La jolie brune n’avait rien caché à Wendy. Elle aurait pu. Mais elle voulait que tout cela cesse. Parce qu’elle ne voulait pas perdre Jacob. Vic n’avait pas cessé de méditer durant la nuit. Tout ce qui comptait dans tout ça, c’était lui. Parce qu’il n’y avait qu’avec lui qu’elle était pleinement heureuse. C’était avec lui qu’elle avait réellement apprit à sourire, à savourer les petits plaisirs de la vie, à vivre vraiment. Elle savait parfaitement qu’elle l’avait déjà perdu. Elle s’était obstinée, lui avait tenu tête et elle l’avait perdu. Elle avait également comprit qu’il n’était pas en capacité de comprendre ce qu’elle avait éprouvé, le déchirement qu’elle avait éprouvé en se retrouvant face à Roberto. Face au vrai Roberto. Celui qu’elle n’avait jamais été capable de voir durant tant d’année.

Elle avait passé la journée à se concentrer sur son travail, évitant de trop penser à tout cela. Servir du café, conseiller les gens, elle y trouva un peu de réconfort. Un peu de calme au milieu du bordel ambiant qu’était sa vie. C’était pourtant le cœur lourds qu’elle était rentrée. Le pas trainant, elle avait même hésité à aller dormir chez ses parents. Mais cela voulait dire leur expliquer la situation, et elle ne voulait pas les inquiéter. Surtout pas. Alors elle était rentrée à l’appartement. Elle avait pris une douche brûlante. Avait tristement pensé qu’il n’y aurait jamais d’appartement avec baignoire. Elle avait ensuite décidé de cuisiner, chose qu’elle faisait rarement. Mais elle avait besoin de s’occuper les mains et l’esprit. Trop déprimée pour peindre. Un léger sursaut en entendant la porte s’ouvrir. Elle était dans le canapé, un carnet de dessin sur les genoux. Un regard pour Jacob qui fila sous la douche. Un long soupire plein de tristesse.

Lorsqu’il était revenu, elle avait osé : « -j’ai… y’a quelque chose dans le frigo si jamais ça te fait envie. » elle avait fait des lasagnes. Rien de bien compliqué. Il dirait surement non. Croirait peut-être qu’elle avait fait cela pour se faire pardonner. Elle se remit à noircir la page, sans pour autant être vraiment concentrée. Un nouveau regard. « -très bien… » que dire de plus ? Elle savait parfaitement que Wendy n’allait pas garder tout cela secret. Vic n’avait pas envie d’en parler. Pas non plus envie d’entendre à nouveau des reproches ou de déclencher une nouvelle prise de tête. « -je vais me coucher… » elle posa les pieds sur le tapis du salon, et se leva pour rejoindre sa chambre. Elle prenait la fuite ou alors elle se protégeait. Les protégeait. Evitant de détruire le peu qu’il restait d’eux.

Depuis qu’ils vivaient sous le même toit, c’était la première fois que Jacob franchissait le seuil de la porte d’entrée sans lui adresser le moindre mot. Pas même un bonjour. Pas même un sourire qui aurait eu la même signification. Il n’osa qu’un bref regard à son attention et avait ensuite trouvé refuge sous l’eau chaude de la douche durant quelques minutes. En ressortant de la salle de bain, il s’était rendu jusqu’à la cuisine pour se préparer un en-cas et adressa, pour la première fois depuis la veille au soir, la parole à Victoria. Il laissa son geste en suspens lorsqu’elle évoqua un plat dans le réfrigérateur et ouvrit la porte de ce dernier pour y apercevoir des lasagnes. Il le referma sans prendre la peine de sortir le plat du froid et reprit la préparation de son sandwich « Je n’ai pas suffisamment faim ». Il n’était même pas certain de parvenir à manger ce qu’il se préparait actuellement. Il évoqua ensuite Wendy de manière laconique. Aucun d’eux ne semblait être prêt à parler de l’éléphant dans la pièce… Il mordit dans son en-cas tout en l’observant se lever, et après avoir avalé, reposant le tout sur le comptoir de la cuisine, il rétorqua « On parlera de nous deux demain, lorsque tout sera derrière nous » et reprit une bouchée, la laissant rejoindre sa chambre. Jacob prit une bière, une assiette et prit place dans le canapé, allumant la télévision comme il en avait l’habitude lorsqu’il vivait seul.

