Je peux facilement comprendre que parler de ce que je vais bouffer à mon quatre heures , ne l'a rend pas franchement à l'aise.
Moi aussi , ça me fait bizzare désormais , étrangement. J'aimerais rendre les choses plus simples , mais je ne suis pas certaine de savoir comment le faire.

"Ok. Promis." , je souffle avec sincérité avant que les sujets ne dévient sur ses transformations , et sur son amitié avec Dolly. Cela fait longtemps que je ne me suis pas montré gentil , de manière sincère , honnête. La conversation devient tellement facile avec Willow que ça en presque perturbant. "Gérer ses émotions...c'est sans doute le défi de notre existence." , petit instant philosophique glissé comme si de rien n'était.

J'ai envie de plus tout d'un coup , et Willow me repousse , gentiment. Ego un peu touché , mais je ne peux pas lui en vouloir réellement. Ce que je comprends moins bien , c'est son invitation à flirter lors d'un bain de minuit alors qu'elle vient de me foutre , ce qu'on appelle communément , un rateau.
Elle a quelqu'un. Et même , si ça n'a rien d'étonnant , ça entache ma bonne humeur l'espace d'une seconde.
Un connard...quel est le problème alors si c'est un enfoiré... ? Enfin , j'oublie parfois qu'elle a davantage de sens moral que moi. Au fond , elle a raison : personne ne mérite d'être trompé dans son dos.

"D'accord...je vois. Je respecte ça." , je ne veux pas m'imposer , l'a faire fuir , puis nous avons tout notre temps. "Pourquoi tu dis que c'est un connard ?" Je lui confie que je ne savais pas nager avant ma transformation , visiblement ça l'a surprends : "Quand on est foetus on se laisse porter ! Je n'avais simplement jamais eu d'occasion d'apprendre..." , ça n'était pas mon truc d'aller me baigner pour me rafraîchir avec les copains. Je ne saurai même pas dire pourquoi , peut-être que j'aimais déjà le calme , à l'époque , les effusions me mettaient mal à l'aise. Je demande alors à Willow de me raconter quelque chose sur elle :

"Une baleine ?" , je relève avec un sourire en coin. "Il n'aurait pas fallut te transformer au milieu de Forks alors..." , je l'a taquine un peu mais ça ne m'empêche pas de l'écouter attentivement. Si je lui ai posé la question , c'est que cela m'intéresse vraiment. "Je pense que je vois ce que tu veux dire. Il ny a aucun bruits parasites sous l'eau , parfait pour se reconnecter avec sois-même." , et pour deux êtres comme nous avec des sens particulièrements accru , ce serait un pur bonheur de pouvoir se couper du reste du monde. Je lui offre un sourire triste quand elle me confie que son enfance n'était pas heureuse. Je me retiens de prendre sa main dans la mienne. "Je suis désolé si ma question a remué de mauvais souvenirs. J'ai la chance de pouvoir dire que j'ai eu une enfance heureuse...jusqu'à la fin de l'adolescence." , avant la guerre , avant la mobilisation. Avant d'être confronté à ce que l'Homme a été capable de pire dans son histoire. Je n'insiste pas plus , conscient qu'elle veut changer de sujet...et son choix me fait ouvrir de grands yeux : "Nan mais ça va pas ?!" , je lui lance une gerbe d'eau avec la main levant les yeux au ciel. "Je suis peut-être le même mais toi tu n'es plus une gosse de huit ans...Et on ne se connaissait pas. Puis ce sont vous , les loups , qui pouvez vous imprégner de gosses !" , je lui réplique mi-sérieux , mi amusé avant de lui tirer la langue. Willow est très près désormais. Et le contact de sa main sur mon visage pour écarter cette mèche de cheveux...Cela réveille un nombre incalculable de choses en moi. "Les contacts physiques ce n'est pas le meilleur moyen d'éviter de tromper son gars , tu sais ça ?" , je souffle finalement , me retenant de la toucher à mon tour , évitant ses lèvres du regard. "Tu...as-tu déjà vraiment aimé quelqu'un Willow ?" , je ne parle pas de l'affection qu'on peut avoir pour ses proches , mais bien du véritable amour , celui qui te donne des papillons et te fait déplacer des montagnes.

