Bishop doute qu’elle en fasse exprès, mais la portée de ses mots pourrait presque le mettre dans l’embarras, il sait que c’est dit innocemment, mais enfin difficile de ne pas être un peu gêné quand même. Le sorcier s’éclaircit donc la gorge avant de répondre, affichant un air sérieux parce qu’il aimerait qu’elle comprenne qu’elle n’est pas juste une chose à sa disposition.

— Un baisemain à vocation d’être fait uniquement sur la main, alors non, je te ferais pas de baises ailleurs, ce serait totalement déplacé et je ne suis pas un profiteur.

Il souhaite prendre son temps avec Nerina, apprendre à la découvrir et le sexe viendra en temps voulu, même si a son humble avis et vu le tempérament de la brune il va très certainement devoir lui expliquer des choses. Puis, elle aura sûrement tout un tas de questions, d’un autre côté, il peut lui offrir un livre qui parle des choses du corps, pas uniquement sur les rapports charnels, mais l’intimité en général. Oui, ça lui enlèverait très certainement une épine du pied et Nerina pourrait comprendre mieux les choses que ses explications pas toujours très claires. Il faudra qu’il fasse un petit tour sur le nez pour commander tout ça. Quant à ce problème avec son patron, il n’y a pas grand-chose d’autre à faire que de l'accepter. Mais peut-être que grâce au collier offert à la jeune femme, l’homme ne sera plus envouté et cessera ses gestes déplacés. Le blond l'espère de tout cœur en tout cas.

— Ça viendra avec le temps, c’est encore une notion nouvelle pour toi et je pense que si quelqu’un à un geste envers toi que tu n’apprécie pas, tu le sentiras immédiatement. Quand je nous trouverais assez intime, je te demanderais toujours, la notion de consentement c’est quelque chose que je refuse de négliger. Mais je ferais en sorte de d’expliquer les choses bien sûr.

Le sorcier observe ensuite la sirène tester le café et ça ne semble pas être une franche réussite quand il voit sa grimace avant qu’elle ne tousse, visiblement ce n’est pas une boisson pour elle. Enfin en tout cas le café corsé et sans sucre.

— C’est ça, c’est amer, confirme le blond. Mais sache qu’il y a de multiples manières de boire le café, tu peux ajouter du sucre, de la crème et d’autres choses pour le rendre plus savoureux. Je t'emmènerais dans un café pour que tu puisses essayer quelque chose de plus doux et oui, la glace au café et bien plus douce et sucrée que ce que tu viens de goûter.

Se décollant du comptoir où il s'était calé, Bishop hausse doucement les épaules, ce n’est pas bien grave si elle n’aime pas le café, chacun ses goûts après tout. Maintenant il est plus que temps de préparer à manger, il commence sérieusement à avoir la dalle.

— Bon, on va préparer des pancakes pour notre petit déjeuner, ce n’est pas bien difficile, je vais tout t’expliquer !

Il lui tend un tablier, comme ça elle évitera de trop se salir durant la fonction des pancakes, mais en théorie ça devrait aller, il compte lui donner des choses simples à faire.

— Tu es prête ?

- Oui, un baisemain, mais un baise-joue, ou un baise-front ? Je comprends, et je ne te verrais jamais ainsi. Profiteur.

S’il y avait bien quelque chose que la jeune sirène avait compris c’était que Bishop ressemblait plus profondément au prince d’Ariel que la plupart des humains. Il y avait quelque chose de profond, de sincère en lui. Et de princier, comme le prince de la petite sirène. Peut-être était-elle une autre version d’Ariel ? Avec un cœur, et un prince. Sauf que ce n’était pas elle qui venait de sauver le prince de la noyade, mais lui. Ouais. Elle aimait bien cette idée. Elle lui sourit, hoche la tête, ok pour le consentement, il l’a… mais s’il veut lui demander, alors elle accepte aussi. Elle avait dit, c’était un prince. Elle ne savait simplement pas que le mot adéquat qui, bien qu’elle le connaisse, ne voulait rien dire pour elle, était gentleman. Bishop était un prince. Et elle ne voulait rien entendre. Elle pouvait accepter d’apprendre et de mal comprendre, mais même la sorcière des mers ne pourrait lui faire changer d’avis.

- Je crois que j’aime le sucré. Le café au sucre ça doit être très bon, alors. Tout est bon avec du sucre, je pense. Et pourtant il n’y a pas ce goût dans la mer. C’est peut-être pour ça que je l’aime beaucoup ?

