Je fronça les sourcils une petite seconde. Ainsi son acte était simplement parce que je l’avais aidé? Pas plus que ça? Enfin, pas que je voulais la mettre dans mon lit mais je pensais que au minimum un semblant de relation amicale. Je n’aimais pas comment je me sentais en ce moment et je ne savais pas si c’était pire qu’à mon arrivée ou simplement comme toute la soirée en générale. Cependant je lui répondis à sa question aussi honnête et transparent que je pouvais être. Certes je n’avais pas échanger beaucoup de chose avec elle, mis à part la température, mais j’avais observé beaucoup. C’était peut-être une de mes qualité en fait. Quand je lui retournai la question, toujours aussi bon enfant et taquin qu’elle a été je ne m’attendais pas à recevoir un retour de bâton aussi violent.

* Vous êtes un client, pas un ami* cette phrase me fis l’effet d’une claque en plein visage. Ça m'apprendrais tiens à être gentil! Visiblement j’aurais dû partir avec une des deux femmes qui papillonnaient du regard. Je ne dis rien me renfrognant simplement et tripotant le pied de la flûte de champagne que je n’avais même plus envie de boire. Je me dis rien me mordant la langue dans ma bouche en ayant baissé le regard sur la table. Quand elle s’excusa je relevai le regard vers elle cherchant encore quoi rajouter à cela. Merci? Dommage j’aurais aimé vous connaître plus? Je comprends? Peu importe je sens que je me serais fait envoyé joliment sur les roses alors j’opinais de la tête lentement.

- Pour être franche tu l’es, aucun doute là-dessus. dis-je en faisant une pause, Je peux être honnête à mon tour?

Je fis une pause prenant mon veston pour l’enfiler et posant mon regard dans le sien.

- Il n’y a rien de mal à nouer des liens amicaux, je sais ce que c’est de rester enfermé à simplement bosser. Voir autre chose que notre commerce c’est bien aussi.

Je me levai lentement pour prendre mon manteau que je laissai pendre au bout de mon bras.

- Merci pour la tarte, elle est délicieuse. Je vais rentrer comme il est tard et tu dois ouvrir tôt alors…

J’enfilai mon manteau et me dirigeai vers la porte et mis ma main sur la poignée et me tournai vers elle.

- Si jamais une relation de surface ne te suffit plus tu sais où me trouver. Bonne soirée Anna.
****************************************

Le week-end n’avait rien eut de reposant malheureusement. J’avais dû gérer la commande qui prenait du retard, ma soeur qui me suppliait de lui raconter la soirée et que je lui résumait en trois mots: Ennuyant, barbant, pas de prospect. Ce qui me valu un énorme soupir d’exaspération. Ouais bien elle devait s’en douter un peu non? J’ai même fait des courses en me disant que je pourrais cuisiner mes repas. Force d’admettre que je me trouvais bien idiot maintenant sachant que je ne pourrais jamais cuisiner tout ça sans faire cramer le tout. Tout ça parce que je ne voulais pas imposer ma présence plus que ça. Certes je pourrais me pointer mais je sais que peu importe ce que je ferais, Anna n’irais jamais plus loin qu’une “relation de surface”. Oui je pouvais ma l’avouer à moi-même, ça me faisait quelque chose qu’elle m’ai dit ça. Donc après avoir renoncé à me cuisiner quelque chose de possiblement mangeable, je m’affalai sur le canapé devant un épisode Mr. Bean trouvant ma propre soirée complètement nulle. Je pourrais sortir prendre un verre et… et quoi? Juste m’étourdir pour être encore plus fatigué le lendemain? Non je pense qu’il valait mieux que je me couche tôt pour régler mes problèmes de travail et qu’on arrive dans les temps. Le lundi matin donc, je sautai dans ma voiture et direction le boulot mais je fus le premier surpris quand je me garais devant le café d’Anna.

- Habitude quand tu nous tiens…

Je poussai un soupir et descendit de la voiture, tant qu’à être garé autant entrer. Je poussai la porte et vraiment je ne sentais pas à l’aise du tout. Et encore malchance pour moi, il n’y avait qu’un client devant moi. Sarah me salua chaleureusement, ce que je fis en retour jusqu’à ce que se soit mon tour. Mon regard s’arrêta dans celui d’Anna me trouvant le mec le plus con de la terre… plus qu’en général.

