Elle grognait… encore. Je n’ai pas compris ce qu’elle avait dit comme elle avait marmonné en prime et je suis pas certain que je voulais savoir ce qu’elle avait dit. C’était frustrant oui, elle avait bossé en folle je le sais aussi donc je pouvais comprendre quelque part sa rage et son exaspération à avoir une réaction comme ça. D’ailleurs en tentant de vouloir la raisonner, le regard de feu qu’elle me servit me fit abdiquer. Parfait, qu’elle me cogne si elle le voulait, mais je voulais juste qu’elle se calme pour m’écouter un peu. Lui offrant donc le choix de son exutoire elle me répondis tout aussi sèchement de la laisser gérer. Parfait! Je relevais les deux mains en l’air et me reculai la laissant se défouler.

Elle grognait de frustration, de colère et de rage. Le sac de frappe bouge sous ses coups puissant, raide et de mon côté je reste les bras croisés attendant qu’elle s’épuise, elle finirait bien par tomber de fatigue… ou complètement déshydratée si elle continue à ce rythme. Sa peau se perlait de sueur, sa peau rougissait d’effort. Elle arrêta enfin pour mieux rager mais verbalement cette fois. Les bras croisés sur moi je l’écoutais sans l’interrompre, valait mieux de toute façon pour le moment. Elle ne m’entendrait pas même si je gueulais plus fort qu’elle et inévitablement on finirait par se disputer. En gros: Ça serait la merde totale. Quand elle termina, je m’avançais vers le sac de sable pour l’immobiliser, et tourner mon regard vers elle.

- Elle a pu mener une vie loin de tout ce qui est technologie. Pas de prêt, pas de compte de banque, pas de permis en gros elle “n’existe” pas au yeux de l’État. Pourquoi Rebecca ne l’a pas vue, elle ne comprend pas elle-même. Peut-être est-ce qu’elle cherchait juste une Lopez on en sait rien.

Je parlais calmement pour ne pas attiser encore plus sa colère. Je laissai mes mains glisser le long du sac de frappe et m’approchai lentement d’elle mon regard fouillant le sien. Des émotions tellement diverses tournaient dans ses prunelles que c’était difficile d’en dire juste une. Je pris une inspiration et prit le temps de bien choisir mes mots.

- Je comprends que tu sois enragée Taylor. Tu as bossé en malade, le tri de tout ce foutoir. Ce livre et que personne ne te croyais et j’en passe. Je comprends tout ça. Rebecca va vérifié pourquoi elle ne l’a pas vu elle est supposé me rappeler. Ce n’est pas fini tant qu’on est pa rendu au bout Taylor. je souris doucement, À mon sens, on est pas encore au bout. Peut-être que la piste que tu as demandé seras la bonne, peut-être que la mienne est complètement nul et ne mènera nul part. Peut-être que c’est une usurpation d’identité et qu’on se plante totalement… toutes les pistes sont encore possibles et toi-même tu le sais.

J’espérais que ça la calme un peu, pas totalement mais au moins un peu. Elle était passionnée, intense et c’est ce que j’aimais dans sa personnalité. Une chose parmi tant d’autre, parce que malgré ses “manque”, comme elle disait, elle est une femme juste ce qu’il y a parfait. Je pris sa main gantée en fouillant son regard encore une fois.

- Si tu veux mon avis, on a pas le droit d’abandonner, il y a les familles des victimes qui espèrent des réponses, ou même leur descendant. On leur doit au moins des réponses faute d’emprisonner quelqu’un.

Je relâchais sa main et me reculais allant tenir le sac de frappe.

- Allez, laisse sortir le reste… dis-je avec un sourire en coin.

J'ai besoin d'entendre une vérité indéniable, une chose à laquelle me raccrocher pour ne pas perdre totalement pied. J'ai bien conscience que ce que je demande est impossible dans cette situation où tout n'est que hypothèses et incertitudes. C'est extrêmement frustrant d'entendre qu'on ne peut rien tirer d'une information. Qui décide de cela au juste ? C'est stupide. Plus particulièrement dans notre métier où toute supposition se doit d'être vérifiée. Qui nous prouve que cette femme est bien Alana ? Peut-on se fier à l'interlocutrice de Ford ? Peut-on vraiment disparaître aussi facilement en gardant son nom ?

Non, bordel, c'est impossible.