Finalement, Jacob s’était endormi dans le canapé et ce fut la porte de la chambre de la jeune femme qui l’extirpa des bras de Morphée. Il se frotta les yeux et tourna la tête en sa direction avant de jeter un coup d’œil à l’heure. Il se redressa en position assise, ses pieds au sol et enfouit son visage entre ses mains quelques secondes, puis se leva et se servit un café noir après un bref « Bonjour » tout juste inaudible. Il le but devant la fenêtre de son appartement donnant sur la rue, en silence. Lorsque ce dernier fut fini, il prit une douche et délaissa ses costumes pour une tenue plus décontractée. Il se rapprocha d’elle, déposa un baiser sur son front « Fait attention à toi » et se dirigea jusqu’à la porte d’entrée « Je vais rejoindre Wendy » alors qu’elle allait en faire de même avec Roberto. D’ici quelques heures, ce dernier serait derrière les barreaux, attendant patiemment son procès, et quant à eux, ils allaient pouvoir enfin savoir la manière dont ils allaient avancer. Ensemble ou chacun de leur côté…

« Tu es sûr de ce que tu fais Hermano ? » avait demandé Armando, son ami de longue date, assis à ses côtés sur le canapé, le regard focalisé sur son jeu vidéo. « Je reste convaincu qu’elle me suivra peu importe où j’irais, et sinon, elle y sera contrainte ». Son ami osa détourner le regard en direction de Roberto qui venait d’envoyer son message « Tu vas la kidnapper ? Quand on disait que le romantisme était mort… » et reporta son attention sur la console, criant un « Fait chier ! » alors qu’un imposant : Game Over, venait de prendre place au milieu de l’écran. Il ne dormit rien durant la nuit. Roberto avait pris soin de rassembler tous ses effets personnels, et avait acquis une vieille voiture sur le net pour pouvoir quitter Miami avec la jeune femme. Le lendemain matin, il s’était garé sur le parking où il avait donné rendez-vous à Victoria, attendant patiemment, une clope au bec, appuyé contre la voiture. Un sourire s’était glissé sur ses lèvres en la voyant arriver à lui « Mi Vida ! Tu es venue ! » et la serra dans ses bras, et se recula ensuite légèrement « Dernière chance, tu m’accompagnes ? » et fronça légèrement les sourcils « Vu ta gueule, j’ai l’impression de ne pas être le seul souci dans ta vie actuellement, je me trompe ? » avant de sourire, se doutant que le petit-ami n’était pas innocent dans tout cela « Je te propose de quitter tout ça, de tirer un trait sur ta vie actuelle. Viens ».

Au matin, elle s’était levée sans vraiment avoir dormi. Parce qu’elle était stressée, mais aussi et surtout que dormir sans Jacob a ses côtés, était vraiment quelque chose d’étrange. Depuis qu’ils se connaissaient ils avaient prit cette habitude. Devoir se passer de sa présence rassurante… ça n’avait fait qu’attiser la douleur qu’elle ressentait intérieurement. Elle le perdait. Elle le savait. Mais elle ne pouvait rien faire contre. Si ce n’était aller jusqu’au bout de cette journée, et faire en sorte de Roberto soit mis hors d’état de nuire. La jeune femme avait posé son regard sur l’homme qui à la base partageait sa vie, endormi sur le canapé. Elle avait décidé d’aller prendre sa douche avant de se faire un café, pour le laisser dormir encore un peu. En dormant peut-être qu’il souffrait moins. Et puis ça leur évitait de se parler, de se regarder.

Lorsqu’elle revint, habillée et prête, elle répondit sur le même ton que lui. Comme si c’était devenu trop difficile, comme si elle avait peur qu’il l’entende. Elle retourna dans sa chambre, incapable de rester dans la même pièce que lui. Elle déjeuna alors qu’il était sous la douche. Lorsqu’il posa ses lèvres sur son front, elle eut envie de le retenir, de lui crier qu’elle l’aimait, qu’elle était tellement désolée… mais elle l’avait déjà dit. Alors elle avait seulement hocher la tête, sans être capable de le regarder. Elle prenait sur elle pour se retenir de pleurer. Elle savait que c’était une certaine forme d’adieu. Avant de quitter l’appartement, elle avait envoyé un message à Wendy pour lui dire qu’elle serait au lieu de rendez-vous dans une demi-heure.

