Je haussais les épaules lorsqu’elle demanda pour quelle raison elle pourrait prendre ma suggestion comme déplacée.

Je n’en sais rien, je voulais être certain de ne pas être mal compris je pense. Souriais-je.

Je me versais un verre de vin avant de repousser la bouteille qui se trouvait entre nous. Je n’aime pas avoir un objet entre la personne avec laquelle je discute, cela me parait toujours particulièrement grossier. Alors, je fis tournoyer la boisson dans mon verre, admirant sa robe avant d’en humer les arômes fruités. J’avais toujours trouvé que l’Empire avait de meilleurs vins que nous, même si nous étions bien plus fort pour les liqueurs.
Je lançais un regard à mon interlocutrice, accompagné d’un sourire avant de lever mon verre.

Ma foi, je n’ai pas d’idée précise… Enfin, je ne sais pas, vous m’avez soigné mais je ne sais pas quelle est l’origine de vos compétences par exemple. Vous m’avez simplement assuré que vous saviez ce que vous faisiez et je vous ai fait confiance. Vous étiez infirmière ?

Il affirmait ne pas avoir d'idée précise concernant le sujet de cette conversation. Pourtant, la question qui suivit me parut extrêmement précise.

–Mon père était médecin. Il possédait sa propre clinique. C'est là que nous avons passé notre enfance, mon frère et moi. Nous avons pu le voir travailler, nous avons beaucoup participé aussi. Théodore a pu poursuivre ses études dans le domaine, et devenir médecin à son tour, pas moi.

Les portes de la faculté restaient malheureusement fermées aux femmes et ce, qu'importe leur intelligence ou leur motivation. C'était un fait malheureux voire totalement déplorable, mais un fait quand même.

–Quand j'avais seize ans, à peu près, j'ai intégré l'hospice géré par les sœurs du sacré cœur. Elles m'y ont enseigné le métier d'infirmière mais je ne l'ai jamais réellement pratiquée ensuite. Au lieu de ça, j'ai poursuivi mon apprentissage auprès d'un apothicaire spécialisé dans l'herboristerie. À vingt ans, j'ai rencontré Ernest, à vingt-deux ans, nous étions mariés.

Le regard dans le vide, je fis tourner mon verre dans lequel restait un fond de vin blanc sucré. Je n'avais aucune intention de le terminer, mais j'aimais sa couleur.

–D'autres questions ?

Je l’écoutais me raconter son parcours avec attention, attentif à ce qu’elle me disait, en apprenant un peu plus sur celle à qui je devais la vie. J’avais l’impression de noter un certain regret de ne pas avoir pu poursuivre d’études de médecines, ce qu’elle aurait tout à fait pu faire de mon côté de la frontière.

Je me retenais cependant de le dire, ne voulant pas spécialement relever cette différence. En revanche, je fus assez surpris lorsqu’à la fin de son histoire, elle parla de son âge lors de sa rencontre et de son mariage avec Ernest. Evidemment, cela la troubla un instant et elle observa son verre, faisant tourner le fond de liquide qui y restait avant de me poser une question qui semblait presque annoncer la fin de notre discussion.

J’ai eu de la chance de tomber dans le champ de patates de la bonne personne alors ! Souriais-je. Si votre père avait été maçon, cela aurait été un peu plus aléatoire.

J’avalais une petite gorgée avant de reprendre.

Je… Ma foi. Comment en êtes-vous venue à faire de la mécanique ? Franchement, vous êtes pleine de ressources.

Parler de moi n'a jamais été une chose particulièrement aisée. Autant dire que je n'aimais pas particulièrement me plier à ce genre d'exercice. N'y voyez pas un quelconque sentiment de supériorité de ma part, ni même un ennui étrange… Mais plutôt l'impression d'ennuyer la personne qui devait avoir à écouter la vie la plus ennuyeuse qui soit… La mienne. Je n'estimais pas avoir accompli quoique ce soit d'intéressant, bien au contraire. Toutes mes expériences passées, hormis mon mariage et la naissance de mon fils, étaient toutes empreinte d'une grande insatisfaction.