– Non, même loin de toute technologie, ça fait quand même huit ans qu'elle se trouve supposément dans cet hôpital… Elle est inscrite dans leurs registre et, surtout, il y a forcément quelqu'un qui paye pour ses soins. Sans argent, ils l'auraient foutus dehors.

Alors pourquoi Rebecca ne l'a pas trouvé ? C'est quand même bizarre… Ce genre de "faute" ne fait pas partie de ses habitudes. Qu'est-ce qui cloche alors ?

J'ai besoin de réfléchir… Non, j'ai besoin de trouver LA solution. Tout ceci me rend tout simplement folle. C'est pas juste, pas logique…

– Ce n'est pas un concours, je soupire avant de m'essuyer le front avec mon avant bras . Je veux juste comprendre…

J'ai bien saisi sa manœuvre. Il essaie tant bien que mal de me calmer…ou alors de me consoler, au choix. Je sais bien que mes petites crises peuvent être déstabilisantes, mais j'ai toujours su les gérer… À ma façon.

– Qui a dit que je comptais abandonner ? je lui demande en haussant un sourcil perplexe. C'est pourtant pas mon genre de laisser tomber une affaire…

Je le dois aux familles des victimes, certes, mais je me le dois à moi aussi. J'ai pas bossé comme une folle sur ce dossier pour laisser tomber aussi facilement.

– Ce qui m'agace ici, c'est le système et ses foutues failles à la con ! je gronde avant de frapper encore une fois dans ce sac. On est censés avoir l'un des meilleurs système de renseignements du monde et on bloque sur un truc aussi stupide ?

Encore un coup.

– Et puis, quand on veut disparaître… On change de nom !

Mais… C'est peut-être ce qu'elle a fait jusqu'à ce qu'on la retrouve errante et désorientée dans la rue. Dans ce cas, avec une telle pathologie, il est fort possible que son nom d'emprunt soit passé à la trappe Alzheimer… Et donc qu'elle donne son vrai nom… Mais dans ce cas… Ils auraient dû lancer un appel à témoins, rechercher sa famille via les différents réseaux de communication. Ils avaient bien réussi à trouver Miguel… Est-ce lui qui paye pour les soins ? C'est peu probable, mais l'on peut toujours vérifier ça, quitte à chercher sur ses relevés bancaires…

Encore un autre coup et je me sens à présent assez calme pour évoquer tout ceci avec Phil. Je reprends chaque point avec lui…

– T'en penses quoi ?

Je tentais bien sûr de trouver une raison pourquoi elle était passée inaperçue pendant des années et quand elle rejeta ma théorie, je roulai les yeux. C’était à prévoir qu’elle la rejeterais mais en même temps, les sans-abri étaient quand même un bon exemple. Ils vivaient en marge de la société, souvent sans-papier donc sans identité et encore moins des gens pour aider. Quelque part elle avait raison, quelqu’un devait payer pour ses soins mais qui? Je savais qu’elle ne voulait que comprendre et c’est tout ce que je voulais moi aussi mais en même temps, c’était tellement un foutoir de merde que je me demandais même si on allait finir par trouver une réponse. Si oui, Taylor serait contente d’avoir enfin une conclusion. Si non… alors là je pense que je vais avoir droit à la pire crise de colère jamais vue sur cette terre.

- Je n’ai pas dit que tu abandonnais Taylor, comme je sais que ce n’ai pas ton genre d’abandonner. Cependant, il faut que tu sois consciente que peut-être il n’y aura pas d’issue à cette affaire. je pris une inspiration avant de continuer de parler, Puis pourquoi on bloque… il y a des milliers de questions mais peu de réponse…

Je me tut à se moment lui donnant l’occasion de se défouler, encore, jusqu’à ce qu’elle arrête de nouveau en m’expliquant ses pensées alors que je tenais le sac de sable. J’écoutais ses point un par un en hochant lentement de la tête avant d’aller devant elle, et prendre une main et défaire son gant lentement.

- Ce que j’en penses c’est que tout se tient mais là maintenant, on prend une pause jusqu’à demain. je défis l’autre gant tout aussi lentement, Il nous reste peu de temps avant de retourner à Chicago et comme une partie de la soirée est foutue en l’air…

Ses deux gants enlevés, je relevai le regard vers elle et lui fit un sourire en coin.

- On pourrait aller manger ailleurs et juste… profiter. Demain matin, on regardera tout ça à tête reposée parce que présentement, je n’arrive pas à réfléchir correctement. tu en penses quoi?