La question autour de son alimentation devient un sujet tabou, et je ne pense pas que ce sera quelque chose dont je pourrais faire facilement l’impasse. Le temps nous le dira bien. En attendant, le vampire promet de se nourrir en dehors de Forks et c’est tout ce qui compte.

Matthias semble accepter la situation en ce qui concerne Alex. Je ne sais pas trop comment m’y prendre pour la suite. Rompre serait la chose la plus logique tenant compte de ce qu’il y a entre Matthias et moi, autrement ce ne serait pas honnête de ma part à ce point-ci…
— Disons… que ce n’est pas le genre de personne fréquentable. C’était un peu la grosse brute et le tyran de notre bahut. Et… il m’a poussé à faire des choses que je regrette. » Genre défoncer à coup de batte des boîtes aux lettres dans tout Forks, foutre le feu à une bagnole sous l’effet de la colère, ce genre de conneries, mais au vampire je lui épargne les détails. J’aime sa façon de me regarder et je ne veux pas que ça change. « Mais il était là pour moi quand j’ai… enfin quand il y a eu… » Je n’arrive pas à dire les mots. Ça fait cinq ans et je n’arrive toujours pas à dire les putains de mots. « Ma mère adoptive et moi avons eu un accident de voiture il y a quelques années de ça. Elle ne s’en est pas sortie. J’ai rencontré Alex à ce moment là de ma vie et aujourd’hui je ne sais plus si c’était une bonne ou une mauvaise chose. »

Je m’étonne d’apprendre qu’il a fallu des décennies au vampire pour apprendre à nager et à la blague lui rappel que c’est tout de même quelque chose d’inné. Je rigole à sa réponse sur mon envie secrète d’être une baleine. Je lui lance un sourire complice : « C’est tout à fait ça… Sans souffle, sans lumière. Juste l’obscurité et le silence. Si j’étais comme toi Matthias, un vampire, j’irai tout au fond de l’océan et je crois que je n’en sortirai jamais. » je lui lance en toute sincérité. Et puis, la curiosité sur mon enfance chasse ce sourire mutin de mes lèvres. La vérité c’est qu’elle n’était pas si terrible. « Loin de là ne t’en fais pas. » je souris doucement tandis que je remue l’eau devant nous. « J’ai eu des parents aimants. Même si ce n’était pas les miens. C’est me rappeler ces souvenirs qui me font mal. Chaque fois que j’y repense… » je pense à Elena et l’état dans lequel sa mort à plongé Jack. « J’ai l’impression que je ne serai jamais aussi heureuse que j’aie pu l’être à l’époque. » Je souris doucement, avant que mon visage ne redevienne sérieux aux mots du vampire. « C’est vrai. Tu as dû être appelé au front, c’est ça ? Tu avais quel âge quand c’est arrivé ? » J’ai la chair de poule un instant juste le fait de pensé que les tranchées et les horreurs de la guerre telles qu’on nous les a racontés en classe et dans les films, étaient sans doute son quotidien. Et j’avoue avoir une fascination un peu morbide autour des circonstances de sa mort. En général Matthias me fascine. Son comportement parfois sorti tout droit d’un autre temps, la dichotomie de son humanité et de sa nature vampirique surtout.