- Bonjour euh… un café et un muffin aux bananes. dis-je simplement ne cherchant même pas à faire la conversation parce que je ne trouvais rien de sympa ou d’original à dire alors que je sortis mes billets pour les lui tendre. Bonne journée.

Rien de plus et je quittai simplement. Je pus avoir enfin la confirmation que ma commande serait livré à la fin de la semaine ce qui me rassura grandement. J’allais m’acheter un sandwich dans un petit dépanneur du coin revenant de mes chantiers pour aller passer quelques entrevues et… la fin de la journée arriva et comme chaque jour celui ou mes pas me dirigèrent vers le café d’Anna. Je commandai simplement le repas du soir gentiment et encore là je ne trouvais rien d’intelligent à dire. Ce fut les jours suivants, je restais poli, gentil mais pas plus que ce qu’elle voulait. Le jeudi soir comme toujours, je saluais les deux femmes, commandai mon repas et une fois terminé je me levai pour leur souhaiter une bonne soirée.

- Fergus!

Je me tournai vers Sarah en haussant un sourcil, l’encourageant à continuer.

- Anna voulait te dire quelque chose…

Mon regard se déplaça vers la jeune femme comme Sarah disparaissait dans la cuisine. Je me rapprochai du comptoir les sourcils froncés flairant le plan foireux à deux balles.

- Comme ça tu veux me parler?

Et si elle ne se trompais pas? Quoique j’en doute fortement.

À l'évidence, je l'ai vexé et, si j'en suis désolée, je préfère ne rien ajouter de plus. À quoi bon après tout ? Je sais parfaitement que nous pensons différemment lui et moi. Pour preuve, il enchaîne en affirmant qu'il n'y a rien de mal à tisser des liens amicaux. En soi, je suis tout à fait d'accord avec lui… Mais je n'ai malheureusement pas le temps pour ça et du temps, j'en ai besoin pour garder la tête hors de l'eau… Pour tenir ce commerce et pour élever deux enfants qui ne sont pas les miens. Des enfants qui souffrent énormément de la perte de leurs parents… De leur maison… De leur vie d'avant.

Je fais tout ce que je peux pour leur offrir une nouvelle chance. Pour leur permettre de vivre, heureux… Je sais que je suis encore très maladroite. Après tout, rien ne m'a préparé à ça… Mais je fais de mon mieux malgré mon tempérament de grande solitaire.

– Bonne soirée, Fergus, rétorqué-je simplement.


C'est au fil des jours qui s'écoulent que je prends la mesure de sa vexation. Fergus déserte le café et si cela ne m'étonne pas vraiment, son absence soulève de nombreuses interrogations chez Sarah.

– Il n'est pas venu du week-end ! S'écrie-t-elle.
– Et alors ?
– Il lui est peut-être arrivé quelque chose !
– Mais non… Tu imagines toujours le pire.

Lorsqu'elle soulève sa présence lors de la soirée Speed Dating, mon assistante au grand flair commence son interrogatoire. Je réponds à chacune de ses questions avec grande franchise et il me semble très vite évident qu'elle a saisi le fond du problème.

– Roh…Anna… Mais…
– Mais quoi ?
– Tu lui plais bon sang ! Il ne veut pas devenir ton ami, il veut devenir ton petit ami !
– Ne dis pas n'importe quoi… Et puis, dans tous les cas, nous sommes beaucoup trop différents et…
– Et quoi ?
– Je ne veux pas d'homme dans ma vie, je réponds, catégorique.

C'est ce matin-là que Fergus refait son apparition. Visiblement, il a décidé de prendre en compte mon opinion. Il commande simplement, sans rien ajouter et je le sert comme n'importe quel client. Sourire commercial, amabilité de circonstances, service impeccable.

– Merci beaucoup, en vous souhaitant une bonne journée, lui lancé-je après qu'il m'ait payé.

