Ce fut … Différent. Mais intense. Et je crois que j’aimais plutôt bien. Je pense qu’on va devoir réitérer l’expérience, c’était franchement agréable. Bon, j’ai plus que peur de lui faire mais c’était si naturel. A croire que nous étions destinés l’un à l’autre. Ce que j’ai hautement du mal à concevoir. Qui voudrait être condamné avec un déchet comme moi ? Puppy sur mon torse, je caresse ses cheveux, c’était … Pour une fois, les mots me manquent.

Je n’avais pas la force de me lever. J’avais envie de rester dans cette chaleur. Dans notre monde. Je me fais peur. Ce gamin va me changer. Et je vais me ramollir. Ce n’est pas bon. Ni pour mes affaires – nos affaires – mon tempérament. Non vraiment pas.

Et je repense aux épreuves dont allaient devoir faire face. J’en avais déjà mal à la tete. Dans quelques jours, il ne sera plus du tout le même. Et c’est bien ce qui me faisait peur qu’il en perdre toute innocence. Celle qui me compressait le cœur. Celle que je cherchais constamment. Celle que j’aimais plus que je ne voulais l’accepter.

Je ne pouvais plus ignorer que sa présence m’avait plus de bien à l’inverse où je lui avais apporté tant de ténèbres. Mais j’étais quand même toujours en quête, d’un regard, d’un sourire. Que ce soit durant mon tour pour saluer mes salariés, dans les réunions ou même au havre. Tant de chemin parcouru entre nous. Et j’ai bêtement cru que j’allais l’épargner. A présent, il allait être sacré, Reine.

Sursaut de lucidité, de remords soupoudrés de peine, j’attrape son menton entre mes doigts et le relève vers moi. Et je fronce le regard, même si je doute avoir encore de la crédibilité après notre partie de jambe en l’air.

- T’as pas intérêt à changer. T’as compris. Quoi qu’il va se passer, à présent, tu restes comme tu es. J’apprécie tout de toi, alors, sois toujours toi-même. Ne réfléchis jamais comme moi. Conserve tes valeurs, tes principes. Je veux toujours voir tes fossettes quand tu souris, tu m’as compris ?

 

Je n'ai pas eu peur, je n'ai pas eu mal. Tout m'a semblé si naturel, si évident. Et là maintenant, je sais que je ne m'arrêterai plus jamais et que plus personne ne m'intéressera s'il est dans les parages. Comment ai-je pu vivre sans lui pendant toutes ces années ? Evidemment, je ne lui dis rien, je sais qu'il va paniquer ou lever les yeux au ciel sans me répondre. Qu'il est timide en amour. C'est presque mignon. Parce que, s'il ne me dit que rarement des mots doux, dans son attitude et ses gestes, c'est très clair. Il se voile la face, sûrement.

J'étais tout à mes songes, à mes pensées de vie heureuse à ses côtés, quand il se met à paniquer. Je ne vois pas comment appeler ça autrement puisque sa poigne sur mon menton est très claire. Son regard est bien trop lucide après ce moment charnel intense. Je tente de sourire pour l'apaiser.

« D'accord, d'accord. »

J'essaie de soupirer, pour avoir l'air blasé, mais je sens mon sourire s'étirer jusqu'aux oreilles. Je sens cette moue rieuse et ces fameuse fossettes.

« De toute manière, je n'suis pas sûr d'être vraiment capable de faire ce que tu fais. »

Regard levé vers le ciel. Je me recule pour poser mon dos contre la tête de lit.

« Panique pas d'accord ? Tout s'passera bien. »

Mensonge, vu son taff ya rapidement moyen que ça s'envenime. Et il le sait bien mieux que moi.

« Tu n'as pas assez de côté pour tout quitter et qu'on reste cloitrés au Havre durant toute notre vie ? » lançai-je sur le ton de la blague.

Depuis quand c’est moi qui joue les protecteurs irrationnels. Ce petit gars me fait perdre la boule. La raison. La sérénité. Et je sais qu’il est capable de déclencher des démons qu’il ne voudra jamais connaitre. Ces démons qui ne font que somnoler en moi, qui n’attendent que de plonger ce monde, dans les ténèbres. Eteindre sa lumière à lui. Et je l’espérais vraiment qu’il avait cette force de toujours résister. Quoi qu’on fasse, il était condamné avec moi.  

