L’explication ne lui convient pas. Shuito hausse les épaules, l’air de dire “tant pis si vous ne me croyez pas”. Elle l’accuse de ne pas lui avoir parlé, ni même regarder. Il ricane.

”Je ne lui ai pas vraiment pas parlé, en effet, par contre je l’ai bien regardée...”

Il l’a carrément vu nue... La louve est particulièrement belle, il le reconnait volontiers, mais cela n’enlève en rien la beauté des autres femmes, dont celle qui lui fait face.

”Et c’est marrant mais, pour elle, vous êtes la plus belle femme du monde.”  

Il prend un air peu plus sérieux et évite sans peine le burger moisi qu’elle lui envoie à la figure en le menaçant. Il soupire avant de répondre, l’air las. Dire qu’il ne peut même pas s’amusez vraiment avec elle...

”Le manoir est la maison de mon... maitre... Et comme je vous l’ai dit, je suis ici parce que Shira a demandé qu’on vous prévienne. Elle est libre de partir quand elle veut, on lui a juste offert le gite et le couvert en compensation de... du fait que je l’ai emmenée...”

Il ne peut décemment pas parler du fait que son maitre soit en fait un roi vampire et qu’il a enlevé la louve pour lui offrir en cadeau. Un cadeau manqué qui va lui couter cher, il le sent...

Kuro sait punir quand il le veut...

Avisant l’ordure que tiens la jeune femme, Shuito pince les lèvres.

”Je vous préviens, je ne suis pas sensé vous faire de mal, mais balancé moi encore une ordure à la figure et je risque bien de trouver une faille à la règle...”

Il ne la blessera pas, non, mais il ne compte pas se laisser faire non plus, et ce certainement pas par une humaine...

Shira ressent un terrible frisson dans l’échine. La manière dont il dit l’avoir regardé ne lui plait pas. Cela ne lui plait pas du tout. Elle déteste l’idée que l’homme puisse l’avoir vue nue et sans la payer. Parce que tant qu’elle n’aura pas à nouveau Shira entre ses bras, elle ne croira pas que l’homme puisse être honnête d’une quelconque manière que ce soit. Cependant elle cille quand l’homme avoue que Shira considère qu’elle est elle-même la plus belle femme du monde.

- Bon. Là, j’ai moins de mal à vous croire, précise-t-elle en pinçant les lèvres.

Shira est clairement le genre à dire à tout le monde qu’elle est la plus belle femme du monde. Et la plus douce. Et la plus incroyable. Et la… etc. Shira serait le genre à dire que Sakura mérite le monde et le soleil quand la femme pense ne méritait que les noirceurs. Sakura s’est laissé faire, elle s’est faite abandonné, elle s’est fait trahir. Pourtant, cette adorable brune croit qu’elle mérite toutes les bonnes choses du monde. Alors, oui, cette phrase lui permet de croire l’homme, un peu. Sauf qu’il continue de parler, et elle rigole jaune.

- Un manoir, un maître ? Merde, vous avez envoyé cette adorable enfant dans un donjon BDSM ? Vous êtes sérieux là ? Elle est si adorable que si elle voit une personne triste, elle va vouloir l’aider !

Non, mais… C’est n’importe quoi ! Shira ne peut pas supporter la douleur. Et elle pleure quand elle a besoin de faire du mal aux autres dans le cadre de leur travail. Emmener un ange là-bas, c’est comme vouloir mettre un agneau dans une fosse au loup affamé ! En plus, si quelqu’un semble triste, elle va vouloir l’aider pour lui apprendre la douceur et le sourire. Et bien sûr qu’elle restera de son plein gré. Alors qu’elle arme son bras pour le lancer, l’homme disparait dans un battement d’aile, et apparait derrière elle. Il lui attrape son bras. Sa main entourant son poignet avec facilité, mais ce n’est pas ce qui surpris Sakura et la fit hurler mais le froid.

- Bon Dieu ! s’exclame-t-elle malgré elle, mais vous êtes frigorifié !

Elle lui attrape les doigts et passe ses deux mains sous sa veste pour frictionner sa peau, avec le plus de contact possible. Merde. Il lui fait peur. Elle a vraiment peur de cet homme qui est capable de venir en un clignement d’œil… mais elle ne peut pas s’empêcher de sentir le froid de son corps. Sakura a déjà eu froid. Elle a déjà eu froid jusqu’à avoir l’impression de ne plus sentir ses membres, sa langue ou même son esprit. Elle n’aime pas voir quelqu’un dans le besoin, à l’image de Shira, mais encore moins avoir froid.

