Peut-être qu’elle a raison. Peut-être que ton père cache un lourd secret qu’il n’en parle pas à ses propres enfants. Peut-être que ta mère le sait aussi, mais reste dans son silence pour ne pas briser ses rêves de famille parfaite elle non plus. Après tout, votre portrait de famille ne fonctionne que sur photo, avec des faux sourires et des tentatives bancales de faire ds repas à la maison. Les oncles et tantes n’y voient que du feu alors que vous vous lancez des regards à qui franchira le pas en premier et éclatera au grand jour. Peut-être que c’est juste ça.

Tu grimaces de nouveau, ta meilleure amie sait trouver les mots, mais tu ne la remercieras jamais assez pour ça. Tu sais que tu pourrais améliorer tes contacts avec les patineurs à ses côtés. Tu essayes déjà d’arrêter, mais quelques fois, le naturel revient, poussé par l’équipe qui te voit bien devenir capitaine d'équipe pour l’an prochain. Tu refuseras de toute façon, tu n’as pas les épaules pour autant de responsabilités. Tu le sais au fond de toi. Mais tu ne préfères pas y penser. Il y a autre chose qui te coince, qui va rendre ces vacances et la dernière année scolaire plus que compliqué, tu le sens.

- Je… Lisa….

Tu soupires et baisses la tête, abattu. Elle avait compris. Comme toujours, quand tu n’allais pas bien. Comme toujours, quand tu perdais ton sourire et cette étincelle de vie dans le regard. Comme toujours, quand tu avais besoin de vider ton sac, dire la vérité, celle que jamais tes parents entendraient.

- J’vais rien lui dire ok?!

Mais la vérité blesse, elle te rend aussi agressif qu’un animal coincé, boitant et errant à la recherche d’un abri de fortune.

- Puis ça servirait à quoi ?! J’ai aucune chance de toute façon. Elle me déteste et j’pourrais jamais l’approcher correctement sans qu’Myers soit dans l’coin, un autre patineur, sa famille ou autre… J’ai réussi à lui parler c’soir, mais elle m’a bien fait comprendre qu’elle voulait qu’j’lui foute la paix. Et j’le mérite de toute...

Que tu termines, penaud, te massant du pouce la paume de ta main. Mais il y a encore un point noir au tableau.

- Et j’ai pas envie qu’Karine s’en prenne à elle… C’est déjà assez compliqué comme ça pour la rajouter au bordel.

Jetant ton pot de yaourt dans la poubelle, profitant pour descendre laver ta cuillère alors qu’elle te répond, tes questions font le chemin dans ta cervelle. Tu vas devoir peut-être passer le reste de la soirée au téléphone avec Lisa pour éclaircir tout ça après, mais tant pis. Tu l’apprécies beaucoup elle aussi. Tu ne comprends pas ce qu’elle trouve à Sachs pour rester ami avec, mais ça, tu t’en fous à la limite. Tu lèves un sourcil à l’adjectif utilisé par ton amie et pouffes.

- Incroyable ? Ne reprends pas les mots d’McQueen s’il te plaît. C’est peut-être le seul truc que je pourrais plaindre chez Sachs, c’est d’être la cible de cette pétasse.

Tu remontes dans ta chambre et commences à te changer pour la nuit, ou alors pour le peu que tu dormiras. De toute façon, il va bientôt faire trop chaud dans ta chambre pour que tu puisses survivre en dormant avec un haut. Tu mets juste un t-shirt et ton jogging avant de te placer devant ton ordi, téléphone toujours coincé sous ton oreille.

- M’enfin. Normalement, oui, s’il était arrivé un truc, Lisa serait déjà en train d’agir. Tu sais comment elle est. Elle y va jamais par quatre-chemins avec ce crétin. J’trouverais bien ce qu’il cache, t’en fais pas pour ça. Détective Myers en action !

Que tu clames fièrement, le dos droit, le sourire sur le visage et les yeux déjà rivés sur ta messagerie instantané pour chercher la jeune Hampton dans ta liste de contact.

- T’sais quoi ? Reste tranquille, prend une bonne douche, oublie cette histoire et dort dans ta couette comme un bébé. Tu as une grosse saison estivale à préparer. On a les examens aussi, mais ça, je m’en occupe, te ferais des notes du tonnerre et tu vas tout déchirer ! Moi j’m’occupe de Sachs. Deal?

Elle grimace à l'évocation de Karine, une blondinette persuadée que tout lui est dû, que le monde devrait être à ses pieds et qui squatte la patinoire seulement pour baver sur les hockeyeurs - enfin, surtout sur Aayden - alors qu'elle n'est pas fichue de tenir plus de trente secondes avec des patins aux pieds, même sans être sur la glace. La personnification de l'enfer en personne, du genre psychopathe. Il faut au moins qu'elle le soit pour avoir essayé de diviser Aayden et Lisa, agacée par le fait qu'ils soient si proches, ne comprenant pas pourquoi Aayden tenait autant à la patineuse.