- Je fais partie des 20 richesses du pays mais désolé, je ne peux malheureusement pas quitter le navire. Ou alors tu me trouves deux successeurs et je te suis où tu veux.  

Prendre ma retraite. Ça m’hérisse les poils. C’était trop me demander. Je voulais crever sur scène moi. D’une main vengeresse et pas aller me foutre au green. Mais je suppose que s’il se faisait insistant, je cèderais...  

Les jours suivants sont si paisibles à ses côtés. Tout semble être si fluide. La peur de le perdre me fait réaliser qu’il est indispensable à ma Vie. Et que ses futurs frères d’arme s’impatientent surtout. Tandis que moi, je repousse l’échéance. Non, je préfère explorer son corps, jouer avec ses points faibles, c’est encore plus amusant avec une femme. Pour l’heure, je n’étais pas prêt à ce qu’on échange nos places, je tenais à ma masculinité. C’était stupide mais non, je préfère quand il me susurre des mots peu chastes pour le moment.  

- Désolé Puppy mais on va devoir rentrer maintenant. Tu te lances ce soir.

Je ne sais pas lequel je tentais de préparer. Moi parce que je crois que j’allais faire une syncope de l’obliger à vivre une telle épreuve. J’en profite pour ranger les valises dans la voiture. Ou lui, parce qu’il allait vivre un truc à l’opposé de ses habitudes. On fait le tour de la location une dernière fois puis mettons les clés dans la boite aux lettres.  

- Je t’explique comment ça va se passer. Dès que tu ne comprends pas, tu m’interromps.

Profiter du trajet pour lui expliquer en quoi consiste une intégration chez nous. Et tenter de calmer mes nerfs. Je serais le volant, jointures blanchies. Me raccrocher à quelque chose. Je fixe la route qu’on emprunte.  

- On doit s’assurer que deux cargaisons en attente au port soient acheminées vers une autre société - autrement dit un gang qui a souscrit à nos services – sans embuches. Tu seras à l’arrière du fourgon, et armé. Trente minutes de trajet. Expliqué ainsi, c’est très facile mais tu as toujours le camp ennemi pour venir voler, torpiller ou même alerter les forces de l’ordre. Et ça peut vite finir en bain de sang. Pour ne pas flouer ta participation, je ne serais pas avec toi, mais dans une autre voiture plus simple. On sera tous connectés par une oreillette. Dans tous les cas, si ça tourne vinaigre, je t’extirperais de là, en priorité. Quand tu auras réussi ta mission, parce que je ne doute pas de toi, tu deviendras Reine.

Dans ses bras le temps passe toujours trop vite. Je veux savourer chaque seconde, jouir de chaque instant. Et pour l'instant, j'y arrive plutôt bien. Rien à voir avec tout ce que je connaissais, je découvre de nouvelles sensation, je découvre que la douleur et le plaisir peuvent être liés, j'ai des crampes au ventre tellement mes orgasmes sont intenses, je découvre qu'il me fait frissonner juste avec ses mots et que sa langue est bien trop cajoleuse. Je ne veux jamais quitter ce monde où nous sommes seuls.

Et pourtant, il n'est pas prêt à raccrocher. Et je ne pourrais rien y faire alors j'accepte et je souris quand il me parle de notre futur et de la manière dont cela s'imposera. Quel couple allons-nous devenir ? Aurais-je une vraie place dans le gang où ne serais-je que sous sa protection ? Je ne sais même pas si j'ai envie de m'impliquer réellement, je ne suis pas sûr d'avoir les épaules assez fortes.


Tu seras à l’arrière du fourgon, et armé.

Gloups.

Et ça peut vite finir en bain de sang.

Re-gloups. Il n'y a pas à dire, il connait les mots pour me rassurer. Bon, il a raison de me dire la vérité, mais je me rends compte que je n'étais pas prêt. J'essaie de ne rien laisser transparaître. De toute manière, il fixe la route devant lui, ne me jetant pas le moindre regard.

Pour ne pas flouer ta participation, je ne serais pas avec toi, mais dans une autre voiture plus simple.

Je m'en doutais, mais tout de même, cela me serre le coeur. J'aurai aimé l'avoir dans mon champ de vision.

Quand tu auras réussi ta mission, parce que je ne doute pas de toi, tu deviendras Reine.

