Je passe un excellent moment avec Lucy. Cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas retrouvées comme ça. Juste elle et moi autour d'un café et de quelques sucreries. Je ris à de très nombreuses reprises, de quoi faire remonter mon humeur quelque peu maussade… Il me tarde de retrouver mon environnement et le calme qui va avec. Au moment de nous séparer, Lucy insiste pour que je reste dîner avec elle. Mais je dois malheureusement refuser. Les raisons de mon refus, elle les comprend mieux que quiconque et je sais qu'elle ne m'en tiendra pas rigueur. Au contraire, elle me promet même de me rejoindre à Castine pour les fêtes de fin d'année… À condition que je décore ma maison, au moins avec un sapin. Elle explose de rire en me voyant grimacer. Elle sait que je n'aime pas cette tradition consistant à tuer un arbre pour le recouvrir de boules et de guirlandes colorées.

– Tu sais qu'il existe des sapins artificiels, n'est-ce pas ?

Bien-sûr que je le sais, sauf qu'ils sont en plastique… Ce qui ne vaut guère mieux à mes yeux. Néanmoins, je lui promets de trouver une alternative qui nous conviendra à toutes deux et nous nous séparons après avoir échangé une accolade amicale.

– Je suis vraiment heureuse de t'avoir revu, Mily.
– Moi aussi. Prends soin de toi !

Je reprends la route de l'hôtel, subissant par la même les embouteillages du début de soirée. Encore une chose que je ne pourrai jamais supporter. Mais bon…

Arrivée dans le hall, je rends les clés à l'accueil avant de régler la note et de pouvoir monter rejoindre Tom. Je suis accueilli par un son de guitare, m'annonçant ainsi qu'il a su trouver son bonheur dans ce magasin.

– Bonsoir, je lui lance en retirant mes chaussures. Voici donc ta nouvelle amie ?

Je lui offre un grand sourire avant de venir m'emparer tendrement de ses lèvres.

– Comment s'est passée cette rencontre ?

Je suis toujours assis à même le sol, ma guitare sur les genoux, et je teste l'étendue des possibilités de cette dernière. Mes doigts courent sur le manche, tandis que j'enchaine les notes, ajoutant un bend par moment.
J'improvise, le sourire aux lèvres. Cet instrument est un véritable bonheur. Facile à jouer, parfaitement dimensionné. Comme si cette guitare avait été faite pour moi.

Ce n'est que lorsque la porte de la chambre se referme que je me rends compte que je ne suis plus seul.
Je relève la tête, et je suis ravi de constater qu'Emily est de retour.

"– Bonsoir, voici donc ta nouvelle amie ?"
"– Bonsoir, mon amour".

Elle se penche vers moi pour m'embrasser. Je souris contre ses lèvres.

"– Comment s'est passée cette rencontre ?"

Je lui tend une main, pour qu'elle vienne s'assoir à côté de moi. Le sol commence à être un peu dur sous moi, et il faudra probablement que je ne tarde pas à me lever. Mais j'ai envie de profiter encore un peu de cet instant hors du temps.

"– Avec ma guitare, ou avec Sofia ?", je plaisante avant de lui voler un baiser. "Ma guitare et moi nous sommes tout de suite bien entendu. Sofia par contre..."

Je grimace.

"- Je crois qu'elle a toujours une dent contre moi, mais elle était ravie de revoir Jeff. Elle jouera avec nous demain soir. Et ça signifie une nouvelle répétition demain matin. En espérant que ça se passera mieux qu'aujourd'hui. Mais entre Sofia et Jake, l'ambiance promet d'être électrique."

A vrai dire, je suis très curieux de voir ce que ça va donner. Lorsqu'elle avait joué pour nous il y a quelques années, ça ne s'était pas très bien passé entre eux.

"- Ils se sont hurlés dessus au téléphone", je confie à Emily avec ravissement.

J'éclate de rire. J'ai vraiment hâte d'être à demain.