C’était mystérieux. Dans la mer, elle tuait les créatures marines pour manger. Sorti de l’eau, elle avait mangé des créatures terrestres … Et il y avait eu un moment, elle ne pourrait dire ni où, ni comment, ou elle avait appris l’existence du sucre. Comme toujours elle connaissait le mot, mais elle ne connaissait pas l’objet ou le goût… et c’était devenu quelque chose qu’elle aimait trouver. Dans la glace, surtout. Ou simplement dans un carreau de sucre qu’elle grignote comme un lapin. Elle se demande si Bishop, il en a des carreaux de sucre à grignoter. Elle pourrait le mettre dans le fond de son verre, que le café imprègne le sucre pour qu’ensuite, elle puisse apprécier. C’était à méditer. Elle se lève, prend le tablier qu’il lui tend. Elle observe le tissu, analyse et arrive à passer la tête là où il faut avant d’essayer de faire un nœud derrière elle. Elle n’y arrive pas, ça l’agace, elle repasse le fils devant elle et elle fait le nœud devant. Voilà. Elle écarte les bras, victorieuse avant de s’approcher pour voir ce qu’il faisait. Elle voit un sac de sucre et une cuillère. Elle se demande si c’est bon le sucre pur, mais à la place, elle s’approche et regarde aussi la farine.

- Pourquoi le sel, le sucre et la farine, ça se ressemble autant ? demanda-t-elle en reposant les yeux vers le sorcier, oh, et j’ai déjà entendu un glacier dire que faire à manger, c’était comme faire des potions magiques, alors, on va faire de la magie ?

Mélanger plusieurs choses sous forme de graines et de … sable ? Et en faire un pancake à manger, n’est-ce pas quelque chose d’un peu magique ? Pas magique, magique comme ce qu’elle était ou les pouvoirs de Bishop, mais magique, un peu. Elle est prête à suivre tout ce qu’il lui dira de faire avec joie et bonne humeur.  

Le sorcier esquisse un sourire avant de rire discrètement, elle a une sacrée imagination cette sirène et c’est rafraichissant.

— Désolé ça n’existe pas, il s’agira d’un baiser sur le front ou sur la joue, mais c’est bien tenté, il va falloir te contenter de quelques baisemains ici et là et à mon vouloir, répond le blond en haussant un sourcil.

En tout cas, il est plutôt soulagé que cette conversation n’aille pas plus loin que ça, ce n’est déjà pas évident de lui expliquer des choses qui vont de sens pour lui, car il a été élevé avec des coutumes de terriens. Alors s’il avait fallu rentrer dans les détails, pas sûr qu’il aurait réussi à se dépatouiller, parler de nourriture est un sujet bien moins dangereux et bien moins gênant pour le coup. Le romantisme viendrait en temps voulu et tout ce qui irait avec si le feeling va de mieux en mieux pour lui. Ça semble être déjà le cas pour Nerina, mais Bishop a le sentiment qu’elle le voit de façon un peu trop parfaite, ce qu’il est très loin d’être et il espère qu’elle finira par s’en rendre compte. Il ne veut pas d’une relation ou l’un des amants voit l’autre avec des œillères ou d’une façon plus brillante qu’il ne l’est en réalité.

— Hum tout n’est pas toujours bon avec le sucre, je pense que tu en fera peut-être l’expérience au cours de ton séjour ici, par exemple certains gâteaux peuvent être très bien cuisinés et sucrés mais le mélange des différents ingrédients ne te plait pas. Hum, vu que tu viens de la mer et que tu dis aimer le sucré, il faudra que tu essayes certains plats sucrés/salés c’est vraiment très bon tu verras.

Après avoir tendu le tablier à la jeune femme, il l’observe du coin de l’oeil tenter de l’enfiler pendant qu’il prépare les ingrédients, ce qu’elle finit par réussir à faire, c’est qu’elle apprends vite cette demoiselle. Une très bonne chose, il faut savoir s'adapter vite dans ce monde.

— Le sucre et le sel se ressemblent beaucoup mais pour la farine, en dehors de la couleur la ressemblance n’est pas vraiment frappante.

Pour appuyer son propos Bishop ouvre le paquet de farine plus largement et lui montre ainsi que la farine est encore plus fine que le sel et le sucre, pas de risque de se tromper. Ce qui n’est pas toujours le cas avec les deux autres ingrédients, si on n’y prend pas garde on se retrouve avec un gâteau au sel.