- Mais ! Est-ce que vous aimez souffrir à ce point ? Vous allez attraper la mort et ensuite j’aurais votre mort sur la conscience !

Elle souffle sur une mèche de cheveux devant son visage.

- Je vous paie le Mcdo et vous allez me dire exactement où est Shira que je puisse aller la sortir des griffes sordides de votre « maître », même s’il ne faut pas croire, Shira tape si elle souffre… C’est son cœur qui est souvent oublié.

Et elle garde la main de l’homme dans la sienne, pour le réchauffer… mais aussi pour ne pas le laisser partir. Et ça se voit à son sourire et son sourcil qui se relève. Elle se sent très fière de l’avoir attraper… Héhé.

La jeune humaine semble un peu moins dubitative lorsque Shuito lui fait part des dires de Shira la concernant. Bon, au moins, ils avancent... Jusqu’à ce qu’il parle du manoir et de Kuro. Et la réaction de la blonde fait exploser de rire le vampire. Un donjon BDSM... Certaines pratiques qui se déroulent dans l’intimité de certaines chambres pourraient laisser croire à du BDSM en effet, mais ce n’est pas le but principal de la maison mère, loin de là... En fait, c’est même minoritaire, vu le peu de pratiquants de la chose...

Shuito se reprend tant bien que mal, répondant entre deux rires.

”J’aimerais bien, mais non, il ne s’agit pas de ça...”

Il se calme aussitôt en voyant la jeune femme préparer un nouveau lancé. Il se déplace derrière elle dans un souffle et lui attrape alors le bras pour stopper son geste. Elle hurle de surprise, mais avant que Shuito n’ait eu le temps de dire quoi que ce soit, elle se retourne vers lui en s’exclamant qu’il est frigorifié. Saisi, le vampire ne réagit pas tout de suite alors qu’elle tente de le réchauffé en lui frictionnant les poignets sous sa veste. Elle lui fait quoi là ?!

Se reprenant, plutôt que de s’éloigner, il affiche un petit sourire et se laisse faire. Kuro lui a demandé de ne rien lui faire, mais si c’est elle qui agit, ça ne compte pas, n’est-ce pas ?

”Disons que... j’ai le sang-froid.”  

Elle n’a pas chaud non plus, mais il est en effet plus glacé encore qu’elle.  

Sakura lui indique qu’elle lui offre le McDonald afin qu’ils puissent discuter au chaud, et le sourire du vampire se fige quelque peu avant de s’agrandir.

”Il est hors de question que je mange au... “McDo”... quant à savoir où est votre amie, je vous l’ai déjà dit. Et elle ne risque rien avec... Mori sama.”

Il n’aime pas l’appellation de “maître”, surtout vu la façon dont la jeune femme l’utilise et même si c’est lui qui a ainsi décrit Kuro. Il ne peut pas non plus l’appeler par son prénom devant elle. Ça sera donc plus simple d’utiliser son appellation générale...

Et quitte à devoir manger de la nourriture humaine, autant que ça soit quelque chose de bon...

Il observe un instant l’humaine avant de dégager sa main d’un coup sec et rapide, mais sans bouger d’un pas.

”Je peux vous payer le restaurant si vous avez faim, mais vous n’irez pas au manoir. Mori sama a déjà assez à faire avec Shira san.”

Vu la furie qu’elle semble être, le roi n’appréciera clairement pas qu’elle débarque au manoir... et surtout Shuito ne veut pas que son cadeau lui pose encore plus d’ennuis...

Il retient un soupire avant de continuer.

”Par contre il faudra vous changer, cette tenue à beau vous mettre en valeur elle ne sera pas des mieux vue pour le repas...”  

Il reste suspect. Voilà à quoi elle pense alors que sa main eut touché cette peau glacé. Même s’il semble en train de mourir de froid, il n’a pas encore les lèvres bleues. Les siennes le sont depuis longtemps, mais son rouge à lèvres, qu’elle a acheté grâce à une promotion, arrive à cacher cette erreur chromatique et peut tenir, quelque que soit l’utilisation de ses lèvres dans la nuit. C’est pratique.

Bref.

Elle observe l’homme et reste toujours dubitative de cette manière qu’il a de se moquer d’elle. Est-ce que rien n’était sérieux pour lui ? Est-ce qu’elle est un clown qui l’amuse ? Elle aimerait lui dire qu’elle fait payer tous les spectacles qu’elle donne, mais il enchaine sur une remarque sur son front.