Mais ce fut sans compter sur l'intervention de Sarah… Et quelle intervention…

– Euh … Pardon ? demandé-je en haussant un sourcil sceptique.
– Comme ça tu veux me parler?
– Non, pas du tout, je soupire en lançant un regard noir à mon employée qui vient de perdre son statut d'ami. Oui, il m'en faut peu.
– Elle voulait te présenter ses excuses !
– Ah oui ? Et pourquoi donc ?
– Tu l'as blessé !
– Je n'ai fait que me montrer franche et honnête. Je suis navrée si mes propos ont pu le heurter, mais je ne regrette absolument pas ce que j'ai pu dire, je rétorque, clairement sur la défensive malgré mon air impassible. Je n'ai rien de plus à ajouter vous concernant, Fergus… En revanche, nous avons à discuter, vous et moi, dis-je à l'attention de Sarah.

Non, je n'apprécie pas que l'on se mêle de ma vie. Je déteste que l'on me force la main et que l'on me place devant le fait accompli. Je me sens insultée et je compte bien régler cela avec elle…. au plus vite d'ailleurs.

– Je vous souhaite une excellente journée.

J’avais bien mangé et loin de moi l’idée de m’attarder encore plus m’ayant fait royalement envoyer valser. Certes en soi elle avait bien le droit de ne vouloir lier aucun lien avec moi mais c’était plutôt la manière de faire que j’avais mal digéré et bien que je sois un gentil, je n’étais pas stupide au point de m’attarder et discuter avec elle sachant qu’elle en avait rien à battre du gros nigaud que j’étais. C’est donc une fois mon frugal repas terminé que je me levai pour quitter simplement mais c’était sans compter l’intervention de Sarah stoppant mon départ. Je m’avançai donc suspicieux et flairant le plan de merde à deux balles. Mais bien sûr suite à ma question elle me répondit aussi franchement et aussi tranchante qu’une lame de couteau me frustrant. Ouais c’est bon j’ai compris aussi que c’était un plan foireux pas obligé de me le faire sentir.

J’assistais maintenant à une mini querelle entre elles alors qu’on parlait de moi comme si je n’étais pas là. Quoi de mieux pour se sentir PARFAITEMENT à l’aise! Je soupirais longuement en me demandant si Ellie ne faisait pas partie de ce plan foireux à deux balles. Non Ellie aurait été le genre à nous donner rendez-vous en même temps au même endroit avec une excuse bien pourrie et ça c’est si elle parvenait à savoir qui était celle qui avait attiré mon attention, chose qu’elle ne saurait jamais visiblement. Et encore une fois, la fin d’une discussion tranchante, froide et cinglante.

- Ça vous dérangerait de faire comme si j’étais un peu présent mesdames? dis-je en les toisant tour à tour.

J’étais légèrement insulté qu’on m’ignore un peu. Puis je conçois que l’idée de Sarah n’était pas la meilleure du siècle mais rien pour monter aux barricades non plus. Je pris une inspiration car mon orgueil d’Écossais semblait prendre le dessus. J’expirais fortement en les regardant encore tour à tour et en appuyant mes mains à plat sur le comptoir. Mon regard alla se porter directement sur Anna qui était visiblement en pétard contre son employée. Ok… donc elle n’avait besoin de personne pour lui dire quoi faire, elle était fière comme pas une et en prime trop orgueilleuse pour simplement s’excuser. Intéressant.

- Je ne peux nier que tu as été franche et honnête. C’était même très clair, cependant il faut aussi avoir l’humilité de reconnaître qu’être trop franche peut blesser. Je n’attends pas vraiment d’excuses, je me doute que tu ne m’en donneras pas. Tu es une femme fière, qui sait ce qu’il veut et c’est ok. Mais je doute que Sarah mérite ta colère.

Dis-je le plus sérieusement du monde mon regard bien planté dans le sien. Je relevai le regard vers Sarah qui semblait… comment dire… entre le malaise évident et l’envie de se téléporter ailleurs.

- Merci de ton intervention mais je pense qu’Anna et moi-même on peut se débrouiller pour se comprendre. Mais évite les plans foireux, j’ai l’habitude. dis-je avec un sourire en coin.

Je reportais mon attention sur Anna son air renfrogné me fit sourire légèrement. Elle avait la lèvre légèrement pincée, les sourcils froncés et j’étais presque certain, piqué dans sa fierté. Tiens… un autre point que je découvrais.

- Je vais te laisser, j’imagine que tu as bien du boulot pour simplement faire causette avec moi… ou n’importe qui d’autre dans cette ville. dis-je platement, Bonne journée Anna.