— D'une certaine façon oui la cuisine et la préparation de potions ça revient plus ou moins à la même chose, assembler des ingrédients, les mélanger, les faire chauffer pour atteindre le résultat escompté.

Prenant la recette, il la dépose ensuite devant Nerina pour qu’elle puisse y jeter un œil. La première chose à faire va être de mesurer la farine et pour cela elle va avoir besoin d’un verre mesureur et bien sûr de la farine, il dépose le tout devant elle également.

— Tu vois les chiffres sur le verre ? Tu dois le remplir jusqu’à atteindre les 250 grammes, s’il y en a de trop on pourra en retirer pas de panique .

Ok. Elle veut plein de baisemains alors. Mais elle ne le dit pas. Il a dit « à son vouloir ». Il prend les choses en main alors. C’est drôle. Elle sait ce qu’il pense, Nérina. Elle ne sait pas comment elle le sait, mais elle le sait. Elle peut le sentir. Il l’avait déjà dit plusieurs fois, quand ils parlaient ensemble. Bishop pense beaucoup de mal sur lui. Il défend pourtant les autres et leur dignité ou la confiance qu’elle peut leur accordé. Elle ne sait pas si ça aurait été pour tous pareil. Elle doute. Déjà. Il était le seul qui, sans magie, ne lui avait pas envoyé une photo de son entrejambe. Ce qui montrait à Nérina qu’il était un homme bien. Et tout ce qu’il fait pour lui ? Cela le prouve aussi. Alors, même si elle ne sait pas si c’est de l’amour, elle sait qu’il est un prince. Point. Fin du débat. Elle serait lui prouver en temps et en heure. Les sirènes, entre elles, se voient à travers leurs actes en rapport aux autres. Si plusieurs de ses sœurs ne veulent pas la tuer, c’est que ses actes avaient de la valeur pour elle. C’était la même chose pour Bishop. Nérina n’avait aucune envie de le tuer, et plus, elle le protégerait de sa famille si elles venaient à le rencontrer. Elle rit doucement, tourne la tête et sourit encore. Elle était sûr que Bishop serait validé par l’entièreté du banc des sirènes … Elle rit un peu plus en posant sa main devant sa bouche. Avant de se tourner. Même sans cœur, les sirènes n’étaient pas comme les autres. Elles voyaient les humains comme certains chasseurs voient les biches. Mais Bishop, c’était plus comme un hibou tranquille dans l’arbre. Et, bien que l’image n’apparaisse pas aussi claire à Nérina, cela la faisait rire.

- Je te fais confiance. Je mange la plupart du temps du poisson cru et des glaces, depuis deux ans. Je n’ai pas eu l’occasion de … AH. Si, j’ai mangé autre chose. Une petite fille m’a surprise une fois, et elle m’a donné un espèce de gâteau avec deux biscuits et du chocolat au milieu. C’était très bon. Un peu mâchouillé mais très bon.

La meilleure rencontre, avant Bishop, c’était cette petite fille qui s’était perdu une nuit. Et elle avait parlé longuement. La petite fille voulait rester avec la sirène, mais Nérina savait que des parents la cherchaient. Alors elle avait fait le chemin dans la mer avec elle, pour l’aider et la ramener à bon port. Elle était petite mais si bavarde. Et elle n’avait aucun problème avec le tactile, ou la nudité. Elle n’était jamais revenue. Elle touche la farine, en met une fine couche sur ses doigts et le porte à ses lèvres. Elle fait la grimace. Ce n’était pas bon en l’état. Elle prend le pot comme il lui avait dit et met de la farine. Elle va lentement et remarque que ça fait une montagne. Elle réfléchit avant de faire la technique du sable. Elle prend le verre et elle le secoue doucement en donnant des petites tapes sur le fond pour qu’il se retrouve aplatit par la gravité.

- J’ai vue des enfants faire ça avec le sable de la plage. Ils sont plus malins que ce qu’on croit.

Elle met la farine dans le grand saladier, comprenant en lisant sur la fiche qu’il fallait aussi mettre le sucre, et comme il y avait qu’un seul verre. La logique voulait qu’elle le réutilise. Ce qu’elle voulu faire avant de regarder Bishop pour être sûr de ne pas faire de bêtise.