Je me blottis contre Emily, déposant mes lèvres dans son cou.
Elle m'a manqué. Même si notre séparation n'a duré que quelques heures. Dans quel état vais-je être lorsqu'elle repartira direction Castine ?

"– Comment va Lucy ? Tu lui as exposé ton idée pour développer son activité ?"

Cette histoire de sex-toys me fait toujours rire, et je suis curieux de savoir si Emily a proposé cette idée à son amie, même juste pour plaisanter.

"– Tu veux l'essayer ?" je lui demande en lui tendant ma guitare toute neuve. "Je peux t'apprendre, si tu veux ?"

Je ne dirais pas non à avoir Emily dans mes bras, tandis que je lui montre quelques accords simples. Ca me plairait de partager ça avec elle. Ca, ou autre chose. Du moment que nous sommes ensemble.

Je ne résiste pas une seule seconde, lorsqu'il me tend la main pour m'inviter à m'asseoir près de lui. Il semble de bonne humeur ce qui laisse sous-entendre que ses épaules se sont vues soulagées d'un poids. Au fond, il n'a pas besoin de répondre à ma question, je le vois dans ses yeux.

– Ma guitare et moi nous sommes tout de suite bien entendus.
– Voici donc ma nouvelle rivale ? je plaisante pour le détendre un peu tandis qu'il m'explique que cette fameuse Sofia doit encore avoir une dent contre lui.

Je me demande bien pourquoi, même si cela ne me regarde absolument pas… Mais au moins, je suis soulagée d'apprendre que, malgré leur mésentente, elle a quand même accepté de jouer avec eux demain…

– Elle et Jake ne s'entendent pas ? je rétorque, pas si surprise que ça. Voilà qui apportera un peu d'animation à votre répétition.

Je suis sincèrement heureuse de le voir sourire ainsi. Son rire m'enchante et je me sens tout de suite beaucoup mieux… Je me sens chez moi, en quelque sorte.

– Comment va Lucy ? Tu lui as exposé ton idée pour développer son activité ?
– Zut, j'ai totalement oublié de lui en parler… je réponds en prenant une mine faussement déçue. J'en profite pour me blottir un peu plus contre lui. Nous en discuterons à Noël, elle a dit vouloir passer les fêtes avec moi.

– Tu veux l'essayer ? me propose-t-il en me tendant sa guitare. Je peux t'apprendre, si tu veux ?
– Je croyais que les guitares étaient comme les brosses à dents : on ne les partage pas, pourtant, je la saisit cette guitare, trop curieuse de pouvoir constater des talents d'enseignant de mon compagnon. Comme ça ?

"– Voici donc ma nouvelle rivale ?"
"– Je t'assure que tu fais des sons beaucoup plus intéressants qu'une guitare. Surtout quand tu es dans mes bras."

Elle tire la même conclusion que moi au sujet de la répétition du lendemain. Animation est le terme correct au sujet de ce qui nous attend. Pour une fois, j'ai vraiment hâte d'y être.

"– Comment va Lucy ? Tu lui as exposé ton idée pour développer son activité ?"
"– Zut, j'ai totalement oublié de lui en parler…"

Elle se blottit contre moi, et je soupire avec bien-être.

"– Nous en discuterons à Noël, elle a dit vouloir passer les fêtes avec moi."
"– Oh, vraiment ?"

A vrai dire, Noël me paraît bien loin, même si ce n'est finalement que dans quelques mois. J'ignore quel sera mon quotidien d'ici là. Mes parents voudront sans doute que je passe une partie des fêtes avec eux. Mais au fond, je couve l'espoir secret d'un Noël blanc dans les bras d'Emily, à Castine, au calme.
Ou peut-être simplement la nouvelle année. Juste du temps pour nous. Seuls.

Mais je ne sais pas si elle a envisagé ça.

"– Castine doit être magnifique, sous la neige", je me contente donc de répondre. "Il me semble que tu m'en avais parlé, le jour où je t'ai rencontré."

Ca me paraît si loin, maintenant...