Des milliers de questions pour peu de réponses… Oui, ça, c'est précisément le fond même de notre boulot. Pour trouver les bonnes réponses, il faut d'abord nous poser les bonnes questions. Sans cette étape, il nous est totalement impossible d'avancer dans nos enquêtes. Le problème ici, c'est que je suis totalement accro à cette étape en particulier. Une étape que je pensais avoir franchi en grande partie jusqu'à ce que cet hôpital ne réponde. C'est frustrant de ne pas savoir. Ça m'agace profondément… Cela me met tellement en colère que je suis totalement incapable de pouvoir profiter d'une simple soirée.

Ce n'est visiblement pas le cas de Ford qui vient me saisir les poignets afin de retirer mes gants… Lui, il veut profiter du temps qu'il nous reste ici.

– On pourrait aller manger ailleurs et juste… profiter. Demain matin, on regardera tout ça à tête reposée parce que présentement, je n’arrive pas à réfléchir correctement. Tu en penses quoi ?
– Je pense que tu es un vrai casse-pied, Phillip Ford… je soupire en le laissant gagner. Mais bon, on va dire que c'est de bonne guerre, je ne vaux pas vraiment mieux.

Je pourrai très bien passer le restant de la soirée à me torturer l'esprit. C'est même ma grande spécialité. Néanmoins, en acceptant d'entamer une relation avec lui, je me suis promis de prendre un peu plus sur moi et de mettre un peu d'eau dans mon vin. Je ne suis pas seule après tout et il n'a pas à tout subir non plus. Alors autant faire un petit effort…

– C'est bon, tu as gagné… Je vais me préparer, dis-je avant de déposer un baiser sur sa joue.

Nous remontons dans la chambre où je prends une nouvelle douche avant d'enfiler une tenue confortable. Rien de bien extraordinaire cela dit, une paire de jeans sombre et un chemisier bordeaux. Je n'ai pas pensé à apporter plus de robes ou du moins, le genre de tenues que l'on porte lors d'un rendez-vous amoureux.

– Où veux-tu aller ? je lui demande en relevant mes cheveux pour mieux les piéger dans une pince.

Je sais qu’elle aurait bien aimé résoudre tout ça ce soir, mais je n’étais même pas en état de réfléchir convenablement, surtout quand je la voyais aussi dépassé et en colère de ne pas trouver. On ne ferait que se torturer le cerveau alors qu’on ne trouverait rien. Je lui dis tout ça alors que je défaisait ses gants lentement mon regard allant rencontrer le sien quand elle me répondit que j’étais un casse-pied. Je lui fis un petit sourire en coin jetant les gants sur le support.

- Avoue que tu t’ennuierais si je ne l’étais pas…

Dis-je pour la taquiner. Mon sourire s’élargit quand elle me dit que j’avais gagné et qu’elle allait se préparer. Je remontais à la chambre et m’étendit sur le lit en attendant qu’elle finisse de se préparer et quand elle ressortit presque prête, je me redressant sur les coudes pour la voir relever ses cheveux et sourire doucement. Je m’assied lentement sur le pied du lit et lui souriant tendrement. Elle était magnifique! En fait elle l’était tout le temps mais je ne sais pas cette simplicité avait quelque chose d’attirant. Je me relevais du lit lentement et allait la rejoindre. C’est tout en douceur que je pris ses lèvres emprisonnant ses mains dans les miennes et la relâchant quelques poussière de minutes plus tard.

- Je tenais à te dire aussi que tu es splendide. Maintenant, tu me donnes ta main et tu me suis sans poser de question.

Je pris doucement sa main et on sortit de la chambre et on redescendit dans le lobby pour finalement regagner l’extérieur encore humide mais plus supportable et on descendit le trottoir. Pour l’empêcher de me poser milles questions et surtout qu’elle pense à cette enquête, je lui parlais de tout et de rien. Elle en savait déjà beaucoup sur moi, alors la plupart des choses étaient des choses qu’elle savait déjà. Je lui racontais aussi comment j’vis tout lu sur le FBI pour être fin prêt pour mon examen d’embauche, comment j’avais redoubler de détermination pour l’examen physique et je m’arrêtais enfin devant un resto thaï que j’avais dénicher sur le google map.

- Voilà! Tu m’as dit aimer la cuisine thaï. J’ai pensé que ça te ferait plaisir. dis-je en serrant sa main tendrement, on est un peu en retard j’avais réservé ce matin mais on a encore notre place. Alors ça te dis de profiter de ce repas avec ton casse-pied préféré?

