Victoria avait agi en véritable grande sœur avec ses petits-frères, veillant à ce qu’ils ne se retrouvent pas influencés par les gangs et l’appel de la rue. Pour cela, elle s’était initié au football européen, et cela avait fonctionné. Aucun d’eux n’était devenu des délinquants. Un sourire étira alors les lèvres du lieutenant qui réprima un petit rire quand elle évoqua notamment les menaces de sa mère « Je pense que ça pesé dans la balance ! ». C’était même une certitude. Cela n’enlevait rien à l’influence du sport et de la jeune femme qui avaient sûrement participé à garder tout ce petit monde sur le droit chemin. Pour sa part, il avait opté pour le football américain à compter du lycée jusqu’aux deux premières années d’université. Un petit rire résonna tout en baissant la tête, et finit par poser son regard sur la jeune femme « Oui, un peu, même si je n’étais pas le favori ». Jacob n’était pas quarterback, et ses coéquipiers de l’équipe avaient su se montrer davantage séducteur, jouant la carte du sport et du corps d’éphèbe qui allait avec pour flirter avec les jeunes filles. Pour sa part, il avait toujours été d’un naturel discret et sensible, ne séduisant pas vraiment ce genre de femmes. Il n’avait pas été en reste pour autant. Seulement, il pouvait compter les conquêtes sur les doigts de ses deux mains de sa première fois à la rencontre avec Sharon. L’appel de sa mère interrompit leur conversation, et lorsqu’il confia l’appel à sa tante, le trentenaire lui rappela que l’espoir de sa mère était toujours le même « L’espoir fait vivre après tout » confirma-t-il.

Une heure après, ils s’étaient retrouvés à acclamer l’enfant comme s’il avait été le leur, alors qu’il n’en était rien, et ce, jusqu’à la fin du match. Jacob avait donc proposé de jouer les prolongations, décidant de jouer dans l’équipe de Dino « Exactement ! Tu ne perds rien, je suis réellement un piètre joueur » la rassure-t-il sur ce point qui était véridique. Un petit sourire à l’attention de Victoria tout en clamant un « Prêt petit homme ? » « Oui !! » et la balle passa dans les jambes de l’enfant alors que le trentenaire entoura la taille de la jolie brune pour la retenir pendant qu’il courrait jusqu’aux buts « On a modifié quelques peu les règles ! » tout en la laissant lui faire face, relâchant son emprise sur sa silhouette. Il remarqua de nouveau ce regard et ce petit instant de flottement, avant qu’elle ne le traite de mauvais joueur, ce qui le fit rire « J’assume ! » et Dino parvint à mettre le but. Ce fut au tour de Victoria d’avoir la balle en sa possession et marqua un but « Le prochain est pour nous ! » répliqua le lieutenant à l’attention de l’enfant qui semblait s’amuser.

Jacob récupéra à son tour la balle « Tu ne seras pas déçue ! » alors qu’il était réellement un mauvais joueur. Il couru toutefois avec la balle jusqu’aux buts avant que la jeune femme ne fasse barrage et tente d’intercepter la balle. Il évita une première fois la manœuvre, puis finit par s’entremêler les pieds avec la jolie brune qui chuta sur lui dans un éclat de rire. Jacob posa ses mains sur ses hanches « Ils ont tout le temps de s’entrainer aussi » souffla-t-il alors qu’elle se laissa glisser sur le côté. Le lieutenant se redressa sur ses avant-bras pour observer l’enfant qui leur rappela qu’ils devaient rentrer à la maison. Il était le plus sage des trois. Un regard pour Victoria qui avait trouvé la force de se redresser et lui tendit les mains dont il se saisit pour se redresser. Il glissa sa main dans son dos pour la retenir afin qu’elle ne chute pas en arrière dans l’élan, et resta un instant à l’observer alors qu’il était pratiquement blottie à elle, son visage à proximité du sien. Il resta ainsi quelques secondes avant de bafouiller un « On… On… Devrait peut-être y aller… » et se passa une main dans la nuque tout en lui souriant timidement alors qu’il reprit sa marche jusqu’à Dino qu’ils raccompagnèrent jusqu’à chez ses parents. Devant l’entrée, Jacob interpella l’enfant « Va te doucher et te changer. On arrive dans quelques minutes » tout en retenant ainsi implicitement Victoria à lui « Je… » et se mit à rire nerveusement « Est-ce que quelque chose à changer entre nous ? ».  