Elle a l'air curieuse lorsque je lui propose d'essayer ma guitare.

"– Je croyais que les guitares étaient comme les brosses à dents : on ne les partage pas."

Elle n'a pas tort. Je n'aime pas trop que quelqu'un mette ses doigts sur mes instruments. Ils font partie de moi, comme une extension de mon corps.
Et pourtant, ça ne me pose aucun problème qu'Emily le fasse. Je l'ai dans la peau, aussi bien dans les marques sur mon dos et mes épaules que dans la chaleur qui se propage en moi lorsque je pense à elle.
Il n'y a donc rien d'illogique dans le fait qu'elle joue de cette guitare comme elle joue de moi lors de nos moment d'égarement.

"– Pour toi, je peux faire ce sacrifice", je lui réponds avec un sourire amusé.

Et je la laisse se saisir de l'instrument.

"– Comme ça ?"
"– Redresse un peu le manche"

Je me déplace pour me positionner derrière elle, et l'aide à ajuster sa posture.

"– Parfait", je souffle dans son cou. "Essaie déjà de gratter les cordes à vide... Comme ça"

Je lui prends la main droite, et lui montre comment descendre et remonter. Le son n'est pas aussi clair que lorsque c'est moi qui joue, mais c'est parfaitement normal.

Je la laisse répéter le geste plusieurs fois, puis je viens doucement positionner sa main gauche sur le manche.

"– Un accord de Mi mineur", je lui explique à voix basse.

Je n'ai pas l'envie, ni le besoin, d'élever le ton.

C'est la première fois que je me prête à ce type d'exercice. Je ne me suis jamais improvisé professeur auparavant. Mais il y a quelque chose d'incroyablement intime dans le fait de guider Emily sur ce manche de guitare, de l'aider à plaquer ses doigts sur les cordes. Mon torse est collé à son dos, et mes bras l'enlacent doucement.

"– Gratte à nouveau les cordes, comme toute à l'heure"

Le son est beaucoup moins joli, et j'étouffe un rire dans son cou.

"– Ne t'inquiète pas, je faisais bien pire, à mes débuts", je la rassure néanmoins.

Je lui demande de répéter l'exercice. Plusieurs fois.

"– C'est beaucoup mieux !" je m'exclame doucement lorsque l'accord sonne enfin correctement. "Je pense que tu mérites une récompense, tu ne crois pas ? Pour ton excellent travail."

–Je t'assure que tu fais des sons beaucoup plus intéressants qu'une guitare. Surtout quand tu es dans mes bras.
– Voilà qui est très inconvenant, monsieur Alskell, je raille en secouant doucement la tête en affichant une moue empreinte d'une fausse réprobation.

Je m'installe près de lui, puis nous évoquons la possibilité que Lucy vienne me rendre visite à Noël. Il est vrai que nous n'avons pas encore parlé des fêtes de fin d'année, probablement parce que notre relation est encore bien trop récente pour que l'on puisse se projeter aussi loin. Sans doute a-t-il même d'autres projets. Après tout, ses parents sont encore en vie et Noël est une fête familiale. Pour ma part, depuis le décès de Martha, je passe le réveillon avec Sean et le lendemain seule avec Nix. Je ne me suis jamais vraiment vu hantée par cet esprit des fêtes qui vient enchanter le monde à cette période.

– Castine doit être magnifique, sous la neige. Il me semble que tu m'en avais parlé, le jour où je t'ai rencontré.
– Oui, c'est très joli, je réponds en souriant, sincèrement touchée par ce souvenir.

Je sais que notre rencontre date d'hier à peine, mais il s'est passé tellement de choses depuis que j'ai l'impression que cela remonte à bien plus longtemps. Je suis donc plutôt surprise qu'il se souvienne d'un détail aussi banal que celui-ci.