Il se demande bien ce qui la fait rire, mais ce n’est pas pour autant qu’il va le lui demander, des fois, il lui arrive aussi de rire ou de sourire en pensant à des choses drôles ou idiotes et qu’il n’a pas forcément envie de partager. Si Nerina veut lui en parler, il l’écoutera avec joie, mais il ne compte pas l'interroger pour tout et n'importe quoi, chacun a le droit a son petit jardin privé. La jeune femme finit par lui parle de son régime alimentaire, qui n’est pas banal mais pas étrange non plus, après tout en Asie aussi ils mangent du poisson cru, même si ce dernier est préparé. Bishop doute que la sirène puisse en faire autant, non, elle mange ce qu’elle trouve et basta, l'instinct de survie primant sur la préparation ou l’aspect visuel de l’aliment. En revanche, il grimace un peu quand elle lui dit qu’elle a mangé un gâteau un peu machouiller donné par une enfant. Ouais, l’idée de manger un truc venant de la bouche de quelqu’un d’autre ça le révulse un peu, encore plus si ça a été machouillé.

— Je t'emmènerais manger dans un restaurant Japonais alors, ils font pas mal de plats à base de poisson cru, si tu aimes ça en théorie ça devrait te plaire. Et pour ton gâteau, on pourra toujours en trouver à l’épicerie du coin et non machouillé cette fois.

Tiens, maintenant qu’il y pense, après la visite de son chez lui, il ira un peu lui montrer les alentours de la ville, il en profitera pour prendre quelques livres à la librairie pour la brunette. Elle pourra même se prendre quelques bouquins en plus pour elle, si jamais certains sujets peuvent l’intriguer. Puis peut-être qu’après cette balade et s’ils ne sont pas trop crevés, ils iront se baigner dans le l’étang, ou la piscine naturelle du sorcier pour éviter la vase, à voir. Mais pour l’heure il se concentre sur leur activité cuisine et la préparation des pancakes.

— Non la farine ça ne fait pas partie des choses bonnes à manger si ce n’est pas cuisiner, enfin, après chacun ses goûts, mais vu la tête que tu as tiré je doute que tu ais apprécié, dit-il en riant doucement.

Elle s’occupe donc de verser la farine dans le pot et applique une petite technique visiblement apprise sur la plage et via des gosses jouant à faire des châteaux très certainement.  

— Certains le sont en effet plus que d’autres.

Bon, il est sans doute un peu dur parce qu’il ne s’agit que d’enfants, mais force est de constater qu’il y a des enfants qui ne sont pas toujours hypers malins. Voyant qu’elle en a terminé avec la farine et qu’elle s’apprête à s’occuper du sucre, Bishop hoche la tête pour lui dire d’y aller.

— Tu te débrouilles, tu n’auras peut-être même pas besoin de mon aide pour faire cette recette !

- Un restaurant japonais ? Je pense que ça me plairait oui. Une fois, j’ai été proche des bords du japon avec une de mes sœurs. Elle avait attrapé un poisson pour qu’on le mange ensemble. Elle avait dit que ce poisson, mal préparé, pouvait tuer les humains. Je n’ai jamais compris pourquoi.

Elle, elle l’avait mangé cru et sous l’eau … et elle n’avait rien eu du tout. Mais ça l’avait fait réfléchir sur la condition humaine. Les humains étaient si fragiles. C’était presque que des bébés qui ne savaient pas se protéger des poisons et autres choses qui se trouvent dans l’eau. Elle sourit. Les humains étaient étranges aussi, un peu effrayant, mais étranges. Elle sourit pour le gâteau. Pas mâchouillé, ça lui va aussi. Elle n’était pas le genre à faire la fine bouche. Elle pouvait tout manger, la petite sirène, même ce qu’elle n’aime pas. Bien sûr, si elle peut éviter le café sans sucre à l’avenir, elle le ferait … mais quand on a faim, on mange ce qu’il y a. Elle sourit sur la farine, n’en dit pas plus parce qu’il a raison. Elle n’avait pas apprécié la farine sur sa langue. Elle continue de faire les choses qu’il faut pour faire la pâte. Elle lui sourit.

- Certains le sont bêtes. Ou alors ils sont comme moi. Ils n’ont pas eu les bases et ils passent pour des idiots. Ou pire, ils comprennent mais trouvent ça stupide. J’aime bien les enfants.

C’était peut-être pour ça. Elle regarde la farine et le sucre dans le pot, mélange les deux blancs qui ne sont pas exactement du même blanc. Elle se souvient, elle croit. Elle regarde Bishop.