Je souris. Pour tenter de m'apaiser moi-même. Puis je prends une profonde inspiration. « En gros, s'il n'y a pas d'attaque, je ne fais rien ? J'suis juste là pour défendre au cas où, c'est ça ? Bon, comme tu l'as dit en tout franchise, il y a de grande chance que ça parte en baston, maais ça va aller. » Ma voix tremble vers la fin, alors que j'essaie de la garder neutre. Je regarde droit devant moi, au cas où il plonge son regard dans le mien et que je perde tous mes moyens. « Tout va bien se terminer. » Je répète, comme un mantra, pour me convaincre.


Deux heures plus tard, je suis en effet armé et dans un fourgon. On m'a mis ce pistolet dans les mains en m'expliquant rapidement les rudiments. J'ai le doigt sur le cross et j'ai envie de vomir. J'ai à peu près compris comment enlever le cran de sécurité, comment viser et comment tirer. On m'a répété que le bruit était bien plus fort que dans les films et que je risquais d'être déséquilibré. On m'a ordonné de bien le tenir à deux mains. Trop de commentaires importants, j'ai peur de tout embrouiller.

Quand la radio grésille et lance le premier signal, bien vite, la camionnette se met en marche. Et le temps paraît s'étirer d'une manière très étrange. Je suis inconfortable comme si j'étais assis là depuis des heures et pourtant ça ne doit faire que dix minutes ! Et puis le camion roule toujours. Alors je regarde les autres avec moi, on est tous habillés en noir, anonymes, je ne les reconnaîtrais pas dans la rue et pourtant j'essaie de leur trouver quelque chose d'humain, de simple, pour me rappeler qu'ils achètent aussi leur coca au coin de la rue et leurs sushis à emporter. Comme n'importe qui.

BOUM

Le choc contre la camionnettes est violent. J'entends les deux crans de sécurités des deux autres pistolets, je mets quelques longues secondes à faire de même. J'inspire. Je ferme les yeux. J'expire et je lève mon arme. Je me tiens prêt. J'espère qu'ils seront plus rapide que moi. Putain comment on tire déjà ?

Les deux gars communiquent par signes et m'indiquent de me mettre sur le côté, je tends mon arme comme eux - j'essaie du moins. Puis la porte s'ouvrent. Une première explosion puissante et une balle se fige dans la camionnette. Ah ouais, ça fait du bruit. J'inspire doucement. Je peux le faire. Je lève mon arme et tire. J'espère qu'aucun de mon camp ne s'est pris une pris perdue. Je ne sais absolument pas qui ni où viser. Je regarde la voiture noire qui nous a foncé dedans, elle peut sûrement encore roulé et s'enfuir, alors je tente le tout pour le tout et je tire dans les roues. Je tire quatre fois jusqu'à avoir mal aux oreilles et aux bras. Je n'ai aucune idée de si j'ai atteint mon objectif, j'espère. Puis je remonte dans la fourgonnette. Il n'y a plus de bruit et les deux autres gars remontent derrière moi.

Il y en aura d'autres non ? Faut qu'on se dépêche, qu'on change d'itinéraire. Faut qu'il me sorte de là.

Il faut croire qu’espérer que tout se passe bien à l’Univers était trop demander. Avoir une moitié dans une mission, le meilleur pour perdre la moitié de sa vie. Je n’ai jamais autant stressé durant un convoyage. C’est moi qui tiens le volant, le maltraitant pour passer l’inquiétude. On roule à bonne distance du fourgon. On a l’habitude de le faire. C’est ce que je me dis sans arrêt.

Et pourtant, c’est la merde quand j’entends l’explosion. Voiture qu’a déboulé de nulle part. Je me maudis encore plus d’avoir accepté que Puppy se mette à l’arrière, quand je vois la porte du fourgon explosée. Heureusement qu’il y a des tireurs hors pair dedans mais je pourrais faire de l’huile avec une olive tant je serre du cul.

Echange de tirs entre les deux véhicules. Je retiens ma respiration. Je m’agrippe au volant tandis que ma bagnole se rajoute aussi à la danse. J’imagine le pire. Perdre Puppy. Je sens la suée couler dans mon dos. Puis on assiste à une rafale et la voiture explose plus loin, en déroute. Mes gars finiront le boulot pour n’offrir aucun indice aux forces de l’ordre. Je félicite les gars et on opte pour un plan B. On reste tous aux aguets.