Avant de descendre du taxi, Vic avait prit une grande inspiration. Elle savait que rien n’allait se déroulé comme prévu. Elle le sentait. Une sorte de présentiment. « -je suis venue te dire adieu. » avait elle soufflé. Peu importait sa réflexion sur ses cernes. Elle n’avait pas envie de lui raconter sa vie. Elle voulait seulement qu’il la quitte. « -je pensais être quelqu’un de buté mais tu me surpasses vraiment. Je n’aurai pas dû venir. » elle fit demi-tour, réprimant une envie de courir à toute vitesse. Elle s’immobilisa et regarda à nouveau Roberto. « -je te souhaite bonne chance… » même si elle savait qu’il ne finirait pas sa vie en train de siroter des cocktails sur une plage.

Roberto était bien loin de se douter que la police les observait actuellement et qu’ils attendaient un signal pour intervenir et procéder à son arrestation. Il se voyait d’ores et déjà libre sur les plages californienne en compagnie de la jolie brune qui venait d’arriver à sa hauteur. « Adieu ? Carrément » rétorqua-t-il en riant. Il trouvait ces aurevoirs quelque peu solennel, d’autant plus que dans son esprit, elle ne repartirait pas aussi facilement. Il avait passé une année à subir son existence, à avoir constamment peur, à vivre parcimonie. Aujourd’hui, il ne voulait plus de ça. Il voulait obtenir ce qu’il désirait et ce qu’il désirait, c’était Victoria ! « Tu plaisantes j’espère ?! » et se rapprocha de cette dernière, un sourire en coin « Tu viens avec moi » et lui saisit le poignet avec violence « Sinon, je tire une balle dans la tête de ton nouveau petit-ami » et ouvrit la portière pour la forcer à pénétrer dans la voiture « Si tu doutes de ma parole, résiste-moi ! » avait-il ajouté en la tenant à quelques centimètres de son visage « Monte maintenant ». Il referma la portière derrière elle et ouvrit la portière conducteur lorsque les sirènes hurlantes de la police se firent entendre de toute part. Il sentit la peur montrer crescendo en lui et sursauta en sentant deux mains lui saisir les poignets, le plaquant contre la carrosserie de la voiture « Monsieur Andrea, vous êtes en état d’arrestation… » et écouta la coéquipière de Reyes lui énumérer les nombreux chefs d’accusation retenus contre lui. Il tourna la tête en direction de Victoria « Je suis désolé… Je voulais seulement te rendre heureuse… Je t’aime Mi Vida », puis se laissa conduire jusqu’à la voiture de police, mais marqua un arrêt en voyant le lieutenant Reyes s’approcher de celle qu’il aimait, et serra la mâchoire, se laissant pousser jusqu’à l’arrière de la voiture de police.

Jacob avait quitté l’appartement peu de temps avant la jolie brune pour rejoindre sa coéquipière qui ne posa pas de questions en voyant la mine fatiguée de son ancien coéquipier. Wendy se préoccupa uniquement de lui expliquer le plan, tout en lui rappelant qu’il n’avait pas le droit d’intervenir d’une manière ou d’une autre. Il était seulement présent en souvenir du bon vieux temps, et parce que sa petite-amie était mêlée à toute cette sombre histoire. Il avait accepté, et s’était laissé conduite jusqu’au lieu de rendez-vous. Les jumelles posées sur le nez, l’ancien lieutenant avait observé la scène du siège passager de la berline de Wendy qui avait quitté l’habitacle quelques minutes auparavant pour rejoindre les officiers en uniforme. Lorsqu’il avait vu Roberto empoigner sa petite-amie, il avait contracté la mâchoire, se résonnant pour ne pas répondre à ses pulsions. Il ne devait pas intervenir. Son ancienne coéquipière avait été dès plus claire sur ce sujet. Toutefois, il ne s’était pas fait prier pour quitter à son tour la voiture au moment où elle avait menotté Roberto. Il s’était avancé jusqu’à Victoria, jetant un bref regard à l’attention de ce dernier au passage. Il n’aimait pas ce qu’il lisait dans son regard en cet instant. Comme une promesse qu’un jour, il lui nuirait d’une manière ou d’une autre. Ce n’était qu’une question de temps.