– Je tenais à te dire aussi que tu es splendide. Maintenant, tu me donnes ta main et tu me suis sans poser de question.
– Tiens donc… je pouffe gentiment. Puis-je au moins prendre mon sac ?

Je ne lutterai pas, pas ce soir. Je n'en ai ni l'envie, ni la force. Alors s'il souhaite me guider, qu'il le fasse. Je réalise bien vite que ces bavardages n'ont pas d'autres buts que celui de m'empêcher de réfléchir… Ou de l'interroger sur notre lieu de rendez-vous. Je sais qu'il tient à bien faire les choses et cela me touche beaucoup.

Et puis nous arrivons devant un restaurant thaïlandais à la devanture colorée. Un merveilleux parfum d'épices s'en échappe et il n'en faut guère plus pour éveiller mon appétit.

– Bien joué… Mais… euh… je prends une mine faussement inquiète. Je pensais que je le prendrai avec toi, ce repas.

Pour ponctuer ma petite plaisanterie, je lui donne un bien délicat coup d'épaule. J'apprécie énormément cette petite attention, même je ne sais pas vraiment comment l'exprimer…

A l'intérieur, l'on nous place à une petite table dissimulée derrière quelques voilages. L'on nous donne la carte sur laquelle je découvre avec plaisir tous ces mets délicats que j'aime tant … Choisir risque d'être compliqué, tout me fait envie.

– Merci beaucoup, c'est vraiment très délicat de ta part de penser à mes goûts, je lui lance… Mais du coup, qu'est-ce que toi tu aimes ? Je sais déjà que tu adores les sushis… Mais ensuite ?

Je voulais vraiment avoir une soirée tranquille, elle et moi et qu’on profite des deux derniers jours qui nous restaient alors j’avais réussi à dégoter ce resto pour qu’elledécroche complètement. Si profiter de la plage n’était plus au menu, autant se rabattre sur autre chose. Quoique je me promettais une escapade le lendemain, je ne pouvais pas ne pas y aller au moins une fois quand même! Mais pour le moment je tenais à lui offrir un repas qu’elle aimerait avec de la cuisine qu’elle aimerait. C’est devant le resto qu’elle se montra inquiète alors que je me disais que je m’étais planté encore une fois mais sa blague me fit sourire lentement.

- Justement, comme j’ai vu que tu avais un autre casse-pied préféré j’ai dû m’en débarrasser donc maintenant je suis le seul et unique.

Entrant donc dans le resto, on pris place à notre table et je suis plutôt content de voir que c’est tranquille à cette heure-ci. On aura toute la discrétion voulue. Je pris le menu et commençait à le parcourir lentement, les choix s’offrant à moi m’ouvrant l’appétit et tout semblait tellement bon! Je relevais les yeux du menu quand elle me demanda ce que j’aimais comme nourriture. Je relevai le regard vers elle en haussant les sourcils.

- Bien… j’aime pas mal tout je te dirais. Sauf les trucs bien épicé qui arrache la gueule… ça j’ai un peu de mal. Sinon pour le reste… disons que je suis ouvert aux expériences. Ah! Oui! Les asperges cuites… je déteste. C’est tou mou, ça goûte trop fort alors je les mangent crues. en vrai je ne suis pas difficile. Tiens je vais même prendre un cari rouge de tofu… ça sonne délicieux ça.

Je refermai mon menu et posai mon menton dans ma main et regardai Taylor choisir son plat avec un petit sourire tendre, elle faisait beaucoup d’effort pour qu’on ai une vie de couple à peu près normale et je ne pouvais le nier. Certes j’étais encore un peu sur mes gardes mais je tentais de taire mes doutes et mes inquiétudes en profitant de chaque seconde qui passaient avec elle. Je ne lui avais pas dit je t’aime encore, peut-être par peur que tout vole en éclat. Peut-être par peur de la faire fuir, j'en sais rien mais je savais que le jour où je lui dirais, ça serait sincère, sentit et que je n’aurais pas besoin de le faire dans un grand éclat d’amour non plus.

- Dis-moi, comment tu vois notre retour à Chicago toi? Je te l’ai dit mais je ne te l’ai jamais demandé. Outre le fait qu’on ne dormira pas toujours ensemble. je plissais des yeux une seconde pour me pencher vers elle et planter mon regard dans le sien en le fouillant un moment, j’aimerais savoir ce que peut penser ma jolie brunette.

