elle se devait de profiter de chaque secondes plutôt que de se morfondre ou de broyer du noir.

Elle lança une conversation, simplement pour éviter de parler des cicatrices qu’elle venait de voir sur le torse de Tobias. Elle savait d’où elles venaient. Et n’avait vraiment pas envie d’évoquer Lee Jong ici. Ça serait briser le charme de l’endroit. Elle s’enfonça un peu plus dans l’eau en pliant les jambes, écoutant la réponse de Tobias. « -vous en avez combien d’autres des maisons comme celles ci ou celle de Santa Barbara ? » une question comme une autre. « -la mienne me manque… je l’aimais vraiment beaucoup... » commenta la jeune femme en regardant dans l’eau alors que Tobias s’éloignait pour nager. Un regard pour lui, pour les autres cicatrices. Combien son corps en portait il ? Elle chassa cette question de son esprit alors qu’il lui parlait. « -d’accord... » souffla t elle, prenant note qu’elle ne devait pas aller plus loin.

« -pardon ? » demanda la jeune femme en souriant. Un froncement de sourcil avant qu’il ne précise qui était Maggie. « -vous pensez sincèrement qu’on est capable d’apprendre à mon âge ? » et puis ça lui servirait à quoi ? « -vous êtes donc un enseignant multi matière ! » s’amusa June en lui souriant enfin franchement. Elle avait déjà bien d’autres choses à apprendre. Savoir nager était en réalité le dernier de ses soucis. « -vous en avez fait quoi d’ailleurs de vos élèves ? » la question venait seulement de l’effleurer. Avait il pris des vacances ? Un congé ? Démissionné ? « -votre famille sais où vous vous trouvez ? » demanda t elle encore réalisant que s’il mourrait, ils ne le sauraient peut être jamais. Tobias menait une vie bien compliqué. Trop de secrets… A nouveau elle trouva ça triste. « -quelle âge a t elle ? Maggie... » ajouta June pour revenir à un sujet moins pesant dans son esprit.

Tobias souhaitait offrir une journée de quiétude à la jeune femme. Une journée où Lee Jong ne les traquait plus. Une journée qui donnait une impression de vacances. C’était tout ce qu’il pouvait lui offrir dans ce grand branle combat qu’il avait engendré dans sa vie. Une journée pour profiter du charme de cet endroit isolé et apaisant. Il commençait, lui aussi, à s’interroger sur les raisons qui l’empêchaient de venir vivre ici. Il affectionnait de plus en plus cet endroit, et il allait sérieusement y songer comme il l’avait confié à June « Six … J’ai une maison en Thaïlande, un appartement à Paris, ma maison ici-même, une à Santa Barbara, une dans les Hampton et la dernière au Mexique » alors qu’il s’éloignait d’elle, la prévenant de ne pas en faire de même car elle risquerait de se noyer, ou de paniquer en ne sentant plus la terre sous ses pieds. Ce fut pour cela qu’il lui proposa de lui apprendre à nager alors qu’il le faisait pour revenir vers elle « Vous apprendre à nager » et lui sourit avec douceur « Oui » avant de rire légèrement « On va dire ça ». Il se laissa flotter sur le dos alors que la jeune femme l’interrogea sur ses élèves. Il se redressa, passant ses mains dans ses cheveux pour les plaquer en arrière, répondant avec sérieux « J’ai expliqué que je devais protéger une demoiselle en détresse, et tuer deux ou trois personnes. Ils ont dit que ce n’était pas un souci, que je pouvais prendre le temps qui m’était nécessaire », puis se mit à sourire « J’ai prétexté des soucis personnels importants » et étonnamment, on ne se montrait jamais particulièrement curieux avec lui. On le laissait partir. C’était peut-être son regard sombre, sa discrétion ou son air dangereux. En tout cas, ça lui épargnait des questions. Un signe négatif de la tête pour répondre « Non et ils ne m’interrogent jamais dessus. Cela fait des années que je m’absente sans raison pendant des jours voire des mois » et ils avaient pris l’habitude. Sa sœur ainée s’était inquiétée pour lui au début, mais en le voyant revenir sain et sauf, elle avait accepté ses départs sans l’accabler de questions auxquelles, elle n’obtenait jamais la moindre réponse.