Qu’est ce qu’elle aimait ces moments de liberté et d’insouciances. Elle adora le sourire du petit garçon, sa joie d’avoir marqué de but avec la complicité de Jacob. Elle avait également aimé ce moment presque enfantin lorsqu’il l’avait retenu à elle et qu’elle s’était débattue. Malgré ce petit moment de flottement, elle était parvenue à revenir rapidement lucide et continue sur cette note joyeuse. Un but pour elle, avant de défier Jacob. Ils furent bien vite au sol, l’un sur l’autre, sans doute trop proche. Vic s’était laissée tombée sur le côté, ne voulant pas bloqué à nouveau. Elle ne voulait pas de ça. Et elle ne voulait surtout pas gâcher leur amitié. Une fois sur ses jambes, elle tendit la main à Jacob pour qu’il se redresse également. Pourtant, elle n’avait pas prévue de se retrouver si proche de lui. Cette fois-ci ce fut lui qui sembla déstabilisé. « -ouais… » avait elle soufflé en s’écartant, quittant le terrain à ses côtés sans rien dire de plus.

Le retour fut assez rapide, et elle sourit à Dino alors qu’il les remerciait avant de courir prendre sa douche. Elle avait fait un pas, mais elle stoppa sa marche en entendant la question de Jacob. Surtout son rire nerveux et cette sorte d’hésitation. « -non. » avait elle répondu après l’avoir regardé. « -je… » à son tour de rire nerveusement : « -je suis désolée… c’est ma faute si tu te poses cette question. » il n’était pas con, et loin d’être aveugle. « -je… je sais pas, c’est la conversation de tout à l’heure qui… » un haussement d’épaules, elle ne savait pas comment expliquer cela. « -on a parlé de connexion et je sais pas… j’ai pas pu m’empêcher de me dire que si on avait été en couple l’un et l’autre, ce lien aurait sans doute été différent. » elle lui sourit : « -c’est con hein… » voilà, elle avait sans doute ouverte une porte qui aurait dû resté fermée. « -donc… c’est rien. » voilà… elle espérait qu’il allait se contenter de ça.

Greta l’appela du font de la cuisine. Vic pointa ses deux pouces par-dessus ses épaules et dit : « -je vais allée l’aider en cuisine. Et ensuite on regardera pour notre idée d’excursion, si ça te va. » elle gagna la cuisine et prêta main forte à Greta, tout en discutant des prouesses de son fils. Après le repas, elle gagna la chambre et s’allongea sur le lit, avec son téléphone. Quand Jacob entra à son tour, elle lui lança : « -regarde ! Pas besoin de camping, il y a des hébergements. » elle lui fourra son téléphone sous le nez afin qu’il regarde. « -j’ai réfléchis et je crois que je vais rien dormir si on part sous la tente. Et puis ça à vraiment l’air trop bien ! » et pourquoi pas après tout se prendre une petite maison dans un cadre paradisiaque. Dans le genre vraie vacance. « -t’en dis quoi ? » bon, elle allait vider une bonne partie de ses économies, mais ça valait le coup.

