« Je ne voulais pas risquer de gâcher une seule minute qu’on aurait ensemble. » qu’il avait conclut en rejetant l’idée de se rendre dans un magasin. Faire semblant de n’être que de simples amis en s’aventurant dans une boutique ? Hors de question. Nate avait réfléchit pour être certain de passer tout son temps disponible en tête à tête avec Matt dans l’intimité la plus totale. Ce week-end passerait déjà suffisamment vite. Il voulait se l’accaparer tout entier. Les explications de Matt firent du bien à Nate. Il comprenait ce qui s’était passé et ça n’avait à priori rien à voir avec lui. Tant mieux. Ça le soulageait. Ce qu’il ressentait était réciproque et c’était bien tout ce qui comptait pour le moment. Et puis Matt lui confia ses propres peurs, Nate secoua vigoureusement la tête. Jamais de la vie. Il avait eu tellement hâte de s’échapper de son foyer auquel il se sentait déjà enchainé. « Non. Crois-moi… Non. » qu’il avait simplement dit en pensant au vide abyssal que Matt avait laissé dans sa vie et que rien ne pourrait combler. Aucune prime au travail, aucune partie de jambes en l’air avec sa femme, aucun bébé ne saurait le consoler de ça. Nate vivait une sorte de perpétuel chagrin d’amour. Son seul salut, c’était de retrouver la chaleur des bras de son amant. Nate s’occupait comme il pouvait pour se divertir entre le boulot, le sport… Et quand ça prenait vraiment trop de place, il noyait ça dans l’alcool. Tout ça, il ne le disait pas à Matt. Pourquoi faire ? Il était le seul responsable du fiasco de sa vie, du mensonge qu’il devait générer chaque jour que Dieu faisait. « Je l’appréciais Alison. Je l’aimais pas… mais je l’appréciais. » Un peu comme une amie, l’hypocrisie et les mensonges en plus. « Mais plus le temps passe… moins je l’apprécie. Des fois, juste le son de sa voix suffit à me taper sur le système et… » Et je bois. Des mots qui étaient restés coincés dans la gorge de Nate. Il ne savait pas vraiment si c’était elle qui était devenue moins agréable ou si c’était lui qui s’était fait plus aigri. Quoi qu’il en soit, ça ne promettait rien de bon pour le futur. Ça ne faisait que trois mois qu’ils étaient mariés. C’était beaucoup trop tôt pour être lassé l’un de l’autre. « Si déjà j’arrive pas à aimer sa mère, j’espère au moins que j’aimerais cet enfant. » C’était sans doute parce que Matt était le seul au courant de ses problématiques qu’il se confiait de cette façon. Ça ne l’empêcha pas de regretter presque aussitôt. Il soupira. « Je suis désolé. Je devrais pas te parler de ça. C’était débile. » Et il tenta de sourire pour dissiper ce moment incroyablement gênant.
 

- Non non ce n'est pas débile...

C'était juste incroyablement douloureux de l'entendre parler comme ça. Je tentais de faire comme si tout ça n'existait pas, comme si il n'y avait pas une femme qui l'attendait chez Nate. Et quand je pensais à lui, parce que je pensais à lui chaque putain de jour, je faisais tout pour ne pas l'imaginer enlaçant ou embrassant sa femme. Ca faisait mal... horriblement mal que de penser à tout ça. Ce n'était pas bien que de lui souhaiter de passer le rester de sa vie seul comme moi. Je savais que ce n'était pas fait pour tout le monde. Nate avait toujours rêvé d'avoir une famille et ce n'était pas avec moi qu'il aurait réussi à en avoir une. Mais ça faisait quand même mal, horriblement mal que de savoir qu'il avait une femme et bientôt un enfant.

- Tu as besoin de vider ton sac je comprends. On ne peut pas parler de tout ça à nos proches.

