La maison disposait de deux salles de bain, et ils n'étaient que trois à utiliser celle du rez-de-chaussée. En outre ils avaient l'habitude de partager très peu d'espace pour beaucoup de monde, donc ils étaient plutôt organisés que ce soit dans l'utilisation des dits-espaces ou pour leur entretien. Et de toute façon avec Amara qui travaillait de nuit, il n'y avait que Nill et elle qui investissaient la douche. Potentiellement Asriel parfois, mais c'était plutôt rare puisqu'Angel et elle privilégiaient les douches communes.
Afin de retirer correctement l'huile de sa peau, Hazel s'était munie d'un gant de crin humide sur lequel elle avait frotté le savon, et ses mouvements sur le corps du loup étaient fermes et énergiques. Elle ne cherchait pas à lui faire mal, mais si elle ne le décapait pas ainsi elle ne pourrait pas éliminer le film gras qui le recouvrait. Et elle avait besoin du même traitement car forcément, elle n'était pas mieux lotie de s'être frottée contre lui. Son commentaire la fit sourire et elle y répondit par un baiser. La coylouve nettoya chaque parcelle du corps de son amant avec application puis le laissa se rincer tandis qu'elle s'occupait de sa chevelure.. plutôt emmêlée puisque son chignon l'avait abandonnée en cours de route. Elle se demanda un moment si sa salle de bain à lui serait plus adaptée pour s'amuser.

"Alors je réitère : on va avoir une semaine chargée, puis on rentrera et on organisera mon déménagement ? Si tu n'as rien contre les furets bien sûr. Mais je te préviens, c'est voleur, caractériel et énergique."

Elle ne voyait aucun problème à vivre avec lui, puisque tant que ce ne serait pas le cas ils ne feraient que des allers-retours entre chez l'un et chez l'autre. Elle se sentait seule ici et de toute façon elle voulait être avec lui, tout le temps. Et ça ferait plus de place dans cette maison, ce qui n'avait rien de négligeable. Elle aurait pu admettre que vivre loin de ses jumeaux pourrait la déranger mais ils étaient liés, et ils vivaient juste à côté, alors bon... Le plus gros problème que cela poserait serait entre Gretel et Amara, et ça c'était à Bran de s'en charger. Son instinct lui soufflait qu'ils étaient d'ores et déjà au courant du tournant qu'avait pris sa relation avec Asil, mais ils auraient le temps d'en parler.

Malgré toutes les idées qui lui passaient par la tête, Hazel resta sage et se laissa même faire par Asil, appréciant sincèrement qu'il cherche à prendre soin d'elle de cette manière. Elle se lava les dents puis le suivit dans la chambre et s'installa comme il le lui avait demandé, en profitant pour sécher autant que possible ses cheveux. Puis il revint la chercher alors elle installa une serviette sèche sur son oreiller histoire d'épargner son matelas, y déposa sa tête en ramenant tous ses cheveux dessus et se blottit contre le loup.

"Buenas noches, Mi Lobo."

Elle nicha son visage au creux de son cou et ferma les yeux, s'endormant bercée par les battements de son coeur.

-

Le lendemain matin Hazel s'éveilla avec le soleil, et s'étira longuement en essayant de ne pas réveiller Asil pour autant. Elle s'arrêta un instant pour le regarder, sourire aux lèvres, avant de se redresser et d'embrasser son front. La veille lui semblait si... irréelle. Elle avait besoin de s'assurer que tout était arrivé, qu'il était là, et cela lui plaisait. Elle finit par se lever toujours nue comme un ver et partit farfouiller dans ses vêtements à la recherche d'une tenue confortable. Elle opta pour une jupe arrivant au dessus des genoux noire dotée d'un large élastique qui ne lui serrera pas la taille, et passa un crop-top mauve laissant peu de place à l'imagination, mais qu'elle appréciait pour son tissu doux et ses détails de dentelle. Une paire de chaussures plates, quelques bijoux en argent, un scrunchie qui lui permit de nouer ses cheveux en une natte informe le temps de les préparer, puis elle sortit à pas de loup dans la cuisine. C'était le week-end et -presque- tout le monde était présent : Asil et Irina aux fourneaux, si bien que la table principale débordait de victuailles salées comme sucrées. Elle ne vit que les deux cuisiniers, sa jumelle, sa petite soeur et son cousin, mais aucune trace de la démone, d'Amara et Nil.