Je colle le fourgon cette fois. Je ne m’attendais pas à ce qu’on se fasse attaquer. J’allais devoir mener l’enquête. Qui sont ces fous qui viole mon autorité ? Fourgon en visu et je soupire, soulagé de le voir en Vie. Je ne sais pas pourquoi les deux gars tapotent mon Puppy.

Rangez vos mains avant que je vous les coupe, merci. Phrase qui sort plus vite que prévu. Ce qui les fait rire en retour. On ne recommencera pas Chef. Bande de petits cons.

Le reste du trajet se fait plus calmement. C’est certain, je vais avoir la tête toute grise en me réveillant demain matin. On livre le fourgon à nos clients puis nous récupérons le paiement. Puppy qui monte dans ma voiture et les autres dans la seconde voiture. Silence dans le tas de ferraille et nous rentrons au QG.

Je dépose les deux sacs d’argent sur la table et laisse notre intendant faire la répartition. 10 000 par personne. J’en déposerais le tiers sur un compte courant, l’autre tiers dans un coffre et le reste sur moi, pour les claquer comme j’en ai envie.

Depense pas tout. Que je dis à Louis. Je le taquine alors que j'en avais strictement rien à carrer de comment il allait écouler son argent. Et je réalise que je ne lui avais pas expliqué la marche à suivre. Y'a des règles à respecter.

Je regarde tout le monde discuter. Bon, je crois qu’on a une cérémonie à faire. Tout le monde me regarde puis Louis ensuite. Et d’un seul homme, on sort notre canif gravé avec nos positions dans l’organisation et on se met face à Louis. On prononce le discours d’intronisation de frère d’armes puis ensuite de Reine. Un genou à terre et on s’ouvre la main pour faire couler le sang à ses pieds.  

Je suis en vie et c'est terminé.

Je ne pensais pas ressentir un tel soulagement. Enfin, je m'en doutais mais pas que ça me prendrait au tripes de la sorte. Pas que je ne voudrais plus jamais de toute ma vie recommencer. C'est pas pour moi, ce n'est définitivement pas pour moi. Je tremble encore. Et je ne peux plus jamais ressentir ça. Je ferme les yeux et inspire longuement. Plus jamais.

Dépense pas tout.

Je sursaute en l'entendant et sourit, parce que ça me semble être la seule chose à faire. Je n'ai jamais vu autant d'argent de ma vie, même si j'imagine bien que Sullyvan a tellement plus chaque instant dans sa poche, mais tout de même. Que vais-je en faire ? Ca ira sûrement dormir progressivement sur un compte d'épargne. On verra.

Bon, je crois qu’on a une cérémonie à faire.

J'ai envie de reculer, d'abandonner, de fuir. Mais non, on a pas fait tout ça pour rien. Je secoue la tête et le suit. Je me mets à genoux, m'ouvre un peu avec le couteau comme prévu, mais je me sens détaché, loin de tout ça. C'est très étrange comme sensation.

Enfin, c'est fini. On s'éloigne, on change de lieu, on se retrouve seuls. Je sais que ce n'est pas le moment de craquer, alors je lui chuchote juste.

« On peut rentrer ? »

Le minimum de mots pour ne pas me mettre à pleurer. J'espère qu'il va comprendre la demande pressente, j'espère que je vais me retenir. Je sais qu'il ne va pas aimer me voir faible et que ça risque de le dissuader de me laisser en liberté. Sûr, il va vouloir m'enfermer dans sa cave pour m'empêcher de sortir.

Je ne suis pas fier de moi. Tous mes gars sont volontaires. Donc, je n’ai aucun cas de conscience à les embarquer en mission. Mais là, mon Puppy, c’est l’innocence même. Que je venais de souiller. Je le regarde quand il me demande de rentrer. Je le vois dans ses yeux, c’est trop pour lui. Je hoche la tête. J’allais lui dire d’attendre. Mais il en a assez fait pour aujourd’hui. Mon Roi veut rentrer. On reste calme pour le restant dans la semaine. On a encore l’officialisation a faire. Merci les gars. On respecte les règles pour le placement des thunes. Considérez vous au repos. Mais pas d’imprudence. Je les remercie et on quitte le QG en moto.