- C’étaient des enfants. Que je devais tuer. La première fois. Une sirène ne tue pas tout de suite, d’abord, elle apprend à vivre comme une sirène dans les abysses, elle se nourrit, apprends les codes de la vie sous marine. Et au bout d’un moment, je ne serais dire combien de temps, nous n’avons pas de « jour » qui passe. Nous ne calculons ni en années, ni en jour, ni en heure. Les sirènes savent juste qui est né avant ou après elle.

Elle tend les œufs quand elle voit qu’il faut les mettre dans la préparation. Elle se doute qu’il fallait en faire quelque chose, mais elle ne se sentait pas de le faire. Elle se pousse donc, pose ses fesses loin pour le regarder faire alors qu’elle continue de parler

- Une fois assez « vieille », on doit chasser seule. Et je me suis retrouvé avec un bateau. Le père était mort en mer, une crise cardiaque. Et il y avait deux enfants avec lui. Je devais les tuer. Mais je n’en ai pas eu le cœur. A la place, j’ai fais en sorte d’amener un autre bateau jusqu’à eux. C’était la première fois que je voyais des humains.

Elle avait fait passer ça pour la faute à pas de chance. Après tout, c’était facile de tuer deux enfants humains, mais plus quand il y a un gros bateau avec plein de gens dedans… Sauf que les fois suivantes, elle n’avait pas pu non plus. Ni les vieux, ni les jeunes, ni les super jeunes. A chaque fois, elle avait fait en sorte de les sauver. Parce qu’elle ne pouvait pas supporter l’idée de les laisser mourir entre les dents de ses sœurs.

- J’essaie de me dire que je ne suis pas seule. Si les humains connaissent les sirènes, pas seulement comme des monstres, c’est que je ne suis pas seule à avoir voulu les sauver au lieu de les manger, non ? C’est ce que j’essaie de me dire quand je suis seule dans ma cabane. Que quelque part, sur Terre, il y a peut-être une ou deux autres sirènes qui viennent d’autre sororité qui ont été dans la même galère que moi.

Refuser de tuer. C’était comme refuser de nourrir sa famille. Et la famille, c’était la seule chose qui compte parmi les sirènes. Quand Nérina avait refusé de tuer pour ramener la nourriture, elle avait de se faire trahie sa famille. Bien sûr, pas toutes les sirènes ne l’avaient pris ainsi … mais la plupart ne la comprenait pas. Pour elle, c’était étrange. Incroyablement étrange. Dangereusement étrange. Son exil n’avait pas été tout de suite, avant elle avait été mis dans l’océan pour être surveillé. Ses sœurs voulaient la sauver de son propre cœur. C’était ironique que pour la sauver de son cœur, il fallait la tuer. Ou lui faire regretter d’en avoir un. Elle pose sa main sur sa poitrine, sent son cœur battre. Elle ne sait pas pourquoi elle n’avait pas pu tuer ses enfants. Elle ne le saura jamais.

— Parfait, on pourrait se faire ça demain midi, comme ça je n’aurais pas besoin de cuisiner, juste mettre les pieds sous la table et se faire servir ça fait du bien de temps en temps. Oui, il s’agit du poisson fugu, son corps contient une toxine très puissante et qui peut tuer s’il est mal préparé, il y a des chefs cuisiniers qui sont entraînés à la préparation de ce poisson.

Ce n’est pas lui qui irait manger un truc pareil, même si le poisson en question était préparé par le meilleur des cuisiniers du Japon, Bishop ne se risquera jamais à tenter ça. Il ne veut pas finir à l’hôpital ou pire crever parce qu’il a voulu jouer au casse-cou culinaire, ouais, il va s’en tenir à du classique en terme de plat Japonais comme les sushis ou encore les ramen, beaucoup moins de risque de passer l’arme à gauche.

— Ouais, j’imagine qu’il en faut pour tous les goûts et qu’on est pas tous logé à la même enseigne en termes d’éducation. J’ai rien contre les enfants, mais de là à dire que je les aime bien, il y a un sacré gouffre..