- Deux jours, souffle-t-elle, certainement personnes peuvent souffrir pendant deux jours avant de réussir à se soigner, alors sang-froid ou pas il faut faire attention !

L’homme est-il comme Shira ? Incapable de prendre soin de lui et avec des difficultés à comprendre le monde qui l’entoure ? Si c’est bien le cas, ce qui semble être véridique, alors il doit y avoir un gros problème avec son amie. Sakura fronce les sourcils. En plus il ose critiquer ce qu’elle peut lui offrir ? Il se fiche d’elle ou quoi ? Il est de plus en plus suspect.

- Donc, tu refuses d’aller dans un lieu public que je connais, en me soutenant que mon amie va bien dans les mains d’un maître dont tu n’oses pas même pas dire le nom tel Voldemort dans Harry Potter, et tu penses que je vais te faire confiance comme ça ?

Elle rit un peu. Un rire cristallin, qui remonte le long de sa gorge alors qu’elle pose un regard rieur malgré la critique. Il est fou. Cet homme est complètement fou. Mon dieu. Elle pose sa main devant ses lèvres rouges et cache le sourire qui s’étend un peu plus. Elle tourne même la tête pour vérifier qu’on est pas en train de lui faire une caméra caché.

- Mon dieu. Dans quoi est-ce qu’elle est encore allé se fourrer cette douce amour ? souffle-t-elle.

Elle regarde l’homme encore. Noir sur noir. Il est suspect. Elle n’arrive pas à s’enlever l’idée qu’il est dangereux. Elle sent, au fond d’elle, qui pourrait lui arracher le cœur en un tour de main… mais elle est incapable de s’arrêter de rire en observant l’homme devant elle.

- On récapitule. Tu refuses que JE te paie un Mcdo, -d’ailleurs évite d’être aussi condescendant- parce que ce n’est pas assez bien pour toi… mais tu attends de moi, qui suis, on vient de le prouver, plus faible que toi, que je t’emmène chez moi pour que je puisse me changer, puis aller dans un lieu de ton choix, pour me dire qu’il est impossible pour moi de vérifier que ma meilleure amie se retrouve entre de bonne main ?

Elle réfléchit.

- D’accord. Viens avec moi. Puisque tu me proposes de manger à l’œil, je ne vais pas me priver. C’est d’ailleurs ce que j’ai toujours dis à Shira. Si elle peut grappiller de la bouffe ou de l’argent sans avoir à écarter les jambes, il faut qu’elle le fasse.

Elle est passée totalement à la familiarité avec lui. Pourquoi ? Parce que quand on a peur de quelque chose et qu’on s’inquiète, on oublie les règles de politesse. On dit toujours « Y a quelqu’un ? » quand on entend un son dans la maison… pas « Diantre, j’ai cru ouïr un bruit suspect », hein. Et comme le mec la fait flipper MAIS qu’elle a besoin de lui, il faut bien qu’elle trouve un moyen de le berner… Même si pour ça, elle doit refuser un repas… quoi que. Elle a un plan. Il faut que tout se passe bien. Et puis, elle a bien précisé qu’elle ne compte pas écarter les jambes pour ses beaux yeux étrangement fascinant. Elle lui attrape la main et lui montre le chemin jusqu’à la chambre qu’elle partage avec Shira. Une prostituée qui est aussi son amie, sort d’une chambre avant de sursauter face à la présence d’un homme dans l’immeuble.

- Sakura, souffle-t-elle en prenant un peu plus loin la jeune femme, il y a un homme qui te suit.
- Non, tu crois ? Elle lève les yeux au ciel. Je gère.
- Tu es sûre ?
- Je… ouais. Son « maître » tient Shira. Je dois en apprendre plus pour savoir si je le tabasse ou l’amène à la police.
- D’accord.