Le trajet se fait plus long qu’a l’accoutumée pour le laisser décompresser. Je ne sais pas tout ce qu’il se passe dans sa tête mais ca doit être l’anarchie. Certain. Quarante minutes à rouler et on rentre à l’appartement. Je salue notre majordome qui exprime sa joie de revoir Puppy. Et on monte. Je vais te faire couler un bain. Et âpres, au lit. Je lui parle tout en me déshabillant, ne restant qu’en pantalon et torse nu. Je rajoute des trucs pour détendre le corps. Des conneries qu’on m’offre. Ils allaient enfin servir. Puppy c’est prêt. Je me pose sur le lavabo et détourne le regard alors que les prémisses d’un désir ardent s’installent dans mon bas ventre. Ca aussi, ca va être compliqué à gérer. Un partenaire à présent, c’est ca ? Eau bougeant et j’en conclus qu’il s’est mis dans le bain. Je m’accroupis à son niveau. Si fatigué mon Puppy. Je suis fier de toi, tu as été incroyable Louis. Tu n’auras plus à faire ca. Plus jamais. Juste .. assister à des réunions et c’est tout. Plus personne ne te fera du mal. J’embrasse son front puis ses lèvres. T’es magnifique Louis. Vraiment. Heu ... Quoi ? Je viens de dire ca ? 

Et il accepte, il vire tout le monde, il me soutient. Je me colle à lui sur la moto. Je suis content qu'il ait choisi ce mode de transport, au moins il ne me voit pas. J'essaie de ne pas bouger en pleurant, mais sentir son corps sous le mien m'aide énormément. Il est là, vraiment là.

A la fin du trajet qui semble avoir duré mille ans, je me sens déjà un peu mieux. J'ai toujours eu cette faculté d'oublier les éléments dur, pour ne me concentrer que sur la facilité ou la beauté du reste. Je ne pleure plus, même si j'imagine mes yeux bien rouge.

Et voir combien Sullyvan est attention je suis ... wahou. Cela me remonte le moral en flèche. Il se croyait détaché, loin de toi, or le voilà à genoux devant la baignoire pour me préparer un bain. J'en tombe immédiatement amoureux. Comme un nouveau coup de foudre. Et mon coeur bat plus vite, plus fort. J'ai envie de poser mes lèvres sur les siennes, d'oublier définitivement la seconde part de lui pour ne voir plus que l'homme extraordinaire à qui je viens de me lier d'une manière ... peu ordinaire.

Il m'appelle et se retourne. Je manque un sourire, et me déshabille avant de plonger dans l'eau. Elle est douce, chaude, je me sens bien. Pourtant, cette part sombre de mon cerveau ne fait que de revenir, pourquoi le mécanisme n'a pas fonctionné correctement ? Pourquoi ne puis-je pas effacer tout ? Je me risque à lui parler, pour le faire sorti quand il me surprend. Magnifique, moi ? Je rougis.

« Tu t'es vu ? » je murmure en évitant son regard. « Merci » précisai-je doucement.

Je ferme les yeux et plonge sous l'eau, pour me débattre avec mes pensées. Puis je ressors et décide de lui dire. « Sur le moment ça allait, l'action, pas le temps de penser. C'est après coup que j'ai compris. Est-ce que ... j'ai blessé quelqu'un ? J'ai eu envie de vomir, c'est pas fait pour moi, j'suis si ... faible. » Et me voilà qui tremble. Alors que la chaleur me rend tout moite. « J'ai peur pour la suite, je peux plus, mais je sais que je dois. Je veux pas que tu paies toi... dans ce milieux. » Je m'embrouille. Je bégaie. « Merci pour tout. » Et, enhardi par un je-ne-sais-quoi, je me soulève du bain pour poser mes lèvres contre les siennes. Mon baiser n'est pas doux comme je l'avais espéré, je crois que j'ai plus besoin de lui que je ne peux l'avouer.

Le contre coup débarque. Ses mots sont hasardeux. Je n’imagine même pas le bordel dans sa tête. Je le regarde, peiné pour lui. Moi qui n’avait de cesse de vouloir soit le fuir soit le mettre à l’écart, il était les deux pieds dedans. J’allais lui répondre mais il se lève.