Est-ce utile d'avouer que je n'ai jamais touché de guitare de toute ma vie ? Non, certainement pas. Tom s'en aperçoit à l'instant même où je saisis l'instrument pour la toute première fois. Je me prête très sérieusement au jeu de l'exercice. Je m'applique et me concentre du mieux que je peux. Il semble que je n'ai aucun talent pour la musique, mais cela ne m'importe que très peu. Je m'amuse tout en profitant de la présence de Tom contre moi… Je n'ai donc aucune raison de m'en plaindre.

– C'est beaucoup mieux !Je pense que tu mérites une récompense, tu ne crois pas ? Pour ton excellent travail.
– Tu n'es donc pas très exigeant comme prof, dis-je en souriant. Mais, je suis curieuse, qu'as-tu en tête ?

"– C'est beaucoup mieux ! Je pense que tu mérites une récompense, tu ne crois pas ? Pour ton excellent travail."
"– Tu n'es donc pas très exigeant comme prof", me répond-t-elle en souriant. "Mais, je suis curieuse, qu'as-tu en tête ?"
"Juste un baiser", je murmure.

Je réajuste ma posture, me penchant sur le côté pour venir capturer ses lèvres. Et j'entrouvre bien vite les miennes pour approfondir ce baiser. Je sais que je ne pourrais jamais me lasser du goût de sa bouche contre la mienne, et de son souffle qui se mélange au mien. Tout comme des soupirs qu'elle pousse lorsque je m'éloigne juste quelques secondes.

"– Quand à mon manque d'exigence...". Je lui vole un baiser. Puis un deuxième. "Peut-être est-ce parce que tu es une élève très appliquée."

Je l'embrasse à nouveau, sur la joue cette fois, puis le long de sa mâchoire.

"– A ce rythme-là. Tu deviendras une star du rock en très peu de temps", j'annonce avec un air que j'essaie de garder parfaitement sérieux.

Puis je m'approche d'elle, juste assez pour effleurer ses lèvres. Mais je m'éloigne tout aussi vite. Et je reprends ma place juste derrière-elle, comme si rien ne s'était passé.

"- Très bien, mademoiselle Greene. Maintenant, un accord de La mineur."

Sans me soucier de sa réaction, je replace ses mains sur le manche, jusqu'à obtenir la forme de l'accord.

Mais je dois admettre que je suis un peu distrait. Elle est bien trop proche pour que mon corps ne réagisse pas.

J'ai envie de l'embrasser à nouveau. Mais j'ai aussi besoin de ce contact, qui m'a manqué toute la journée. Elle était si proche, mais en même temps si loin par moments.

Et ma journée a été riche en rebondissements.

Je dépose un baiser dans sa nuque, puis lui souffle de gratter les cordes.

– Juste un baiser, murmure-t-il juste avant de s'emparer de mes lèvres avec cette tendresse gourmande qui a le don de m'envouter.
– Quant à mon manque d'exigence...Peut-être est-ce parce que tu es une élève très appliquée.

Chacune de ses phrases se voit ponctuée d'un nouveau baiser… Des baisers qui laissent rapidement sous-entendre un désir plus … explorateur. Pour ma part, je me contente de sourire. Il est évident qu'il cherche à me provoquer, enfin… D'une certaine manière.

– A ce rythme-là. Tu deviendras une star du rock en très peu de temps, me dit-il d'un air faussement sérieux avant de venir me taquiner.
– C'est évidemment mon rêve le plus cher, je pouffe en faisant mine de ne rien remarquer de son petit manège.

Moi aussi je le provoque, à ma manière. Je rajuste ma position entre ses jambes pour combler le peu d'espace qu'il restait entre nous. Ceci fait, je me concentre sur la position de mes mains sur la guitare jusqu'à produire le son demandé…Enfin, je le suppose. Après tout, je ne suis pas fichue de reconnaître les accords et je suis presque sûre d'avoir déjà oublié le premier…

– Comme ça ? je murmure après plusieurs essais plus ou moins fructueux.

Je sais que cette leçon de guitare n'en est pas vraiment une. C'est un câlin. C'est un homme sensible et la journée a été longue et éprouvante… Comme toutes les journées vécues depuis que nous sommes arrivés dans cette ville. Dans son étreinte, je ressens son besoin de retrouver un cocon protecteur et rassurant. Alors je joue le jeu, parce que je sais que ce moment-là lui est nécessaire.