"Tu disais que vous n'aviez fait que DORMIR ensemble !"

D'une part, heureusement que la chambre était insonorisée. De l'autre elle fit les gros yeux à l'adolescente qui avait réagi à l'instant même où elle avait perçu l'odeur du loup entremêlé à celle de la coylouve, attirant un peu trop l'attention dessus selon elle. Hazel se contenta de lever les yeux au ciel tout en attrapant le verre de jus d'orange tendu par son frère, mais finit par sourire.
En attendant leur invité, la famille discuta d'un peu tout et rien. Gretel s'était jetée sur les cheveux de son double, l'ayant entraînée dans la salle de bain pour démêler sa tignasse sans la moindre délicatesse avant de lui décolorer les racines, laisser poser, rincer puis recolorer en bleu. Cela fait, tout le monde s'attela à lui faire des nattes ce qui prit étrangement peu de temps -la force de l'habitude-, et Hazel se permit même d'ajouter quelques décorations dorés dans sa coiffure. Gretel lui avait évidemment posé des questions, mais ne semblait pas dérangée par l'idée qu'Hazel se soit si rapidement mise avec Asil. Elle lui faisait confiance et elle comprenait, dans une certaine mesure. Angel avait râlé parce qu'il ne connaissait pas bien son prétendant mais, voyant le sourire de sa jumelle, il céda très facilement et décida de lui faire confiance. Gaëlle posait mille questions plus déplacées les unes que les autres et Irina écoutait les réponses avec intérêt, tandis que de son côté North n'en avait pas grand chose à faire.

La coylouve attendait le réveil de son compagnon pour aller préparer ses affaires, mais au moins il pourrait récupérer ses forces vu la quantité de nourriture préparée. Personne ne savait qu'elle partait, mais bon... Elle eut cependant une petite pensée pour son compagnon qui allait se retrouver seul face à une demi-douzaine de jeunes adultes curieux. Dans une meute plus classique, une louve aussi dominante qu'Hazel aurait pu se montrer protectrice, mais elle était sa soeur avant tout et savait faire la part des choses. Asil était sympa, Hazel lui faisait confiance, ça lui allait.

Lorsqu'Asil débarqua dans le salon, celui-ci était infesté de jeunes adultes en train de se chamailler pour des raisons diverses et variées. Hazel l'attendait, assise en tailleurs sur un tabouret avec un équilibre précaire, une main tenant une tasse de chocolat chaud fumant tandis que l'autre se retenait à l'assise pour lui éviter une chute. Il y avait un siège libre à ses côtés qu'elle lui désigna d'un signe de tête. Gretel avait passé un bras autour de la nuque de sa plus jeune soeur en utilisant sa main comme bâillon pour l'empêcher d'ennuyer leur invité, ce qui fit rire les autres. N'ayant pas vu Asil alors qu'il parlait, Angel s'empressa de lui signer la question alors elle se tourna vers lui avec un grand sourire.

"Ange et moi, on avait pas aussi bien dormi depuis des années. C'est rare qu'Hazel soit aussi calme la nuit.
Ne sachant pas trop s'il pouvait comprendre, le blond s'empressa de préciser.
-On est tous les trois liés et quand on dort nos barrières s'affaissent, on influence mutuellement la qualité de sommeil des autres.
-J'ai bien dormi aussi, à partir du moment où une certaine personne a cessé de venir me poser des questions sur à peu près tous les sujets que je ne maîtrisais pas.
Dans le fond, le coyote détourna les yeux comme s'il ne voyait pas ce qu'insinuait Irina.
-Mais encore ?
-Rien c'est juste qu'en attendant d'avoir un meilleur boulot j'ai repris mes études à distance, et je suis toujours aussi mauvais en histoire. Mais comme Irina s'y connaît bien...
-J'ai des connaissances variées mais superficielles, apprends tes cours au lieu de m'ennuyer.
-...Et sinon, Asil, ça a été pour toi ?"