J’écarquille les yeux et ses lèvres fondent avec force sur les miennes. C’est nouveau ça ... Depuis quand il peut devenir aussi entreprenant ? Souffle court, je m’éloigne et colle mon front contre le sienne. « Eh bien jeune homme, vous êtes bien fougueux » rire qui se fait. « Faut pas me faire ça à moi. Je reste un homme avec des besoins primaires, un rien m’attise. Mais toi, t’es encore un peu innocent. Alors retourne barboter p'tit poisson. Que je te frotte le dos. »
Il se replace et je viens attraper une fleur de douche et du savon pour le laver, des pressions circulaires espérant le détendre. « Est-ce que tu te sens capable de retourner travailler ? Genre Lundi. »

Massage de sa petite boite crânienne. Une des rares personnes à qui j’offre mon attention. Il mérite tout ce petit homme, l'univers entier. « Il va falloir que tu choisisses notre première sortie publique également. Ce ne sont pas les propositions qui manquent. Je te ferais un premier tri, certains sont barbants. Et d’autres plus sympa. » Cela m’est étrange. Le monde va savoir qu’Andrew Sullyvan a quelqu’un et c’est un homme. Effrayant.

« Tu vas avoir droit à une protection également. Un homme et une femme. J’ai déjà fait des sélections. Quatre candidatures. Je te laisserais choisir parmi eux vu qu’ils vont devenir ton ombre. » J’embrasse son épaule puis mordille son cou. « As tu des questions Puppy ? » Ventre qui se fait entendre. « Avant qu’on aille cuisiner. »

Il est là, tout contre moi. Et je suis bien; Enfin bien. Les évènements passés n'existent plus. Ils sont relégués loin dans mon esprit, la seule chose qui compte maintenant, c'est mon envie pour lui, c'est mon besoin de lui, c'est lui. Et je me sens bien. Heureux. Excité. Fou. Je trépigne. Comme un gosse avant Noël alors que je ne devrais pas. « Faut pas me faire ça à moi. Je reste un homme avec des besoins primaires, un rien m’attise. Mais toi, t’es encore un peu innocent. Alors retourne barboter p'tit poisson. Que je te frotte le dos. » Il ne me laisse pas le temps de répondre, pourtant le "et si j'étais prêt" est sur le bout de ma langue. Je crois que je le suis enfin, pour tout, entièrement à lui.

Mais je me tais. Ce n'est pas le moment, il a raison. Je ne dois pas laisser mes peurs d'être quelqu'un de... merde. C'est ce qu'il est c'est ça ? La peur d'être une telle personne me rend malade, mais lui, c'est précisément ce qu'il vit. Il me sait faible et ne s'offusque sûrement pas, mais je comprends soudain. Quel idiot je sais. Tant que ce n'était que des mots, je pouvais les accepter. Est-ce que ça va me séparer de lui ? Il se décale pour chercher du savon et, lorsque sa main quitte mon dos, je me sens nu, froid. Et j'en tremble. Non, c'est trop tard, j'accepterai encore et encore ce qu'il est, je le veux. Et je ne pourrais jamais m'en passer. Il est ancré dans ma peau. Je ne peux qu'accepter et tenter de le soulager.

« ... de retourner travailler ? Genre Lundi.... notre première sortie publique ... barbants ... protection ... devenir ton ombre ... Puppy »

Soudain ses mots se heurtent, il parle trop, trop vite. Et ses fichus doigts si doux qui vont m'endormir. Je n'arrive pas à me concentrer, mon souffle se fait plus court, je commence à voir trouble. J'ai peur. J'ai froid. J'ai chaud. Je transpire je crois. Rien n'a plus d'importance. Et je m'effondre dans ses bras.

Quand je rouvre les yeux, je ne suis plus dans le bain. Je reprends doucement ma respiration. Et je tends la main vers lui. « Sullyvan. » Ma voix est rauque. Je la déteste. « Je » J'ai honte. Honte de ne pas réussir à m'en remettre, honte de ne pas être assez fort pour lui. Honte de lui faire honte. Il va se détourner, m'en vouloir. Au bout d'un moment, il en aura marre de moi. Je dois me forger une carapace. Il le faut. « J'irai lundi. » Une détermination nouvelle s'empare de moi, ma voix est assurée, plus que je ne l'ai jamais été. Je me relève, manque de trébucher, mais je m'accroche. Je me tiens debout. « Je peux le faire ok ? Je le ferai. Pour toi. Pour nous. » Les mots roulent avec délice sur ma langue. Nous sommes enfin un nous et j'ai failli faire tout capoter, mais je suis débile ou quoi ? Une fois lancé, je ne m'arrête plus. « Fais moi une liste de première sortie officielle, je veux te rendre fier ok ? » Et là, je me perds dans son regard. « J'suis prêt, je te jure. Je suis prêt. » Je lui attrape les mains, comment lui faire comprendre que je suis entièrement à lui et que je ne serais plus jamais faible ?