Cette manière qu’elle avait eu de l’observer sans prononcer le moindre mot, ce moment de flottement inexplicable lorsqu’ils étaient à proximité l’un de l’autre… Ce trouble qu’il avait ressenti en se redressant… Tout cela avait fait gamberger le lieutenant sur le chemin du retour et avait donc demandé à l’enfant de rentrer auprès de ses parents, les laissant ainsi seuls quelques minutes. Jacob voulait savoir si leur relation venait de prendre un tournant dont il ignorait tout, ou si leur amitié était restée intacte. Il n’était pas à l’aise, et son comportement le trahissait à chaque seconde. Il appréhendait la réponse de Victoria. Ses mains venaient de se glisser dans les poches de son jean « Oui… » murmura-t-il. C’était ce regard qu’elle avait posé pour lui qui avait fait surgir des interrogations dans son esprit pourtant au clair sur sa relation jusqu’alors. La tête légèrement penchée, Jacob lui prêta une oreille attentive et se mit à la couver du regard avec tendresse « On ne serait pas aussi proche l’un de l’autre » et souffla un « Ne dis pas ça… » avant d’ajouter « Il m’arrive de penser aussi à ce qu’aurait été ma vie, notre relation, si les choses se seraient déroulés autrement… Puis je me dis que même si notre amitié s’est construite sur un évènement dramatique, je ne pourrais plus vivre sans dorénavant ». Un regard pour la porte alors que la voix de Greta venait de leur parvenir « Je crois qu’elle veut cuisiner avec toi » et acquiesça à sa proposition. Ils déjeunèrent tous ensemble, évoquant le match de football de Dino, puis leurs vies respectives, avant que son oncle ne rejoigne le salon pour regarder la télévision et sûrement s’effondrer de fatigue devant. Quant à Jacob, il rejoignit la chambre après avoir échangé quelques instants avec sa tante qui partait en ville rejoindre des amies à elle.

Un petit rire résonna dans la pièce au moment où Victoria lui colla presque le téléphone sous le nez, et s’en saisit « C’est joli. Un vrai petit coin de paradis » précisa-t-il tout en retirant sa paire de basket pour prendre place dans le lit aux côtés de la jolie brune, son oreiller posé tout contre le mur « Je suis assez d’accord… » avoua-t-il avec un sourire tout en reportant son attention sur le petit appareil entre ses mains, faisant défiler les photos de la maison « Je trouve que c’est une bonne idée », et se pencha au-dessus de Victoria pour attraper le portefeuille qu’il avait glissé dans la table de nuit, et lui tendit sa carte de crédit « Je te laisse réserver », tout en prenant place à ses côtés « J’ai déjà hâte d’y être ». Quelques jours plus tard, Jacob déchargea le pick-up qu’il avait emprunté à un ami de son oncle et s’arrêta face à la demeure. Aucun bruit de circulation ou d’âme qui vive en dehors de la faune ne leur parvenait. Seulement le bruit de la nature dans son entièreté. Il inspira à plein poumon l’air pur qui se dégageait de cette petite jungle, puis pénétra dans la maison « On ne dormira pas ensemble ce soir » en constatant les deux lits superposés qu’on leur avait attribué dans le dortoir, tout en posant les sacs au pied du lit « Tu veux manger un morceau avant de repartir ? ».

Vic aurait pu nier, dire qu’elle ne voyait pas de quoi il voulait parler. Mais elle avait trop de respect pour Jacob et pour leur amitié pour faire ça. Il avait raison de poser cette question. Alors elle avait tenté de trouver les mots. Puis elle avait hoché la tête. Oui, les choses auraient été différentes. Elle avait ensuite levé les yeux au ciel. Si c’était un peu con… Comment ne pas ressentir de la tendresse pour l’homme qui se tenait à quelques mètres d’elle ? « -c’est réciproque. » avait elle alors répondu avec beaucoup de douceur dans la voix. Elle avait ensuite tourné la tête vers la porte. Greta l’appelait. Un sourire doux pour Jacob et elle fila pour apporter son aide en cuisine.

Une fois dans la chambre, elle s’allongea et prit le temps de regarder plus en détail ce qu’ils pouvaient trouver pour leur excursion. Ce fut particulièrement heureuse qu’elle annonça à Jacob qu’ils pouvaient oublier le camping et la nuit sans fermer l’œil de la nuit. Il y avait des hébergements. Un grand sourire étira ses lèvres quand il déclara être d’accord. Elle s’allongea lorsqu’il tendit le bras vers la table de nuit. « -non, attends je… » en même temps ils ne pouvaient pas faire une réservation avec deux cartes. « -je te rembourserais. » puis elle cliqua sur son écran pour rentrer les données demandées.