Malgré tout, Élias ne paraissait pas ennuyé du tout. Au contraire, il se permit même une petite plaisanterie qui, ma foi, était plutôt drôle.

– Un maçon aurait pu vous plâtrer directement. Cela vous aurait au moins empêché de bouger plus que de raison ! raillais-je à mon tour.

Sa question suivante concernait mon attrait pour la mécanique. Un sujet qui, étrangement, me semblait pourtant lié à la médecine. Mais peut-être étais-je finalement la seule à voir un lien entre les deux.

– J'ai toujours aimé savoir comment les choses fonctionnent. Les machines, qu'elles soient à vapeur ou à rouages, ressemblent énormément au fonctionnement d'un être vivant. Tout, absolument tout à l'intérieur fonctionnent ensemble. Le moindre déséquilibre, la moindre panne, dérange l'entièreté de l'organisation de la machine. C'est vraiment très intéressant à observer.

Mais ce n'était point là la nature de la question. Je repris, donc :

– Pour son travail, mon père possédait plusieurs véhicules, dont une ambulance. C'était une très vieille automobile qui tombait constamment en panne. J'ai donc pu assister à de nombreuses réparations grâce au mécanicien. Et puis… Ernest adorait cela. Il aimait acheter de vieux véhicules pour les remettre à neuf et puis les vendre… Comme cette vieille automobile qui nous permet de traverser le pays.

Penser à ceci me provoqua un petit pincement au cœur. Au fond, avec la destruction de notre maison de ville, ses vêtements et cette voiture, étaient tout ce qui me restait de mon mari.

– Et vous alors ? J'avoue ne pas parvenir à comprendre comment votre travail a pu autant vous empêcher de trouver une épouse.

Je riais de bon cœur à sa réflexion au sujet de ce qu’elle aurait fait si son père avait été maçon et qu’elle avait appris à ses côtés.

Et vous seriez en train de déplacer une statue ! Gloussais-je en buvant une gorgée.

Je l’écoutais ensuite me raconter d’où lui venait cet attrait pour la mécanique. Ses explications étaient intéressantes, les liens qu’elle y voyait étaient amusants et, à bien y repenser, pas du tout délirants. Bien au contraire, je trouvais même cette transposition ingénieuse et pertinente, même si ma question n’était pas là à la base. Elle finit par s’apercevoir de son écart et revient donc à des explications plus en adéquation avec l’interrogation que je lui avais partagé.
De l’ambulance de son père à la passion de son époux, elle avait toujours évolué dans un univers de mécanique. Aussi, curieuse comme elle était de connaitre le fonctionnement des choses, elle avait toujours eu accès à des engins à bricoler ainsi qu’à des personnes pour lui enseigner.

Je hochais la tête en souriant. C’est fantastique que vous ayez pu ainsi assouvir votre passion pour les fonctionnements tant des machines que des corps. M’exclamais-je, sincèrement impressionné et enjoué. J’indiquais mon bras de celui qui était valide. Fantastique et, je dois bien reconnaitre, plutôt utile ! Avouais-je en lui lançant un sourire.

Sa question, à laquelle je ne m’attendais pas du tout, me fit un peu rougir. Je bus une gorgée avant de m’adosser à ma chaise.

Euh… Ma foi, c’est une question très personnelle que vous me posez-là ! Dis-je en souriant. Je pourrais vous répondre en vous faisant tout un laïusse sur le patriotisme et tout le tintouin, mais ce ne serait pas la stricte vérité…

Bon, l’armée y est pour beaucoup mais mon caractère également. Je suis assez solitaire. Vous voyez, dès que j’en ai eu l’âge, je suis entré à l’école des officiers. Là, nous ne sommes qu’entre hommes et c’est un pensionnat. A l’issu, j’ai enchainé avec ma formation de mécanicien, puis de pilote et enfin, d’officier d’escadrille. Pendant toute cette période, j’aurais pu employer mon temps à trouver quelqu’un mais je n’ai jamais cherché à pousser plus loin les quelques histoires que j’ai vécu. A y réfléchir, c’est sans doute pour cela qu’elles finissaient par partir. Bref. En fait, je n’arrête jamais. Une fois mon service terminé, je rejoignais les mécanos pour bricoler. J’allais voir les ingénieurs pour réfléchir à des solutions techniques, pour trouver de nouvelles technologies… Je suis un passionné déraisonnable de bricoles et de bidouilles. J’ai planté un certain nombre de rendez-vous pour finir la mise au point d’un mécanisme ou pour être le premier à piloter un nouvel appareil…