Ma soeur m'avait encore pris la tête pour que je me trouve quelqu'un. Je ne devais pas rester enfermé dans cette ferme avec seulement notre père pour compagnie. Et ce n'était pas la meilleure compagnie du monde. Mais je ne pouvais pas lui dire. J'avais quelqu'un, une personne à qui je tenais plus que tout. J'aurais aimé pouvoir passer ma vie avec cette personne, vivre avec, reprendre la ferme à ses côtés et en faire quelque chose de bien. Une personne dont le sourire hantait mes rêves. Une personne à cause de qui mon coeur saignait parce que je ne pouvais pas être à ses côtés. Mais ça je ne pouvais pas le lui dire, parce que cette personne était un homme et qu'elle ne comprendrait pas. Elle me jugerait, couperait peut être les ponts avec moi parce que j'étais un détraqué. Elle le dirait même sûrement à mon père et là... Alors je ne disais rien. J'esquivais le sujet, expliquant que j'étais bien et que je n'avais pas besoin de plus.

Je soupirais avant de passer le reste du trajet en silence. Je l'orientais finalement vers un petit chemin coupant à travers la forêt. Au bout de plusieurs minutes on arriva devant la maison. Je descendis avec mon sac et allais ouvrir la porte. Une pièce à vivre où se trouvait la cuisine, une table et un coin salon. Sur un mur se trouvaient deux portes, la salle de bain et la chambre. Il y avait une petite terrasse à l'arrière de la maison, donnant sur le lac. On y trouvait même un barbecue. On pourrait se faire des grillades, profiter de la nuit.

- Voilà... c'est pas le grand luxe mais c'est plutôt confortable et surtout c'est loin de tout.

Et de tout le monde...

Une douce chaleur se diffusa dans les entrailles de Nate quand Matt lui dit que ce n’était pas débile. Il se sentait compris. Pour la première fois depuis des mois. Un sourire sincère, bien qu’un peu triste, avait étiré ses lèvres. Ça faisait un bien fou. Il avait soupiré une nouvelle fois, de soulagement cette fois. « Merci. » qu’il avait prononcé, véritablement reconnaissant d’avoir une oreille attentive. Nate avait plutôt l’habitude de faire parler les autres en temps normal. Il leur posait des questions, il faisait la conversation. C’était le meilleur moyen pour éviter d’attirer trop la curiosité le concernant. Faire parler les autres, ça l’évitait de le faire parler de trop. « Et toi, tu… » Il jeta un regard en biais vers Matt. Les kilomètres défilaient, le paysage changeait mais Nate n’en avait que faire. Il n’était là que pour Matt. « Ça va ? » qu’il avait demandé, soucieux. Nate aimerait tellement savoir Matt heureux… mais ça lui paraissait fort peu probable. Est-ce qu’il était aussi malheureux que lui ? Est-ce qu’il gérait mieux leurs séparations ? Il y avait tant de choses qu’ils ne se disaient pas au final, tant de silence entre eux. Mais ça avait toujours été ainsi. Nate s’était habitué aux silences de Matt et il avait appris à l’aimer en l’observant être plutôt qu’en l’interrogeant. L’heure s’était écoulé et ils étaient arrivés à destination. C’était charmant. Vraiment mignon. Ça dépaysait Nate qui ne voyait plus rien de la nature depuis qu’il avait emménagé dans un appartement en ville. Ah, si Matt savait… Il ne valait sans doute pas mieux à ses yeux que ses beaux-frères. Nate attrapa ses affaires qu’il débarrassa dans la maison, ses yeux parcourant la maisonnée avec curiosité. Ils seraient bien ici. Seuls. « C’est parfait. » que Nate avait murmuré, plongeant son regard dans celui de Matt. Il avait passé de longues secondes à l’observer en silence. Lui, l’objet de tous ses désirs et, paradoxalement, de toutes ses tourmentes. Attiré comme un aimant, il avait franchi les quelques mètres qui les séparaient pour venir emprisonner ses lèvres d’un baiser tendre. Qu’est-ce qu’il lui avait manqué… « C’est parfait. » qu’il avait répété en quittant ses lèvres pour venir se poster devant une des fenêtres de la maison. « De la forêt d’un côté… Et l’eau de l’autre. C’est un endroit comme ça que je devrais trouver. » Car, soudainement, l’idée d’une maison secondaire le traversa. Un lieu pour eux deux, à l’abri du regard des autres. Il lui faudrait faire quelques économies mais ça voudrait le coup.
 