Quelques jours plus tard, ils étaient partis à l’aventure. Vic s’était émerveillée sur tout un tas de chose sur le trajet, et se fut à nouveau le cas lorsqu’ils arrivèrent à l’hébergement. « -j’adore… » souffla la jeune femme en refermant la porte du pick up. Elle prit son sac et suivit Jacob dans la maison. « -prem’s en haut ! » avait lancé Vic avec léger coup d’épaule complice. « -visiblement on est pas seul. » il y avait des affaires appartenant à d’autres. Elle déposa les siennes et dit : « -ça me va. » avant de le prendre par la main pour l’entrainer avec elle à la découverte du reste de la maison. Main qu’elle lâcha lorsqu’il arrivèrent sur la terrasse. Elle sourit en voyant les hamacs, puis elle engagea la conversation avec les personnes qui se trouvaient là. « -je suis Vic, et lui c’est Jacob. On est là pour deux jours. » ils étaient quatre. Un groupe d’amis. Ils lui plurent tout de suite. Ils les invitèrent à partager leur repas. Un sourire pour Jacob et ils se joignirent au petit groupe. Tous des trentenaires en reconversions, en quête de sens à leur vie.

Leur amitié s’était construite sur un évènement dramatique, sur le deuil, et c’était peut-être pour cela que le lien qui les liait était si fort aujourd’hui. Jacob n’imaginait plus sa vie sans elle à ses côtés, et se mit à sourire avec douceur quand elle lui confirma qu’il en était de même pour elle. Et pourtant, sans la disparition de Roberto, ils ne se seraient jamais rencontrés, n’auraient tissés aucun lien, et n’auraient pas été si proche. Ils auraient vécu en ignorant tout de l’autre. C’était une manière comme une autre de démontrer que même dans l’obscurité, il pouvait avoir de la lumière. La voix de Greta mis fin à cette confidence entre eux deux, lui adressa un doux sourire et la laissa s’éclipser, ne la rejoignant dans la chambre qu’après le déjeuner. Victoria lui annonça qu’elle avait trouvé une alternative à leur camping à la belle étoile, pas particulièrement heureuse à l’idée de partager sa tente avec toute la faune locale. Son enthousiasme avait fait rire le trentenaire qui s’était installé dans le lit à ses côtés, son portable en main. Il se pencha pour récupérer sa carte bancaire et la lui tendit pour qu’elle effectue la livraison « Ne dit pas de bêtise. Réserve ». Il ne voulait pas entendre parler de remboursement. Le lieutenant avait un salaire fixe chaque mois, et d’ici peu, son ex-femme aura procédé à la vente de leur appartement. Alors que la jeune femme vivait sur ses économies.

Quelques jours plus tard, Jacob avait roulé jusqu’à l’hébergement que leur avait trouvé Victoria et apprécia l’environnement. Faune et flore cohabitant dans un mélange harmonieux. Pas de bruit de circulation ou de brouhaha incessant de la population. Seulement la nature. Un regard pour la jeune femme qui apprécia les lieux « Je suis d’accord, c’est vraiment parfait », et se saisit des bagages qu’il déposa au pied du lit superposé « Tant mieux, je préfère dormir près du sol. La chute sera moins douloureuse si je remue trop » rétorqua-t-il avec amusement, puis tourna la tête en direction des autres lits « C’est ce qui fait le charme du lieu ». Jacob fut surprit que la jeune femme se saisisse de sa main ainsi, et sourit bien vite, appréciant qu’elle soit à l’initiative de leur proximité, et se laissa conduire jusqu’à la terrasse. Leurs mains se séparèrent en arrivant à hauteur des autres locataires de l’hébergement, saluant d’un signe de main le groupe d’amis alors que la jolie brune se chargea des présentations, murmurant un « Salut ». Il prit place autour de la table, faisant ainsi connaissance avec le petit groupe tout en déjeunant. « Vous bougez cet après-midi ? » demanda l’un d’eux, répondant au nom de Guiseppe, « Oui, c’est dans nos projets. Et vous ? » « On voulait piquer une tête au lagon. Vous venez ? ». Jacob posa son regard sur la jeune femme, l’interrogeant du regard « Qu’est-ce que tu en penses ? ». Après tout, peut-être voulait-elle seulement profiter de ces deux jours en sa compagnie. C’était normalement l’idée principale. « On peut passer l’après-midi tous ensemble, et demain rien que nous deux ? ».