"- Arrête, si la connerie avait un prénom, ce serait certainement le sien." elle lève les yeux au ciel. "C'te pimbêche insupportable."

En attendant, ça ne leur apprend pas grand chose sur le comportement bizarre que le jeune homme a eu aujourd'hui, même si Andrew promet de se pencher sur la question et de trouver une réponse à ces questions qu'ils se posent. Elle pousse un long soupir en massant ses temps, le téléphone bloqué contre son épaule.

"- J'te jure, ce type va finir par me rendre folle." elle soupire. "Il m'embête pas déjà suffisamment quand il est là hein, il faut AUSSI qu'il m'embête quand il n'est PAS là." Elle inspire profondément comme son meilleur ami continu de parler, hochant la tête alors qu'il ne peut pas la voir. "Deal ! On t'as déjà dis que t'es un amour, Andy ? Merci de toujours être celui sur qui je peux compter..."

Il affirme qu'il ne va rien dire à Cornelia et Lisa ne peut pas empêcher une petite moue de se dessiner sur son visage, un peu déçue, même si elle sait que cette réponse est évidente et qu'elle n'aurait pas pu s'attendre à autre chose de la part de son meilleur ami. Elle pousse un soupir léger en observant son écran et se passe une main sur le visage. Elle n'aurait pas pu s'attendre à ce que ce soit simple, mais elle aurait évidemment préféré. Forcément, les raisons sont cependant nombreuses pour que son meilleur ami se montre réticent à l'idée d'assumer ses sentiments et les avouer à la principale concernée.

"- C'est sûr que si tu ne lui en parle pas, t'as aucune chance." remarque la demoiselle en levant un sourcil. "Qu'est-ce qu'il peut t'arriver, au pire ? Qu'elle te dise non ? Si tu ne tente pas, le non tu l'as déjà..."

Forcément, la relation plutôt tendue entre eux ne facilite pas les choses et c'est vrai qu'il est difficile de voir Cornelia sans qu'Andrew soit dans les parages. A la patinoire comme au lycée, ils sont presque toujours fourrés ensemble. Mais ce n'est pas non plus impossible de la voir sans Andrew. Surtout s'ils se débrouillent de faire une petite diversion. Lisa peut toujours s'occuper de ça pour laisser à Aayden le champ libre afin de parler avec la patineuse. Andrew n'est définitivement pas ce qu'il y a de plus gênant dans l'affaire.

"- Par contre... Comment ça tu lui as parlé ce soir ? T'es pas parti de la patinoire un moment avant nous ? J't'ai pas vu en sortant..."

Elle grimace encore quand il évoque Karine à nouveau. McQueen est probablement l'une des filles les plus insupportables qui soient et que l'on a guère envie d'avoir sur son dos. Lisa en sait quelque chose, son seul crime étant d'être proche d'Aayden.

"- T'occupes pas d'elle. C'est quoi le plan ? Rester tranquillement dans ton coin en attendant de la voir tomber amoureuse d'un autre garçon ? Avoir envie de défoncer la tête d'un spectateur à coup de crosse parce que ce sera son copain ? Si tu l'as remarqué, tu sais que d'autres la remarqueront aussi..."

Tu reviens un peu à Lisa, gardant la baie vitrée dans ton champ de vision, légèrement inquiet en voyant l’heure qu’elle n’avait toujours pas fermé les lumières. Tu serres les dents et ne réponds pas de suite quand elle te confirme que sans lui parler, tu ne sauras jamais ce qu’elle en pense elle non plus. Mais tu es encore trop convaincu que ta démarche sera dans le vent, une rumeur à lancer pour briser quelque chose, ta carrière ou la confiance de ton père en toi. Une espèce d’épine dans le pied que tu gardes pour le moment. Parce que l’équilibre précaire dans lequel tu vis te convient encore un peu. Tu grimaces quand Lisa insiste.

- Mais j’ai pas de plan !

Tu t’énerves un peu et écoutes la suite et secoues la tête avant de te lever pour passer tes mains sur ton visage, sur le haut de ton crâne et les joins à l’arrière, baissant la tête, comme pour ne pas hurler. Tu t’accroupis et inspires doucement. Tu te relèves et retournes à ton écran, encaissant comme tu peux.

- Et ouais, p’t-être que je vais faire ça ! Elle s’ra mieux qu’avec un abruti comme moi !