Je le sentis fondre sur moi, venant prendre mes lèvres. J'en avais eu tellement envie... Cette heure en voiture avait été un supplice beaucoup trop long pour moi. Sentir sa main sur ma cuisse et ne pas avoir le droit de faire plus.. c'était aussi bon que frustrant. Je revivais. Je ne me sentais heureux et vivant que lorsque j'étais dans ses bras.

Puis bien trop vite il se recula, allant contempler la fenêtre, parlant de ses envies de s'acheter une maison du même genre, sûrement pour y venir en week end avec sa femme et leur enfant. Et la réalité me rattrapa bien vite. J'avais esquivé sa question dans la voiture, son ça va, me contentant de hausser vaguement les épaules. Non ça n'allait pas. J'étais à nouveau criblé de dettes. J'allais devoir prendre un boulot en plus de la ferme pour qu'on puisse s'en sortir. Mon père était plus exécrable que jamais. Mes soeurs vivaient leur vie sans se soucier de savoir comment il allait, sans s'occuper de lui. Nous étions seuls dans notre merde. Et je n'avais pas Nate... Chaque jour je me levais, je faisais face à un nouveau problème, sans que cette douleur lancinante ne me quitte. Alors non ça n'allait pas...

Je m'approchais de lui venant l'enlacer par derrière. Je déposais un baiser sur son épaule avant de poser ma tête dessus. Je le serrais contre moi, fermant les yeux en écoutant sa respiration.

- Tu m'as manqué...

C'était la vérité, toute simple et si cruelle. Il me manquait à chaque instant de la journée. Il n'y avait que contre lui que je me sentais bien. Je passais mes mains sous son tee shirt, allant caresser doucement son ventre.

Je ne voulais plus penser à tout ce qui allait de travers dans ma vie. Je ne voulais plus l'entendre parler de sa femme ou des projets qu'il faisait pour eux deux. La petite maison qu'ils achèteraient sûrement pour élever leur enfant, la maison secondaire peut être pour venir se détendre le week end. La gentille petite vie bien rangée, celle qu'avait mes soeurs aussi. Je ne voulais pas entendre parler de ça. Ca faisait beaucoup trop mal. Je voulais juste profiter de lui.

Si Nate trouvait un endroit comme cela, Matt n’aurait pas besoin de faire des pieds et des mains pour avoir cette maison-là. Ou une autre. Ou un hôtel sordide. Quelque part, c’est tout ce que Nate désirait : un endroit pour eux deux. C’était sans doute une autre rêverie de plus de la part du jeune homme mais c’était encore en lui. Il n’en parlerait pas pour ne pas froisser Matt mais… Il y croyait encore. Il y croyait encore plus quand il sentait son corps contre le sien. Il avait senti ses bras l’enlacer et, tout à coup, il avait l’impression que le poids du monde quittait ses épaules. Il avait poussé un petit grognement de plaisir, preuve manifeste de son bien-être. Il avait fermé les yeux aussi, oubliant momentanément son histoire de maison secondaire. Il lui avait manqué. C’est ce qu’il lui disait. Qu’est-ce que c’était réciproque… Le coeur de Nate se serra. Il lui avait manqué aussi… Et il lui manquerait encore. Ce n’était pas la fin, ce n’était qu’une trêve dans cette douleur de tous les jours. « Tu m’as manqué aussi... Terriblement manqué. » qu’il avait soufflé en se laissant emporter par ses caresses sur son ventre. C’était bon, et ça avait eu le don d’éveiller tous ses sens. Le désir l’électrisa. Il attrapa une des mains de Matt sur son ventre pour faire volte-face. Ses lèvres vinrent retrouver les siennes mais il n’y avait plus de tendresse dans ce geste, rien qu’un désir fougueux. Il se pressa contre lui, l’attrapant par le bas du dos pour mieux l’attirer à lui. Ça faisait beaucoup trop longtemps. Entre deux baisers, son t-shirt vola plus loin dans la pièce suivi de près par celui de Matt. Nate n’était que désir pour cet homme qui ne serait jamais le sien. Alison, le bébé, son boulot, tout paraissait bien loin. Est-ce que Matt, lui aussi, était transporté loin de ses problèmes ? Nate avait deviné à son silence qu’il n’allait pas forcément très bien mais il n’avait pas voulu forcé les confidences. Tirer les vers du nez de Matt, ce n’était pas toujours très judicieux. Nate l’avait appris à ses dépends et, à vrai dire, il n’avait aucune envie de le contrarier de peur de devoir se passer de lui. Il avait beaucoup trop attendu ce week-end pour faire une croix dessus maintenant.
 