Je l'écoute me parler de ses goûts qui n'ont rien de bien compliqué à retenir… Surtout si l'on doit les comparer aux miens. Je déteste tout ce qui vient de la mer ou des rivières, les radis, le céleri et la plupart des céréales. En sommes : je suis une véritable emmerdeuse avec la nourriture. Je sais bien que ce n'est pas quelque chose que l'on peut vraiment contrôler, mais tout de même… Je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine honte en constatant à quel point je peux être difficile.

Cette fois, mon choix se porte sur un sauté de poulet et des nouilles aux aubergines. Je n'en ai jamais mangé, mais je ne demande qu'à goûter. En reposant mon menu, mon regard rencontre celui de Phil qui l'observe avec grande attention, un sourire aux lèvres.

– Dis-moi, comment tu vois notre retour à Chicago toi? me demande-t-il soudainement. Je te l’ai dit mais je ne te l’ai jamais demandé. Outre le fait qu’on ne dormira pas toujours ensemble. J’aimerais savoir ce que peut penser ma jolie brunette.

– Euh…Et bien, j'en sais trop rien. Je ne me suis pas vraiment posée la question à vrai dire.

Une demoiselle vient prendre notre commande avant de remplir nos verres d'une sorte de cocktail maison, sans alcool.

– Je pensais que l'on ferait au feeling sans se prendre la tête.

Enfin, c'est ce que j'imagine. On pourrait très bien décider de dormir chez l'un ou chez l'autre lorsqu'on en éprouve l'envie… Sortir, comme on le fait à présent. Comme le font tous les couples. Je n'ai vraiment rien imaginé de spécial, d'autant plus que je ne tiens pas à précipiter les choses. J'aime autant y aller tout doux pour ne pas le brusquer… Ni de me donner des raisons de paniquer.

Je goûte à ce cocktail légèrement sucré et je lui demande à mon tour :
– Et toi, qu'as-tu envisagé ?

Je trouvas curieux qu’elle me demande ce que j’aimais comme nourriture alors qu’elle m’avait vu engloutir tout et n’importe quoi. En vrai j’étais assez simple comme homme. Je ne demandais pas grand chose, juste être bien,  heureux et épanoui. Donc côté nourriture c’était sensiblement la même chose. J’aimais autant une bonne bouffe cinq étoiles que le pire burger bien graisseux d’un petit resto miteux. Je me demandais si ma jolie brunette avait autre chose qu’elle n’aimait pas mais je ne posai pas la question. Je finirais bien par le découvrir et j’espère avant qu’elle soit malade dans son assiette. Ayant porté mon choix sur un cari rouge de tofu, je posai mon menu et attendit qu’elle fasse son choix en la dévorant du regard. C’est quand elle relève son regard vers moi que je lui demande comment elle voyait notre retour. Personnellement je l’avais fait, je lui avais dit mais je ne lui avais jamais posé la question. Je souris doucement quand elle me dit qu’elle n’y avait jamais vraiment pensé tout juste comme une demoiselle vint prendre notre commande et nous verser un cocktail sans alcool. Sa réponse fit agrandir mon sourire. Donc elle pensait comme moi finalement. Y aller sans se prendre la tête, aller lentement et continuer à se connaître. En même temps, ça me donnerait le temps de le dire à ma famille et éviter qu’ils ne lui saute à la gorge quand elle passerait la porte.

- Moi? dis-je en prenant une gorgée de mon verre et le reposant lentement. Oh j’ai pensé acheter une grande maison avec une grande cour, les petites barrières blanches… peut-être un chien aussi et nous installer dedans après notre mariage somptueux mais je me suis dit que c’était peut-être un peu trop rapide.

Je lui servit le sourire le plus gamin du monde pour mepencher vers elle et fouillr son regard.

- Je te l’ai dit, on prend ça comme ça vient. On a envie de dormir ensemble,de se voir, de… bien juste de faire des trucs de couples on les fait. Tant que je suis avec toi et qu’on s’amuse moi ça me va.