Tobias esquissa un doux sourire à l’évocation du prénom de sa nièce, ou plutôt au fait qu’il se mettait à se livrer à June sans retenue « Six ans et un peu trop maligne pour son âge » et saisit la main de la jeune femme dans la sienne « Venez » et l’entraina avec lui jusqu’au pied de la cascade « Vous la retrouverez, votre maison. Ce n’est qu’une question de temps » tout en lui souriant avec douceur. Ils avancèrent jusqu’à ce que l’eau arrive à la poitrine de la jeune femme « Je peux… je peux poser mes mains sur vous ? » et s’approcha, se mettant sur le côté, et posa sa main sur son ventre « Allongez-vous sur le ventre maintenant, je vous tiens » et posa l’autre sur ses cuisses « Maintenant, nagez tout simplement », la suivant dans ses mouvements « Mettez-y un peu plus de force pour vraiment brasser l’eau » et décida de retirer ses mains en douceur, restant à côté d’elle et restant aussi là où elle avait pied juste par précaution. « Vous voyez, ce n’est pas si difficile » alors qu’il leva les mains au-dessus de l’eau. Il l’observa en silence jusqu’à ce qu’elle revienne vers lui « Et en dehors de votre mère, vous n’avez aucune famille ? ».

« -ah oui quand même... » souffla June. Ça rapportait plutôt bien de tuer des gens… C’était juste un peu moche que cette argent soit sale. Un peu beaucoup super moche. Après, si jamais il le fallait, ils avaient d’autres pieds à terre pour la suite de leur aventure. Sincèrement elle préférerait qu’ils restent ici. Perdu au fond des bois. Même si elle ne dormait rien la nuit, elle se sentait tout de même plus en sécurité éloigné du monde. Elle enregistra l’info sur la profondeur du bassin avant de bloquer quelque peu sur la demande de Tobias. Elle se pinça les lèvres en regardant l’eau, n’osant bouger plus, même si à quelques mètres d’elle, il lui souriait et semblait vouloir l’aider. June préféra un semblant de conversation pour le moment, elle n’était pas encore prête dans sa tête à se lancer.

« -quelle demoiselle en détresse ? » demanda June en faisant mine de ne pas comprendre. « -je n’étais pas en détresse avant que vous vous pointiez chez moi. » précisa la jeune femme. C’était la vérité. Elle allait très bien le soir où il avait sonné à sa porte. Elle ris en même temps que lui avant de soupirer : « -et mon de mettre fait enlevé par un fiévreux amant à l’autre bout du monde pour des vacances pleine de folies ! » ironisa June. « -à chacun son mensonge. » le sien était tout de même bien plus gros. Elle était loin des vacances de rêves aux côtés d’un amant ardant. Peut être que la retraite spirituelle collait plus avec tous ses silences. Un hochement de tête en comprenant que sa famille ne savait pas où ils pouvaient se trouver. June préféra revenir sur la nièce de Tobias plutôt que de s’imaginer devoir annoncer sa mort à sa famille.

« -ils sont tous comme ça les gosses maintenant ! » commenta June en espérant vraiment qu’il allait laisser tomber l’idée de lui apprendre à nager. « -ah donc vous allez pas changer d’idée… ça vous tiens vraiment à coeur de me voir encore une fois ridicule c’est ça ? » tout en avançant avec lui, elle serra e plus en plus fort ses doigts entre les siens. June leva les yeux sur Tobias lorsqu’il évoqua à son tour la maison qu’elle avait acheter, et préféra seulement lui adresser un petit sourire. Ils ne partageaient pas la même vision de l’avenir. Elle s’en était rendue compte la veille, et ne préférait pas évoquer cela à nouveau. Plus elle avançait, moins elle parlait et plus elle retenait sin souffle. Encore heureux que l’eau était chaude ! « -je préférerais même que vous me lâchiez pas ! » répliqua June en levant vers lui un regard qui révélait vraiment son angoisse d’arriver dans la partie ou elle n’avait pas pieds. Alors qu’il se rapproche et qu’il posait sa main sur son ventre, June ajouta : « -je vous interdit de vous foutre de moi ! » en enfonçant son index dans le torse de Tobias.