Que tu réponds sèchement en baissant le regard, un peu coupable d’avoir hurlé sur ta meilleure amie. Elle ne veut que ton bien, sait ce qu’il faut dire pour que tu ouvres les yeux, tu le sais. Tu l’adores pour ça. Tu secoues la tête, plus calme.

- Désolé…

Que tu dis, penaud. Puis tu reposes tes bras sur la table et hoches la tête, cherchant tes mots.

- Nan mais… C’soir j’ai… j’avais fait tomber un truc dans les vestiaires et… j’y suis r’tourné pour l’chercher… Puis en rentrant, j’l’ai croisé et… j’sais pas j’ai… j’lui ai proposé d’rentrer ensemble… Et… J’ai paniqué… J’voulais pas qu’elle arrive en r’tard chez ses vieux et j’l’ai… Porté sur mon dos pour rentrer...

Silence. Tu secoues la tête et détournes le regard, le reportant une énième fois vers la baie vitrée, espérant la voir déambuler dans sa chambre.

- Vas-y, fous-toi de ma gueule.

Tu ne le vois pas, mais tu devines déjà la tête que fait la petite brune quand tu prononces le nom de famille de celle qu’il faut éviter. De toute façon, cette fille est le cliché parfait de la tête à claques. Blonde, jolie pour certains, riche, pompom girl, elle sait chanter, danser, elle a un harem à ses pieds, mais non. Elle a visé un mec qui n'a rien demandé, qui a jamais fait autre chose que se concentrer sur le sport qu’il pratique et qui a déjà une meilleure amie qui le met en garde sur ce genre de sangsue. Mais de toute façon, à la place de Lisa, tu lui aurais aussi dit de ne pas approcher cette nana.

- Effectivement. Une vraie plaie. Il paraît qu’elle sera là samedi pendant les entraînements.

Que tu répliques, soupirant d’avance de la voir dans les gradins en train de se pavaner devant l’équipe en train de baver, sauf éventuellement Sachs qui prendra la poudre d’escampette quand il verra la concernée. Tu souris en voyant que Lisa est connectée et sûrement déjà en appel avec le hockeyeur, donc tu attends un peu avant de lui envoyer un message, concentré de nouveau sur ton amie.

- Folle ? Vraiment ? Et oui, on me l’a déjà dit, merci. Mais blague à part. Va te reposer. J’te tiens au courant si j’ai un truc.

Folle ? Tu pouffes intérieurement. C’est vrai qu’elle t’en parlait de plus en plus souvent du blond, même si lui, en parallèle, s’était calmé sur ses attaques. La maturité ? Ouais non. Tu as du mal à y croire, même si, du peu que tu t’autorises à voir par curiosité, il est l’un des plus posés de son équipe… Sauf quand il s’énerve. Là, tu avoueras, que même eux ont du mal à le stopper. Tu soupires et commence alors à rédiger ton message pour Hampton, espérant que Cornelia ira dormir, oubliant ce qui venait de se passer, juste pour ce soir.

*Hey, Lisa. Ça va ? J’dois te parler de Sachs. T’as un moment ?*

- On s’voit demain de toute façon. J’crois qu’on commence plus tard en plus. Un cours de biologie qui saute ou une connerie du genre.

"- C'est pas vraiiiiiii." soupire la demoiselle. "Elle veut pas passer sous un bus comme dans Lolita malgré moi ? Non pardon, c'est vrai que c'est pas bon pour mon karma... Fait vraiment chier !"

Elle pousse un nouveau soupir en imaginant déjà Karine et sa bande de copines installées ce samedi dans les gradins de la patinoire alors même qu'elles ne comprennent pas grand chose à ce sport, pour ne pas dife rien du tout. Tout ce qui les intéresse, ce sont les joueurs, pas le jeu en lui-même. Ce n'est pas.comme si Karine avait laissé le moindre doute là-dessus.

"- Merci ! Espérons que tu ne trouve rien de préoccupant..."

Mais il a raison, en ce qui la concerne, elle a besoin d'aller se reposer. Le lendemain elle aura des cours et encore son entraînement de patinage, comme tous les jours. Elle a donc besoin d'être en forme et pour cela, il faut qu'elle aille dormir. Mais bien sûr, avant ça, elle doit encore prendre sa douche. Elle acquiesce donc à son propos.

"- C'est jamais les maths qui sautent..." se plaint elle. "Allez je vais prendre ma douche ! Bonne nuit Andy !"

La communication coupée, elle prépare ses affaires pour le lendemain puis retire ses vêtements, s'enveloppe dans son peignoir, attrape ses affaires de nuit et file prendre une bonne douche. Lavée, les cheveux encore humides, elle descend manger un morceau en vitesse puis remonte, lave ses dents et revient dans sa chambre. Ouvrant la fenêtre, elle sort quelques minutes sur le balcon, son regard promenant sur la façade voisine, perdue dans ses pensées.