En racontant cela, j’avais l’impression de me mettre à nu devant elle. Finalement, ce n’était pas très loin de la vérité puisque je lui dévoilais un aspect très personnel de moi-même. Avec le recul, j’avais un peu honte d’accorder autant de temps aux machines et ci-peu aux gens.

Je ne pus qu'acquiescer lorsque Élias souligna la chance que j'avais eu de pouvoir ainsi assouvir ma curiosité naturelle. Oui, une chance fantastique d'avoir été entourée d'hommes bienveillants et ouverts d'esprits qui m'ont permis d'apprendre sans cesse sur divers sujets. Après tout, si j'étais née dans une famille un peu plus traditionnelle, tout ceci se serait trouvé hors de portée pour une femme. Certes, les études restaient inaccessibles et cela, personne ne pouvait rien y changer, mais l'on m'avait tout de même permis de m'instruire sans jamais essayer de briser mon enthousiasme et ma motivation.

– J'ai eu beaucoup de chance, en effet, déclarais-je en souriant légèrement.

Penser à tout ceci me rendait quelque peu nostalgique. Aussi tentais-je, plutôt maladroitement, de détourner le sujet de conversation de ma personne. Je ne cherchais pas à le gêner avec ma question, vraisemblablement, personnelle, simplement à parler de tout autre chose … Et, honnêtement, c'était la seule question qui m'était venue à l'esprit.

Heureusement, Élias ne sembla pas m'en tenir rigueur et se plia aux règles du jeu et répondit sans détour. En somme, il m'expliqua que ses diverses activités au sein de l'armée l'intéressaient bien plus que de construire une relation avec une demoiselle. À nouveau, je souris. Après tout, ce n'était pas si difficile à imaginer.

– Je comprends, affirmais-je.

Ernest, tout comme moi d'ailleurs, étions également de grands passionnés. Aussi, il n'y avait rien d'anormal pour nous de nous laisser absorber par notre tâche sans voir le temps passer. À dire vrai, je pense sincèrement que c'est précisément cette capacité si dérangeante pour les autres qui nous a rapprochés.

– Ce n'est pas quelque chose contre laquelle il faut lutter. C'est même impossible. On ne lutte pas contre sa nature sans perdre…Le mieux est encore de trouver une personne apte à comprendre cela et surtout… Capable de l'accepter sans se perdre elle-même.

Combien d'épouses de passionnés ou de travailleurs ambitieux s'étaient laissées absorbées par ces derniers au point de ne plus être que "la femme de". Des ombres qui n'existaient plus que pour soutenir leur mari… Des femmes souvent malheureuses et délaissées… Quelque part, même si je trouvais évidemment cela très triste, je ne pouvais m'empêcher de me dire que tout ceci aurait pu être évité… Il suffisait simplement de prendre le temps de réfléchir, d'envisager les choses et de peser le pour et le contre. Dès lors qu'il s'agit de sacrifices, il y a toujours un perdant dans l'histoire… Toujours… Oh, bien-sûr, il existait toujours des demoiselles, folles amoureuses , capables d'affirmer pouvoir faire ces fameux sacrifices. Après tout, elles en avaient bien conscience… Néanmoins, ces fameuses femmes, au fil des années, souffraient souvent de grave dépression…

Alors, quelles femmes étaient réellement capables de vivre avec un tel époux ? Tout simplement une autre passionnée qui vivra avec lui comme de son propre côté sans souffrir d'une quelconque privation de liberté.

– Il me semblait pourtant que dans votre royaume les femmes étaient plus libres qu'ici. Par conséquent, il devrait s'y trouver un grand nombre d'érudites ou d'artistes susceptibles de vivre leurs passions aux côtés de la vôtre, affirmais-je sans détour. C'est vers ces femmes-là que vous devriez vous tourner. Et puis, au moins, si elles sont piètres cuisinières, elles ne manqueront pas d'intérêt.