Elle avait grimacé, mais elle avait réservé. Non, sans se promettre que oui, elle finirait par le rembourser. Parce que ce petit séjour n’était pas donné, que s’était son idée et que Jacob n’avait pas à lui payer ses vacances, mais seulement les siennes. Une fois sur place, elle était un peu comme une enfant le soir de noël. Le paysage était sublime. Il faisait chaud et humide à la fois, mais ça restait supportable. La maison était parfaite et Vic savait qu’ils allaient passer un merveilleux séjour ici. « -tu brasses pas la nuit. » avait elle répondu en fronçant les sourcils. Cela faisait plus d’une semaine qu’ils partageaient le même lit et elle n’avait jamais été gêné. Elle se fit d’ailleurs la réflexion que ça allait être étrange de dormir sans lui. Mais elle n’en dit rien. Peu à peu, elle était parvenue à faire disparaitre cette sorte de flottement étrange et c’était très bien comme ça.

Une fois sur la terrasse, ils furent invités à partager un repas par les autres locataires des lieux. Assise à côté de Jacob, Victoria hocha la tête à la question, laissant Jacob répondre parce qu’elle mangeait de l’ananas. Un délice. Elle hocha de nouveau la tête avant d’enfin parler : « -si tu veux, oui ça me va. » ça pouvait être sympa de faire connaissance avec les autres. Ils commencèrent à faire connaissance. Celui qui leur avait adressé la parole était kiné. Il avait pris une année sabbatique pour faire le tour du monde. L’autre, Zach était à la base tradeur, il avait visiblement peter un câble et décidé de tout envoyer bouler. Quant aux femmes, Jenny était infirmière. Elle était ici pour faire de l’humanitaire, mais c’était octroyé une semaine de vacances bien mérité. Dora semblait un peu plus perchée, axée sur la communion avec la nature, le retour à l’étage sauvage. Elle était art thérapeute. Cela fit sourire Vic qui trouva cela très intéressant. Forcement on leur retourna la question : « -oh heu… et bien… j’ai décidé de faire un voyage pour euh… pour… pour me retrouver moi-même et avancer dans mon deuil. J’ai perdu mon petit ami il y a plus de six mois maintenant… j’avais besoin de… de changement. » elle replaça ses cheveux, comme gênée d’avoir avouer cela, et peur d’avoir pourri l’ambiance. « -je trouve ça courageux… » avait répondu Dora qui semblait doté d’une grande empathie. « -vous vous êtes rencontré ici ? » demanda alors Zach en désignant du doigt Vic et Jacob. « - non… nous sommes amis, je loge dans la famille de Jacob et il a décidé de me rejoindre pour les vacances. »

Victoria avait opté pour le lit du haut. Pour sa part, ça serait du bas, ainsi en cas de chute, ça serait moins douloureux. Même si aux dires de la jeune femme, il n’avait pas à s’inquiéter de cela. Il avait relevé son regard sur elle à cette précision et lui avait souri avec douceur « Je bougeais beaucoup avec Sharon… ». Cette nuit en solitaire sous les draps allait lui paraître presque étrange. Il s’était habitué à la présence de Victoria à ses côtés, à leur conversation à la nuit tombée, à leur proximité. Les deux prochaines nuits, ça serait différent. Peut-être que c’était mieux ainsi. Après tout, à son retour à Miami, il dormirait de nouveau seul. Main dans la main, Jacob suivit la jolie brune jusqu’à la terrasse où ils rejoignirent un groupe d’amis venus ici pour faire le point sur leur existence. Ils partagèrent ainsi le déjeuner ensemble autour de la table et accepta, après accord avec son amie, la proposition formulée par Guiseppe. Cela leur permettrait de faire connaissance avec les quatre personnes autour de cette table, et de passer un agréable moment. Chacun avait un profil différent, et venait presque d’horizon différent. Il terminait son verre de limonade lorsque qu’ils les interrogèrent sur les raisons de leur venue ici, au Guatemala. Jacob resta silencieux, laissant Victoria se prêter au jeu de la vérité en première. Il posa sa main sur la sienne en l’entendant se confier sur le décès de Roberto qui était intervenu quelques mois auparavant, et lui adressa un sourire compatissant, avant de rétorquer « Je suis venu rejoindre Vic parce qu’elle me manquait, et j’ai besoin de faire le point sur ma carrière ». Il n’aimait pas se confier sur son métier, ne sachant pas qui se trouvait réellement face à lui, et encore moins sur son infidélité qui s’était soldé en divorce et au décès brutale de sa maîtresse.