Ma blague un peu noire à bien fait réagir le vampire, et pour cela je m’en félicite intérieurement. Moi qui le pensais imperturbable. Il m’envoie de l’eau au visage que j’esquive en me laissant couler dans l’eau. Silence et obscurité. De nouveau à la surface je me laisse aller d’un rire léger et me régale de la gêne provoquée. Je pars de plus belle d'un rire grelot, surtout lorsqu’il a la réplique pour accuser les miens d’être encore plus louches. «  Touché ! C’est complètement fou quand on y pense. Mais je ne pense pas qu’il ne soit question d’une attirance physique à ce stade. L’amour est égoïste, alors qu'avant toute chose, l’imprégnation nous pousse surtout à une sollicitude constante par-dessus tout envers… Cette personne "spéciale".» Je confronte son regard à ces mots. Je le réalise maintenant que j’en fais l’expérience. De l'imprégnation je veux dire. J’en profite pour nager vers lui, ingénu. Je ne peux m’empêcher de vouloir créer un contact. Et dans notre cas à nous, il faut être honnête, ce n’est certainement pas uniquement de la sollicitude qu’il y a... On va pas se le cacher. Une mèche de cheveux lui tombe sous les yeux. Je dégage la bouclette brune d'un doigts avec toute la douceur du monde. Le vampire me fait comprendre subtilement que si je veux vraiment éviter de tromper mon copain, vaut mieux que je m'en tienne là.« Et... tu as raison. » je dis en ramenant ma main vers moi un sourire sur le coin des lèvres. Ce n'est que partie remise.

Matthias me pose une sacrée colle par la suite. Pourquoi cette question, là, maintenant ? Alors qu’il vient de chambouler un peu tout ce que je croyais tenir de ce concept. Je m’extrais de l’eau, mais m’arrête à mi-chemin me couvrant de mes mains comme je peux.
« Tu peux heu… te retourner le temps que je me rhabille ? » Pensive à ce que je pourrais lui dire au sujet d’aimer, je laisse un temps avant de répondre tandis que j’enfile de nouveau la petite robe fleurie. Je pense à Alex, censé être mon premier amour. Est-ce que c’était ça aimer ? Où avais-je juste besoin de me sentir moins seule ?
« Je ne pense pas, non. » Je finis par dire en haussant les épaules. « J’ai toujours pensé que l’amour était une fantaisie pour être honnête. » “était”.  Pourquoi est-ce que je l’ai dit au passé? Je m’allonge sur l’herbe non loin de lui, mais regarde le ciel constellé.
« ...Et toi? » Sans raison, mon cœur s’accélère. Est-ce que j’ai vraiment envie de savoir ? À propos de toutes ses petites amies de la dernière décennie ? « Y avait-il quelqu’un de spécial avant ou après… tout ça ? » Je demande en parlant de sa nature vampirique comme point de repère dans le temps.

Je ne peux pas vraiment m'opposer à ce qu'elle vit déjà avec son copain. Sûr que ça me rend un peu mal à l'aise, surtout quand elle dit qu'il est pas du genre fréquentable alors j'ai envie d'en savoir davantage. Je fronce un peu les sourcils quand elle dit que ce garçon l'a poussé à faire des choses qu'elle regrette aujourd'hui. Ca ne me donne pas une bonne opinion du type, c'est certain, peu importe de quels trucs elle parle.
Toutefois, je m'interdits de réagir sous le coup de l'impulsivité en sentant son émotion, alors qu'elle me confie un aspect de son histoire que j'ignorais totalement. Elle me touche Willow, là, énormément même.

"Je suis vraiment triste d'apprendre ça...S'il a pu t'aider dans cette épreuve, c'est qu'il a été positif pour toi, au moins un certain temps."

J'imagine que nous sommes parfois destinés à rencontrer certaines personnes sur notre chemin, elles sortent ou restent dans nos vies selon les circonstances...Ce Alex l'a sûrement aidé d'une manière ou d'une autre à surmonté son deuil, bien qu'aujourd'hui, Willow ne m'apparait pas être dans la relation la plus saine qui soit...Mais, je ne crois pas que j'ai grand mot à dire là-dessus, aucun même.

"Je n'ai pas besoin d'aller au fond de l'océan pour être dans l'obscurité et le silence, mais je comprends. Vraiment.", je réponds avec un sourire un peu triste, constatant que notre conversation prend un tournant on ne peut plus sombre. Elle n'est pas vieille, Willow, mais déjà bien trop tourmentée. Je n'aurai peut-être pas dû remuer de vieilles blessures en l'interrogeant. "Je te souhaite d'être aussi heureuse à nouveau Willow, sincèrement.", je reprends avec une voix plus chaleureuse, bien que les rappels de la guerre ne soient pas de ceux que j'aime avoir non plus. "J'avais 19 ans, presque 20.", ce n'était pas loin de l'âge minimum pour être appelé. En tant de guerre, on ne se pose pas la question de l'innocence des jeunes : on les réquisitionne, on leur donne une arme et démerdez-vous. Si tu meurs, tu n'es qu'un parmis tant d'autres finalement.