Il s'était retourné, m'embrassant, me serrant contre lui. Les vêtements n'avaient pas tardé à voler dans la pièce. J'avais attendu ce moment depuis tellement longtemps... Je ne savais pas si on allait beaucoup quitter la chambre du week end. Je quittais ses lèvres juste le temps de le prendre par la main et de l'attirer avec moi dans la chambre. Je me laissais tomber dans le lit, le faisant tomber sur moi. J'inversais rapidement nos positions pour venir me mettre sur lui et l'embrassais avec envie. Mes lèvres ne tardèrent pas à descendre, embrassant son torse. Je terminais de le déshabiller avant de le faire mien complètement. Ce n'était que trois mois cette fois mais ça m'avait semblé durer une éternité. Comment est ce que je tiendrais la prochaine fois? Est ce que je devrais attendre plusieurs mois à nouveau avant qu'elle n'accepte de me prêter la maison? Et est ce qu'elle accepterait de le faire? Et si ça n'arrivait plus jamais? Si il se retrouvait coincé avec sa femme et son gosse à la maison?

Toutes ces questions ne cessaient de tourner dans ma tête alors que nous étions allongés tous les deux, mes jambes entremêlées aux siennes, ma main caressant doucement son torse. Je n'avais pas envie d'en parler. Je ne voulais pas évoquer les sujets qui fâchent, pas maintenant, pas de tout le week end même.

- Tu as prévu quoi pour le diner? Je me disais qu'on pourrait faire griller un peu de viande sur le barbecue de la terrasse si tu en as pris. Ou alors on pourrait vraiment pêcher.

Je ris doucement. C'était l'excuse qu'on avait donné tous les deux. Mais je ne comptais absolument pas perdre une seconde du temps que je pouvais passer avec lui pour faire quelque chose comme pêcher.

Je me redressais un peu pour le regarder dans les yeux et l'embrasser doucement.

- Ou on pourrait plutôt aller se baigner dans le lac. L'eau doit être gêlé mais ça me rappellerait des souvenirs. De certains jours où nous allions plonger ensemble dans le petit lac après une journée épuisante de boulot à la ferme.

Les meilleurs moments de ma vie. J'aurais voulu qu'ils ne s'arrêtent jamais, qu'on puisse vivre ainsi pour toujours...

Matt l’entraina dans la chambre et ce qu’il se passa ensuite fut la suite logique du désir qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Et ce serait toujours comme ça. Ils se verraient, toujours trop furtivement, se sauteraient dessus et auraient à peine le temps de dire ouf que leur temps ensemble serait écoulé. S’ils pouvaient avoir une vie normale… Ils pourraient passer des moments simples tous les deux. Mais leur situation rendait le besoin de se retrouver à l’horizontal urgent et ce n’était pas près de s’arranger. Nate récupérait son souffle. Il caressait distraitement les cheveux de Matt, sa tête était toute occupée à rêver. C’était le problème quand il le voyait… Il se remettait à espérer. Tout lui paraissait de nouveau possible. Le coeur gonflé d’espoir, un sourire pointait sur ses lèvres. Le même sourire qui se faisait de plus en plus rare quand il rentrait chez lui. « Oh, je jure sur Dieu que je ne compte pas approcher ma ligne une seule fois de l’eau ! » qu’il s’était exclamé en rigolant. La canne à pêche flambant neuve qu’il avait du acheter pour l’occasion resterait tranquillement dans son pick-up. Elle ne lui servait que d’alibi, jamais de la vie il avait envisagé sérieusement de pêcher. Matt lui offrit un baiser doux que Nate lui avait rendu, leur complicité était restée intacte malgré les années et les obstacles qui se dressaient entre eux. « C’était bien… Avant, je veux dire. C’était plus simple. » Nate se mordit la lèvre, il ne voulait pas gâcher l’ambiance mais il ne pouvait pas ignorer non plus la mélancolie que les souvenirs de cet été à la ferme provoquaient chez lui. « Ça me plairait beaucoup, oui. Et puis on fera griller de la viande ensuite. L’eau froide va nous ouvrir l’appétit, c’est sûr. » Et avant de se lever pour mettre leur projet à exécution, Nate était revenu sur un sujet que Matt avait éludé plus tôt. « Tu m’as pas dit ce que t’en pensais… Si je trouvais un endroit comme ça à acheter. » Nate parlait à voix basse, comme s’il avait peur de ce qu’il disait lui-même. En vérité, il avait surtout peur d’être rejeté. « Pour nous. » qu’il avait rajouté d’une voix plus claire cette fois. « Nous ». C’était un peu douloureux à dire, pourtant, il existait bien un « nous ». C’était bancal mais ça existait.
 