Délicatement, Jacob retira sa main de la sienne pour prendre une gorgée de limonade et ajouta « Et vous ? » « Non, on se connaissait d’avant. On est tous de New York ». Le trentenaire hocha lentement de la tête avant de se lever pour débarrasser la table en silence avec l’aide de Jenny. Il revint ensuite à hauteur de la table « On se change et on se retrouve ici dans une demi-heure ? » proposa Zach. Il souffla un « Ça me convient », et après un signe de tête à l’attention de Victoria, il rejoignit leur dortoir. Il prépara son sac à dos avec de quoi se baigner, se changer également et s’essuyer, et posa le sac sur son épaule « Je ne pensais pas que tu serais prête à évoquer ton deuil ainsi… Ce n’est pas rien dans le deuil » rétorqua le trentenaire « Je suis fier de toi que tu sois capable d’en parler ». Ils optèrent pour son pick-up, le petit monde grimpant à l’arrière, et direction le lagon à l’eau presque surnaturelle. Jacob se changea dans la voiture, à l’abri des regards, et descendit de l’habitacle vêtu de son short de bain. Il se rapprocha de l’eau, déposa sa serviette, puis leva son regard sur la jolie brune dont il découvrit les formes affriolantes pour la première fois. Il déglutit avec difficulté tout en prenant conscience qu’elle avait un effet non-négligeable sur lui en bikini. « Tout va bien Jacob ? » l’interpella Zack. Il se racla la gorge en levant la tête en direction du jeune homme « Oui, oui. J’étais perdu dans mes pensées ». Il vit le regard de ce dernier se porter sur la latine, et se mit à sourire « Oui, bien sûr » avec une certaine taquinerie dans la voix et un sourire qui en disait long. « L’eau est bonne, elle te fera le plus grand bien » lui conseilla-t-il et Jacob souffla un « J’en prends bonne note » avant de se rapprocher de la jeune femme « Tu veux mettre de la crème solaire ? ».

« -ah… » souffla Vic en posant son sac au sol. « -ba faut croire que j’ai un pouvoir calmant sur toi, ou alors je dors vraiment trop profondément et je m’en suis pas rendue compte… » mais la seconde option n’était pas vraiment réaliste puisqu’elle n’avait pas des nuits parfaites. Malgré la présence de Jacob, il lui arrivait de passer des heures à regarder le plafond, les bras croisés derrière la tête. « -les vacances te fond peut-être du bien aussi… » avait-elle ajouté, avant de l’entrainer avec elle en le prenant par la main, jusqu’à la terrasse. Ils firent la rencontre des quatre autres locataires, appréciant la proposition et le repas. Vic ne s’était pas fait prier pour manger. Cela faisait une semaine qu’elle avait comme retrouvé l’appétit alors, elle avait décidé de ne pas se priver. Elle gardait également en tête ce que Greta lui avait dit un matin : tu as le droit d’être vivante. Pleinement vivante. Alors oui, elle avait prit de l’ananas mais aussi ce qui semblait être pancakes à la banane avec la confiture de mangue. Elle soupira même en goutant le café, qui était divin. Ce fut son tour de prendre la parole et elle décida d’assumer qui elle était, pourquoi elle était là. Elle n’aimait pas mettre en avant la perte de Roberto, son deuil… les gens la regardait comme une petite chose fragile, n’osait plus rire ou lui parler sans avoir peur de dire une connerie. De son pouce elle caressa la main de Jacob, avant de lui sourire. Elle comprit son silence sur son métier ou les autres aspects de sa vie. S’il ne voulait pas en parler, c’était son droit.