Il n'a pas de plan mais ce n'est pas un problème. Un plan, ça se trouve. Le principal c'est d'avoir déjà une idée de ce qu'il veut faire. Lui parler ou se taire... évidemment, Lisa ne saurait que trop lui conseiller d'opter pour la première option et c'est d'ailleurs celle-ci qu'elle défend. Il peut très bien se jeter à l'eau, essayer d'obtenir un oui, puisque le non il l'a déjà, à ne pas oser se dévoiler. Tout ce qu'il risque, c'est que la jeune femme ne veuille pas de lui. Effectivement, ce n'est pas ce qu'il y a de plus agréable, mais ce ne serait pas un drame non plus. Du coup, il serait fixé et il pourrait avancer. Il n'aurait pas besoin de rester dans cet entre-deux. Et puis s'il ne dit rien il prend le risque de voir quelqu'un tomber amoureux de Cornelia juste sous son nez, sans s'être autorisé la moindre chance. Ce n'est pas ce que la jeune femme veut pour lui, évidemment. Seulement, Aayden est sur les nerfs et alors qu'il est généralement calme avec elle, il perd son sang-froid cette fois avant de se reprendre rapidement, présentant ses excuses à Lisa.

"- C'est pas grave. Mais ne dis plus jamais que tu es un abruti !" proteste la demoiselle.

Il peut s'en prendre à elle, il peut crier et hurler s'il en a besoin, mais il ne peut pas, en revanche, douter de lui. Pas douter de la personne qu'il est et qu'elle connait bien. Elle le lui interdit, quelques soient les raisons qu'il pourrait avoir de remettre sa parole en doute.

Elle écoute attentivement le récit de son ami et ses yeux deviennent ronds comme il lui raconte avoir porté Cornelia sur son dos pour la ramener chez elle, après avoir paniqué à l'idée qu'elle puisse arriver trop tard. Alors ça, pour une surprise, s'en est une. Si elle avait deviné les sentiments de son meilleur ami pour la patineuse, ça en revanche, elle ne l'aurait jamais vu venir. Forcément, imaginer la scène a de quoi faire sourire.

"- NOOOOON je ne me moque pas bien sûr, jamais... Mais comment elle a réagi ?" questionne la jeune femme avant de jeter un œil au message qu'elle vient de recevoir, de la part d'Andrew. Hey ! Je suis en visio avec lui justement. Je te fais sonner après ? Je suppose que Corny t'as raconté ?

Elle confirme que tu n’es pas non plus l’abruti que tu prétends être. Aux yeux de ta famille tu l’es un peu, quand même, juste assez intelligent pour avoir la moyenne qu’il faut pour pouvoir avoir ta bourse. Mais pas assez pour être un génie non plus. Au grand damne de tes parents, tu n’étais pas l’enfant trop parfait qu’ils voulaient. Ils avaient un peu loupé avec les deux autres, ils espéraient chacun avoir quelque chose de toi… Loupé. Et tu vas en rajouter en ayant le palpitant facile pour la voisine. Voisine que tu aperçois au loin sur son balcon.

Tu déglutis et recules dans ton siège pour pouvoir mieux regarder. Tu l’aperçois en peignoir et devines rapidement qu’elle sort sûrement de sa douche. Tu recules un peu, basculant sur tes pieds arrières de la chaise. Mauvaise idée, mais tu n’as pas le choix si tu veux être plus ou moins discret dans ton observation.

- Elle a surtout gueulé en fait. J’crois qu’ai perdu un ou deux niveaux d’audition, mais bon. Au moins, ça m’a fait l’cardio.

Sûr qu’avec un poids plume sur le dos en courant comme tu l’avais fait, tu ne pourras pas nier que c’était sportif. Inattendu, mais un bon exercice. Tu te grattes la tempe, te tenant à la table d’une main, toujours dans un équilibre précaire.

- J’me suis arrêté à la rue derrière pour qu’elle puisse descendre et continuer sans qu’on nous voie comme ça, tu vois ? Et...AAAHHH!!

Hurlement qui se fait… Parce que tu avais sans le vouloir lâcher ta prise sur la table, tombant en arrière comme une masse. Tu grimaces, attendant de voir si tu as mal, si on t’a entendu. Tu ouvres un œil sous le silence et lèves le pouce pour qu’elle le voie à l’écran.

- J’vais bien!!

Tu te redresses un pour te remettre devant l’ordi et soupires.

- J’ai glissé, te marre pas. J’disais quoi déjà?

Tu éclates de rire quand la petite brune te proposes de foutre Karine sous un bus, comme ce film que vous aviez vu ensemble une fois. Tu essayes d’imaginer son karma qui déconne à cause de ça, par la simple idée de vouloir la pousser pour qu’elle se loupe. Tu secoues la tête et ranges un peu ton bureau et hoches la tête.