– Tu veux dîner ? je chuchote au bout de quelques minutes.

"– C'est évidemment mon rêve le plus cher", rit-elle lorsque je suggère qu'elle pourrait devenir une star du rock.

Je souris, puis me fige alors qu'elle ajuste sa position entre mes jambes. Je ne sais pas si elle se rend compte de l'effet qu'elle a sur moi. Peut-être. Et dans ce cas, elle joue avec mes nerfs.
Mais impossible de savoir si c'est le cas.
Elle semble rester attentive, et je souris tandis qu'elle gratte les cordes plusieurs fois.

"– Comme ça ?"
"- Hmm, c'est parfait. Tu peux enchaîner les deux accords, maintenant."

Je lui remontre le premier, puis le deuxième. Reste à construire la dextérité nécessaire. Mais ça viendra, si elle veut continuer.

Je l'embrasse sur la joue, et la félicite pour ses premiers essais. Puis je me contente de la serrer contre moi, tout en déposant une succession de baisers sur sa joue, son cou, dans ses cheveux.

Au delà de ce désir toujours présent, j'aime surtout l'avoir dans mes bras, retrouver ce calme, ces moments juste à nous.

"– Tu veux dîner ? "
"– Pourquoi pas"

Il est vrai que nous n'avons pas fait un vrai repas ce midi. A vrai dire, j'aimerais surtout prendre une douche et m'affaler dans le lit. Mais je suppose que manger est tout de même la priorité numéro une.

J'ai bien du mal à me détacher d'Emily. Mais le sol commence à être vraiment dur. Et je me résigne à me relever, volant au passage un baiser à mon élève d'un jour.

Je gémit en me redressant. Voilà, j'ai mal au dos. Mais ça m'apprendra à rester trop longtemps dans des positions tordues.
Je m'étire soigneusement, prenant le temps de décoincer certaines zones sensibles.

J'éteins l'ampli, je range la guitare, puis je récupère le menu du room service.

Nous nous mettons vite d'accord, et notre commande arrive relativement rapidement.
Nous nous installons autour de la table, et je réalise seulement à quel point j'ai faim. J'attaque mon repas avec appétit, discutant de choses et d'autres avec Emily.

Reste un sujet que je j'avais pas osé aborder jusqu'à présent, mais dont l'échéance approche à grands pas.

"– Tu as déjà pris ton billet retour ?" je lui demande tandis que je repose mon assiette vide sur la desserte posée à côté de la table.

Je n'ai pas envie de la voir partir, mais elle m'a prévenu qu'elle quitterait Vegas dès le lendemain du concert. Après-demain, donc.

J'ai déjà presque l'impression de la voir filer entre mes doigts. Et je n'aime pas ça du tout.

"–Tu vas me manquer", je murmure. Peut-être trop bas pour qu'elle l'entende.

Elle le sait probablement déjà. Et elle sait aussi sûrement que je ferai tout mon possible pour la rejoindre rapidement.

Je souris en le voyant se relever avec difficulté. Le sol n'est, après tout, pas très confortable et nous y sommes restés un bon moment. Je le laisse se déplier et ranger sa guitare, attendant simplement qu'il soit prêt pour choisir notre repas. Ce que nous faisons plutôt rapidement.

Le dîner se déroule dans une ambiance plutôt légère. L'on discute simplement jusqu'à ce que je vois son regard se ternir quelque peu.

– Tu as déjà pris ton billet retour ?
– Euh oui, Lucy m'a montré comment faire depuis mon téléphone. C'est plutôt pratique, je rétorque en déposant mon assiette vide avant d'ajouter : c'est prévu pour dimanche à neuf heures.

Je n'ai pas envie de le quitter si vite, même si l'idée de rentrer chez moi m'obsède de plus en plus. Mais ce besoin de partir est uniquement lié à Vegas… Certainement pas à lui.