Je leur accordais un dernier regard avant de franchir la porte et simplement regagner mon propre commerce et tenter de me concentrer sur mon boulot. Mais bon c’était sans compter sur ma gentille réceptionniste qui m’avait vu arrivé et qui me connaissait autant que ma propre mère.

Ça ne va pas toi…

Je relevai min regard des messages que j'avais eu et me renfrognai légèrement.

Non ca va…

Mlle. Anna?

Je roulai des yeux en soupirant me disant que j'aurais peut-être dû ne rien lui dire à elle aussi. Je racontai brièvement ce qui s'était passé. La soirée speed dating, après, ce qu'elle m'avait dit et ce qui c'était passé là tout de suite. Aimable comme toujours elle se leva et tapotant ma main doucement.

Donnes-lui le temps de te connaître…

Elle ne veut pas me connaitre! Elle me l'a bien fait comprendre.

Elle a une boutique et deux gamins à s'occuper normal qu'elle ai de la difficulté à gérer un peu. Puis depuis quand tu abandonne à la première difficulté toi? Tu es bien plus entêté que ça…

Je n'ajoutais rien de plus préférant bosser un maximum pour éviter de penser. Le soir j'arrivais plus tard que d'habitude dû à des petits tracas de chantier et en passant la porte je me fus accueilli par Liam qui faisait ses devoirs. Je commandai mon repas et m'attardais un peu au comptoir.

Je voulais m'excuser de mon comportement Anna. Je me doutes que tu n'en a peut-être rien à faire mais je tenais à le faire.

D'aucun vous le diront, je ne suis ni colérique, ni rancunière. En revanche, je déteste que l'on se mêle de mes affaires, même avec les meilleures intentions du monde. Je suis une grande fille après tout. Je peux tout à fait me débrouiller toute seule. Sarah le sait parfaitement et, pourtant, il a fallu qu'elle vienne mettre son petit grain de sel dans cette histoire qui n'en méritait pas tant. La réaction de Fergus était pourtant claire, lui aussi voudrait pouvoir passer à autre chose alors… Pourquoi diable revenir mettre de l'huile sur le feu ?!

L'intervention de Sarah me pique dans ma fierté. Je ne cherche d'ailleurs même pas à le cacher. Je me ferme aussitôt, essayant tant bien que mal de contenir mes propos les plus corrosifs. Mais alors que je m'apprête à m'expliquer avec mon employée, voilà que mon client se permet d'intervenir…

Je sens que tout cela se complique beaucoup trop à mon goût.

Je prends vraiment sur moi pour me contenir. Je n'ai pas envie de l'envoyer paître une fois de plus, même si je considère son intervention comme sacrément inappropriée. Alors je ne dis rien et me contente de lui lancer un regard noir et ce, jusqu'à son départ.

– Pardon Anna, je ne voulais pas…
– C'est bon, je souffle en fermant les yeux dans l'espoir de retrouver mon calme. On a du travail.

Je passe le reste de la journée à bosser sur ma paperasse pour me tenir occupée… Et aussi un petit peu pour punir Sarah en lui laissant la cuisine et le service. De quoi lui offrir une magnifique surcharge mentale. Mais bon, j'ai très vite culpabilisé, au point de la libérer à quinze heures.

Je termine donc la journée seule. Rien de dramatique là dedans, j'ai l’habitude et puis… Il n'y a jamais grand monde en fin de journée. Liam m'a rejoint à la sortie de l'école et fait sagement ses devoirs tout en me racontant le déroulement de sa journée. Je sais que c'était une sorte de tradition entre lui et sa mère…Une sorte de blablatage studieux que je me surprend à apprécier de plus en plus.

Lorsque Fergus entre, je me tend aussitôt. Je n'ai pas vraiment envie de me disputer avec lui… Pas maintenant, pas ici, pas devant le petit. Je me contente donc de lui préparer sa commande en ajoutant une part de tarte à la rhubarbe et aux noix en gage de paix.

–Je voulais m'excuser de mon comportement, Anna. Je me doute que tu n'en a peut-être rien à faire mais je tenais à le faire.
– Que j'en ai rien à faire ? je demande en lui tendant le sac contenant sa commande. Bon sang, je soupire en me passant une main sur le front avant de demander à Liam de remonter à la maison.