- Mais non, ma Puce. Ton karma est parfait. Une petite écartade comme ça changera rien. L’mien par contre, il est déjà foireux que ça changerait rien.

Tu rigoles un peu, en imaginant le tient. Pas qu’il est aussi bancal que ça, mais disons qu’avec tes frères aînés, heureusement qu’ils sont comme tes parents et que tu mets des paillettes dans leurs vies. Littéralement même quelques fois. Tu souris un peu en voyant la notification du message de réponse de Lisa et souris.

- Allez Corny. A demain.

Tu secoues la tête en raccrochant et tapotes de nouveau sur ton ordi pour pouvoir à Lisa, cette douceur sans nom, cherchant machinalement un paquet de bonbons dans un tiroir de ton bureau. Un peu trop douce comme nana pour rester dans les pattes de Brutus à ton goût, mais personne ne choisit les amis des autres hein ? Tu prends une grande inspiration avant de répondre, voyant bien qu’elle était déjà occupée, comme tu le pensais. Tu mâches doucement tes bonbons, écrivant tranquillement ta réponse.

*Prend le temps ma Belle. J’ai toute la soirée devant moi. Et ouais elle m’a dit ça presque comme s’il l’avait menacé de monter sur son dos. Elle a paniqué et a hurlé de lui coller un procès s’il la faisait tomber. C’est quoi sa version ?*

Tu te doutes bien qu’il avait une autre version lui aussi. Tu veux quand même avoir ses dires, sait-on jamais si Corny a aussi exagéré la situation.

"- Je ne suis tellement pas surprise !" remarque Lisa comme son meilleur ami confit avoir été confronté à une véritable alarme anti-incendie lui ayant fait perdre un à deux point d'audition. "En même temps, quelle fille saine d'esprit ne hurlerait pas quand on l'attrape pour la porter sur son dos comme si tout était normal, quand ça ne l'est pas ? Je me le demande." elle rit encore.

L'image a de quoi faire sourire, car Lisa imagine fort mais la scène mais ça ne les aide pas beaucoup dans l'entreprise visant à gagner les faveurs de la patineuse, dont elle suppose facilement qu'elle n'a rien dû comprendre. Elle n'est pas certaine qu'Aayden ait lui-même compris ce qu'il faisait ou voulait faire, d'ailleurs. Mais, au moins, il a pensé à ce qu'on ne les voit pas dans une telle situation. Elle rit d'autant plus.

Comme il parle, il se casse la figure de sa chaise et Lisa le voit disparaître de l'écran dans un grand hurlement qui la fait hurler de rire, en même temps qu'elle s'inquiète de la possibilité qu'il se soit fait mal. Mais rapidement, le pouce du jeune homme apparaît à l'écran et la demoiselle peut le voir se relever, reprenant place dans son siège alors que la lumière s'est éteinte à la fenêtre de la façade d'en face. Il semble avoir perdu le fil.

"- Tu disais que tu l'avais déposé à une rue de chez vous... Si elle hurlait aussi fort que tu me le dis, c'était sans doute préférable, oui !" affirme Lisa.

Elle n'ajoute rien, se gardant bien de dire que si Cornelia hurlait vraiment fort, alors des voisins avaient peut-être regardé dehors et aperçu la scène par leurs fenêtres, mais consciente que cette éventualité pourrait faire flipper son meilleur ami, elle se contente de ne rien dire. Inutile d'ajouter au stress qu'il ressent déjà.

La notification de son ordinateur attire son attention comme elle reçoit un nouveau message d'Andrew et son cœur manque un battement quand elle lit celui-ci. Elle pourrait presque l'entendre dire ces mots. Presque l'entendre lui donner ce surnom qu'elle lit et... une nuée de papillons semble s'être perdue dans son ventre. Lisa dessine sur son visage un sourire idiot. Bien sûr, c'est d'autant plus stupide qu'elle ne devrait pas perdre de vu qu'Andy est son ami et que ce surnom, de fait, ne revêt rien de plus que le reflet de cette amitié mais...

*A peu près la même, je dois dire ! Il m'a dit qu'il avait perdu un ou deux points d'audition, mais à part ça... Elle n'a pas apprécié la balade ? Je ne comprends pas ! C'est si désagréable d'avoir un chevalier servant ? . Il m'a dit qu'il avait peur qu'elle rentre trop tard chez elle.*

Tu soupires alors qu’elle rigole, comme si tout était normal. Elle te confirme de toute façon que la façon d’aborder la question de raccompagnement de la jeune patineuse était tout sauf habituel venant de toi et que sa réaction était légitime. Tu sais qu’elle a raison, maintenant que c’est passé et que tu es calmé, que tu peux y repenser à froid. Puis, l’esprit ailleurs, tu as fait ta chute magistrale. Au moins, tu n’as pas mal et cela t’a permis aussi en te redressant de voir que la lumière était éteinte en face. Un long soupir te prend et secoue doucement la tête.