–Tu vas me manquer, chuchote-t-il comme pour lui-même…

L'air qu'il affiche alors me brise le cœur. Je déteste l'idée d'être responsable d'une telle expression.

– Tom… je soupire avant de venir m'installer sur ses genoux. Ce n'est pas un adieu… N'est-ce pas ?

Peut-être que si, au fond… Personne ne peut prévoir ce que nous réserve l'avenir. Nous nous sommes trouvés dans un contexte bien précis et il reste possible qu'en nous éloignant l'un de l'autre… Nous ne faisons pas partie du même monde après tout. Et même si nous veillons soigneusement à ignorer ce détail précis, force est de reconnaître que, ni lui, ni moi, n'osons faire le moindre projet d'avenir. Même à court terme.

– En tout cas, je n'en ai pas envie, dis-je en déposant un baiser sur sa joue. Dans tous les cas, tu sais où me trouver…

"– Tu as déjà pris ton billet retour ?"
"– Euh oui, Lucy m'a montré comment faire depuis mon téléphone. C'est plutôt pratique. C'est prévu pour dimanche à neuf heures."
"– Je vois. Je t'accompagnerai à l'aéroport."

Et tant pis pour mes fans, pour les journalistes. J'ai envie de rester avec elle le plus longtemps possible.

Je tente de sourire. Je sais bien qu'elle est heureuse de rentrer chez elle. Mais je n'arrive pas à me réjouir de la perspective d'être séparé d'elle.

"– Tom…"

Elle vient s'installer sur mes genoux, et mes mains se posent par réflexe sur sa taille. J'ai envie de l'embrasser. Mais c'est presque trop douloureux.

"– Ce n'est pas un adieu… N'est-ce pas ?"

J'ouvre la bouche pour protester, mais aucun son n'en sort. Est-ce que je donne vraiment l'impression de pouvoir abandonner ce que nous avons construit ensemble ? Tout cela est encore si fragile... Mais pour rien au monde je ne souhaite lui dire adieu.

"– En tout cas, je n'en ai pas envie", ajoute-t-elle.
"– Moi non plus", je murmure avec émotion.

Je ferme les yeux lorsqu'elle pose un baiser sur ma joue.

"– Dans tous les cas, tu sais où me trouver…"

Mes paupières se soulèvent, et ma vision est floue de larmes qui coulent sans tarder sur mes joues. Je me laisse envahir par l'émotion, une fois de plus. Ou peut-être que cette discussion a mis trop de temps à arriver. Je me retrouve une fois de plus au pied du mur, avec des aveux sur mes lèvres, et cette volonté d'aller plus loin, de m'accrocher à elle comme si sa présence m'était vitale. Et peut-être qu'elle l'est, après tout. Comment ai-je fait pour tomber amoureux de cette manière ? Aussi fort, aussi rapidement.

"– J'y compte bien. Tu ne vas pas te débarrasser de moi aussi facilement," je plaisante.

Un rire nerveux m'échappe, au milieu de mes larmes.

"– Tu peux compter sur moi pour te rejoindre dès que je pourrai. Dès que ces fichues négociations pour ce nouveau label seront terminées. Je suis prêt à faire plusieurs aller-retour, s'il le faut, si ma présence est de nouveau nécessaire ici, ou à Los Angeles."

Je lui caresse la joue.

"– Et ensuite, on trouvera un moyen pour que ça fonctionne, si tu es prête à me faire une place dans ta vie, avec mes guitares et mon pick-up. Il faudra probablement que je passe par Los Angeles, récupérer quelques affaires, vérifier que ma villa tient encore debout..."

Ca demandera de l'organisation, bien sûr. Je ne suis pas naïf. Je me rends bien compte qu'il nous faudra du temps pour réussir à trouver un équilibre. Mais j'ai envie de me battre pour que ça marche.

"– Je t'aime, Emily. Je n'ai pas envie de te dire adieu. J'ai envie de construire un avenir avec toi."