Elle part, non sans laisser un regard suspicieux vers Shuito. Sakura ne dit rien, elle entre en premier dans l’unique chambre qui sert de maison, demeure et foyer depuis qu’elle avait tout perdu. Il y a une bonne odeur de vanille dans la pièce, venu de tout ce qui touche à Sakura. Quand elle est ici, elle a l’habitude de se laver des saletés extérieures pour ne laisser que l’effluve de la plante. Elle attend que Shuito passe l’embrassure et elle lui passe une menotte sur son poignet, relié de l’autre à elle. Elle lui montre tout fière. Elle s’était déjà changée. Elle était toujours habillée de manière sexy. Elle portait une jupe un peu plus longue d’un tartan écossais qu’elle a troqué à une voisine contre une vieille perruque. Son croc top à manche longue aurait le mérite de la couvrir un peu plus, même si son ventre marqué se voit toujours d’un dégradé de bleu, marron et vert qui laisse comprendre sa dernière visite avec des poings.

- Maintenant que je t’ai attrapé, et que je ne te dirais pas la localisation de la clé avant de savoir tout ce que je veux savoir sur Tom Jedusor, on peut aller manger. J’ai hâte que tu trouve un moyen d’expliquer ça au restaurant !

Elle a un sourire ravi. Comme la première fois, elle a un sourire de parfait contentement. Elle tente. Elle n’a pas peur de mourir. Elle n’a pas peur de se faire battre. Elle a peur de lui, oui. Mais elle accepte de se faire meurtrir comme ça. Elle ne sait pas que les menottes étaient faites en alliage avec de l’argent, ce qui était une des kryptoniques des vampires. En gros, qu’elle est en train de l’affaiblir et que oui… une petite humaine vient de s’en faire exprès attraper un gros méchant vampire.

- Où comptes-tu m’amener, Croûtard ? J’ai des adresses de restaurants qui détourneraient les yeux de notre particularité, montre-t-elle leur main qui se lève en même temps. Je protège Shira, s’il le faut je ferais un échange d’otage.

Elle attrapa un grand plaid, qui fait aussi office de grosse écharpe, et avec le même motif que sa jupe avant de sourire. Au moins, ils pourront se réchauffer avec. S'il est gentil, elle lui prêtera un bout.

A la remarque du vampire sur son sang, l’humaine rétorque qu’il faut malgré tout faire attention. Il ne comprend pas trop cette histoire de jours et de soin, mais il ne pose pas de questions.  

Elle rétorque alors qu’elle ne voit aucune raison de lui faire confiance, mais au lieu de rire en affirmant qu’il ne lui a rien demandé de tel, il se rembruni à l’évocation de son roi.

”Je ne vous divulgue pas son prénom par respect pour lui ! Et croyez-moi, Voldemort n’est rien comparé à lui.”

Si Kuro est bien moins cruel que celui auquel la jeune femme le compare, il est tout de même, selon Shuito, bien plus dangereux.

Sakura rit, semblant peu convaincue par toute cette histoire. Elle récapitule la situation et, las, le vampire s’apprête à la planter là pendant qu’elle réfléchit. Sauf qu’elle finit par accepter la proposition d’aller au restaurant plutôt qu’au fast-food, lui enjoignant de la suivre. Le sourire de Shuito réapparait malgré lui sur ses lèvres. Cette jeune femme est aussi dérangée que son amie... et cela l’amuse.

Il se laisse donc guider jusque chez elle ; une chambre dans un immeuble exigu qui loge plusieurs autres prostituées. Là-bas, Sakura se fait interpellée par une de ses collègues et le vampire ne peut s’empêcher de sourire de plus bel en entendant leur échange. Elles se croient à l’abris de son ouïe sur développée, elles sont mignonnes...

Restant quelques pas derrière la blonde, il se stoppe lorsqu’elle ouvre la porte de sa chambre. L’odeur l’assaille. Elle n’est pas désagréable, loin de là, mais elle est... forte...

Lorsqu’il rentre enfin, il a un mouvement de recule alors que la jeune femme lui passe un bracelet de menotte au poignet. Il a aussitôt le réflexe de vouloir se dégager, mais le fer le brûle légèrement et il ne lui en faut pas plus pour comprendre que c’est de l’argent. Comment diable cette femme s’est-elle procurée des menottes en argent ?!

D’abord furieux, Shuito lui lance un regard noir, du genre qui ferait pisser un gros dur dans son froc. Mais elle est trop contente d’elle pour y faire attention. L’autre bracelet est accroché à son propre poignet, et le vampire la maudit pour avoir réussi à l’avoir. Sale petite humaine insignifiante... Si seulement Kuro n’avait pas demandé à ce qu’il ne lui arrive rien...