- Ça change rien au problème. Jamais elle voudra m’approcher avec ça. Déjà qu’elle m’approchait pas beaucoup… Mais là, la seule réaction que j’aurais d’elle, c’est qu’elle parte en courant comme un lièvre… C’tout…

Tu te renfrognes un peu et te masses la tempe. Vivement les vacances d’été quand même. Au moins pour souffler un peu, penser hockey et pas à mater ta voisine le soir quand elle balade sur son balcon en peignoir avant d’aller se coucher. Ou à lorgner sur une photo volée parce qu’elle est tombée dans ta voiture quand tu l’avais POUR UNE FOIS amener quelque part parce qu’aucun de ses parents ne pouvaient la conduire non plus et que tu étais le seul qui connaissait l’adresse. Tu serres un peu les dents et baisses la tête.

- M’enfin… C’pas grave. Y a pas d’plan et d’solution. T’casses pas la tête. J’ai fait de la merde ce soir, j’vais récup c’que j’ai semé avec elle et c’est tout…

Tu regardes un peu l’heure sur ton ordi et soupires en te rappelant doucement qu’il fallait que tu entames ton propre rituel nocturne. Tu soupires et t’étires un peu en continuant.

- Hey, t’sais quoi. J’vais aller me doucher et aller dormir… J’ai un gros entraînement samedi en plus… Et un contrôle… Ça va aller si j’t’abandonne ? On s’voit demain de toute façon.

Profitant du temps de calme pour fouiller internet, parlant avec d’autres connaissances qui parlent de près ou de loin avec Sachs, tu ne trouves malheureusement rien en rapport avec un changement soudain de caractère venant du hockeyeur. Encore moins concernant ta meilleure amie. Ce qui ne semble pas du tout concorder avec ce qui venait de se passer ce soir. Tu te grattes la tête, perdu et regardes la réponse de Lisa en souriant. Tu pouffes un peu. Qu’est-ce que tu peux aimer l’humour de cette nana. Son franc-parler aussi. Peut-être pour ça que Sachs la supporte, elle est la seule patineuse qui peut lui tenir tête, finalement.

*Ouais. Corny m’a dit qu’elle avait gueulé comme si sa vie en dépendait. J’aurais payé cher pour voir ça en vrai.*

Bon, tu aurais eu peur qu’il ne la blesse aussi, mais dans le fond, faire sortir la petite brune de sa zone de confort est aussi appréciable vu les prochaines épreuves de stress qu’elle va devoir subir dans sa carrière… Autant l’habituer un peu à l’inconnu. Tu profites un peu du mouvement de la discussion pour poser tes doutes, tes craintes. Enfin, celles de ton amie. Toi, savoir que le gardien se drogue, ça te donnera juste une nouvelle raison de le cogner et lui faire manger tes patins dans la bouche. Tout en restant très sceptique sur cette hypothèse.

*J’suis sûr qu’elle aurait apprécié la balade si c’était pas aussi … Étrange. Et c’est aussi ce qu’elle m’a dit, mais… Ça n’a pas de sens. Pourquoi il s’inquiéterait qu’elle ne rentre tôt ou pas ? J’veux dire.. Brutus s’en fout d’elle en temps normal. Il a quoi ? Il va bien ? Enfin, t’as rien vu d’inhabituel ? Genre .. Des trucs dans ses affaires qui devraient pas y être?*

"- Tu sais, elle ne peut pas te dire oui si tu ne lui en laisse pas l'occasion donc... essaie juste d'être gentil avec elle ? J'ai dis gentil, pas flippant hein ?" remarque Lisa en levant un sourcil. "Peut-être qu'au début elle trouvera ça étrange mais, si ça devient une habitude, elle pourra se rendre compte que t'es pas aussi idiot qu'elle l'a toujours cru jusqu'ici, bien que j'ai essayé de plaider ta cause par le passé. Faut dire que tu m'aidais pas beaucoup sur ce coup-là." remarque la rouquine.

Elle pousse un soupir comme il est persuadé qu'il n'y a pas de solution à son problème et qu'il doit seulement se préparer à récolter ce qu'il a semé avec Cornelia. Lisa fixe son écran, secouant la tête en oubliant Andy un instant, le temps pour elle de dévisager Aayden. Il ne peut pas dire ça. Il ne peut pas partir du principe que c'est forcément mort et que c'est immuable. Parce que si certaines choses le sont bel et bien, ça, en revanche, ça ne l'est pas. Mais, évidemment, elle ne dit pas que ce sera facile, loin de là. Il faut juste que... Il interrompt ses pensées en reprenant la parole, parlant d'aller se doucher et dormir. Il a un gros entraînement ce week-end et de toute façons, ils se voient samedi. Mais Lisa n'entend pas le laisser partir comme ça. Pas sans avoir au moins implanté une petite graine dans son esprit.