Je ris à sa remarque sur la pêche. J'avais pris la vieille canne de mon père, non sans qu'il me sermonne je ne sais combien de fois pour éviter que je ne l'abime. Si il savait que sa précieuse canne n'allait pas toucher une seule fois du week end... c'était pour faire tout autre chose que je m'étais enfui. Je me foutais un peu de la pêche et des poissons. Je voulais juste l'homme qui se trouvait dans mon lit.

Je fronçais les sourcils en l'entendant remettre sur le tapis son histoire de maison à lui. Je n'avais aucune envie de l'entendre parler de ses projets de maison secondaire avec sa femme. Et surtout pas maintenant alors que nous venions de coucher ensemble. Je m'étais dit que je voulais éviter tous les sujets qui fâchaient et celui ci était précisément l'un d'entre eux. Je ne voulais pas remuer toute cette merde, penser à sa femme et à sa vie de famille, et j'aurais aimé qu'il ait les mêmes scrupules.

Mais il continua, parlant de sa maison comme de quelque chose qu'il ferait pour nous. Je me rallongeais, blotti contre lui, la tête sur sa poitrine, regardant dans le vide alors que je réfléchissais. Une maison rien que pour nous, loin de tout et de tout le monde, j'avouais que l'idée était séduisante. Nous pourrions venir quand nous en aurions envie. Je ne serais pas obligé de supplier ma soeur pour me prêter sa maison. Un endroit rien que pour nous, comme je n'avais jamais osé en rêver. Mais il y avait un problème, je n'en avais pas les moyens. Nous avions à peine de quoi vivre au quotidien. Les factures arrivaient et je n'avais rien pour les régler. J'allais devoir bosser encore plus rien que pour pouvoir payer nos factures et qu'on ne se retrouve pas à la rue avec la maison saisie. Alors acheter une maison comme celle ci... non c'était impensable.

- Ca serait bien... mais je n'ai pas les moyens.

Nous n'avions plus du tout le même train de vie lui et moi. Il avait réussi et je ne lui en voulais pas pour ça. Au contraire, j'étais même fier de lui. Mais ce n'était pas mon cas. Et je refusais qu'il me fasse la charité.

- Et je ne veux pas que tu achètes seul une maison pour nous deux, pour qu'on puisse venir baiser de temps en temps. Je suis pas... je ne suis pas ce genre de personne.

Je n'étais pas une pute.