Elle hésita un moment avant de s’allonger. Mais elle finit par le faire. « -vous appelez ça un cours ?! » ironisa June lorsqu’il lui dit de nager ! « -moi je sais faire que la nage du petit chien ! » ajouta la jeune femme qui savait d’avance qu’elle ne devait pas ressembler à grand-chose. « -non non non non ! Me lâchez pas ! » paniqua t elle alors qu’il venait de retirer sa main. Elle fit rapidement demi tour et reposa les pieds au sol, dans un soupire de soulagement qu’elle ait encore pieds. « -je vais rester par là si ça vous ennuis pas. De toute façon, la cascade voilà… on est pas dans une pub pour un gel douche ! » elle le dépassa de deux pas, et répondre : « -heu… je dois avoir un oncle et une tante genre au Texas… Un cousin aussi je crois. Ma mère avait une sœur… De ce que je souviens, j’ai pas vraiment envie de les revoir. Les cowboys… c’est pas trop mon truc. » une petite grimace pour conclure cette phrase en relevant son regard sur son protecteur. « -vous vous sentez jamais seul ? » demanda t elle en s’enfonçant jusqu’aux épaules dans l’eau, simplement parce qu’elle avait un peu froid.

« Ne pas savoir que vous êtes en danger, n’empêche pas le fait de l’être malgré tout » et elle était bel et bien en danger lorsqu’il était venu chez elle, quatre ans après leur dernière rencontre, pour la conduire jusqu’à cet endroit reculé. En réalité, il n’avait pas sorti cette excuse de demoiselle en détresse, optant pour quelque chose de plus évasif, qui lui laissait le champ libre en cas de complications. Un petit rire pour Tobias quand elle expliqua son mensonge « Nous en sommes bien loin » que ça soit du fiévreux amant ou des vacances de folies. Même si ça pouvait être considéré comme des vacances de folies que de se faire poursuivre par un tueur à gage dans tout le pays. Mais il se doutait bien que ce n’était pas vraiment comme cela qu’elle aurait pu voir ses vacances en Thaïlande… Ils en vinrent à parler de sa famille, et de sa nièce tout particulièrement. Un sourire tendre sur ses lèvres en repensant à l’enfant « Oui » et décida de revenir sur les cours de natation « Non, ce qui me tient à cœur, c’est que vous puissiez profiter de cette plage face à chez vous en rentrant » parce qu’il comptait bien la ramener chez elle, de gré ou de force. Toutefois, il n’allait pas revenir sur le sujet. Ils n’avaient pas la même perception de la situation et de son issue…

Avant de poser ses mains sur son corps, Tobias lui demanda s’il pouvait et sourit en acquiesçant. Il n’allait pas la lâcher. Enfin, pas tout de suite. « Arrêtez de croire que je vais me moquer de vous à chaque fois » et posa ses mains sur sa peau, l’aidant à nager « Oui » et sourit « Il faut faire la grenouille ». Bon, il la taquinait un peu, mais c’était gentil. Il décida que c’était le bon moment pour la laisser se débrouiller « Concentrez-vous » alors qu’il retira ses mains de son corps. Elle fit rapidement demi-tour pour le rejoindre. Tobias esquissa un sourire pour seule réponse, et décida de s’intéresser à elle, à sa famille « Vous n’avez jamais tenté de les contacter ? » et resta interdit devant sa question pendant quelques secondes, son regard ancré dans le sien. Est-ce qu’il se sentait seul parfois ?!
« Je… » il esquissa un sourire mal à l’aise, baissa la tête, puis la releva pour regarder June de nouveau « Il y a des moments où je me sens seul, mais c’est la vie que j’ai décidé de mener. J’ai fait des choix qui m’ont naturellement conduit à cette solitude… » et ajouta « Oui, et encore plus depuis que vous êtes là ». Quelques secondes de silence à l’observer avant de reprendre « Parce que je sais que quand tout sera terminé, vous reprendrez votre vie et moi la mienne, et c’est à cette pensée que ma solitude me pèse le plus. Je me suis habitué à vous, à votre humour et votre présence… Et ça allège un peu mon quotidien ». Il pencha légèrement la tête sans bouger pour autant. Il craignait que ces révélations ne la mette mal à l’aise…