Serrant les poings, Shuito prend quelques secondes pour se calmer, écoutant la blonde d’une oreille distraite. Il fait le point sur la situation : il est menotté avec de l’argent à une prostituée bien trop insupportable pour son job mais qu’il n’a pas le droit de toucher... Il ne peut pas se libérer seul du bracelet, il ne peut pas boire son sang pour se donner un peu de force... il ne peut pas lui couper la main pour se libérer d’elle...

Il soupire puis reporte enfin son attention sur elle, jaugeant sa tenue d’un œil critique. Il remarque les marques de coups sur son ventre et se fait la réflexion qu’elle doit définitivement avoir la langue trop pendue pour ce métier... Mais il ne dit rien à ce sujet.

”Très bien...  Allons-y, Miss Granger.”  

Puisqu’elle veut jouer à Miss Détective Granger, il va rentrer dans son jeu et reprendre le contrôle des règles.

Il lui attrape la main afin que les menottes ne les ennuis pas trop et ils ressortent de l’immeuble, elle emmitouflée dans sa grosse écharpe et lui serrant ses doigts dans les siens comme s’ils étaient deux amoureux en sortie.

Il l’emmène en voiture dans un quartier plus animé. Elle a dû enjamber le pommeau de vitesse pour rejoindre son siège. Conduire menotter n’est pas facile, mais il se fiche bien de malmener son poignet. Elle l’a cherché...

Le quartier est chic et il y a ses habitudes. Il gare la voiture dans un parking couvert, fait ressortir la jeune femme du côté conducteur et, reprenant sa main, l’amène dans un restaurant où ils sont accueillis par nombre courbettes.

Contrairement à ce que pouvait penser l’humaine, personne ne dit rien sur les menottes. Ils n’oseraient pas... Mais Shuito, lui, compte bien le faire remarquer. Il lève leurs mains enlacées, et menottées donc, devant les yeux du serveur qui les accueille, souriant.

”Madame à voulut jouer les vilaines et a réussi à perdre la clé. Je me suis dit que prolonger un peu le jeu serait amusant avant d’essayer de nous libérer.”

Le serveur garde les yeux baissés et ne répond que par un “je vois” neutre et polis avant de leur montrer leur table. Shuito est aux anges malgré sa faiblesse. Il murmure alors à la jeune femme.

”N’essayer pas de jouer avec moi, car vous allez perdre...”

Il vient en effet de lui prouver sa “puissance”...

« Voldemort n’est rien comparé à lui », qu’il dit. Non mais… le mec, il veut qu’elle lui fasse confiance et lui sort une phrase pareille ? Il est au courant que Voldemort tue des gens pour asseoir sa domination magique… Bon, il perd contre un bébé, mais on n’en parle pas c’est pour le bien de l’histoire qu’Harry Potter arrive à survivre. N’empêche, il est pas un enfant de cœur et il n’hésite pas à manger des pauvres licornes pour pouvoir survivre… Et Shira, elle est plus mignonne qu’une licorne ! Sakura n’aime pas l’idée qu’il puisse lui faire du mal. Raison de plus pour l’attraper et lui faire cracher le morceau. Pour le moment, elle ne peut rien faire… mais son intuition, qu’elle a bonne la plupart du temps, lui souffle qu’elle peut prendre son temps et titiller un peu le mage noir, ou mange-mort ?, qui se trouve devant elle. Elle lui fait un sourire de conquérante, et le fait qu’il ne la frappe pas pour découper sa main et se libérer prouve qu’il a des ordres précis, comme il la sous-entendu. Elle le suit dans la voiture et elle sourit à chaque fois qu’elle sent l’agacement sur son jolie visage tout froid.

Quand il la dépose devant un restaurant et sort l’idée la plus impromptue pour expliquer leur situation, et si proche de la vérité, elle ne peut s’empêcher un éclat de rire qui fait tourner la tête de quelques personnes attablés. Au loin, elle remarque un client à elle, qui aime frapper les femmes et elle lui fait un petit sourire alors que l’homme se lève et prend très clairement la poudre d’escampette. Il est vrai que c’est assez rare que l’on mène une prostituée dans un lieu si huppé. Elle hume l’air et sent déjà les bonnes choses qu’elle pourrait manger. Elle garde la main dans la sienne et elle essaie de la réchauffer au passage. Si le froid ne lui a jamais rien fait, sentir la peau glacé d’autrui l’inquiète toujours. Elle ne quitte pas ses doigts enlacés.

- Tu n’es pas fair-play, mais j’aime jouer. La plupart des jeux se termine par la reddition de mon ennemi et une récompense pour moi.