La blague, un peu limite qu'elle fait par la suite a le don de me mettre mal à l'aise, de me faire réagir franchement et vivement. "J'ose espérer qu'il n'y a pas d'attirance physique à ce stade effectivement...Le phénomène reste fascinant. Tu peux me faire preuve de sollicitude quand tu veux !", j'ajoute avec un sourire en coin, reprenant assez aisément les taquineries qui semblent s'installer naturellement dans nos conversations. Je pose une question un peu plus personnelle ensuite, très certainement sur un coup de tête, et ça la gêne je le vois bien, même si j'ai du mal à saisir pourquoi. Je lâche un petit rire quand elle me demande de me retourner quand elle se rhabille, puis que j'accède à sa demande, en profitant pour remettre ce qui me sert de vêtements également. "Je peux le comprendre.", je réponds quand elle me dit considérer l'amour comme une fantaisies, rien d'important. "T'es encore jeune après tout.", même si on se taquinait sur notre différence d'âge avant, on doit bien reconnaître que nos situations et nos expériences de vie sont bien différentes. Willow me retourne la question, et même si Maria reste dure à évoquer pour moi, même après toutes ces années, il me paraît important de lui en parler. Elle ne mérite pas que je lui cache cela, après tout. "Il y avait quelqu'un oui. Avant ma transformation. J'étais fiancé, en fait.", je me replonge forcément dans ses nombreux souvenirs parfois heureux, parfois douloureux. "C'était une amie d'enfance, elle s'appelait Maria. A l'adolescence nos sentiments ont évolué, et je l'ai demandé en mariage pas longtemps avant de partir au front. Elle...elle était certaine que je reviendrais. Malheureusement, eh bien tu connais la suite. Pour elle, je suis mort en Afrique du Nord en 1941. Je suis retourné la voir plusieurs fois, sans me montrer. Elle me manquait, et j'avais besoin de la savoir en sécurité. Maria est décédée en 1998, et j'étais près d'elle ce jour-là. Malgré les années elle m'a encore reconnu...", j'hausse les épaules, tentant de masquer le fait que tout cela me remue encore beaucoup. "Elle m'a pleuré quelques années avant de refaire sa vie, ce dont je ne peux pas lui en vouloir. Parfois je me dis que ma vie aurait été bien différente, plus heureuse sûrement si j'avais pu rentré chez moi...Enfin, on ne refait pas le passé hein ?", je souris un peu en coin, tristement. "Il n'y a eu personne depuis elle.", en tout cas jusqu'à maintenant.

Parler de l'accident fait toujours remonter en moi un sentiment de culpabilité insoutenable. Mes yeux se posent brièvement sur mon avant-bras. Avant ma première transformation, il y avait une énorme cicatrice. Un vestige de mon passé que la capacité de régénération ou je ne sais quoi du gène Quileute a effacé depuis ma première transformation. L'écouter parler d'Alex me fait bizarre et je ne sais pas trop quoi répondre à ses sympathies. Je repense à toutes les drogues consommées à ses côtés pour oublier la réalité merdique de nos vies. Néanmoins, je pense avoir vraiment éprouvé quelque chose pour lui à une époque. Mais aujourd'hui, ce sentiment s'est dissipé avec l'arrivée du vampire. Et je ne sais pas encore comment démêler tout ça. Matthias me souhaite le meilleur à venir. J'espère qu'il parle de lui et l'entendre prononcer mon nom me procure une agréable chaleur dans tout mon corps.
— Tu avais mon âge. » je souligne avec gravité lorsqu'il m'indique être parti pour la guerre avant la vingtaine. Savoir tout ça remet pas mal les choses en perspective.