Jacob ne chercha pas la confrontation et continua de marcher jusqu’à la jolie brune qui se trouvait en compagnie de Wendy qui s’était délesté de son fardeau auprès d’un officier en uniforme « Vous avez eu de l’instinct Vic’ » avait rétorqué cette dernière, alors que le trentenaire resta silencieux quelques secondes, puis finit par rétorquer « Je t’avais prévenu qu’il était dangereux, et tu ne m’as pas écouté… Si tu n’avais pas eu la présence d’esprit d’appeler Wendy, tu aurais finis comment ? ». Il se passa une main lasse sur sa barbe de trois jours, alors que sa coéquipière souffla un « Je crois que je suis de trop là… » en s’éclipsant. « J’ai eu peur pour toi… J’ai été terrifié… Je t’aime, ne doute jamais de cela… Mais je pense que pour le moment, j’ai besoin de digérer toute cette histoire » et fixa le sol quelques secondes avant de poursuivre alors qu’il croisa les prunelles de la jeune femme « Je sais que tu as un passé, que tu traines des casseroles, que tu n’as peut-être pas eu de jolies fréquentations, et j’étais prêt à accepter tout cela parce que je te connais, que j’aime la femme que tu es… Seulement, tu as préféré croire en un homme mauvais plutôt qu’en moi… Même l’amour qui nous rattache l’un à l’autre n’a pas été assez fort pour que je te fasse entendre raison… ». Sa voix était calme, mais une certaine lassitude perçait dans sa voix en cet instant « Parfois, il existe des personnes brisées par la vie qui s’attendent tellement à avoir mal un jour ou l’autre, qu’elles préfèrent nuire à leur propre bonheur lorsqu’il se présente pour ne pas souffrir plus tard… Et ces derniers jours, j’ai eu l’impression que c’était ton cas… à la différence, que je ne t’aurais jamais fait de mal… ». Il se rapprocha, déposa un baiser sur son front, puis ajouta « La vie t’as mis sur ma route, et je suis tombé éperdument amoureux de toi... Seulement, aujourd’hui, j’ai besoin de prendre du recul, de réfléchir à ce qui s’est passé… J’ai eu mal, tu m’as fait du mal… Et ce n’était pas ainsi que j’envisageais notre histoire… Et dans quelques semaines, quelques mois peut-être, on verra ce qu’il en est de nous deux… J'ai déjà pris mes dispositions. Je te laisse l’appartement. Eva va m’héberger et je vais l’aider avec l’arrivée du bébé… ». Il posa sa main sur sa joue et déposa ses lèvres sur les siennes, lui donnant un baiser qui avait le goût d’un au revoir, et y mit fin avec lenteur, tout en se reculant, puis tourna les talons.

« -oui. » oui, c’était un adieu. Elle voulait que ce chapitre de sa vie soit terminé. Totalement terminé. Elle voulait qu’il disparaisse de sa vie. Pour toujours. Elle aurait aimé qu’il s’en rende compte, qu’il prenne la bonne décision. Peut-être qu’il saute dans la voiture, qu’il démarre le plus rapidement possible afin de tailler la route et de semer les flics. Mais elle savait que ça ne se passerait pas ainsi. Elle l’avait comprit lorsqu’il lui avait fait mal dans le salon de l’appartement. Il ne partirait pas sans elle. Elle avait voulu lui faire entendre raison. Mais comme Vic venait de le souligner, il était encore plus buté qu’elle. Lorsqu’il se saisit de son poignet, elle fit de son mieux pour ne pas grimacer. Pourtant c’était douloureux. « -je ne viendrais p… » mais en entendant ce qu’il ajouta, elle eut le souffle coupé. « -tu n’es pas un assassin… » avait elle soufflé avec une tinte de désespoir dans la voix et dans les prunelles. Elle savait que la police allait intervenir. Alors elle le défia du regard avant de monter dans sa voiture. C’était le meilleur moyen de l’éloigner d’elle. Elle fut incapable de le regarder se faire passer les menottes. Lorsqu’elle sortie de la voiture, Vic pensait l’entendre la traiter de tout les noms, qu’elle l’avait vendu. Ce fut un tout autre discours qu’il prononça. La jeune femme posa un regard sombre sur son ex fiancé. Elle savait d’où venait ces paroles. Elles étaient là pour la faire culpabiliser. Pour la faire douter de ce choix que de le livrer à la police. « -j’aurai voulu que ça se passe autrement… » avait elle répondu avant de le laisser se faire conduire jusqu’à la voiture de police non loin.