Clairement, les envies de paternité c’est pas pour aujourd’hui, il dirait même qu’il n’est pas sûr que ça puisse arriver un jour, sauf si quelqu’un arrivait à lui donner envie. Qui sait de quoi l’avenir sera fait pour lui. Récupérant les oeufs, car en effet il ne pense pas que la jeune femme arrivera à les casser comme il faut, Bishop s’occupe donc de cette tâche. Il mets le blanc et les jaunes avant de faire fondre le beurre qu’il ajoutera à la préparation, tout en écoutant Nerina lui parler, il poursuit la recette, hochant la tête de temps à autre pour montrer qu’il a son attention. Pour autant et même si le sorcier l’écoute avec sérieux, il ne sait pas quoi répondre, comment rebondir à ce récit, bien sûr il est heureux qu’elle n’ait pas tué ces enfants ou même toutes les autres personnes qu’elle était censé liquidé pour ramener à manger à ses sœurs. Ce n’est pas comme si elle était partie au supermarché pour faire ses petites courses, non, elle aurait dû tuer des gens innocents. Bon tous les humains ne sont pas innocents mais, méritent-ils de mourir sous les mains des créatures de la nuit ? Voilà une bien grande question.

— Je suis content que tu ne sois pas passé à l’acte, parce que tu ne serais surement pas celle que tu es aujourd’hui, tuer des humains et dans la nature des sirènes, mais pas dans la tienne. Et je pense comme toi qu’il doit sûrement exister d’autres créatures, sirénes ou non a part des autres parce qu’elles ne font pas ce que leur nature de créatures surnaturelles leur dicte de faire. J’ai connu un vampire par exemple qui ne se nourrissait que du sang des animaux et encore, même ça il préférait s’en passer, parce qu’il avait un grand amour des animaux. Je ne sais pas ce qu’il est devenu aujourd’hui, mais j'espère qu’il va bien et qu’il continue de respecter sa nature profonde en dépit du regard de ses pairs. D’autant plus que le monde est vaste et qu’il y a plus d’eau que de terre donc, il doit sûrement exister des sirènes comme toi qui ne souhaite pas tuer.

Parfois, il n’y a pas à chercher trop loin, les choses sont comme elles sont et on est comme est, ce n’est pas parce qu’on est différent des autres que c’est forcément quelque chose de mal. Terminant la pâte, Bishop fait signe à Nerina de revenir près du plan de travail.

— Voici une louche, dit-il en montrant l’ustensile. Tu en prends un peu et tu verses dans la poêle que je viens de mettre sur le gaz, tu vas voir c’est très facile.

- Si les recettes sont simples, je pourrais cuisiner pour toi, proposa-t-elle, bien qu’elle sache la plupart des choses lui seraient impossibles, seule. Comme ça tu pourras « mettre les pieds sous la table ».

Elle avait compris que c’était une expression. Et cela la faisait sourire. Puisqu’en théorie, quand on mange à une table, on met toujours les pieds sous la table… Et on peut manger sans avoir de table d’ailleurs. C’était rigolo, donc. Elle aimait bien comprendre les expressions et les détourner pour les rendre plus « logique ». Elle écoute l’homme et se demande si elle aime les enfants. Elle trouvait les enfants intéressants, vraiment… Elle les trouvait malins, et ingénieux, et débrouillards… plus que la plupart des gens. Plus qu’elle. C’était peut-être pour ça ? Qui peut le dire. Elle avait peut-être refusé de tuer ses enfants, dans ce bateau, pour ça ? Parce qu’à deux avec un parent mort à leur côté, ils s’étaient débrouillé ? Elle, elle n’avait survécu dans ce monde que par la chance et quelques conseils de ses sœurs. Ne pas s’approcher des hommes, mais leur demander de l’aide. Super conseil qu’elle n’avait suivi qu’une fois, pour avoir un travail.

- Si jamais tu le retrouves, j’aimerais bien lui parler, au vampire qui ne boit pas de sang. Juste pour savoir s’il a des conseils. Peut-être une méthode pour parler à ma famille, malgré tout ? Parce que même si je ne tue pas, elles me manquent, terriblement.

Ses sœurs étaient … ses sœurs. C’était une autre partie d’elle. C’était son soutien. Les amis, ça n’existe pas pour une sirène. C’étaient les sœurs. C’étaient les sirènes. C’étaient un banc de poisson plus prédateur que les autres. Maintenant qu’elle était seule, elle sentait ce manque comme un gros vide dans son cœur. Elle l’observe continuer la préparation, se disant qu’elle ne devait pas tomber dans le mélodrame avant de sourire. Elle prit la louche et s’appliqua à faire comme il lui demande. Elle essaie de faire sauter une des préparations mais abandonne pour lui donner. Elle ne comprend pas non plus pourquoi ne pas simplement le prendre avec les doigts pour la tourner dans la poêle.

-  Il faut faire à manger comme ça tout le temps ? Demanda-t-elle alors, regrettant un peu d’avoir proposé de cuisiner un peu avant.