J'entends le vampire dans mon dos se rhabiller lui aussi, je m'efforce de ne pas céder à la tentation de me retourner trop tôt. Et quant à la question d'aimer, je ne crois pas que le vampire saisisse à quel point il remet beaucoup d'aspects de ma vie en question. Dont celui-ci. Puis, Matthias se livre à son tour sur le sujet, évoquant une période qui semble l'avoir profondément marqué, même si elle a été de courte durée. Le vampire avait des rêves d'avenir, il y croyait. Puis, la réalité l'a rattrapé, comme elle finit toujours par le faire pour chacun d'entre nous. L'histoire me touche et j'ai un pincement au cœur à l'écouter parler de cette Maria. Est-ce possible d'être jalouse d'une morte ? C'est absurde. À lire l'expression de Matthias, c'est un chagrin d'amour qu'il porte aujourd'hui encore. Je n'imagine même pas ce que ce doit être que de voir la vie à laquelle tu aspirais tant, défiler sous tes yeux. N'être qu'une ombre au tableau. Devoir te faire passer pour mort, alors que l'éternité est devenue ton fardeau. Il m'avoue à demi-mots parfois regretter cette autre vie. Et qu'il n'y a jamais eu rien d'autre depuis. Je ressens sa solitude. C'est un sentiment que je connais bien, même entourée de ceux que j'aime. Ma main vient doucement effleurer la sienne, pour rappeler notre présence dans le moment présent. Je ne veux pas le perdre dans ces souvenirs lointains avec Maria. Je le veux avec moi.
— Eh bien… si cela avait été le cas, je n'aurais jamais eu "l'honneur" de faire la connaissance du célèbre Matthias. » je dis légèrement et sarcastique pour essayer de lui décrocher un sourire. Je laisse un temps. « Merci. De m'en avoir parlé. » Je finis par dire avec sérieux. Si le vampire a l'éternité devant lui, mon temps à moi s'écoule doucement et me fait réaliser d'autant plus le sentiment qui prend racine en moi depuis notre rencontre. J'ai une envie pressante de mettre fin à ma relation avec Alex, pour explorer pleinement ce qu'il y a entre nous. Je me lève pour faire face au lac devant nous. À l'instant, il y a certaines choses que je souhaite sceller dans l'univers.
— Demain, on se retrouvera ici comme aujourd'hui. Tu me proposeras un rancard… Je vais sûrement me moquer un peu de ta maladresse. On ira où bon te semble, le lieu n'a pas son importance. Puis, tu me feras rire et ensuite, je t'embrasserai, Delaglio. » Je me retourne face à lui, souriant avec malice. « C’est une déclaration plus que des ordres. » j'ajoute tout bas. En quelques phrases, j'ai trouvé la motivation nécessaire pour envisager demain avec impatience. « À demain Matt. » et sans un mot de plus pour qu'il ne reste entre nous que cette promesse, je tourne le dos au vampire pour m'enfoncer dans la forêt et me transformer dans la nuit. Chaque pas qui me distancie de lui est une douleur vive à la poitrine, mais je souris avec la pensée que demain je n'aurai plus à me séparer de lui.

***

Le réveil était difficile. Rien d'étonnant, puisque je n'ai presque pas dormi de la nuit. Merci Matthias! Dès la fin de mon shift, j'ai filé jusqu'à chez Alex lui annoncer la fin de notre relation. Il n'avait pas l'air convaincu au début, ce n'est pas la première fois qu'on fait des pauses après tout. Et je ne sais pas comment, mais il a dû finir par lire quelque chose sur mon visage puisque le sien est d'un coup devenu sérieux. « Il y a quelqu'un d'autre ? » qu’il m’a demandé. Je ne le savais pas télépathe, mais je n'ai pas pu nier, ni répondre quoi que ce soi. Ses yeux se sont alors embués, et je voyais qu’il s’efforçait de ne pas pleurer. Je n'aurais jamais soupçonné que rompre pouvait faire aussi mal et son air de chien battu m'a transpercé le cœur.