Wendy lui posa une main sur l’épaule, et puis Jacob arriva. Elle aurait préféré qu’il se taise. Qu’il attende une ou deux heure de plus, qu’ils soient seul surtout. Ce fut un regard dur et sombre qu’elle posa sur lui alors qu’il prenait son ton moralisateur. Elle détestait ça. Quand il jouait son monsieur parfait. « -ce n’est pas le moment Jacob… » avait simplement soufflé la jeune femme en détournant le regard. Elle n’avait pas envie de laisser tout ce qu’elle contenait en elle, se déverser sans filtre sur lui. « -non Wendy… » elle soupira et marmonna : « -et merde… » en espagnol. Vic croisa les bras, et regarda ailleurs en se pinçant les lèvres. Un nouveau regard. Il pensait vraiment qu’elle s’attendait à ce qu’ils rentrent gentiment main dans la main. « -je crois que j’ai compris Jacob… » avait elle soufflé sans le quitter du regard, prenant un ton froid et distant. « -j’ai compris je t’ai dit. » elle voulait qu’il se taise avant qu’elle ne réplique quelque chose qu’elle allait regretter. Elle se sentait bouillir peu à peu de l’intérieur.  

Lorsqu’il embrassa son front, elle sentit des larmes perler aux coins de ses yeux. Elle ne dit rien. Elle le laissa partir. Deux jours plus tard, c’était elle qui partait. Elle avait besoin de changer d’air. Alors elle avait prit un billet d’avion pour l’Europe et après avoir dit aurevoir à ses parents, elle avait quitté le pays. Un mois… Elle avait décidé de partir un mois. Son patron lui gardait sa place, et sa mère étant malade, elle ne souhaitait pas être trop absente. Elle ne chercha pas à contacter Jacob. Elle envoya seulement un message à Eva pour lui dire que Jacob avait du courrier à l’appartement. En réalité, elle avait laissé une lettre sur le comptoir. Elle lui disait comprendre qu’il la quitte. Comprendre qu’il n’ai pas la force de lui pardonner. Qu’elle ne lui ferait pas l’affront de lui dire qu’elle était toujours aussi désolée. Concluait en disant qu’elle avait eut raison de résister, et qu’elle s’en voulait d’avoir céder. Aujourd’hui, il n’y avait plus rien entre eux. Même pas plus une amitié.

Jacob aurait pu attendre qu’ils soient seuls, que le parking soit débarrassé de l’ensemble des policiers présents, mais il n’en fit rien. Parce qu’il savait que s’il attendait, il serait incapable de prendre cette décision pourtant nécessaire à eux deux, pour leur relation. S’il attendait, il serait incapable de lui dire au revoir, de lui dire qu’il devrait prendre du temps pour réfléchir sur l’avenir qu’il souhaitait donner à leur relation. Alors il prit la parole tout en sachant que ça allait être difficile à entendre pour Victoria « C’est maintenant ou jamais… » souffla-t-il avant de tourner à peine la tête en direction de Wendy qui s’éloigna pour leur laisser un tant soit peu d’intimité. Cette manière de croiser les bras, de se pincer les lèvres… Elle n’avait pas mal en cet instant, elle était en colère. Il pourrait presque le ressentir à chacun de ces mots. « Je m’en moque que tu ais compris ou non Vic, j’ai besoin de te le dire » et finit par pousser un soupir, encaissant son regard et décida de s’éloigner. Il se rendit chez Eva, pratiquement les mains dans les poches, et cette dernière avait accepté qu’il reste silencieux tout le reste de la journée durant, puis il avait fini par évoquer une dispute avec Victoria et la fin de leur amitié… Ils avaient eu une longue discussion tous les deux assis sur le canapé du salon pendant que Roméo préparait le dîner, puis elle l’avait serré dans ses bras comme s’il n’était qu’un enfant qui avait besoin de réconfort. Toutefois, ce ne fut que dans l’obscurité et dans la solitude qu’offrait sa chambre, que Jacob laissa les larmes couler…