Matt avait mis du temps à répondre quand Nate avait remis sur le tapis son idée de maison secondaire. Il pressentait que ça n’augurait rien de bon. Est-ce qu’il rêvait encore une fois trop fort aux yeux de Matt ? Il s’était pincé les lèvres, tout en faisant rouler les muscles de son dos sous la pulpe de ses doigts. Il avait d’abord parlé de ses moyens. Ou plutôt de son manque de moyens. Avant même que Nate eut le temps de rétorquer quoi que ce soit, Matt le coupa dans son élan pour dire qu’il ne voulait pas qu’il achète seul. La mine jusqu’alors enjouée de Nate se renfrogna, il arborait maintenant une moue boudeuse. « Je serai venu ce week-end même si on s’était pas envoyé en l’air. » qu’il avait tranché en le serrant contre lui. Si seulement ce n’était qu’une histoire de sexe… Tout serait bien plus simple. Mais c’était plus profond que ça et c’était bien là tout le problème. « Je suis pas là pour ça. Enfin, je veux dire… Pas que. » qu’il nuança ensuite en enfouissant sa tête dans ses cheveux. Sa tendresse parlait pour lui : il n’était pas seulement animé par ce qu’il avait entre les jambes. « Mais je comprends. » C’était tout relatif. Nate aurait eu envie d’argumenter pour convaincre son amant mais il savait le terrain bien trop glissant pour se le permettre. Un seul mot de travers et ils perdraient de précieux moments de quiétude passés dans les bras l’un de l’autre. Il préféra donc clore la discussion là, ce serait trop cher payé. Sans compter que Matt était plutôt du genre têtu et qu’il y avait que très peu de chances qu’il ait gain de cause. « Bon alors, on va se baigner ?! » qu’il lança en retrouvant son sourire. Il avait soulevé Matt de sa poitrine pour se lever d’un bond. Comme un gosse, il s’était éloigné en courant pour rejoindre le lac dans lequel il avait plongé non pas sans une certaine appréhension. Passer de le chaleur des bras de Matt à la température glaciale du lac était plus que revigorant, Nate avait laissé échapper un juron en sortant la tête de l’eau. « C’est affreux ! » qu’il avait crié pour prévenir Matt qui était en chemin. Mais c’était drôle et même si le froid lui mordait la peau, Nate s’était mis à rire à gorge déployée. C’était ça, le bonheur. Une certaine forme d’insouciance l’habitait et ça lui faisait un bien fou.
 

Non on n'était pas là que pour baiser. Mais le manque de l'autre était tellement fort, on passait tellement de temps sans se voir, que c'était plus fort que nous à chaque fois qu'on se voyait. J'avais besoin de le retrouver, de le sentir contre moi, de l'embrasser. Puis la passion finissait par reprendre le dessus et nous finissions au lit. Ce n'était pas tout le temps comme ça quand on avait travaillé ensemble cet été là. Il nous arrivait de juste passer la soirée à se caliner devant la cheminée. Mais à cette époque là nous avions tout notre temps ensemble, nous passions nos journées côte à côte. Et même si ce n'était qu'un léger effleurement par moment, nous pouvions être ensemble. Ce n'était plus le cas désormais. Après ce petit week end il se passerait sûrement des mois voir des années avant qu'on puisse être ensemble à nouveau.

Mais je tentais de ne pas penser à ça pour le moment, à tous les regrets que j'avais, à cette vie que nous ne pourrions jamais vivre. Ca ne servait à rien de se torturer. Je voulais juste profiter de ce moment avec lui.

Je finis par le suivre dans l'eau. Je rentrais un peu plus doucement que lui dans l'eau. Je ne tardais pas à sentir la morsure du froid sur ma peau. Je me tendis poussant un juron en entrant. Je ne tardais pas à le rejoindre avant de l'éclabousser gentiment. Puis je craquais. J'allais le prendre à nouveau dans mes bras pour l'embrasser. Je n'allais pas pouvoir me passer de lui ainsi.

On resta un moment dans l'eau, à jouer dans l'eau, à s'embrasser surtout. Puis quand on fut trop gelé on quitta le lac pour aller se sécher et s'habiller. On avait rapidement retrouvé notre routine. Il avait préparé le repas pendant que j'avais allumé la cheminée à l'intérieure et le barbecue. Je l'avais regardé faire en souriant, venant me coller contre son dos et regardant par dessus son épaule ce qu'il faisait.

On s'était installé à table pour savourer la viande qu'il nous avait préparé. Le soleil commençait à se coucher. J'avais allumé les lampes de la terrasse pour que nous puissions manger dehors.

- Parle moi un peu plus de toi. Ton enfance, ton adolescence. A quel âge tu as eu ta première copine? Je suis sur que tu étais tout timide non?

Je voulais parler de tout sauf de ce qui nous contrariait. Et je voulais l'entendre parler. Le son de sa voix, le voir sourire, tout ça me manquait beaucoup trop.