Après mes longues explications, qui me semblaient aussi décousues qu’incompréhensibles. Pourtant, Héléna paraissait comprendre ce que je voulais dire. Elle me souriait et je ne pouvais m’empêcher de la trouver plutôt ravissante. Je me concentrais alors sur ce qu’elle m’expliquait au lieu de rester fixé à son sourire.

Si je saisissais ce qu’elle me disait, il demeurait tout de même deux problèmes assez majeurs.

Je vois. Ce que vous dites fait totalement sens. Trouver quelqu'un qui vous accepte avec vos passions, ce qui permet de continuer de les vivre sans aller contre elles. En effet, si je pouvais trouver une femme qui accepte de ne pas me voir durant de longues périodes et qui, elle-même, a des centres d’intérêts, même s’ils diffèrent, ce serait la meilleure des situations. Hélas, sortez-moi du cadre militaire et je deviens presque incapable de tenir une discussion qui ne tournerait pas autour de l’aviation ou de la mécanique… C’est à tel point que c'en est risible. Par ailleurs, la majorité de celles qui évoluent dans les milieux où je me retrouve sont des poupées vides d’intérêt… Je n’allais pas lui dire que de toutes les femmes que j’avais pu rencontrer, c’était elle que j’avais trouvé la plus intéressante, tout de même…

Elle fit ensuite un parallèle entre les libertés des femmes sudiques et des chironnaises. Il y avait du vrai dans ses propos, tout comme dans son hypothèse sur les érudites et les artistes.

C’est vrai que les femmes ont plus de liberté chez-nous… Malheureusement, une grande majorité de celles qui en ont accès à l’éducation poussée sont désespérément restées dans leurs bibliothèques et parlent crochet et potins. Il me faudrait donc sortir de ma caserne pour rencontrer une jeune femme qu’une passion anime… J’espère cependant qu’elle saura cuisiner un minimum, car me mettre aux fourneaux, c’est l’incendie assuré ! Ajoutais-je en souriant.

Je sentais qu’une légère rougeur s’était emparée de mes joues et je terminais mon verre.

Merci pour vos précieux conseils Héléna ! Vous êtes une femme attentive et passionnante !

Je restais quelque peu perplexe face à la réponse d'Élias. Trouver une telle personne pouvait bien évidemment être une tâche des plus complexes. Plus particulièrement dans une société où l'on enseignait aux femmes de devenir des épouses et seulement des épouses, ce qui était d'ailleurs le cas par ici. Une femme se devait de savoir cuisiner, coudre, tenir une maison tout en gérant les "affaires" du foyer. On ne leur demandait jamais de développer d'autres compétences que ces dernières, dans lesquelles l'on exigeait l'excellence.

Mais, justement, il me semblait que cela ne se passait pas du tout ainsi à Chiron. Les femmes avaient le droit de faire des études. Elles avaient accès à l'art, la culture et avaient même le droit de travailler… Comment pouvait-on les qualifier de "poupées vides" dans ce cas ?

La suite de ses explications ne me permirent pas de mieux comprendre. Au contraire, je finis même par me dire que le problème venait surtout de lui.

– Évidemment qu'il faut sortir de votre caserne pour faire les rencontres. Cela coule de sources. Pensez-vous sincèrement que les femmes tombent du ciel ? raillais-je gentiment. Voici donc votre prochaine mission, soldat : rencontrer une jeune demoiselle passionnée et bonne cuisinière. Peut-être même une passionnée de cuisine, pourquoi pas.

A peine eu-je terminé ma phrase que je réalisais mon indélicatesse et, surtout, mon indiscrétion. Après tout, rien de tout ceci ne me concernait…

– Oh… Je vous demande pardon. Je n'aurais certainement pas dû parler de cela… d'autant plus que je ne sais finalement rien de votre mode de vie et de la culture Chironnaise… Je suis sincèrement navrée.