Comme toujours, tout était prétexte à se chamailler dans la bonne humeur. Gretel relâcha sa petite soeur qui maugréa avant de se tourner vers la discussion North-Irina, laissant le soin à la louve se recentrer sur son intérêt principal : le compagnon de sa soeur. Ni elle ni Angel ne doutaient qu'il s'agissait d'autre chose. Quand leurs regards se croisèrent, Hazel se contenta de sourire. Elle attendit que le loup ait terminé de petit-déjeuner plus ou moins tranquillement pour le ramener dans sa chambre, jetant un vague coup d'œil au short dans sa poubelle et à son panier de linge sale. Avec un soupir heureux elle se retourna, avisant le coupable de ces crimes, puis le prit dans ses bras avec un grand sourire.

"Si ça te convient, je vais te laisser aller chez toi préparer tes affaires et je vais en faire de même ici, et on pourra se retrouver en fin d'après-midi chez Charles puisque c'est lui qui a les billets et tout le reste."

Elle avait mille et une choses à faire. Téléphoner à son patron, faire sa valise, expliquer à sa soeur ce qu'elle partait faire -et faire en sorte que celle-ci ne décapite pas Bran avant de l'attacher dans sa chambre pour l'empêcher d'y aller, et surtout préparer le cadeau pour Sierra. Mais avant toutes ces choses, elle se dressa sur la pointe des pieds pour embrasser tendrement son compagnon, les bras autour de son cou en guise d'appui.

"On doit voir Sierra demain soir, Charles et Anna arriveront le jour suivant, pour info."

Charles allait devoir gérer son frère, mais surtout lui et sa compagne étaient là pour enquêter sur les disparitions faës. Elle laissa partir Asil non sans un dernier baiser avant de s'atteler à son travail.

La journée fut... relativement longue. Si tout s'était bien passé avec son patron, les choses avaient été compliquées pour Gretel. Elle voulait venir, mais elles savaient toutes les deux que c'était une mauvaise idée, la magie du sang existait dans leurs familles et si Sierra la détenait elle aurait l'ascendant sur Gretel, alors qu'elle ne pouvait rien faire à Hazel quoiqu'il advienne. Du point de vue des esprits Sierra n'était qu'une passerelle parmi d'autres, mais la coylouve était la passerelle du serpent. Et Asil ne partageait pas leur sang, alors il ne craignait rien. Angel intervint tout de même pour lui dire qu'il était heureux pour elle, ce que Gretel confirma, alors la changeforme partait le coeur léger et savait son furet entre de bonnes mains.

Elle arriva devant la maison de son oncle à l'heure du goûter, armée de son violon et d'un sac à dos de randonnée bien rempli. Une valise était trop encombrant, surtout qu'elle avait l'intention de garder son sac dans la cabine avec elle. Elle inspira longuement avant d'aller sonner à la porte.

Les triplés étaient toujours reliés les uns aux autres. Cela passait par leur pièce mentale qui leur permettait de communiquer, mais également une forme d'empathie qui leur permettaient de sentir les fortes émotions des autres, bonnes comme mauvaises. Ils pouvaient réfréner ça la journée mais pas la nuit, et la période où ils faisaient tous les trois des cauchemars avait bien failli les tuer d'épuisement. Amara avait dû leur préparer une puissante décoction pour les contraindre à un sommeil sans rêves, ce qui était à peine mieux. Hazel frémit rien que d'y repenser. Gretel était loin d'être dupe et percevait le sourire du loup à travers la porcelaine de la tasse, qu'elle lui rendit, amusée.