Sur le chemin du retour, je coupe par le terrain de baseball de mon ancien établissement scolaire. Et tandis que je m'apprête à pénétrer la forêt qui longe le terrain, j'entends cette voix dans mon dos : « Si ce n'est pas Olsen ! » Je me retourne à la voix criarde de Curtis que je reconnaîtrais entre mille. Le blond un peu turbulent me rejoint à ma hauteur. Le reste de sa bande suit le pas derrière nous. Je me demande ce qu'ils font à Forks. Les cours étant terminés, il n'y a plus grande clientèle pour lui ici l'été. Il manque Sonja parmi eux. Tant mieux, je ne la blaire pas l’autre rouquine!
— Ça fait longtemps qu’on ta pas vu dans le coin ! Toute seule comme ça qui plus est. Qu’est-ce qui se passe Olsen ? »
— J’ai plus besoin de tes merdes peut-être ? » Je réponds avec un petit sourire narquois.
—Même pas pour un peu de Molly ? » Qu’il me dit en sortant de sa poche un petit sachet qu’il secoue devant mes yeux, mais je m’efforce de rester de marbre et ne réponds rien. « Okay ça se comprend. » Qu’il me dit en soupirant et essayant de se donner un air sympathique. « En revanche ton copain m’a toujours pas payé l’avance que je lui ai faite. »
— Ça, c’est son problème. Pas le mien. »  Je lui réponds sèchement sans ralentir le pas.
— Ben le truc tu vois… c’est qu’on ne le voit pas trop dans les parages lui non plus et il me doit un paquet de fric… et vu que tes sa copine tu pourrais t’en occuper. Je suis certain qu’il te remboursera…
— Je ne crois pas non. C’est plus mon copain. Vois ça directement avec lui et lâche-moi les basques ! » Je vocifère en accélérant le pas et contrôle ma colère qu’elle ne pousse pas à me transformer, là, au milieu de tous. Cet imbécile va finir par me faire craquer.
Curtis m’attrape, le bras m’empêchant d’aller plus loin, un sourire malin aux lèvres.
— J’y crois pas trop à ton baratin. Allez Willow! Si t’as pas l’argent, j’accepte d’autres genres de payme-
Je ne lui laisse pas le temps de terminer sa putain de phrase. Sans prévenir, je lui assène un violent coup de boule au crâne. Je n’ai pas maîtrisé ma force, je n’en avais pas envie. Et Curtis s’écrase lourdement sur le sol, le nez pété et en sang, complètement sonné. Aussitôt, sa bande me saute dessus, chose que je n’avais pas anticipée. Je me débats comme une furie et réussi à les malmener pour quelques instants, mais ils sont trop nombreux pour ma forme humaine et finissent par m’immobiliser avant de me plaquer violemment au sol. Je leur hurle un torrent d’insultes et juste avant que je ne me laisse aller à la transformation, j’entends le son de l’écran de sureté d’une arme à feu. Curtis, le visage en sang et le regard rouge, me colle un revolver sur le front. Depuis quand il se promène dans Forks avec ce machin ?!
— Tu fais moins la maligne, là, pas vrai ?! » qu’il me hurle avant de glisser le revolver sur mon ventre.  « T’inquiètes Olsen, tu as un joli visage, je ne t’exploserai pas la cervelle si tu coopères. T’es vraiment une chieuse, tu sais ça ? »
— Lâche-moi, putain!! » Je me débats comme un beau diable, il est hors de question que je leur facilite la tâche. Une rage indescriptible monte en moi et une crainte aussi de ce qui pourrait m’arriver. « Elle est beaucoup trop forte pour son gabarit… Elle cache bien son jeu ! » Dis Curtis à sa bande. Mais entre ses copains qui m’immobilisent ainsi que le poids de son corps sur le mien, je finis par m’épuiser. J’entends les rires et sens une vingtaine de doigts fourmiller sur ma peau. Et un peu de façon cliché, je me mets à penser à mes choix de vies, mes fréquentations, et finit presque par me convaincre que ce qui m’arrive, est mérité. Après tout, c’est le résultat d’une fille qui a pris toutes les pires décisions possibles.

[HRP: J'ai voulu faire avancer les choses. Hésites pas si il y a quoi que ce soit !]