Il se faisait tard et la journée du lendemain s'annonçait déjà longue et compliquée. Aussi, je décidais qu'il était grand temps d'aller dormir.

– Sur ce, je vous souhaite une bonne nuit, dis-je en me relevant.

Je me sentais rougir lorsqu’Héléna se moqua gentiment de moi en confirmant qu’il me fallait sortir de la caserne. Je me sentais un peu idiot et je me rendais compte que mes explications étaient complètements… Ridicules.
J’eus même du mal à encaisser sa plaisanterie lorsqu’elle me confiait pour mission de trouver une femme. Je ne lui en voulais absolument pas, mais… Cela ne voulait juste pas passer.

Immédiatement après, elle s’excusa, arguant que ce n’était pas ses affaires et qu’elle n’avait pas à me tenir ce genre de discours.

Non, ne vous inquiétez pas, vous n’avez rien dit de mal. Cependant, elle se leva pour me souhaiter bonne nuit, ainsi je comprenais que ce moment de discussion prenait fin. J’étais un peu déçu de la tournure des choses, mais après tout, elle était probablement restée pour me faire plaisir et non par désir. Finalement, je n’étais qu’un ennemi que son humanité poussait à aider.

Bonne nuit Héléna, et merci.

****

Je restais assis une bonne heure, seul à réfléchir avant de finalement monter me coucher, éteignant la lumière comme l’avait demandé la patronne. Je tentais de faire le moins de bruit possible en entrant dans la chambre, ce qui n’était pas aisé. Entre la porte qui couinait et mon bâton…

****

Nous roulions depuis une heure et le temps demeurait maussade. De mon côté, j’étais un peu perdu dans mes pensées. Si tout se passait bien, dans deux ou trois jours, j’étais retourné du bon côté de la frontière.
Or, il me fallait me rendre à l’évidence, Héléna et Eric allaient me manquer. Non pas que j’avais de quelconques sentiments pour la jeune femme, je ne pense pas, mais son caractère, son tempérament, sa personnalité… Oui, cela me manquerait.
Quant à Eric, un gamin aussi malin et adorable… Comment ne pas s’y attacher ?
Alors, je regardais le paysage défiler, l’estomac noué, mais le cœur léger, ce qui allait rarement ensemble.

Le lendemain, nous prîmes tous trois la route en silence. Cela ne me gênait en rien, à dire vrai. Conduire me demandait tout de même une certaine concentration, plus particulièrement dans cette partie de la région encore préservée. Le reste du pays était si dévasté que ma paranoïa me poussait à me dire que cela ne pouvait durer… Malgré tout, ce silence n'avait rien d'habituel pour Élias et Eric… Ce qui commençait sérieusement à m'inquiéter.

J'hésitais un instant à prendre la parole. De lancer un sujet plutôt simple, parlant, par exemple, de ce paysage qui se déployait devant nous. L'endroit était plutôt joli malgré l'instabilité nuageuse qui rendait le ciel menaçant. Néanmoins, l'on aurait rapidement fait le tour de cette conversation… Comme de toutes celles qui semblaient sorties d'un chapeau.

Alors, plutôt que de me contenter de parler un peu bêtement. Je décidais d'arrêter la voiture. Un petit ruisseau courait le long de la route. Cela suffirait pour l'entretien du moteur.

– Allons nous dégourdir un peu les jambes. Vous semblez en avoir besoin tous les deux, lançais-je avant de quitter le véhicule pour m'étirer un peu. Regarde Éric, il y a des poissons dans le cours d'eau !

Le petit garçon accouru aussitôt. Les animaux, qu'ils furent à poils, à plumes ou à écailles, étaient une véritable passion pour lui. Il adorait les observer, le regard brillant, ce qu'il ne tarda pas à faire en entraînant Elias avec lui.

– Regarde ! Ce sont des truites mais elles ont beaucoup plus de couleurs que d'habitude ! s'écria l'enfant tandis que je m'éloignais un peu pour prendre un peu d'eau. Elles sont si jolies !

Son regard passa des poissons au soldat, puis, du coin de l'œil, je le vis se ternir quelque peu.

– Pourquoi t'es tout triste ?