Victoria le laissa se lever pour débarrasser, terminant son café tout en discutant avec Dora. Etrangement, la jeune femme lui plaisait déjà beaucoup. « -vous êtes amis depuis longtemps ? » avait demandé Zach avec un léger coup de menton en direction de la cuisine. « -c’est un amitié récente… on se connait depuis un peu plus d’un an… » « -récente mais puissante hein… » avait soufflé Dora avec un sourire tendre. Vic avait forcement hoché la tête, lui rendant son sourire. Elle apprécia le fait que personne ne les pousse l’un vers l’autre, et respect leur relation. Une fois dans le dortoir, Vic passa dans la salle de bain juste à côté, sans fermer entièrement la porte. Elle enfila son maillot de bain, ajoutant un short et un débardeur par-dessus. En écoutant les mots de Jacob, elle ressortait de la salle de bain, en dégageant ses cheveux de son haut. « -moi non plus… » avait elle répondu en collant son épaule contre le montant de la porte. « -je voulais pas jouer un rôle… » un léger haussement d’épaules. « -ça fait partie de moi… » un sourire tendre et elle récupéra son propre sac.

En descendant du pick up, elle resta presque bouche bée en voyant le lieu. Vic prit le temps de détailler le paysage, apprécier les couleurs, les sons les odeurs. Elle fut sortie de sa contemplation par Dora qui l’entrainait avec elle un peu plus loin. Vic retira son short et son débardeur, déposant tout ça dans son sac. Puis elle chercha Jacob du regard. Un sourire alors qu’il approchait. « -c’est le médecin qui parle n’est ce pas ? » s’amusa la jeune femme à voix basse. Il avait raison, c’était bien plus raisonnable de mettre de la crème. Vic retira ses cheveux de son cou et pencha légèrement la tête afin que Jacob puisse lui mettre de la crème dans le dos.

Jacob fut quelque peu surprit d’apprendre qu’il ne remuait pas tant que ça en présence de la jeune femme. Lors des derniers mois où il partageait encore son lit avec son ex-femme, ce n’était pas le constat qui en avait découlé. Sharon lui reprochait même de trop remuer sous les draps, l’empêchant de trouver le sommeil. Il se mit à sourire face à la théorie de Victoria « Peut-être un peu des deux. Les vacances et toi ». Leur conversation dans le lit à la nuit tombée, leurs éclats de rires, la quiétude de leurs échanges et la vie plus douce au Guatemala. Tout cela devait sûrement impacté son sommeil. Il n’avait pas de raison de s’inquiéter ici, entre ces murs. Et encore moins dans le lieu où ils étaient arrivés quelques minutes auparavant. Un véritable petit bout de Paradis sur Terre. Tout semblait si calme et si serein. Ils partagèrent même le petit-déjeuner en compagnie d’un groupe venu ici en quête de réponses. Un peu comme tout le monde apparemment. Lorsque Victoria se confia sur son deuil, le lieutenant se saisit de sa main, comme pour lui rappeler qu’il était là, à ses côtés. Un regard à son attention en sentant son pouce caresser le dos de sa main avec douceur. Elle avait raison, s’ils avaient été tous les deux engagés dans une relation, leur relation aurait été bien différente. Jamais il n’aurait osé faire un tel geste en présence de sa moitié autour de la table. Il retira sa main au moment de débarrasser la table avec le jeune homme, puis décidèrent que l’après-midi serait destinée à une baignade dans le lagon. Ils retournèrent donc chacun dans leur dortoir pour se changer, et Jacob en profita pour lui signifier qu’il était fier d’elle, d’avoir osé parler de son deuil à voix haute. C’était une nouvelle étape vers la guérison. Un regard pour cette dernière qui s’était appuyée contre l’encadrement de la porte « C’est un pas en avant vers l’acceptation » souffla-t-il avec douceur. Et précisa « Ça fait partie de toi, mais ça ne te définit pas pour autant ».