Elle avait chaud. Cela n’avait pas été le cas quand elle était en train de faire la pâte, mais maintenant, elle sentait son corps se réchauffait alors que la pâte liquide devient dure et elle a vraiment envie de se déshabiller. Toute nue, il faisait toujours moins chaud. Elle jette un regard à Bishop. Malheureusement pour elle, elle était une bonne élève, et il le savait. Alors elle ne pouvait pas l’enlever sans comprendre, et ça serait mentir. Elle n’aime pas mentir.

- J’ai très chaud, pas toi ?

Elle regarde autour et prends sa tasse qu’elle avait abandonné pour s’approcher du robinet, elle connaissait donc, puisqu’il y en avait des semblables dans la douche –elle la dit elle apprends vite-. Elle s’arrête devant le robinet et le montre.

- Je me permet, dit-elle l’ouvrant pour se servir une tasse d’eau et la boire rapidement.

Elle était une sirène. Elle était toujours en train de boire, si elle n’était pas dans l’eau, ou en train de vouloir être dans l’eau. D’ailleurs, elle avait toujours un sot, quand elle surveillait, dans lequel elle mettait sa main. Elle pouvait survivre sans, bien sûr, mais l’eau lui manquait tout de suite. Même avec Bishop, elle ne pouvait pas se permettre de rester loin de l’eau longtemps … parce qu’elle ressentait un manque, une confiance que l’eau lui donnait. Elle regarde Bishop et sourit.

- L’eau, c’est meilleur que le café amer, essaya-t-elle de taquiner.

Bishop secoue vivement la tête, non pas qu’il ait peur d’être empoisonné, quoique, ah, ah ! Mais il ne va surement pas la faire cuisiner, ensemble oui, mais toute seule non il n’est pas un pacha qui a besoin d’être nourri.

— Non, non ça va aller, c’est moi qui vais cuisiner j’ai l’habitude et en plus de ça tu es mon invité, je ne vais pas te faire travailler. On pourra toujours cuisiner à nouveau ensemble sinon, c’est plus sympa.

Retrouver le vampire qui ne boit que du sang des animaux ? Ce n’est pas comme s’il l’avait cherché, d’autant plus que ça remonte à quelques années maintenant, le sorcier n’est même pas sûr qu’il soit encore dans la région. Et même si c’est le cas, rien ne garantit qu’il pourra aider la jeune sirène, certes, ils sont atypiques vis à vis de leur pairs, mais contrairement à Nerina, le vampire a toujours vécu seul. Il est très vite devenu un paria parmi les siens et il s’en est toujours accommodé, de ce que le blond savait, il n’a jamais cherché à retourner parmi les siens.

— Je pourrais toujours me renseigner, ça ne coûte rien, mais sans garantie que cela puisse t’aider, le vampire et toi vous avez des histoires différentes, même si vous vous rejoignez sur un point, celui d’avoir été mis de côté par votre communauté.

Mieux vaut être franc avec elle d’entrée de jeu, il n’aime pas causer des faux espoirs aux gens. Retournant à sa préparation, le sorcier la termine sous les yeux observateur de la jeune femme et une fois terminée, il lui propose de faire le premier pancakes. Le passage avec la louche va comme sur des roulettes, puis, elle tente de faire sauter le pancake sans y parvenir et abandonne rapidement pour lui redonner la poêle. Peut-être que la cuisine ce n’est pas fait pour la brunette, pas grave, il leur fera à manger pour deux.

— Non pas tout le temps, tu as des plats déjà tout prêts, des recettes plus faciles et rapides que les pancakes, tu peux te faire livrer aussi ou aller au restaurant. Tout dépend de ton humeur et surtout de ta flemme à préparer à manger. C’est juste un coup de main à prendre.

Et hop, d’un mouvement du poignet il faut sauter le pancake et lui jette un coup d’oeil l’air de dire, tout est une question d’apprentissage. Tout en poursuivant la cuisine, Nerina finit par lui demander s’il à chaud, un peu à cause de la gazinière mais ça va.

— Non ça va encore, tu dois avoir chaud à cause de la poêle, attends...

Bishop fait quelques pas et ramène le ventilateur qui trainait dans un coin de la cuisine, il le place près de la chaise de Nerina, avant de le mettre en route. Il hoche la tête quand elle va pour se servir de l’eau et il reprend sa place devant le fourneau. Efficace, le blond termine les pancakes, puis il s’occupe des œufs et du bacon, avant de lancer le presse agrumes pour avoir du jus d’oranges frais.