"- Cornelia n'est pas ce genre de fille qui va te faire récolter ce que tu as semé, tu sais... Oui, au début ça risque d'être un peu bizarre pour elle que tu te montre sympa et donc... peut-être que la situation le sera. Mais si elle voit que ça dure... Je ne vois pas pourquoi elle ne pourrait pas t'apprécier." souffle Lisa. "Et, à terme, peut-être même sortir avec toi ! Et je sais ce que tu vas me dire mais tu sais quoi Aayden ? On s'en FICHE de ce que vos pères disent ! Et maintenant, va dormir. T'en a besoin. On se voit demain ! Bisouuuuus !" dit-elle en coupant la caméra pour ne pas lui laisser l'occasion de protester.

Elle observe les messages qu'Andy lui a envoyé pendant ce temps là, tiquant comme toujours sur le surnom donné pour désigner son meilleur ami. Brutus. Elle pousse un soupir et tape rapidement sur son téléphone. Hey, pas devant moi ! Je sais que c'est l'un des surnoms que vous lui donnez mais, pour moi, ce type c'est toujours celui qui m'a ramassé chaque fois que je suis tombé quand je ne savais pas patiner. Celui qui a toujours cru en moi et qui m'a toujours soutenu quoi que je fasse. Et qui était là pour moi quand mon père a décidé que se taper sa secrétaire, c'était mieux que d'assumer sa fille.

Elle pousse un soupir. Elle sait bien qu'Aayden n'est pas simple à comprendre, ni facile à vivre pour qui n'est pas de son cercle. Mais... Reste qu'elle n'aime pas lire ce genre de choses à son sujet. Peu importe, elle lance un appel avec Andy cette fois, s'attendant à le voir apparaître sur l'écran. Ce sera plus simple pour discuter. Et comprendre son dernier message.

Tu sais qu’elle a raison. Évidemment qu’elle a raison. Tu sais qu’elle a les mots justes, à chaque fois. Chaque putain de fois. Elle connaît tes points faibles, elle connaît comment te parler. Tu gardes la tête baissée, te grattant un peu l’arrière du crâne, grimaçant. Oui, évidemment, cela prendra du temps, tu vas devoir redoubler d’efforts et ne pas être flippant effectivement. Tu vas devoir changer d’attitude, essayer de montrer que tu t’intéresses vraiment à elle. Que tu n’es pas là pour la descendre. Plus facile à dire qu’à faire hein ? Tu souffles un peu et redresses la tête.

- J’suis désolé… J’fais comme je peux ok?!

Tu ne sais plus vraiment quoi faire en vérité. Tu n’as pas vraiment d’idée de comment amener les choses avec elle. Tu as juste peut-être peur, mais c’est légitime. Lisa le sait sûrement. Tu veux essayer d’oublier, ne pas y penser et aller dormir, mais tu croises le regard de ton amie et restes légèrement sur le cul en écoutant son monologue. Tu essayes de placer un mot, mais elle débite plus rapidement, tu as à peine le temps de comprendre tout ce qu’elle te dit qu’elle raccroche.

- Je… Li… Sa...

Tu bugs devant ton écran et passes tes mains sur ton visage en soupirant. Tu fermes ton ordi un peu rapidement, allant sous la douche chaude pour calmer tes nerfs. Tu reviens ensuite dans ta chambre pour te changer, jeter un dernier coup d’œil au balcon, soupirant avant d’aller te coucher, essayant de te remémorer un peu la soirée. Tu roules un peu sur le côté pour te cacher sous ta couette et essayes de t’endormir, te rappelant alors doucement de la course, le poids de la jeune patineuse sur ton dos, ses bras autour de ton cou… Et son parfum. Tu râles doucement, fermant les yeux et espérer que Morphée vienne te bercer.

Nouvelle notification sur ton téléphone et tu fronces les sourcils devant la longueur de la réponse. Tu bugs un peu et essaye de relire doucement pour avoir tous les points. Tu te pinces les lèvres et soupires en te massant la nuque. Ouais, tu avais oublié que la jeune femme n’aimait pas beaucoup le surnom donné au hockeyeur. Tu peux comprendre aussi. Elle connaît une autre facette du jeune garçon. Elle connaît autre chose que tu n’avais jamais pu voir, entrevoir. Mais aussi parce que le concerné n’aidait pas beaucoup là-dessus non plus.