-

Depuis qu'ils avaient rencontré le Marrok pour discuter de l'affaire des changelins, Anna ne se sentait pas très bien. Elle était en colère, impatiente et stressée. Elle avait peur de ce qu'il pouvait advenir de ces enfants, et de comment réagirait la population lorsqu'elle prendrait conscience de ce qui se tramait. Et elle s'inquiétait pour Samuel, pour Charles, pour Adrianna qui était à nouveau seule... La sonnerie retentissante la fit sursauter, elle échappa le morceau de sucre qu'elle s'apprêtait à glisser dans son chocolat chaud et le rattrapa in-extremis. Attendre deux jours de plus pour collecter des informations et pour que Charles termine son travail était insupportable.
Debout sur le perron, la jeune femme observait son oncle avec un grand sourire. Elle ne le craignait pas, vraiment pas. Bras armé du Marrok ou non, elle posait un regard doux sur lui comme elle le faisait avec absolument n'importe qui. Il se figea une seconde de trop et elle s'amusa de son trouble avant d'entrer lorsqu'il le lui permit, le rejoignant dans la cuisine. Asil n'était pas encore arrivé, visiblement.

"Bonjour !
-Oh, salut Hazel, l'oméga se figea un instant, arrivant à la même conclusion que Charles, et son sourire s'agrandit sincèrement. J'ai préparé du chocolat, tu en veux ?
-Avec plaisir. Merci pour le dossier, j'y jetterai un œil dans l'avion.
-Est-ce que tu penses que Sierra ne posera pas de problèmes ?
-Mh... Aucun que je ne puisse régler, je pense. La bonne nouvelle dans tout ça, c'est que Samuel va globalement bien. Il ne quitte pas sa forme de loup et s'est retranché dans les bois loin de toute population, mais les esprits ne le harcèlent plus pour le faire partir donc il n'est plus dans le même état de stress qu'au début.
-Comment tu sais ça ?
-M'en suis occupée. Je passe les longues explications, mais pour le schématiser disons que les esprits qui sont tout autour de nous ont toujours un pied dans leur monde d'origine, et que moi je suis capable d'y aller et de communiquer avec eux là-bas. J'ai aidé à les calmer et à les convaincre que Samuel n'était pas une menace, et je sais où il est."

Elle remercia Anna pour la tasse fumante qu'elle laissa refroidir devant elle. La dame Cornick semblait un peu perplexe, ça lui semblait si différent de la façon de faire de Charles avec les esprits... Elle n'était pas sûre de tout comprendre -elle n'était pas la mieux placée pour ça- mais elle faisait confiance à Hazel. C'était assez instinctif, même si elle n'aurait su le justifier. Le fait que son arrière-grand-mère puisse poser problème restait une source d'angoisse, mais elle se sentait déjà mieux de savoir que son beau-frère allait mieux.
Hazel récupéra tout ce qui concernait son voyage avec Asil après avoir d'abord rangé le dossier de l'enquête dans son sac. Les billets d'avion aller-retour, la location de véhicule sur place, l'hôtel... Elle retira d'ailleurs l'une des deux réservations qu'elle tendit à Charles avec un petit sourire, car ce n'était pas nécessaire d'être en chambres séparées pour eux. Anna sourit malicieusement et elles échangèrent un regard convenu.

Hazel avait l'habitude d'étudier les gens qui l'entouraient, et se trouvait assez douée pour deviner leurs pensées même s'ils étaient assez impassibles -comme son oncle présentement. Ça tenait plus de l'instinct qu'autre chose, mais elle se trompait rarement. Si elle constatait qu'Anna lui faisait naturellement confiance, Charles était plutôt sur la réserve et elle n'avait aucun doute du pourquoi. Elle fit pourtant mine de rien en dégustant sa tasse de chocolat chaud. Asil arriva peu après elle et en voiture, ce qui était une bonne chose puisqu'elle était venue à pieds. Anna lui adressa un grand sourire -elle aimait bien Asil malgré une première rencontre... malaisante, et il lui avait appris à maîtriser ses capacités d'oméga grâce à sa relation avec Saraï- et vint le délester de son cadeau, posant le pot sur la table avant d'humer le parfum des fleurs.

"Elles sont magnifiques, merci Asil. Tu veux du chocolat ?"