J'attends qu'il récupère ses affaires et qu'il déserte la boutique pour aller tourner la pancarte sur la porte pour être sûre que personne ne vienne nous interrompre et se mêler de notre conversation.

– Écoutez, Fergus, je suis sincèrement désolée de vous avoir heurté. Ce n'était pas mon intention, vous pouvez me croire. Néanmoins, j'apprécierai que vous cessiez d'anticiper mes réactions ou mes propos. Parce que non, je n'en ai pas rien à faire de vos excuses. Bon dieu, j'ai peut-être mon caractère, mais je ne suis pas un monstre pour autant !

Teresa avait quelque part raison, il est vrai qu’elle avait beaucoup à gérer en ce moment et gérer 2 gamins en deuil se n’était pas facile néanmoins je ne demandais pas un rencard à toute les semaines, juste… enfin qu’elle sorte un peu de sa boutique pour voir la ville. C’était magnifique Edimbourgh et il y avait tant à voir et à faire. Je ne sais pas comment je pouvais amener la chose et je préférais me tenir loin. De toute façon elle me l’avait fait bien comprendre alors je n’avais peut-être pas de hautes études mais je n’étais pas idiot pour autant. Oui je me sentais coupable soudainement de lui avoir renvoyer un coup de bâton. Petite vengeance tellement inutile et idiote en plus! Donc en traversant la porte je la vis se tendre, ses lèvres se pincer et je dois dire que je n’étais pas tellement plus à l’aise en ce moment. Je commandais mon repas et même une fois le sac devant moi je m’attardais au comptoir m’excusant de mon comportement me disant qu’elle n’en avais rien à foutre de toutes façon “je n’étais qu’un client” alors…

Quand elle soupira et demanda à Liam de monter, celui-ci me jeta un regard interrogateur et je lui fis un sourire rassurant. Ça irait petit… ça irait non? Je fronçai les sourcils une seconde en la voyant tourner la pancarte de la porte et me préparant à protester pour qu’elle reste ouverte mais elle me coupa l’herbe sous le pied. Quand elle s’excusa - sincèrement ceci dit - je haussai un sourcil surpris. Hé bien, hé bien… elle s’excusait? Ainsi Sarah n’avait peut-être pas totalement tort d’intervenir, mais je ne lui dirais certainement pas. Pas complètement con non plus! J’écoutais attentivement, appuyé sur le comptoir, et mon regard sur elle.. Elle ne voulait pas que j’anticipe ses réactions. Ok… et je faisais comment moi madame la maligne? Je ne te connais pas. Ainsi mes excuses elle s’en préoccupait, intéressant. Elle termina et je ne dis rien tout de suite. L’observant un moment, les yeux plissé partagé entre l’espièglerie et la suspicion.

- J’accepte vos excuses et c’est très gentil de me les présenter cependant il y a encore un petit problème… dis-je en croisant mes bras sur moi. Je ne peux pas arrêter d’anticiper tes réactions pour la simple et bonne raison que je ne te connais pas Anna. Je ne sais pas si tu es un monstre ou non parce que pour ça il faudrait que je te connaisse un peu. Donc on a un petit problème ici je pense et je ne vois juste qu’un moyen de remédier à ça.

Je lui fis un sourire en coin.

- Il faut que je te connaisse hors de cette boutique. je levai mon index pour qu’elle me laisse finir. Ce n’est pas un rencard. Disons que… hum… Vois ça comme si j’étais ton guide touristique. Relation très professionnelle, aucune amitié, juste moi qui te montre les points d’intérêts de la ville. Tu peux même apporter les enfants, ils connaissent peu la ville. Excellente façon de la visiter. Disons que c’est un échange de service. Tu me donnes à manger et moi je te fais visiter.

Ajoutais-je en lui faisant un sourire qui s’élargissait lentement. En vrai c’était très honnête comme offre. Je ne lui offrais pas de sortir dans un pub ou aller voir un cinéma juste pour visiter un peu quelques points de la ville intéressants. Les enfants pourront ainsi éviter les coins un peu plus durs et mal famés et ne pas se retrouver dans de mauvaises postures.