*Mea culpa pour le surnom. Je retire ce que j’ai dis.*

Tu grimaces un peu avant d’avoir l’appel sur ton ordinateur et décroches en souriant. Tu soutiens ton visage avec ta main, coude sur la table. Tu fais un petit coucou de ta main libre.

- Et coucou ma Belle. Et oui désolé pour le surnom. L’habitude...

Tu soupires un peu, vraiment désolé. Lisa et Corny sont les dernières personnes avec qui tu veux te fâcher dans cette ville de toute façon. L’une étant ta meilleure amie et l’autre ton crush depuis que tu as presque quatorze ans, sans jamais vraiment avoir eu l’occasion de lui parler à cause de l’espère d’armoire à glace avec une crosse. Et tu es presque convaincu qu’ils vont sortir ensemble de toute façon. Alors bon. Tu te redresses un peu.

- M’enfin, ouais, je me demandais… Pour Sachs… Ce soir, vu que, comme d’habitude, je pars en dernier, j’ai traîné pour aller aux vestiaires.. Et je l’ai vu dedans. Mais genre… Il rampait par terre comme s’il cherchait un truc.

Tu te tournes un peu pour attraper ton paquet de bonbons, cherchant machinalement dedans, mâchant directement celui que tu avais attrapé. Mauvaise idée, mais péché mignon quand même.

- J’ai voulu lui donner un coup de main. J’ai été correct, tu vois ? Et l’autre, il me sort pas d’me mêler de mon cul au calme ? Genre vraiment agressif ? Encore plus que d’habitude ? Du coup, pour ça que je demande s’il est pas étrange ces temps-ci.

Elle sait que la situation est compliqué pour Aayden vis à vis de son père et que les relations familiales sont quelque peu... difficile. Ce qui lui semble déjà être plus appréciable, une meilleure chose, que l'absence dont son père la gratifie simplement depuis sa tendre enfance, ce que son meilleur ami sait mieux que personne. Lisa n'a pas de père. Du moins, elle n'en a plus. Sloan Hampton, supposé remplir cette fonction jusqu'à sa mort, avait préféré quitter sa vie purement et simplement plusieurs années en arrière. Si Aayden avait, lui, des relations conflictuelles avec son père, il en avait au moins un et Lisa voulait croire que c'était là le signe d'un amour suffisant pour que, au bout du compte, les désirs du jeune homme soient respectés. Mais pour le moment, ils en sont loin et consciente qu'il pourrait protester, la jeune femme ne lui donne pas l'occasion de le faire, coupant court à la conversation pour le laisser aller dormir et penser à tout ça, la nuit portant conseil, dit-on.

Sa conversation tout juste terminée avec son meilleur ami, elle jette un regard aux messages d'Andy, son coeur se serrant légèrement en lisant le surnom donné à Aayden. Elle sait, oui, que le jeune homme n'est pas tendre avec les patineurs, à l'image du reste de l'équipe de hockey. Mais tout ça lui fait mal. Quelque part, elle est toujours divisée entre les deux camps. Pour elle, Aayden est bien plus que le probable futur capitaine de l'équipe. Il est son meilleur ami, celui qui a toujours été là pour elle, en toutes circonstances. Celui qu'elle a connu dans l'enfance et qui lui a laissé voir ce qu'il a de meilleur en lui. Forcément, la guerre entre les deux "camps" la touche donc particulièrement comme, si elle appartient définitivement à l'un, elle a des proches dans l'autre.

L'écran s'allumant, elle manque un petit battement comme le visage d'Andy apparaît. Bon sang... Pourquoi doit-il être aussi beau, même par écran interposé ? Lisa ne sait pas. Pas plus qu'elle ne sait exactement à quel moment son regard sur lui a changé, pour ne plus le voir comme un ami mais comme un garçon. Bon sang.

"- C'est rien. Je sais que... C'est compliqué entre vous." souffle la demoiselle, le regrettant amèrement.

Elle écoute attentivement l'homme et fronce les sourcils comme il raconte la scène étrange qu'il a aperçu ce soir, Aayden semblant cacher quelque chose. Il ne lui a pas parlé de ça, ça n'a pas de sens, d'autant qu'apparemment, c'était agressif, un peu musclé. Elle fronce d'autant plus les sourcils.

"- Alors ça... Je... Non, je n'ai rien remarqué de bizarre. Mais... Peut-être qu'il avait fait tomber mon cadeau d'anniversaire. Il ne l'a pas eut à temps, alors... Il... avait peut-être peur que tu vende la mèche ?" suppose Lisa. "Je vais essayer de creuser de mon côté."

Parce que, quand même, ça reste curieux. Même cette explication lui semble un peu bancale.