Les deux louves eurent l'occasion d'observer la chamaillerie de leurs compagnons, elles s'échangèrent un regard qui en disait long avec un petit sourire. Hazel ne s'en mêla pas mais elle se doutait qu'Asil improvisait son commentaire sur Opalia, bien qu'il n'ait pas tort : l'esprit n'avait l'air d'aimer personne hormis son créateur, et la tolérait tout juste elle. Charles pouvait voir la créature perchée sur l'épaule du loup avec une mine renfrognée, qu'Hazel trouvait adorable bien qu'il valait mieux qu'elle se taise. Quand  le Maure s'approcha d'elle, elle hocha la tête avec un grand sourire avant de terminer sa tasse, amusée par son analogie. Effectivement, le parallèle se faisait plutôt bien... Ça aurait pu coller s'il y avait un ange dans l'histoire. Quoiqu'il advienne, la volonté des noms terminant par la sonorité "el" était un fait de son père, bien qu'Amara soit certainement au courant. Elle songea rapidement que sa petite-soeur avait la bonne sonorité mais que la forme féminisée du prénom ne correspondait pas avec celles des triplés.

"Faites attention...
-Vous aussi. Charles, il ne faut pas que Sierra sache que tu es là pour les raisons que j'ai déjà donné, mais il vaut mieux que tu évites de te présenter aussi, Anna.
-...Pourquoi ça ?
-Les omégas peuvent calmer les esprits même s'ils ne les ressentent pas, avec de la musique par exemple. Tu peux être envisagée comme un attrait ou un obstacle, je ne sais pas trop."

Cette règle s'appliquait aussi pour elle. De toute façon Sierra voyait tout ce qu'elle ne contrôlait pas comme un danger potentiel... Anna se rapprocha mécaniquement de Charles en se disant qu'elle tuerait cette Sierra de ses mains si elle menaçait Charles. Asil et Charles pouvaient témoigner : elle avait tué de ses mains la sorcière qui terrifiait le Maure depuis des siècles et avait su calmer le mode berseker du Marrok en quelques heures alors qu'il avait fallu des siècles à son fils. Hazel apprécia la combativité de la louve.
Ayant terminé son chocolat, elle récupéra ses affaires pour suivre Asil après avoir salué leurs hôtes. Elle laissa le loup conduire puisqu'elle n'avait aucune idée d'où était l'aéroport, lui laissant l'occasion d'observer le paysage. Perdue dans ses pensées, elle était passée dans une sorte de mode autoguidé, comme un automate que l'on aurait programmé pour une tâche précise. Et elle fut ainsi jusqu'à ce qu'ils s'installent dans les sièges d'avion, en première classe pour avoir un tant soit peu de place et ne pas angoisser. Pour une fois elle fut heureuse que quelqu'un paie à sa place. Revenue de son errance, Hazel papillonna des cils pour revenir à elle et s'intéressa enfin à son compagnon dont elle vint prendre la main, se penchant même pour lui embrasser la joue.

"Je crois que j'ai eu une absence... Je suis désolée. Mais ça m'arrive souvent."

C'était peu de le dire. Elle n'avait pas vraiment voyagé dans le monde des esprits mais elle s'était baladée à la lisière, comme un vieux réflexe. Ils avaient de nombreuses heures de vol devant eux mais heureusement ils étaient sur des sièges-couchettes, avec des rebords pour un peu d'intimité, des écrans et des casques, et des collations -sans compter ce que la coylouve avait apporté, évidemment.

Ils étaient dans l'avion, paré au décollage. Hazel n'était pas une grande fan de ce moyen de transport, elle préférait voler de ses propres ailes -qui n'étaient pas tout à fait siennes, mais c'était une autre histoire- que d'être baladée dans un monstre de ferraille sur lequel elle n'avait aucun contrôle. Pour autant, avec Asil à ses côtés, elle ne se sentait pas particulièrement inquiète. Elle redressa les petites parois d'intimité et allongea son dossier pour le mettre en version lit tandis que ses doigts s'entremêlaient à ceux de son compagnon.

"Tant que je ne suis pas évanouie, tu n'as pas à t'inquiéter, même si je sais que c'est contre-nature pour toi."