Elle laisse Shuito s’asseoir et décide de lui grimper dessus, clairement à califourchon pendant un instant, avant de passer sur la chaise d’à côté comme si c’était tout naturel. Elle observe autour d’elle alors qu’elle aperçoit des gens curieux et des hommes désireux. Elle n’a pas besoin de savoir lire dans les pensées pour savoir que l’on aimerait bien qu’elle s’occupe de certains. Elle rit encore à l’image de Shuito, s’il avait été réellement son client, qui lui aurait certainement demandé des gâteries sous la table. Elle se demande ses réactions face à l’incongru. Elle garde leur main enlacée alors qu’elle pose son autre doigt sur son nez et glisse le long de sa peau.

- Tu aurais rapidement une liste de client si tu venais travailler pour moi. Alors, si tu me dirais plutôt qui est ce « Mori-sama », elle croit voir une personne se tendre et même le serveur qui allait leur proposer le menu faire une demi-tour à ce nom, et qu’est-ce qu’il veut à Shira. Elle n’est pas assez expérimenté pour lui faire plaisir, alors je peux prendre sa place et il la payera elle, c’est mieux.

Elle ne sait pas que, d’une autre manière, Shira a proposé la même chose.

- Et puis, pourquoi elle ? Il l’a vu dans la rue et il s’est dit qu’elle était parfaite enchainé ? Ce qui n’est pas le cas. Je le rappelle.

Elle continue de caresser la peau froide, presque hypnotisé par la sensation sous ses doigts.

- En faite, je m’appelle Sakura, et toi ? Tout le monde croit que l’on joue à des vilains jeux sexuels ensemble, alors il faut que j’apprenne le nom que j’aurais à gémir, non ?

Elle observe Shuito mais sa main continue de parcourir sa mâchoire avant qu’on ne dépose presque trop rapidement le menu sur la table. Elle sourit encore, plisse ses yeux de pouvoir « jouer » justement avec cet homme qui pense pouvoir l’avoir… et elle protègera Shira. Sur sa vie.

Sakura rit face à l’explication de Shuito sur leur situation. La chaleur de sa main dans la sienne à quelque chose d’à la fois agréable et agaçant...  

Lorsqu’il lui fait remarquer qu’elle n’a pas intérêt à continuer de jouer avec lui, elle assure qu’elle aime ça et que, généralement, c’est elle qui gagne. Le vampire roule des yeux et s’assied sans un mot. Et lorsque Sakura lui passe littéralement dessus pour aller s’asseoir à son tour, il se dit qu’il va finir par choisir la punition en profitant de la jeune femme, qui le cherche clairement, plutôt que d’obéir à son roi. Tant qu’il ne la blesse pas, il ne devrait pas être trop réprimander, non ?

Alors qu’elle ne lâche toujours pas sa main, Sakura reprend, pensant jouer avec Shuito pour obtenir ce qu’elle veut. Le vampire reste de marbre alors que la main libre de l’humaine parcourt sa peau froide. Il ne réagit qu’à ses derniers mots, tournant un regard brûlant vers elle alors qu’il remercie d’un geste nonchalant le serveur qui vient de leur apporter les menus sans un mot.  

Elle n’a aucune idée de ce dans quoi elle s’embarque, et Shuito adore ça.

”Je ne suis pas à vendre, et si tu écoutais un peu tu m’éviterais de devoir te répéter que ton amie ne risque rien et est libre de partir quand elle le veut.”

Il prend sa main et approche son visage du sien pour lui glisser quelques mots à l’oreille, dans une posture clairement aguicheuse. Il libère son aura. Il l’a prévenue...

”Si vous voulez que je vous fasse gémir, il n’y a qu’à demander.”  

Il vient frôler son cou de ses lèvres, le caressant de son souffle et doit se retenir de ne pas enfoncer ses crocs dans sa peau tendre et palpitante. Il s’éloigne alors, brisant le “sort”, et attrape un menu l’air de rien.

”Je meurs de faim ! Voyons ce qu’ils nous proposent en ce moment.”

Il n’a répondu à aucune de ses questions. Elle pense pouvoir le pousser à bout ? Il a 108 ans, elle craquera bien avant lui... même s’il est impulsif...

”Prenez ce que vous voulez. Si vous êtes sage, je vous laisserais peut-être appeler votre amie.”

Il aurait dû commencer par-là... mais maintenant que le jeu est lancer, il compte bien en profiter un peu...