— C’est une question de point de vue, dit-il en riant.

Finalement, tout est prêt, la table est dressée, il n’y a plus qu’à !

hrp:

Elle est fascinée par tout ce qu’elle voit, Nérina, mais dès que son regard part un peu plus loin de Bishop, il revient inexorablement vers lui. Comme s’il était un aimant et elle, du métal. Elle avait besoin de le regarder, d’observer ses traits pendant qu’il se concentre. Elle se demande si, quand il accepterait d’être toucher, il pourrait s’amuser à faire des expressions sur son visage pour qu’elle puisse le toucher. Elle a très très envie de le toucher, et à la place, elle touche ce qu’elle peut. Curieuse, elle avait mit ses doigts dans les coquilles d’œufs pour en voir le liquide transparent. C’était étrange tout ça. Elle n’avait jamais mangé d’œuf. Ce n’était pas nourrissant. Il fallait que l’être dedans éclose si elle voulait pouvoir le manger. Elle avait déjà couvé des poissons. C’était une autre lubie qu’elle avait parfois. Ne pas vouloir que les œufs des poissons ne meurent, alors qu’elle sait très bien qu’ils finiront par mourir un jour. Elle le remercie tout de même pour le vampire. Elle se dit que ça pourrait être sympa, mais s’il ne peut pas ce n’était pas si grave. Malgré la différence d’espèce, il y avait une chose en commun, ils allaient contre leur nature. C’était dans la nature d’un lion de manger de la viande, et de celle d’une girafe de manger en haut des arbres. Mais si le lion s’essaie à devenir végétarien et la girafe à manger ses congénères, alors où devraient-ils aller ? Ce n’était pas comme si elle avait un cœur parce qu’elle le voulait la sirène. Elle le regarde faire et applaudit pour son pancake en l’air.

- Bravo tu es trop fort. J'apprendrais !

Elle ne s’y essaie pas, mais elle se demande comment elle pourrait s’entrainer à faire sauter des choses dans une poele. Sans feu et avec un torchon, elle pourrait essayer. Le pancake avait l’air aussi léger que le reste. Elle sert un deuxième verre d’eau, pour Bishop, et elle met tout sur la table. Elle regarde la bouteille de …. Quelque chose de visqueux, et elle le met par curiosité sur ses pancakes. Du sirop d’érable, lut-elle sur la boite… et il y avait une feuille sur la bouteille. Donc, elle était en train de mettre la sève d’un arbre sur son repas ? Elle se demande. Elle pose la bouteille et observe à nouveau Bishop en train de manger. Elle mime ses gestes, elle l’observe en train de manger et fait pareil. Elle sourit et parle un peu de tout ce qu’elle a découverte hier soir, elle parle des insectes, et du fait que sous le lit, c’était petit, expliquant ainsi le « boom » qu’il avait pu entendre de l’extérieur de la porte. Elle lui pose aussi des questions, sur son endroit préféré, ou s’il aime toucher l’intérieur des coquilles d’œufs, ce genre de question pour apprendre à le connaître tout en apprenant plus. Elle mange et s’étonne du goût des pancakes alors qu’elle savait avoir mis les ingrédients qui n’avaient pas du tout le même goût. Elle se demande même si elle ne pourrait pas mettre d’autre chose sur le pancake pour faire des tests, mais ne préfère pas le proposer à Bishop. Il était déjà gentil de lui faire découvrir ce genre de mets. Une fois le petit déjeuner terminé, et ça avait pris du temps parce que Nérina prenait le temps de manger, de mâcher, et surtout ne parler pas la bouche pleine … et qu’est-ce qu’elle pouvait parler parfois… Pas parfois, quand elle peut parler. Elle se parlait seule depuis si longtemps qu’elle avait oublié que Bishop était le genre de personne qui l’écoutait réellement. Elle finit par sourire.

- Pardon. Je parle, je parle…. C’est quoi la suite de la journée chef.

Comme ça, il n’y avait absolument rien dans ses gestes ou son attitude qui trahissent le manque de sommeil. Elle était toujours dans l’excitation de la nouveauté… Ce soir, en revanche, elle aurait besoin de dormir … Elle se demande si elle doit, ou pas, lui rappeler de fermer la porte … Bah. Elle lui rappellera pas. Au cas où, il oubliera peut-être et elle pourra faire un câlin…