Deux jours plus tard, il se laissa glisser contre le comptoir de la cuisine, la lettre de Victoria entre ses doigts qu’il avait relu encore et encore, jusqu’à presque connaître chacun des mots inscrits sur le papier. Il avait pris un moment pour lui, puis s’était saisit de son portable et avait envoyé un message à la jolie brune : Je ne regrette pas d’avoir succombé. Pas un mot de plus et avait appuyé sur « envoyer ». Le mois qui suivit, Jacob n’avait pas échangé le moindre mot avec la jolie brune. Il s’était reconcentré sur lui-même, ne souhaitant pas dépérir une fois encore. Cette fois-ci, sans elle à ses côtés, il n’était pas certain de parvenir à remonter la pente seul. Il s’était donc concentré sur son travail, avait accepté les quelques sorties entre collègues que ces derniers avaient organisé pour l’obliger à garder la tête hors de l’eau. Il rendait également visite à ses parents, leur octroyait du temps, même s’il sentait bel et bien que tout son entourage se retenait de l’interroger sur cette séparation amicale avec Victoria. De temps à autre, il rendait également visite aux parents de Victoria pour s’assurer que la mère de cette dernière continuait son suivi auprès des médecins. Puis il y eut ce soir où il se décida à envoyer un message à la jolie brune : Je pense à toi. Simple, mais qui était aussi la vérité. Il avait beau ne pas sombrer, son cœur était marqué par son absence. Combien de fois avait-il rêvé d’elle ?! Combien de fois avait-il cru la voir ou encore sentir son parfum au détour d’une rue ?! Il ne se passait pas une journée, une heure, sans qu’il ne pense à elle, sans se demander ce qu’elle pouvait bien faire à l’heure actuelle… Elle lui manquait terriblement, mais il était incapable de lui dire. Peut-être avait-elle tournée la page de son côté. Peut-être avait-elle rencontrer un autre homme. Peut-être avait-elle décidé de l’oublier.

Elle était tout simplement partie. Elle se soignait exactement comme lorsqu’elle avait cru Roberto mort. Elle prenait de la distance ou la fuite. Elle laissa les gens faire leur choix. Vic voulait simplement laisser Jacob respirer. Il lui avait parlé de quelques semaines, quelques mois. Même s’il avait qu’il avait besoin d’une pause pour savoir, Vic avait décidé de faire le choix qui s’imposait. Elle lui avait fait trop de mal. Partir c’était comme le libérer. Il allait reprendre sa vie, l’oublier petit à petit… De l’autre côté de l’Atlantique, elle souffrait le martyre. Il lui manquait chaque jour… chaque nuit… Mais il n’y avait aucun retour en arrière possible. Elle n’avait pas répondu à son message. Ça ne servait à rien. Sauf à se bercer de faux espoirs.

Elle avait été tenté de répondre ensuite. Ça lui avait tellement serrée le cœur. Il devait oublier. L’oublier. Parce qu’elle ne voulait plus qu’il souffre à cause d’elle. Alors, elle avait effacé ce qu’elle avait écrit, et avait éteint son téléphone. Elle avait passé le reste de la nuit à pleurer. Vic avait beau être à l’autre bout du monde, elle ne profitait pas du voyage. Alors plutôt que de perdre sa place et de ruiner toute ces maigres économies, elle avait décidé de prendre son billet retour sans rien dire à personne. Elle voulait faire une surprise à sa mère. La surprise avait été de taille. Elle s’était installée dans son ancienne chambre, entre la table à repasser de sa mère et des souvenirs. D’ailleurs elle lui avait promettre de ne pas dire à Jacob qu’elle était revenue. « -non mama ! » avait elle crié un soir en se levant de table, les deux mains sur celle-ci. « -je… » elle avait réalisé qu’elle venait de crier et avait reprit avec plus de douceur : « -s’il te plait mama… c’est… je… » elle avait regardé sa mère, persuadée qu’elle était capable de lire en elle et de voir son cœur saigner. Alors elle avait baissé les yeux et avait finit pas s’asseoir. Elle avait pris son courage à deux mains et lui avait raconté. Le retour de Roberto, le choix qu’elle avait fait, ce besoin de lui accorder le bénéfice du doute. Elle avait ajouté qu’elle savait parfaitement qu’elle avait merdé, qu’elle savait parfaitement également ce qu’ils pensaient de Roberto. Sa mère n’avait cessé de la regarder avec douceur. « -depuis combien de temps es-tu amoureuse ? » avait simplement demandé sa mère toujours avec cette douceur de maman aimante. « -peu importe ce que je ressens. Ça n’effacera pas ce que je lui ai fait subir… » elle avait finit par lui faire promettre de ne rien dire à Jacob pour son retour.