Je pris sa main et embrassai celle-ci en la gardant dans la mienne. Certes, présentement on avait droit à un cadre idyllique même parfait pour qu’on se découvre vraiment alors oui le retour à la normal à Chicago m’inquiétait un peu. Mais je voulais vraiment que cette fois ça fonctionne. Je voulais vraiment que cette femme peu commune, casse-couille, des fois trop sérieuse partage ma vie. J’avais encore beaucoup de chose à apprendre sur elle mais je les apprendrais… quitte à faire des faux pas quelques fois. Il y a tellement de chose que j’aimais chez cette femme! Sa droiture, son honnêteté, son intelligence, son ambition mais aussi son sourire qui la rendait encore plus belle. Son regard qui oscillait entre le marron clair et le vert, Ses cheveux en bataille le matin qui lui donnait un petit air de lionne. Ou encore comme maintenant, cette mèche qui s’échappait de sa pince et que je remis derrière son oreille,juste pour avoir le plaisir de la toucher et de sentir sa peau sous mes doigts. C’était une femme qui était belle au naturel. Renversante quand elle mettait du temps pour se préparer et qui me laissait sans mot. Je ne l’avais pas vu bien des fois ainsi mais à chaque fois c’est moi qui ne se sentait pas à la hauteur de sa beauté.

- Je vais dire comme toi, ça sera difficile de revenir à nos vies normales. Mais je penses qu’on peut réussir cette fois.

Et…. ce fut là que nos assiettes arrivèrent me coupant dans mon élan pour l’embrasser. Mon repas sentait tellement bon! L’odeur des épices, des aromates. Après un bon appétit, je me fit une bonne bouchée affamé que j’étais. C’était délicieux,,, enfin jusqu’à ce que le piquant du cari rouge ne fasse son entrée. J’avalais rapidement la bouchée, chose insensé parce que ça me brûlait le long de la gorge pour mieux flamber dans l’estomac. Je pris une longue, très longue rasade du cocktail pour finalement toussoter un peu.

- Finalement… ajoute aussi le cari au tofu sur la liste de ce que je n’aime pas.

Dis-je en souriant doucement. Peut-être qu’en le mélangeant avec la montagne de riz ça serait moins pire…

Je sais bien qu'il ne s'agit pour lui que d'une simple plaisanterie destinée à me faire rire, mais cette dernière m'arrache une drôle de grimace. Je ne pensais pas ressentir une aussi grande aversion pour ce genre de scénario évoquant la parfaite petite une vie modèle américaine, mais je le réalise à présent. Heureusement qu'il n'a pas parlé d'enfant, sans quoi je suis presque sûre que mon appétit se serait fait la malle.

– Beaucoup trop tôt, en effet, dis-je en buvant une longue gorgée de ce cocktail sucré.

Heureusement, tout ce qu'il me dit après cela me rassure. Pour l'instant en tout cas. Néanmoins, je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'il attend exactement de ses relations. Après tout, il avait vécu avec son ex, celle qui est partie avec toutes ses affaires lui laissant un appartement vide. Je déteste cette foutue peur, cette angoisse qui point chaque fois que je me mets à penser à l'avenir. Je veux sincèrement lui laisser sa chance. Je veux voir ce qui nous attend, ensemble. Les projets me semblent parfaitement inutiles, pire… Ils sont toxiques. Autant se contenter de vivre le moment présent en nous laissant guider par nos envies. Ce plan me semble parfait.

– Je vais dire comme toi, ça sera difficile de revenir à nos vies normales. Mais je pense qu’on peut réussir cette fois.

J'acquiesce tout simplement alors que la demoiselle vient déposer nos assiettes devant nous. Mon plat sent divinement bon… Je m'empresse donc d'y goûter, fermant les yeux pour savourer pleinement toutes ses saveurs. C'est juste parfait. Je remarque néanmoins que, de son côté, Phil peine à avaler son tofu. J'éclate de rire en l'entendant me dire qu'il peut ajouter ce plat à la liste de ceux qu'il n'aime pas.

– Tiens, goûte ça, lui dis-je en lui tendant mes baguettes garnies de nouilles et de poulet. C'est épicé, mais pas piquant, tu devrais aimer.

Le repas se poursuit dans la bonne humeur. L'on continue de discuter simplement en laissant le travail et l'avenir de côté. Après le dessert, nous décidons de faire une petite balade en ville, marchant main dans la main dans les rues éclairées en passant devant une multitude de bars animés. Je pense à toutes ces choses que font les couples. J'essaie en tout cas car je n'ai aucune idée de ce que font les couples mis à part aller au restaurant, au cinéma peut-être. J'observe longuement l'un d'eux s'embrassant allègrement en pleine rue comme si le monde autour n'existait pas pour eux. Je suis surprise de ne ressentir aucune gêne, au contraire… Je les trouve plutôt touchants.