C'est en affichant une moue des plus sceptique que j'écoute ses propos. Ma foi, voilà quelques paroles bien surprenantes… Alors que je lui demande de ne plus anticiper mes réactions, voilà que celui-ci affirme ne pas pouvoir faire autrement justement parce qu'il ne me connaît pas… Pourtant, à mon sens, c'est précisément pour cette raison que je lui ai expressément demandé de ne plus le faire. L'on ne peut anticiper que ce que l'on connaît, et non l'inverse.

Et puis voilà qu'il poursuit en ajoutant qu'il serait nécessaire, pour lui, de me connaître en dehors de cette boutique… N'a-t-il donc pas compris ce que je lui ai déjà dit à ce propos ? Je n'ai pas le temps pour cela… Pas l'envie non plus. Notre relation actuelle me convient tout à fait. Je n'ai aucunement besoin de perdre une journée de travail ou de paperasse infernale pour visiter une ville que je connais déjà… Enfin, suffisamment, à mon sens.

– Fergus… je soupire en me passant une main dans les cheveux. Premièrement, il n'y a pas d'échange de service qui tienne. Vous payez pour les repas que vous prenez ici, ils ne vous sont pas offerts… Ensuite…

– Ensuite , elle trouvera des dizaines d'excuses pour ne pas sortir avec vous, ajoute un Liam, toujours aussi curieux.

Sa petite tête souriante dépasse à peine de la porte de l'escalier. Je devine aisément qu'il nous écoute depuis le début… Ah les enfants et leur fichue curiosité qui les pousse à se mêler de tout en permanence…

–Dis donc, petit fouineur ! je râle avant de grogner de façon purement théâtrale.
– Ben quoi ? C'est vrai. Tu ne fais jamais rien en dehors de ton travail… Enfin si, tu passes du temps avec nous quand tu peux … Quand tu ne travailles pas, tu fais les courses ou le ménage…

Je n'ai pas vraiment besoin d'entendre tout ceci. Surtout provenant de la bouche d'un gamin de dix ans… Ma vie d'avant me manque énormément, mais je n'ai pas le droit de me plaindre… Et puis, je n'ai même pas de temps pour ça. Sans doute aurais-je dû trouver un travail tranquille dans une entreprise quelconque plutôt que de me compliquer l'existence avec cette boutique…

– Je fais ce que je peux, bonhomme, dis-je avant de pousser un long soupir.
– Je sais… Mais ce serait bien que tu sortes un peu. Maman avait des amis tu sais ?

Je sais… Suzanne a toujours été la plus sociable de nous deux. Et puis … Elle avait eu le temps de s'organiser avec ses enfants qui ont grandi au fur et à mesure…

–Je vais tâcher d'y réfléchir, conclus-je avant de retourner la pancarte. Nous en reparlerons une autre fois.

Le lendemain, c'est une profonde inquiétude qui m'étreint. Je n'ai pas pu fermer l'œil de la nuit. La raison est affreusement simple : Lucy n'est pas rentrée hier soir. Oh, bien-sûr, j'ai essayé de l'appeler des dizaines de fois, sans succès. J'ai appelé la police, mais ces derniers me demandent d'attendre vingt-quatre heures avant de les alerter. Après tout, c'est une adolescente difficile et, pour eux, il n'y a rien d'inhabituel à ce qu'elle découche. Sornettes ! Je sais bien que Lucy est perturbée, mais jamais au grand jamais elle n'a eu l'idée de fuguer. En tout cas, je n'ai jamais eu à subir ce genre d'inquiétude avec elle. Malgré tout, Liam m'affirme le contraire, ce n'est pas la première fois qu'elle fait ce genre de coup. Suzanne ne m'en a pourtant jamais parlé.

– T'en fais pas, elle va forcément revenir dans la matinée, me dit-il avant de partir pour l'école, l'air de rien.

Il en a de belles celui-là… Je ne sais absolument pas ce que je suis censée faire dans ce genre de situation. Je ne connais pas ses amis. J'ai appelé le lycée mais, évidemment, ils n'ont rien à m'apprendre en dehors du fait qu'elle s'était bien rendue en cours la veille… super. Me voilà bien avancée.

Trop inquiète pour travailler, je décide de ne pas ouvrir ce matin là. J'erre dans mon appartement sans savoir que faire.