Et pourtant, une semaine plus tard, elle était en retard au boulot. Et alors qu’elle criait un : « -bonne journée mama ! »[b] en passant la porte de l’appartement, elle s’était heurté dans le torse d’un homme. Pas besoin de poser les yeux sur son visage pour savoir de qui il s’agissait. Le parfum avait suffi. Pourtant elle avait soufflé un : [b]« -Jacob… » pas de façon surprise, mais de façon douloureuse. Elle n’avait pas été capable de rester plu longtemps là, coincé entre lui et la porte. Elle s’était extirpée et avait dévalé les escalier à la vitesse de l’éclaire, mordant ses lèvres à sang pour ne pas pleurer. Elle avait fait promettre à sa mère de rien dire, pas de rien manigancer.

En apprenant que Victoria avait franchi l’Atlantique, le chirurgien avait eu cette sensation de déjà-vu. Elle s’éloignait de lui, de ses proches, pour se reconstruire tant bien que mal… Il avait demandé du temps, elle y avait vu une rupture. Il avait parlé de plusieurs semaines ou de plusieurs mois. Elle avait entendu pour le restant de leurs vies. Elle en venait à regretter d’avoir succombé. Il n’en était rien pour lui. Il avait aimé l’aimer. Peu importe l’issue que venait d’avoir leur histoire, il en avait savouré chaque instant. Il avait aimé découvrir son corps, il avait aimé entendre son rire, il avait aimé venir se blottir contre elle à la fin d’une journée particulièrement difficile, il avait aimé manger une glace en fin de journée sur le bord de mer, il avait aimé leur baiser juste avant de partir chacun de leur côté pour le travail. Il en chérissait chaque seconde, et pourtant, c’était si douloureux… Jacob ne parvenait pas à l’oublier. Il avait finit par le lui dire, mais n’avait obtenu aucune réponse. Peut-être était-elle parvenue à tourner la page. Ce n’était pas son cas. Elle occupait chacune de ses pensées. Pour autant, Jacob n’avait pas fait de nouvelles tentatives. Il avait compris le message face à l’absence de retour de sa part. Elle ne voulait plus de lui dans sa vie et il l’acceptait. Difficilement. Mais il n’avait d’autres choix que d’accepter son choix. Ses proches savaient pertinemment que ce vide qu’elle avait laissé dans sa vie, aux côtés du chirurgien, ne pourrait jamais être comblé, mais ils eurent la politesse de s’abstenir du moindre commentaire, de la moindre intervention. Ils respectèrent tous le choix de ce dernier de ne pas faire de nouvelle tentative.

Son silence n’empêcha pas le trentenaire de se rendre jusqu’à la maison des parents de Victoria pour s’assurer qu’ils ne manquaient de rien, que la mère de cette dernière allait bien. Il n’eut le temps de frapper à la porte qu’on vint le bousculer en toute hâte. Il resta interdit. Il avait reconnu Victoria à l’instant même où il avait levé son regard sur elle. Son parfum, ses cheveux, sa voix… Son cœur fit un bond dans sa poitrine, et il souffla un « Victoria… » à peine inaudible alors qu’elle prononça son prénom en chœur avec lui. Il ne pensait pas qu’elle était revenue. Personne ne lui avait rien dit à ce sujet. Elle-même n’avait pas eu l’initiative de l’avertir de son retour aux États-Unis. Cette réalité fut difficile à encaisser pour le trentenaire qui la talonna après une brève hésitation « Victoria ! Attends ! » et finit par lui saisir le bras « S’il te plaît… Une minute », mais son portable sonna et l’ignora « Tu es revenue depuis longtemps ? ». Un second appel. Il leva son index « Une seconde » et porta le petit appareil à son oreille sans la quitter du regard. Il peinait à réaliser qu’elle se trouvait bel et bien devant lui. Elle était toujours aussi belle. Il l’aimait toujours aussi fort. Ses sentiments ne s’étaient en rien estompés avec le temps, seule la colère et la déception avaient disparu. « Je dois… Je dois aller à l’hôpital… On pourrait… » et se mit à sourire nerveusement, une main dans la nuque, trahissant son malaise « Se revoir ? ».