Elle lui adressa un grand sourire et l'invita à s'allonger près d'elle. Il y avait même des oreillers et des plaids... Entre ça et les trois voitures pour neuf personnes, ça changeait pas mal. Hazel était la seule à relativement bien dormir puisqu'elle avait des apparences suffisamment petites pour trouver un spot confortable et s'allonger de tout son saoul, mais c'était quand même différent.

"Ma mère et ma soeur ont toujours du mal à laisser leur oméga derrière quand il se passe quelque chose et que je suis ailleurs, mais je t'assure qu'il n'y a pas besoin de s'en faire. Mon corps s'auto-gère très bien quand je ne suis pas là."

Ce qui n'avait pas été une mince affaire. La projection astrale lui permettait de balader son âme un peu partout tandis que son corps ne bougeait pas et, des années durant, elle restait statique et vulnérable. Mais à présent elle savait percevoir son réceptacle à distance et le bouger comme il le fallait, animé par des réflexes de survie.

"Si tu étais parfait Asil, tu ne m'intéresserais pas, elle se redressa pour se mettre à sa hauteur, posa une main contre sa joue avant d'appuyer ses lèvres contre les siennes avec un mélange de douceur et de passion. Te amo, Lobo. Ma place est à tes côtés quoiqu'il advienne et ce pour toujours. Quant à ma mère hé bien... Je suppose que nous verrons cela en arrivant, si mon téléphone ne fait que sonner ou pas."

Dans tous les cas son téléphone sonnerait, parce qu'elle partait voir son arrière-grand-mère. Hazel savait combien Amara avait souffert quand Sierra, qu'elle admirait tant, l'avait rejetée suite à l'activation de sa part animale mais surtout parce qu'elle avait préféré sa propre vie à celle de la meute. Amara allait être dans tous ses états, et cela faisait beaucoup de choses à encaisser avec sa relation avec Asil en plus. Et si Bran lui révélait leur lien pendant son voyage... Sa mère allait soit perdre la tête, soit égorger le premier qui la contrarierait. La coylouve proposa un plaid et un oreiller à Asil avant de se saisir des siens, s'emmitouflant avec plaisir dans la couverture. Elle farfouilla dans son sac afin d'en extirper son propre casque et un vieux mp3 qui appartenait à son père, puis se rallongea sans cesser de tenir la main d'Asil.

"Je vais dormir un peu, je préfère ne pas me laisser le temps de stresser parce que je n'aime pas l'avion."

Ce qui aurait forcément un fort impact sur Asil et serait désastreux. Hazel lança la musique et ferma les yeux, remontant la couverture sur sa tête pour se protéger un minimum de la lumière. Elle se réveilla seulement quelques minutes avant l'atterrissage et grimaça tout du long.
Grâce à Charles et son organisation impeccable, leur voiture de location les attendait sur le parking de l'aéroport. Il n'y avait pas trop de monde à cette heure, ce qui était plutôt appréciable, et l'hôtel était plutôt proche. La première chose que fit Hazel fut de vérifier les horaires du roomservice, et elle constata avec plaisir qu'il était effectif à tout heure du jour et de la nuit. Elle avait extrêmement faim mais n'était pas d'humeur à se fader tout un tas de gens dans un restaurant.
Leur chambre n'était pas très grande, mais joliment décorée dans des tons beige et doré. Il y avait un grand lit double en plein milieu, un bureau, une petite table d'appoint avec deux chaises, une penderie et le coffre-fort. La coylouve déposa son amas d'affaires près de la penderie avant de farfouiller un peu partout comme l'aurait fait un enfant, puis elle se rendit dans la salle de bain et sourit en voyant la grande baignoire dans laquelle elle ne tarderait pas à se prélasser. Ce n'était pas un hôtel haut de gamme, mais il faisait sacrément l'affaires. Elle retourna dans la partie chambre et, équipée du menu du roomservice, elle s'assit en tailleurs à même le sol pour regarder tout ce qui se trouvait sur la carte et faire son choix, avant de la tendre à Asil.