En arrivant au lagon, la vue était pour le moins resplendissante, à couper le souffle. Jacob savoura cet instant avant de s’installer sur l’herbe qui bordait l’eau, et son regard se perdit dans la contemplation d’une toute autre beauté. Victoria était aussi attrayante dans le bikini. Elle était jolie au naturel, mais il devait avouer qu’elle le laissait encore moins indifférent dans cette tenue. Sans la voix de Zack, il serait sûrement resté interdit encore quelques minutes. Il se rapprocha de la jolie brune et se mit à sourire « Et l’ami aussi ». Il déglutit avec difficulté en observant sa nuque de ses cheveux, et commença à étaler la crème sur sa peau, avant de rire doucement, et murmura « Tu me perturbes un peu en bikini » et continua d’étaler la crème, puis lui fit face et lui en déposa sur le nez en riant, puis deux traits sur les joues « Parfait ! ». Et lui tendit la crème et souffla « Je veux bien, s’il te plaît » tout en lui souriant de ses dents.

Alors qu’elle préparait son sac pour se rendre au lagon, Vic écoutait les mots de Jacob. Il la toucha en plein cœur. Et lui apportèrent un regard nouveau. La jeune femme n’avait pas envisagé sa franchise comme un pas en avant. Elle lui avait adressé un sourire presque gêné. L’acceptation… est ce qu’elle en était déjà là ? Parfois elle se disait ce ces phases de deuil, c’était de la belle connerie. Que dans son cas, c’était parfois un joyeux mélange de colère, de déni, de dépression… l’acceptation… Jacob avait raison, elle le savait, elle devait accepter. Pourtant, quelque chose l’empêchait de le faire totalement. C’était comme si au fond d’elle-même, Vic n’avait pas eu ce signal… Elle n’avait pas rêvé… elle n’avait pas vu de corps… elle avait toujours du mal à croire que son petit ami était mort. Pourtant tant de chose lui rappelait chaque jour qu’il n’était plus là. Une seule tasse de café à préparé le matin, pas de chaussettes sales à côté du lit, le bouchon du dentifrice reboucher convenablement. Moins de linge à plier, et cette place froide la nuit dans le lit. Jacob la comblait depuis quelque temps, mais d’une toute autre manière. Vic n’avait rien répondu, seulement sourit avant de mettre sa serviette dans son sac. Elle espérait qu’il disait vrai. Que maintenant qu’elle avait fait cet aveu, les autres ne changeraient pas d’attitude.

Arrivée au lagon, Vic prit le temps d’observer les lieux. C’était magnifique. Elle mesurait sa chance d’être ici. Vraiment… C’était sans doute un moment unique dans une vie. Elle sourit à Jacob lorsqu’il précisa. Ami. Pourquoi est ce que l’un comme l’autre ils ne cessaient de se justifier à ce sujet ? Est-ce qu’elle avait brouillé les limites à ne pas franchir l’autre jour avec ces petits moments de flottement ? La tête légèrement penchée, elle fronça les sourcils en souriant. « -tu n’imaginais pas ça sous mon éternel pull capuche ça c’est ? » elle préférait en rire plutôt que de rougir ou de le faire rougir. Ils restaient humains. Un homme et une femme.

Vic retroussa son nez quand il y déposa de la crème, avant de lever les yeux au ciel et de prendre la pause. « -exactement ! » elle ne chercha pas à étaler la crème plus que ça. Mais prit le tube pour en couvrir la peau de Jacob. « -merci d’avoir accepté de m’accompagner… » lui souffla-t-elle à l’oreille. « -je me sens… vraiment chanceuse de pouvoir être ici. » elle referma la crème et termina sa phrase : « -avec toi. » elle lui déposa le tube de crème dans la main gauche, avant d’enfin étaler ce qu’elle avait sur les joues. La journée fut merveilleuse… Vic en savoura chaque seconde. L’eau claire, la vue, les rires, les conversations sérieuses ou bien futiles. Elle avait la sensation d’être hors du temps. Le soir venu, elle rejoignit Jacob dans un des hamacs sur la terrasse. Elle se blottit contre lui, observant la lune et les étoiles. Puis au bout de quelques minutes elle demanda : « -tu crois qu’il se passe quoi quand on meurt ? »